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45. (1705) Traité de la police « Chapitre IV. De la Comédie Française ; son origine, son progrès, et les Règlements qui ont été faits pour en permettre, corriger et discipliner les représentations, ou pour en assurer la tranquillité. » pp. 439-445

L’Abbé Perrin qui avait été autrefois Introducteur des Ambassadeurs auprès de feu Monsieur, Duc d’Orléans, Oncle du Roi, fut le premier qui forma le dessein d’en introduire l’usage à Paris ; il en obtint le privilège du Roi en l’année 1669. […] Faisons pareillement défenses, et sous les mêmes peines, à toute sorte de personnes de quelque qualité et condition qu’elles soient, de faire effort pour entrer dans le lieu de l’Académie ; de porter aucunes armes à feu dans celui des représentations, d’y tirer l’épée, et d’y faire aucune insulte ou querelle, à peine de la vie. […] ce qui Nous a été représenté par le Procureur du Roi, que certains personnages sans emploi, portants l’épée, qui ont en diverses occasions excité des désordres considérables en cette Ville ayant depuis peu de jours, avec la dernière témérité et un grand scandale, entrepris de forcer les portes de l’Hôtel de Bourgogne, se seraient attroupés pour l’exécution de ce dessein avec plusieurs vagabonds ; lesquels assemblés en très grand nombre, étant armés de mousquetons, pistolets et épées, seraient à force ouverte entrés dans ledit Hôtel de Bourgogne pendant la représentation de la Comédie qu’ils auraient fait cesser ; et ils y auraient commis de telles violences contre toutes sortes de personnes, que chacun aurait cherché par divers moyens de se sauver de ce lieu, où lesdits personnages se disposaient de mettre le feu, et dans lequel, avec une brutalité sans exemple, ils maltraitaient indifféremment toutes sortes de gens. […] Nous, conformément aux ordres de Sa Majesté, avons fait très expresses défenses à toutes sortes de personnes de quelque qualité, condition et profession qu’elles soient, de s’attrouper et de s’assembler au devant et aux environs des lieux où les Comédies sont récitées et représentées ; d’y porter aucunes armes à feu, de faire effort pour y entrer, d’y tirer l’épée, et de commettre aucune autre violence, ou d’exciter aucun tumulte, soit au dedans ou au dehors, à peine de la vie, et d’être procédé extraordinairement contr’eux comme perturbateurs de la sûreté et de la tranquillité publique. […] Faisons pareillement défenses à toutes sortes de personnes, de quelque qualité et condition qu’elles soient, de porter aucunes armes à feu dans le lieu des représentations, d’y tirer l’épée, et d’y faire aucune insulte ou querelle, à peine de la vie.

46. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre VII. Est-il de la bonne politique de favoriser le Théâtre ? » pp. 109-129

Telle était la politique des Romains, qui dans les guerres civiles amortissaient par des spectacles le feu de la division, et surtout celle d’Auguste, à qui le fameux Comédien Pylade disait avec autant de liberté que de vérité : « Laissez le peuple s’occuper des factions du cirque, il s’occupera moins de l’établissement de votre autorité, il y mettra moins d’obstacles. » Les autres Empereurs, au commencement de leur règne, ne manquaient pas, pour calmer la fermentation des divers partis, de donner des jeux magnifiques. […] Luther vient ensuite, qui prend dans la cheminée des tisons embrasés, et met le feu au fagot. L’Empereur Charles-Quint paraît ensuite, qui remue le feu avec une épée, comme pour l’éteindre, et l’allume encore davantage. Enfin vient Léon X, qui prend une bouteille pleine d’eau pour jeter sur le feu ; mais il se méprend, et y jette une bouteille pleine d’huile qui ne fait que l’embraser de plus en plus. […] Luther mit le feu partout, en renversant toute la discipline ; Charles, par la guerre qu’il déclara aux Protestants, Léon, par la condamnation qu’il prononça contre eux, ne firent qu’allumer l’incendie.

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