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384. (1690) Entretien sur ce qui forme l’honnête homme et le vrai savant « VII. ENTRETIEN. » pp. 193-227

Et que pensez-vous de ceux qui peignent les passions, et qui expriment les beaux sentiments ? […] On le ramènera aux principes sur lesquels ils raisonnaient, à cette confiance qu’ils avaient en leurs propres forces ; et on lui découvrira le fond d’orgueil, et même d’impiété, d’où ils tiraient leurs plus beaux discours.

385. (1754) Considerations sur l’art du théâtre. D*** à M. Jean-Jacques Rousseau, citoyen de Geneve « Considérations sur l’art du Théâtre. » pp. 5-82

Il aura beau nous montrer dans ses faux raisonnemens, qu’il est capable d’embrasser un projet vaste, que son genie égale son audace, pourra-t-il jamais nous arracher un sentiment d’estime ? […] Il auroit beau nous prouver par un discours patétique, qu’on doit commencer par soi-même, que Berenice est trop aimable, qu’il aime mieux regner sur elle que sur nous, & qu’il nous prie de nous consoler de sa perte ; il ne lui seroit jamais possible de nous persuader que Titus n’étoit pas comptable de ses vertus au genre humain. […] L’amour du beau moral inné dans l’homme (je parle d’après vous) il faut le mettre en action, sans quoi il ne seroit qu’une faculté stérile : tout ce qui sert à exercer notre sensibilité doit être estimé avantageux : la Tragedie opere cet effet, elle est donc bonne par elle-même. […] Si jamais il vous prend fantaisie de créer une nouvelle Republique, à l’imitation de Platon, admettez-y les histrions de place, les saltinbanques ; protegez, encouragez les tavernes, plaisirs selon vous bien supérieurs aux spectacles, & dont vous celebrez l’innocence ; que ces amusemens exquis fassent les délices de votre colonie, il est beau d’être le fondateur d’une nouvelle secte de Philosophie, & le législateur d’un peuple heureux : dispensez-vous seulement de proposer à vos nouveaux habitans, comme le modele parfait d’un divertissement public, cette danse où les vieillards, les hommes faits, & les enfans, accompagnoient leurs sauts de cette chanson que vous avez traduite de Plutarque, & que je vous rappelle ici : Nous avons été jadis jeunes vaillans & hardis ; nous le sommes maintenant à l’épreuve à tout venant ; & nous bientôt le serons, qui tous vous surpasserons. […] Plût au Ciel que ces barbares ennemis du plus beau des arts, eussent la pieté de Polyeucte, la vertu de Burrhus, & qu’ils finissent comme le mari d’Alzire !

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