Encore si dans la Comédie moderne les propos d’amour étaient traités avec la même modestie ; ce serait, à la vérité, un miroir qui ne pourrait servir que pour représenter cette passion : mais il en réfléchirait du moins quelques rayons d’utilité et de vertu ; et les jeunes gens apprendraient jusqu’où ils doivent porter la politesse et la retenue avec les femmes. […] J’ajoute encore que, dans notre siècle, les amateurs de la Comédie ne s’exposent guère à recevoir des leçons que sur le Théâtre ; et que ce motif, fût-il seul, devrait suffire pour faire revivre la Comédie, s’il n’y en avait pas ; afin d’apprendre leurs vérités à des hommes qui, sans cela, les ignoreraient éternellement ; puisqu’il n’est que trop commun d’être aveugle sur ses propres défauts, pendant qu’on est si clairvoyant sur ceux des autres. […] On prétend que Cratès de Thebes ne connaissait que trois remèdes pour guérir de la maladie d’amour ; la faim, le temps et la corde : l’Histoire du Vieillard de Parme nous apprend que la Comédie est un quatrième remède, non moins infaillible que les trois autres, mais qui mérite toute préférence, parce qu’il est bien plus aisé à prendre et qu’il produit son effet en divertissant le malade.
Comme on n’y apprend à juger des choses que par le sens, et à ne considérer comme subsistant et réel que ce qui les frappe et fait impression sur eux, c’est dans ces sens aussi que l’âme s’accoutume à se répandre toute entière. […] une expérience journalière nous apprend qu’on perd le goût de tous les biens spirituels en s’abandonnant aux plaisirs grossiers des spectacles, que les actions même sérieuses et communes deviennent à charge, qu’on n’aime plus qu’à se satisfaire, et que ce désordre est si funeste à l’homme, qu’il ruine entièrement en lui toutes les qualités de l’esprit et du cœur, et devient la source de tous les vices.