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220. (1759) Apologie du théâtre « Apologie du théâtre » pp. 141-238

Est-ce le goût du vice, ou l’amour de la vertu, que ces spectacles y excitent ? […] Mais voici bien un autre paradoxe. « Toutes les passions sont sœurs, une seule suffit pour en exciter mille ; et les combattre l’une par l’autre, n’est qu’un moyen de rendre le cœur plus sensible à toutes. […] Ainsi tout ce qui excite en nous la pitié, nous dispose à la vengeance ; ainsi la crainte que nous inspirent les forfaits de l’ambition, les lâches complots de l’envie, les projets sanglants de la haine, cette crainte, dis-je, est elle-même le germe des passions qui la font naître. […] Tout ce qui l’excite la rend féconde ; mais elle produit des baumes ou des poisons, selon les semences qu’on jette dans l’âme, et s’il est des âmes qui corrompent tout, ce n’est pas la faute du théâtre. […] S’il n’y a donc que l’émotion pure de l’âme sans aucun mélange de vice, quel est le caractère dépravé qui change en affection criminelle le sentiment que viennent d’exciter en lui la bonté, la candeur, l’innocence, la vertu même ?

221. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Causes de la décadence du goût sur le théâtre. — Chapitre III. De la Fable Tragique. » pp. 39-63

L’inquiétude même où ce tendre pere étoit de savoir si sa fille abandonnoit une fausse Religion pour la vraie, y auroit encore contribué ; mais on vient de voir un Prince rassuré sur la foi de sa fille, exciter ses amis à partager sa fermété, remettre son sort & celui de ses enfans entre les mains de son Dieu ; & tout-à-coup ce Héros oublie son intrépidité, succombe à sa joie, & expire.

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