Ne crois pas cependant, qu’il s’occupât toujours de moi : ton nom était à tout moment sur ses lèvres : Tu le rends le plus heureux des hommes ; je puis seule lui faire supporter ton absence : je suis son amie, sa protectrice ; je serais son azile contre l’ingratitude ou la légèreté de son propre cœur, si… On ne finit pas : on craint de toucher cette corde trop fort : elle rendrait un son aigre, déchirant pour des oreilles infidelles. […] Le nom d’Acteur, honoré par les Grecs, presqu’à l’égal de celui d’Orateur, comme designant un homme qui possédait un talent honnête, utile, fut donc méprisé des Romains ; ils regardèrent l’Histrionisme, comme un métier infâme, & n’oublièrent rien pour l’avilir1. […] D’ailleurs, les jeunes-gens de condition, destinés à représenter dans le monde, se formeraient sur le Théâtre ; ils se mettraient en état, de parler & d’agir, dans la suite, par eux-mêmes ; ils se feraient un nom d’avance, & deviendraient plus sensibles à la gloire de se faire estimer dans le cours de leur vie, d’un Peuple dont ils seraient aimés & connus. […] Ajoutez que les Echœa, & leurs Masques formés d’une tête entière & creuse, enflaient la voix ; [c’est de-là que ces Masques se nommèrent en latin Persona, du verbe personare, se faite entendre de loin ; & ce nom, par métonymie, passa même aux Personnages du Drame.] […] Il faudrait que les hommes ne connussent pas ces crimes seulement de nom.
Fagan s’étaye de l’autorité de Crébillon, son Censeur, également suspect & intéressé à soutenir le théatre, où il a un nom acquis à peu de frais. […] Les noms vénérables dont on abuse pour justifier les spectacles, les décisions prétendues favorables, les anecdotes fabriquées, les sophismes, tout cela n’est que du bruit, & un bruit bien foible contre le sentiment de la conscience.