La vengeance n’est pas moins opposée à l’esprit du Christianisme, que l’orgueil & l’amour profane, & ce vice est assuré, dit Tertulien1, de faire fortune en une Tragédie ; on couvre d’oprobres sur le Théâtre, la patience qui supporte les injures, on y loue une fausse bravoure qui ne sçait point pardonner. […] La fureur des Duels vient de l’opinion fausse que l’on doit conserver son honneur aux dépens de la vie de quiconque ose le flétrir, & pour le réparer, qu’il est indispensable de tuer un agresseur : or, cette opinion, aussi contraire à la raison qu’à l’Evangile, est préconisée dans le Cid, & c’est un pere qui donne cette horrible leçon à son fils : contre un arrogant éprouver ton courage, Ce n’est que dans le sang qu’on lave un tel outrage, Meurs ou tue… On n’est pas moins choqué d’entendre dire à Chimene, s’adressant au meurtrier de son pere qu’elle va bientôt épouser : Tu n’as fait le devoir que d’un homme de bien.
Les uns éclairez de la veritable sagesse, qui est la sagesse de l’Evangile, les reprouvent ; les autres trompez par les fausses lumieres d’une prudence charnelle les justifient, ou s’efforcent de les justifier. […] Car c’est vous jouër de Dieu même, mon Frere, écrivoit saint Cyprien, d’avoir dit anathême au demon, comme vous l’avez fait en reçevant sur les Sacrez fonts la grace de Jesus-Christ, & de rechercher maintenant les fausses joïes qu’il vous presente dans une Assemblée ou dans un spectacle de vanité.