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134. (1665) Lettre sur les observations d’une comédie du sieur Molière intitulée Le Festin de Pierre « APOSTILLE » pp. 33-57

Si la comédie, comme il ditm, « était libertine, si elle écoutait tout indifféremment et disait de même tout ce qui lui venait à la bouche, si son air était lascif et ses gestes dissolus », Molière n’a pas fait pis, puisqu’il a caché ses obscénités et ses malices, et notre critique s’abuse grossièrement, ou ne dit pas ce qu’il veut dire, lorsqu’il fait passer le bien pour le mal. […] Ce critique, peut-être trop intéressé et dont l’esprit va droit au mal, puisqu’il en trouve dans des choses où il n’y en a point de formel, ajoute que la comédie est quelquefois chez Molière « une innocente qui tourne, par des équivoques étudiés, l’esprit à de sales pensées o ». […] Ce zèle est indiscret et ce commentaire est plus méchant que la comédie, puisque le mal est dedans et qu’il n’est pas dans la pièce. […] Ils n’ont point démenti leur caractère pour en venir à bout, leur jeu a toujours été couvert, leur prétexte spécieux, leur intrigue secrète ; ils ont cabalé avant que la pièce fût à moitié faite, de peur qu’on ne la permît, voyant qu’il n’y avait pas de mal.

135. (1819) La Criticomanie, (scénique), dernière cause de la décadence de la religion et des mœurs. Tome II « Résumé et moyens de réformation. » pp. 105-200

vous ne savez que faire redouter et haïr ; il est nécessaire que la religion recouvre ; dis-je, assez de consistance, assez de crédit et d’ascendant pour se faire, comme autrefois, respecter et soutenir par l’opinion publique, de manière à obliger de nouveau ses ennemis à paraître d’abord la respecter aussi, à rendre hommage, du moins extérieurement, à ses préceptes, à donner de bons exemples, à se cacher quand ils font le mal, en un mot, à redevenir hypocrites, en repassant pour monter à la première école, comme ils l’ont été en descendant à la dernière. […] En effet, Molière a attaqué en général les faux dévots, ou les prêtres auxquels il a fait le plus grand mal généralement ; ce qui n’a pas empêché qu’on ne fit de sa satire une application particulière : M. de Rochette, évêque d’Autun, a été désigné comme en étant l’objet ; il en a souffert toutes les rigueurs, comme si elle eût été dirigée ouvertement contre lui, et cela sans recours, sans pouvoir repousser l’agression, ni s’en plaindre ou se justifier. […] Les lois romaines punissaient un voisin qui ne garantissait pas le serf outrageusement traité par son maître ; les Egyptiens déclaraient coupables de mort un passant qui ne donnait point de secours à un autre, même inconnu, qui était assailli par des brigands ; et les plus honorés des Français seraient toujours si tranquilles spectateurs de l’oppression, de la ruine et des larmes de leurs malheureux con-citoyens, lorsqu’ils ont en leur pouvoir des moyens de les protéger et de leur épargner de si grands maux ! […] Pour dissiper parfaitement et sans retour les anciens préjugés existants contre cette profession diffuse et disloquée, et en ennoblir les fonctions, donner toute considération à ceux qui les exerçent, et les mettre dans la seule situation propre à en remplir dignement le plus important objet, en un mot, pour arrêter dans sa principale source le mal que les spectacles font, je ne crois pas qu’il y ait de moyen plus naturel et plus sûr que d’affilier ou aggréger l’école théâtrale au grand corps d’instruction et d’éducation nationales, à l’université, qui doit en effet toujours être le centre, former l’unité de toutes les écoles publiques de morale. […] On y voit que dans le cas où les traits d’une satire auraient été mal dirigés, on trouverait peut-être dans ce tribunal de mœurs une voie d’appel ou de réparation, qui n’existe pas, qui est impossible aujourd’hui, par défaut d’unité ; ce qui compléterait l’institution de la justice intermédiaire et la contiendrait dans les limites de sa compétence.

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