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315. (1752) Traité sur la poésie dramatique « Traité sur la poésie dramatique —  CHAPITRE XII. De la Déclamation Théatrale des Anciens. » pp. 336-381

Souvent le geste n’est pas d’accord avec la voix dans un mauvais Comédien, parce qu’il est mauvais imitateur ; mais qu’on s’arrête dans une place publique à considérer une femme du Peuple, qui soutient une querelle, on remarquera un parfait accord entre ses gestes & ses paroles. […] Les Personnages de femmes étoient exécutés chez les Anciens par des hommes. […] Enfin ce Passage de saint Jérôme prouve que les hommes jouoient les Personnages de femmes. […] Les femmes qui dansoient sur le Théâtre, pouvoient jouer dans la Comédie, mais non pas dans la Tragédie, parce qu’elles n’auroient pas en la force de pousser leur voix comme des hommes ; mais elles eussent possédé aussi-bien qu’eux, & peut être plus finement qu’eux, l’Art de faire les gestes : pourquoi ne les en chargeoit-on pas, si la Déclamation étoit partagée en deux Parties ? […] Pline parlant d’une Femme qui avoit joué dans la Comédie jusqu’à cent ans, se sert du même terme : Lucceia mima centum annis in Scenâ pronuntiavit.

316. (1822) De l’influence des théâtres « [De l’influence des théâtres] » pp. 1-30

Un enfant du Marais, au courant du répertoire ordinaire des Théâtres secondaires, n’est point embarrassé aujourd’hui pour raisonner, si l’on veut bien nommer raison les traits que sa mémoire lui fournit ; il y en a même qui n’ont pas d’autre éducation, et dont les parents s’applaudissent d’une intelligence, qui fait naître souvent dans la société des scènes comme Molière en a si bien tracé dans ses comédies des Précieuses ridicules et des Femmes savantes. J’avais pour voisin un brave homme, qui jouissait dans le quartier d’une grande réputation, pour la réparation de la chaussure ; sa femme, son honnête et digne compagne, avait par jour dix ménages à faire, le mien était de ce nombre. […] Quel est mon étonnement de reconnaître dans celle, que je prenais tout au moins pour la femme d’un agent de change ou du plus en réputation des courtiers du commerce, ma blanchisseuse ! […] Les oreilles déchirées par la voix rauque des hommes, par les sons criards des femmes, et par les mutilations sans nombre de la grammaire et du sens commun, inhumainement outragés par tous ! […] Je fus arraché à cette idéale félicité par les sons discords d’une trompette d’empirique, qui assemblait les passants autour d’un cabriolet, dans lequel figuraient une jeune femme, couverte de plumes et de diamants, un jeune homme, portant l’habit d’officier de santé (sans épée), et un mauvais bouffon qui, par de misérables lazzis et des fanfares, plus fausses que les grandes protestations de certains amis… servait seul d’orchestre et de valet à cet Esculape de carrefours.

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