/ 414
103. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre onzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre V. Du Luxe des coëffures. » pp. 115-142

Il y a plus de magnificence que du goût dans cette prodigalité. […] Une infinité d’Ecclésiastiques de tous les rangs, depuis la premiere Dignité jusqu’au dernier Bedeau, ose y paroître couvert de poudre, & même monter à l’Autel, quoique le nombre de ceux qui y montent soit petit, un Prêtre curieux de sa parure, a peu de goût pour célébrer la sainte Messe, & il fait bien. […] Nous nous bornons aux Dames ; leurs maris même ne sont pas de notre compétence, ni du goût des Dames que nous coëffons . […] Les hommes sont préférables, parce qu’ils ont le goût plus sûr, & qu’ils l’ont plus au gré des Dames. […] On avoit des secrets pour leur donner toute sorte de couleur, selon le goût ou la fantaisie ; noirs, blancs, blonds, chatains, gris ; l’Evangile dit expressément, vous ne pouvez rendre vos cheveux blancs ou noirs.

104. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quinzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre III. Aveux importans. » pp. 83-110

Bien des hommes ne sont guère plus sages, des vieux pécheurs usés par la débauche dont la concupiscence est encore bouillante, & les inclinations vicieuses, ils ressemblent à l’embrasement d’une maison, quand le feu y a cessé on voit long-temps des étincelles & des pointes de flammes percer à travers les cendres ; le feu y vit encore, mais il manque de matière ainsi le goût de la volupté vit encore, la force y manque. […] La Bruyere est un Peintre qui fait la critique d’un portrait imposteur en lui donnant pour voisin le sien qui est très-fidèle, soit qu’inquiet, alarmé, embarrassé des suites, ce comique n’ait pas doné l’essor à son génie, soit qu’il se foit livré par goût au tabarinage qui chez lui l’emporte sur-tout ; il est certain que dans cette pièce comme dans toutes les autres, la moitié n’est que farce, & le portrait du sujet est croqué, la farce fait rire le peuple, l’irréligion applaudit au décri de la dévotion. […] C’est sans doute pour entrer dans le goût de son siècle que Thomas Corneille fait jouer à Ariane un rôle qui n’est guére plus décent ; car enfin que ne fait-elle point pour retenir Thesée ? […] Cette idée d’une Venus vertueuse, d’une espèce de sainte au goût des femmes, digne des autels, d’un amour platonique ; son fils Cupidon, lien sacré des cœurs vertueux sans que la grossiéreté des sens y eut aucune part. […] Un homme de goût, un homme de bien ne jettera pas les yeux sur ces fruits détestables de la corruption de l’esprit & du cœur.

/ 414