Cependant le conte d’Apulée abandonné aux savans, n’étoit guére lu de personne, lorsqu’il plût à Moliere de l’aller chercher pour en faire le sujet d’une fête galante, que donnoit Louis XIV, à Gacon de le traduire, & à La Fontaine de le broder à sa maniere : tout cela pourtant ne lui donna de vogue que quatre jours, la piéce n’étoit plus jouée. […] Cette fureur a été de tous les tems, comme de tous les pays ; César dit que les Bretons se servoient du Pastel, pour se donner un air terrible, & les femmes un air mâle ; glusto se inficiunt carnuo colore horridiores aspectu ; Martial se moque d’une femme qui se fardoit, ainsi ; barbara depictis venit baccauda britannis : baccauda, veut dire un ange à laver la vaisselle, à laquelle il compare cette femme, le bleu étoit alors la couleur cherie des Bretons, comme aujourd’hui le blanc & le rouge ; Pline prétend qu’on régardoit le bleu comme une couleur céleste, dont par réligion on peignoit les Dieux, & dans leurs fêtes ; les femmes pour les imiter, s’en enluminoient tout le corps.
Il en avoit fait représenter grand nombre dans le Collège de Louis le Grand, où chaque année la représentation d’une piece étoit une grande fête. […] Point de culte plus parfait, c’est une vraie idolâtrie ; victimes, offrandes, parfums, fêtes, prieres, hommages, rien ne leur est refusé, jusqu’au langage de la religion qu’on a la foiblesse sacrilège de leur adresser.