Aussi s’en faut-il de beaucoup qu’un homme de Théatre soit couvert de l’Egide de Pallas. […] Elle a couvert son sein d’une toile si legere, si sine, si transparente, qu’on le voit tout à découvert. […] Je ne suis pas surpris que Nicolas de Lira, Denys le Chartreux & bien d’autres croient que Judith a réellement péché, mais que la beauté de son action & la gloire de ses succès ont couvert & fait oublier ses fautes. […] Jezabel, s’en couvrit jusqu’au moment de sa mort. […] Elle se couvrit d’un voile plus modeste, &c.
Ni le Saint ni le Philosophe ne descendent du trône pour courir le monde en avanturier qui écoute toutes les passions, qui joue toutes sortes de rôles, qui se moque des loix de la décence, ne donne aucune marque de piété, quitta-t-il l’empire du monde, ne grossira jamais la liste des Héros & des Saints ; les éloges dont on comble son libertinage ne peuvent que couvrir de honte ses flatteurs, & la vanité de se faire un mérite d’une démarche forcée, ne peut que couvrir de ridicule celui qui veut prendre l’univers pour dupe. […] Les Catholiques dont elle professa la Religion ne s’en embarrassent guère davantage ; mais quand on a besoin de recruter ses troupes, tout fait nombre, le théatre n’y gagne guère qu’une assez mauvaise Actrice couverte de clinquant. […] Je me représente l’assemblée des États où cette abdication fut reçue comme une véritable farce de la foire, une salle magnifiquement ornée, un trône superbe ; tous les États affublés de leurs habits de cérémonie, couverts de leurs fourrure ; la Reine la couronne sur la tête un globe à la main comme la maîtresse du monde (quoique la Suède n’en soit pas la centième partie, mais ridicule d’usage, plusieurs Rois en sont décorés) elle monte gravement sur son trône pour annoncer sa volonté suprême & dernière ; les États qui le désiroient avec ardeur lui font des protestations de fidélité & des prières pressantes de ne pas se demettre. […] Ces Visigots avoient la barbarie de confondre tout sous le nom de grammaire, & disoit grossièrement que la Reine alloit au Collège, que la Suède étoit gouvernée par des Grammairiens, qu’on ne pouvoit l’aborder qu’à travers une armée de pédans, ni obtenir d’elle un moment d’audience ; on prétend même que Moliere la joua dans les Femmes savantes, & il est vrai qu’il y joua l’Abbé Menage, l’un des protégés & des plus zélés panégyristes de Christine, mais pourtant d’une manière couverte ; elle eut pu se plaindre à la Cour & lui faire des affaires ; ce qui choquoit le plus les Suédois, c’est que les finances qui sont médiocres en Suède, se dissipoient en pensions & en présens pour des étrangers auxquels les Sujets n’avoient point de part, & il est vrai que le trésor se trouvoit épuisé lorsqu’elle quitta le Royaume pour courir après les Savans ; il n’y avoit point de quoi payer la pension qu’elle se réserva, & qu’on croyoit fort mal employée pour eux. […] C’est , dit ingénieusement Madame de Motteville, une Héroine d’Amadis & de Roland ; c’est Marphise & Bradamante , elle étoit du moins en aussi mauvais équipage, sans domestiques, sans argent, sans vaisselle ; elle faisoit seule toute sa maison & toute sa Cour, il fallut que le Roi lui donna tout : le peu de temps qu’elle demeura à la Cour lui fut peu favorable ; ses défauts qui étoient grands furent d’abord couverts par les bonnes qualités & par le plaisir de la nouveauté, mais ces défauts percèrent bientôt, la surprise cessa, elle parut une personne très-commune, nous lui verrons bientôt perdre honteusement tous les avantages, c’est le sort des grands, ils sont plus exposés que les autres, leurs belles qualités sont au grand jour, ils sont d’abord reçus avec applaudissement ; leurs défauts aussi exposés, sont soustraits à la rigueur des loix & à l’autorité des Juges.