C’était la théologie du temps : la corruption des mœurs, qui en était, comme aujourd’hui, le fruit nécessaire, n’était pas regardée avec les mêmes yeux que par les Chrétiens ; il s’en fallait bien que chez eux les regards, les désirs, les paroles, les pensées fussent des crimes, comme ils le sont sous l’Evangile.
N’est-ce point qu’encore que l’homme ne prenne pas plaisir à être dans la misère, il prend plaisir néanmoins à être touché de miséricorde ; et qu’à cause qu’il ne peut-être touché de ce mouvement sans en ressentir de la douleur, il arrive par une suite nécessaire qu’il chérit et qu’il aime ces douleurs ? […] Que les divertissemens sont nécessaires à l’homme pour délasser son esprit, et que la vertu d’Eutrapélie qu’il met dans les jeux, en est une approbation. […] Pour concevoir donc comment il a pu tolérer dans sa Philothée une chose si éloignée du but où il a dessein de la faire arriver ; il faut savoir que son intention étant de détacher doucement les âmes les plus liées au monde, et les moins capables de ces grands efforts nécessaires pour des conversions subites et éclatantes ; il les prend dans le plus bas état où elles puissent être, sans s’épouvanter de leur indisposition : Et dans le dessein de les faire mourir à elles-mêmes, il les attire par une sagesse et une charité cachée sous une indulgence apparente : il regarde les plaisirs du monde dans une idée métaphysique, qui les sépare des désordres principaux ; et néanmoins aprés cela, il n’en accorde l’usage que sous certaines conditions qu’on ne saurait garder fidèlement sans renoncer bientôt à tous ces plaisirs, qui est justement le but où il tend.