» Il faut croire que c’et un remords de conscience qui la fait rétracter ; mais je crois que s’il avait écouté attentivement tous les remords de ce témoins intérieur, il aurait rétracté à la fin de sa Lettre, tout ce qu’il y avait avancé, et il aurait épargné les travaux de beaucoup d’Ecrivains. […] Sur le refus d’y renoncer, le Confesseur se crut obligé de lui refuser l’Absolution. Il consulta le cas en Sorbonne ; et les Docteurs consultés crurent devoir examiner la question de la Comédie à fond. […] Car pour la galanterie criminelle, l’envie, la fourberie, l’avarice, la vanité et choses semblables, on ne peut croire que le Comique leur ait fait beaucoup de mal. […] Qu’aurait-il juge de nos Opéra, et aurait-il cru moins dangereux de voir des Comédiennes jouer si passionnément le personnage d’Amantes, avec tous les malheureux avantages de leur sexe ?
Une pareille conduite, que je veux bien croire néanmoins l’effet de l’imprévoyance ou de l’erreur dans les cas présents, n’est-elle pas souvent une suite de cette manie effrénée dont j’ai parlé, qui porte les hommes qui en sont possédés à tourner en ridicule leurs concitoyens, quelqu’attitude qu’ils prennent, à les tourmenter sans fruit, en les livrant sans raison à la dérision, au mépris et à la haine les uns des autres, et à troubler ainsi le bonheur commun ? […] Je ne la crois pas impossible avec le temps et la persévérance à écarter graduellement toutes les causes principales de désordres, indiquées dans cet écrit et dans plusieurs autres sur le même sujet. […] on pourrait citer bien des exemples d’hommes généreux qui ont pris spontanément la défense personnelle du faible opprimé : je n’ai donc qu’à faire le vœu que ce dévouement soit encouragé tant sous l’ancienne que sous cette nouvelle forme, qui n’entraînerait point une plus grande responsabilité que l’autre, et qui attesterait mieux le courage des auteurs et la sincérité de leur zèle que les imprudences accoutumées rendent si douteux qu’on est quelquefois forcé de croire que les uns sont au moins indifférents aux désordres qu’ils combattent, et que les autres seraient fâchés qu’ils manquassent à leur verve ou à leur ambition. […] Je crois pouvoir les lever en grande partie. […] Pour dissiper parfaitement et sans retour les anciens préjugés existants contre cette profession diffuse et disloquée, et en ennoblir les fonctions, donner toute considération à ceux qui les exerçent, et les mettre dans la seule situation propre à en remplir dignement le plus important objet, en un mot, pour arrêter dans sa principale source le mal que les spectacles font, je ne crois pas qu’il y ait de moyen plus naturel et plus sûr que d’affilier ou aggréger l’école théâtrale au grand corps d’instruction et d’éducation nationales, à l’université, qui doit en effet toujours être le centre, former l’unité de toutes les écoles publiques de morale.