Voici comme il parle à ce Peuple : « Encore que je sois certain que votre vie ne soit pas moins réglée que votre foi est pure ; cependant parce qu’on ne manque pas en ce temps-ci de gens qui par une flatterie et une indulgence indigne autorisent les vices ; et, ce qui est encore plus horrible, qui abusent même des saintes Ecritures et en corrompent les véritables sens pour justifier des pratiques criminelles, et afin de faire passer pour innocent le plaisir qu’on prend aux Spectacles, quand ce n’est, disent-ils, que pour relâcher l’esprit et en forme de divertissement, (car la discipline Ecclésiastique est énervée jusqu’à ce point, qu’on ne se contente pas aujourd’hui d’excuser les vices, mais qu’on s’efforce de les autoriser,) j’ai cru devoir, non pas vous instruire, car vous êtes suffisamment instruits, mais vous donner quelques avis pour empêcher que d’anciennes plaies, pour n’être pas bien bandées, ne rompent les cicatrices qui commencent à les couvrir. » Ne reconnaissez-vous pas, Monsieur, à ces traits les aïeux des Scolastiques et des Casuistes modernes, que notre Docteur a adoptés pour ses Maîtres ? […] « C’est un tableau, dit-il, qui représente des histoires et des fables, non pas tant pour divertir que pour instruire les hommes. » Et pour preuve de cela, il apporte l’exemple non pas de quelque Pièce sérieuse de Corneille ou de Racine, mais de la Comédie d’Esope composée par son Ami, à qui il fait des compliments sur le présent qu’il lui en a fait. […] Mais enfin, il nous en découvre la source ; c’est dans l’incomparable Esope de son Ami qu’il s’est instruit du mérite de la Comédie ; c’est là où il a appris que « dans la Comédie il n’y a rien qui ne soit conforme au sentiment de tous les Fidèles ».
Des considérations aussi puissantes démontrent seules combien il importe en France de ramener le théâtre au véritable but de son institution, celui de corriger et d’instruire en amusant ; ce sera le seul moyen de donner à l’art de la comédie un véritable lustre, et de replacer celui qui le cultive au rang qu’il peut raisonnablement occuper dans la société. […] S’ils sont devenus funestes par le genre de relâchement qui s’y est introduit, corrigeons-les, ramenons-les tous au but véritable de leur institution, qui ne peut être celui de corrompre, mais seulement, comme je l’ai déjà dit, de corriger et d’instruire en amusant. […] Instruit, par une fatale expérience, que la misère et le sentiment impérieux du besoin ont trop souvent produit l’injustice et l’usurpation, il s’arme avec courage contre son propre cœur ; et craignant toujours d’être injuste et barbare à force de droiture et d’humanité, il n’écoute que l’oracle de la loi, et n’en profane jamais le sanctuaire auguste par une coupable acception des parties. […] Cours d’Education simplifié et dégagé de la sécheresse et de l’aridité des préceptes, ou l’art de s’instruire par un procédé nouveau qui fixe l’esprit en intéressant le cœur.