Ce qu’il faut entendre par Opéra-Bouffon. Je pense qu’on ne sera pas faché de trouver ici une définition précise & plus étendue du mot Opéra-Bouffon ; elle le rendra familier à des gens qui se flattent mal-à-propos de l’entendre ; elle servira sur-tout à démontrer pour quel motif le nouveau Théâtre est établi. […] « L’Opéra, dit-il, est un assemblage bisare de Musique, où le Poète & le Musicien se gênent l’un & l’autre… L’Opéra occupe plus les yeux que l’esprit… les Opéras sont des sotises magnifiques, chargées de Musique, de machines, de décorations, mais toujours une sotise. » Le Lecteur est maintenant en état d’entendre ce que signifie Opéra-Bouffon.
Ils vouloient la comédie gratis, mais les acteurs ni les actrices ne prodiguent pas gratuitement leurs faveurs, les boursiers furent refusés ; ils s’aviserent de faire grand bruit dans leur collége, pendant la piece, tantôt avec des trompettes, des cors-de-chasses, des chaudrons, des instruments de cuisine ; tantôt en chantant, en argumentant, en faisant semblant de se battre, &c. on ne s’entendoit plus au théatre, il falut composer & acheter la paix. […] Sa belle ame qui étoit faite pour la pratiquer, fut si frappée de ces discours, qu’il retira ses pieces, & renonça au théatre, que l’étourderie & les passions de la jeunesse lui avoient fait d’abord trop goûter, pour s’adonner à l’étude de la sagesse ; il ne permit, non plus qu’Aristote dans sa République, aucune représentation théatrale, parce qu’il n’en est aucune qui n’excite quelque passion, colere, vengeance, ambition, amour ; l’action suit de près les discours & la représentation, on se laisse aisément gagner lorsqu’on aime de voir & d’entendre. […] Mout, Anglois, fin du théatre, prouve qu’on s’est trompé, le mot d’aristote ne signifie pas ce que nous entendons par passion, mais infortune, calamité, ce qu’il justifie par d’autres passages. […] Il est impossible que la musique la plus parfaite forme des conversations même avec les gestes de l’acteur, quoiqu’à la vérité l’un aidât à l’autre, lui donnât de l’énergie, en fit un meilleur tableau, car tous les deux sont pittoresque, il faudroit doubler l’orchestre pour faire entendre de plus loin ; aussi les Romains avoient dans leurs amphitéatres vingt & trente mille personnes, je ne sache pas qu’ils aient jamais employé la musique pour aider les pantomimes, ni qu’ils aient connu ces musiques pittoresques, telles qu’on les entend, encore moins telles qu’on les voudroit, qui même sont impossibles. […] Les peuples ne sont pas si pauvres qu’ils veulent le faire entendre : pour juger de leur faculté, faites faire un dépouillement de recette générale, ce seroit bien pis si on pouvoit en faire un du livre de la recette particuliere, des acteurs & des actrices.