/ 359
2. (1675) Traité de la comédie « XII.  » pp. 291-292

Et pour en être convaincu, il ne faut que considérer, que lorsque nous avons une extrême horreur pour une action, on ne prend point de plaisir à la voir représenter : et c'est ce qui oblige les Poètes de dérober à la vue des spectateurs tout ce qui leur peut causer cette horreur. […] Car on peut apprendre de cet exemple que l'on approuve en quelque sorte tout ce que l'on souffre et que l'on voit avec plaisir sur le Théâtre; puisqu'on ne peut souffrir ce que l'on a en horreur.

3. (1767) Essai sur les moyens de rendre la comédie utile aux mœurs « Essai sur les moyens de rendre la comédie utile aux mœurs — SECONDE PARTIE. Si les Comédies Françoises ont atteint le vrai but que se propose la Comédie. » pp. 34-56

Voyons maintenant si nos Auteurs se sont attachés plutôt à peindre la maniere d’être extérieure du vice, que le fond du vice ; ou, ce qui revient au même, s’ils se sont appliqués à rendre le vice ridicule, plutôt qu’à en donner de l’horreur : de cet examen naîtra la décision de cette seconde question. […] Je prends d’abord la Comédie de l’Avare, & je demande quel doit être le but de cette piece ; on me répond que c’est celui d’inspirer de l’horreur pour l’avarice : voyons si Moliere a réussi. […] J’en appelle au témoignage de ceux qui suivent les Spectacles, si la représentation de cette piece n’inspire pas une vraie horreur de l’hypocrisie. Cependant on ne peut pas dire que Tartuffe soit ridicule, il n’est que ce qu’il doit être, c’est-à-dire, hypocrite, traître, ingrat : toutes ses actions ne tendent qu’à tromper les hommes, toute sa conduite est un tissu d’horreurs. […] Convenons donc qu’une Comédie, pour atteindre à son but, ne doit qu’exposer le vice d’après nature, sans le charger d’un ridicule qui ne serviroit qu’à en affoiblir l’horreur.

/ 359