Afin que le Théâtre ne puisse jamais manquer de Sujets, outre les Comédiens de Province, sur lesquels il faut peu compter ainsi que sur les enfants de la Capitale, je crois qu’il serait de la prudence d’élever et d’instruire pour le Théâtre une demie douzaine de garçons, et autant de filles ; une ancienne Comédienne, et un ancien Comédien auraient le soin de les former dans des logements séparés ; on leur donnerait en même temps des principes de religion et de piété, et on leur ferait apprendre un métier pour leur préparer une ressource, si par hasard à un certain âge on ne leur trouvait pas les talents nécessaires pour le Théâtre, ou s’il leur survenait quelque défaut qui ne leur permit pas d’y jouer : dans ces deux cas la bonne éducation qu’ils auraient reçus, jointe aux secours qu’on leur procurerait, les mettrait en état de trouver un autre établissement que celui du Théâtre.
L’avidité du gain et; la curiosité du peuple persuaderent peu à peu à des gens sans ressource qu’ils pourroient aisément faire le métier d’acteur. […] Dites-moi, s’il vous plaît, s’il est possible d’honorer le talent du Comédien, sans faire honneur à son métier, puisque le talent en est l’essence ? […] « Quel est, demandez-vous, le métier du Comédien ? c’est un métier par lequel il se donne en représentation pour de l’argent, et; se soumet à l’ignominie et; aux affronts qu’on achette le droit de lui faire. » Je vous répondrai moi que le métier du Comédien est l’art de faire valoir ses propres talens et; ceux des autres. […] Je veux à présent vous faire voir qu’il n’y a rien de deshonnête dans le métier du Comédien, consideré même du côté que vous nous le représentez.