Ainsi il fait un exercice continuel d’ambition, de vanité, de fausse tendresse, de vengeance, tout est en combustion chez lui, sans qu’il en sente seulement la fumée parce qu’il en est dehors, l’appareil de son supplice y est tout dressé par le déchaînement des passions sans qu’il l’aperçoive, tout occupé qu’il est de ces aventures imaginaires qui font des plaies très réelles et très profondes dans son âme, il ne voit pas les précipices que ses ennemis lui creusent, et les chaînes qu’ils lui forgent, je pleurais, dit saint Augustin dans les Confessions, une Reine Didon qui s’était tuée par un violent transport de son amour, et je ne pleurais pas mon âme, ô mon Dieu, à qui je donnais la mort, en m’éloignant de vous sa vraie vie, par l’attachement déréglé à ces fictions dangereuses. […] Or si ceux qui marchent en la présence de Dieu dans une continuelle attention sur eux-mêmes, et s’engagent à une vie austère et solitaire, pour affaiblir ces ennemis domestiques ont encore des combats à soutenir dans lesquels ils reçoivent quelquefois des blessures, quelle est votre témérité, votre présomption, votre aveuglement ! […] Faibles, infirmes et désarmés comme vous êtes, de rechercher de gaieté de cœur une pareille tentation, et d’ouvrir tous vos sens à de cruels ennemis qui ont juré vôtre perte.
On fit quelques changemens à la coëffure du prince & au turc, on l’appella Georges, & le turc fut un ennemi quelconque par lui vaincu. […] Quelque sentence lâchée en passant par un amateur, que fera-t-elle contre cette armée d’ennemis ? […] Son libertinage le changea si fort, qu’il s’en déclara l’ennemi, annéantit son autorité, & le peuple fit brûler chaque année son image dans des rues. […] Un poëte inspiré, applaudi par une muse dont le trône est le parnasse, n’a point d’égal ; & en effet, aucun des misérables versificateurs qui barbotoient alors au-delà des mers dans le limon de l’Hypocrene, ne pouvoit se mesurer avec lui : en cela plus heureux que Corneille, qui lui étoit si supérieur, & qui eut à combattre des ennemis, des rivaux, l’Académie, la Cour & le Ministre. […] Ces grands acteurs avoient deux ennemis à vaincre, leurs concurens & l’envie de rire pendant le sifflement ou le bâillement, plus dangereux par leurs bouffonneries que leurs rivaux par leurs admirables talens.