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288. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 1 « CHAPITRE V. Des Pièces tirées de l’Ecriture sainte. » pp. 96-119

Pour mettre une histoire sainte sur le théâtre, il faut ourdir une intrigue, former des obstacles, ménager un dénouement, introduire des personnages, leur prêter des sentiments et des discours, altérer les faits. […] A ces pieux sentiments, que le Poète supprime, il substitue l’ivresse de l’orgueil, la complaisance en ses charmes, la vaine gloire de ses conquêtes ; il en fait une Actrice. […] Cette innocente Troupe semblait faite pour ces sentiments pieux qui révoltèrent dans la bouche d’une Comédienne.

289. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre III. Du Cardinal de Richelieu. » pp. 35-59

Que l’Etat soit perdu, que ma perte le suive, pourvu que mon amante vive… Les Rois ont des sujets, et n’ont point de parents  »… quels sentiments ! […] La fermentation des guerres civiles, qui éclata de nouveau quelques années après dans les affaires de la fronde, fermentation qui, comme on l’a souvent remarqué, donna à Corneille cette élévation, ce nerf, cette fierté de style et de sentiments qu’on admire, ne contribua pas peu à lui donner de la vogue. […] Le public ne changea point de sentiment, la justesse de la critique n’empêcha personne d’admirer le Cid.

290. (1666) Dissertation sur la condemnation des théâtres « Disseration sur la Condemnation, des Théâtres. — Chapitre X. Que l'extrême impudence des Jeux Scéniques et des Histrions fut condamnée. » pp. 217-229

les Histrions ne gagnent pas seulement leur vie avec leurs mains, mais avec leurs corps, il fait bien connaître qu'il n'entend pas parler des Comédiens et des Tragédiens, qui agissent plus de la langue que de tout le reste de leurs personnes ; mais seulement des Mimes, Pantomimes, et autres Bateleurs de la Scène et du Théâtre, dont l'art était de s'expliquer bien plus par les postures que par le discours : et nous pouvons découvrir son sentiment, quand il écritDe Spect.

291. (1675) Traité de la dévotion « Chapitre III. De la trop grande sensibilité aux plaisirs de la terre ; troisième source de l’indévotion. » pp. 58-65

On a beau dire en faveur du Théâtre qu’on l’a rendu chaste, et que l’on y entend plus de leçons de vertu, que l’on n’y voit d’exemples de vices, on dira si l’on veut que les passions n’y paraissent animées que pour la défense de l’honneur, et que l’on n’y produit pas d’autres sentiments que ceux de la générosité.

292. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — DEUXIEME PARTIE. — Méthode et règlement pour réformer le Théâtre. Avant Propos. » pp. 87-98

Ajoutons que le Théâtre moderne mérite toute préférence, par la commodité qu’il procure aux Acteurs, aussi bien qu’aux Spectateurs : les premiers peuvent exprimer les sentiments et les passions dans les tons convenables et naturels : les seconds sont à portée de concevoir toute la force et toute la finesse de l’expression ; puisque les Théâtres modernes ne sont pas, à beaucoup près, si vastes que les Théâtres des Anciens, ni exposés au grand air, comme ils l’étaient.

293. (1705) Sermon contre la comédie et le bal « I. Point. » pp. 178-200

Sainte Thérèse nous apprend dans l’histoire qu’elle a écrite elle-même de sa vie, que la lecture des comédies et des livres de chevalerie (que eût-ce été de la représentation effective) refroidit tellement en elle la piété et les bons sentiments dont le Seigneur l’avait prévenue, que sans une grâce spéciale elle se fût engagée dans la voie de perdition où marche le plus grand nombre des hommes. […] Peut-on, (avouez-le de bonne foi, je n’en veux point d’autres témoins que vous) peut-on conserver des sentiments de piété dans un lieu où tous les objets ne sont propres qu’à détourner de Dieu, et attacher à la créature ?

294. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « Discours préliminaire. » pp. -

Au reste, comme chacun a son sentiment particulier, duquel on ne s’écarte presque jamais parce qu’on le croit le meilleur, je dois m’attendre que les raisons que j’allégue dans ce Discours préliminaire, afin de me justifier, persuaderont peu de personnes : je dois peut-être penser aussi que je me trompe moi-même.

295. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — Seconde partie. Notes. — [K] » pp. 421-424

Par exemple, si le Père dont on vient de parler, entrait content sur la Scène, il présentait d’abord le côté de son masque dont le sourcil était rabatu ; & lorsqu’il changeait de sentiment, il marchait sur le Théâtre, & fesait si bien, qu’on ne voyait plus que le côté du masque dont le sourcil était froncé, observant dans l’une & dans l’autre situation, de se tourner de profil.

296. (1666) Dissertation sur la condemnation des théâtres « Disseration sur la Condemnation, des Théâtres. — Chapitre XII. Que la représentation des Comédies et Tragédies ne doit point être condamnée tant qu'elle sera modeste et honnête. » pp. 237-250

Il est certain néanmoins que depuis quelques années notre Théâtre se laisse retomber peu à peu dans sa vieille corruption, et que les Farces impudentes, et les Comédies libertines, où l'on mêle bien des choses contraires au sentiment de la piété, et aux bonnes mœurs, ranimeront bientôt la justice de nos Rois, et y rappelleront la honte et les châtiments ; et j'estime que tous les honnêtes gens ont intérêt de s'opposer à ce désordre renaissant, qui met en péril, et qui sans doute ruinera le plus ordinaire et le plus beau des divertissements publics ; Car l'opinion des doctes Chrétiens, est que la représentation des Poèmes Dramatiques ne peut être condamnée quand elle est innocente, quand elle est honnête.

297. (1664) Traité contre les danses et les comédies « Chapitre XIII. Que les lois civiles défendent de danser, et d’aller à la Comédie les jours des Fêtes. » pp. 67-75

Amissionem militiæ, proscriptionemque patrimonii sustinebit, si quis umquam hoc die festo spectaculis interesse, vel cujuscunque Judicis apparitor, prætextu negotii publici, vel privati, quæ hac lege statuta sunt, crediderit temeranda. » On voit bien dans ces Constitutions pieuses et Chrétiennes, quels ont été les sentiments des Princes touchant l’observance des Fêtes, et des autres jours qui demandent une particulière application à Dieu, et à la prière, puisqu’ils ont défendu en ces saints jours, sous des peines très rigoureuses, tout ce qui sert à la volupté.

298. (1715) La critique du théâtre anglais « CHAPITRE II. L’Impiété du Théâtre Anglais. » pp. 93-168

Cet usage du monde semble assez naître de ce préjugé ; que les femmes sont communément plus susceptibles et plus remplies de sentiments de Religion que les hommes : qu’on ne peut par conséquent faire à leurs yeux le plus brutal outrage au Seigneur sans les offenser. […] Mais après ce qu’il ajoute, ses sentiments ne sont plus équivoques : car il lui plaît de traiter Jéhu de Cocher de Fiacre ; sur quoi l’un de ses personnages réplique : Jéhu fit jeter Jézabel par les fenêtres suivant l’ordre qu’il avait reçu de Dieu d’exterminer la maison d’Achab. […] C’est ce qu’on ne peut penser sans avoir de lui les sentiments les plus injustes, ce qu’on ne peut dire sans donner un démenti à ses adorables oracles. […]  » Dans L’Amour Triomphant ; Carlos est Chrétien suivant le dessein de la Pièce : il devrait donc avoir des sentiments convenables à sa Religion.

299. (1643) Les Morales chrétiennes « Des Théâtres. » pp. 511-519

Si les comédies ont fait une leçon, les farces font un jeu des impuretés ; les rapts et les adultères y passent pour des galanteries, on les représente avec quelques rencontres lascives qui gagnent l’attention, et qui font passer l’effronterie pour une subtilité : l’esprit se fait insensiblement des habitudes du mal, par ces pernicieux exemples, et la grande compagnie qui les regarde avec plaisir, fortifie les âmes encore timides, contre les sentiments de la honte.

300. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre onzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre II. Autres Anecdotes du Théatre. » pp. 43-70

L’illustre Chancelier d’Aguesseau pensoit bien différamment, dans son discours sur l’imitation par rapport à la tragédie ; il parle fort au long contre les spectacles, il dit entr’autres ces belles paroles, les caractères, les sentiments, les pensées, les expressions des personnages mis sur la scéne, tout conspire à reveiller, à réflecter les inclinations que nous avons pour la gloire, les richesses, l’amour, la veangeance, qui sont les mobiles du cœur humain ; les passions feintes que nous y voyons nous plaisent, par la même raison que les réelles, parce qu’elles en mettent de réelles dans notre ame, ou parce qu’elles nous rappellent celles que nous avons éprouvées : Rapiebant me spectacula plena miseriarum mearum. […] & seq. veut que les Pantomimes soient très-utiles, non pour enseigner les regles de la vertu, ils ne parlent point ; mais pour amuser une multitude de spectateurs dans les Fêtes publiques ; qui ne pouvant pas entendre, pensent voir de fort loin, (la finesse du geste, du coup d’œil, des traits du visage, &c. ne vont pas plus loin ni si loin que le son, ce n’est peut-être que de gros Lazzis ;) on ne connoît pas les grandes ressources du génie pantomime, on peut en faire un spectacle intéressant, (il faudroit être fort habile pour en faire autre chose que de l’amusement,) il est vrai qu’il veut le faire accompagner d’une musique de génie représentative, & très expressive ; car les airs, dit-il, ne sont que l’expression d’une passion cachée, il faut en représenter le motif & la cause, ce qui met dans la nécessité d’un recitatif joué par le pantomime, ce qui eut ramené non les paroles, mais seulement, & même rarement le sentiment. […] Ne peut-on pas dire aussi, il faudroit fermer les yeux, & n’ouvrir que les oreilles ; l’un & l’autre est vrai, & faux à divers égards : le pas pantomime ne rend que la moitié de l’action ; on sent bien mieux quand on entend les paroles, si les gestes, les mouvements, l’attitude, les yeux, la phisionomie rendent la pensée & les sentiments ; combien de tableaux de nuance perdus ou incertains, si la parole ne donnne le mot de l’énigme, aussi le ton, l’inflexion de la voix, la lenteur & la rapidité de la diction ajoutent les traits les plus vifs, ce sont les couleurs de l’oreille, pour ainsi dire.

301. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quinzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre III. Aveux importans. » pp. 83-110

Sentiment de Jurieu sur les spectacles. […] Le cœur donne du courage, de la gloire, de la témérité, il peut aussi inspirer quelque chose de plus doux, de là dépend une félicité parfaite, il faut pour y parvenir faire un choix avec goût & discrétion suivant simplement la sympathie qui fait pencher vers un objet plutôt que vers un autre (c’est pour le fixer qu’on se farde & qu’on étale des nudités) ; cette sympathie formera bientôt le sentiment qu’on nomme amour (une jolie femme n’en doute pas) ; que cet amour produiroit la délicatesse seule source des vrais plaisirs (ce galimathias feroit rire une Actrice). […] La Princesse Venus inventrice d’un sentiment si délicat qu’elle avoit nommé amour, en fut regardée comme la mère aussi bien que des grâces, ayant été aidée par les plus belles femmes, cet engagement fut trouvé si beau qu’on en fit un Dieu, & de sa mère une Déesse, la force en est invincible (c’est de la bonne morale) ; on peut donc être amoureux sans être si vicieux, cela veut dire en bon françois qu’on voudroit bien que l’impureté ne fût pas un vice, qu’on tâche de colorer le mouvement de passions pour en diminuer la honte que ce langage de vertu, ce vernis de chasteté est une gaze pour en cacher l’horreur & émousser les remords.

302. (1640) Traité des Spectacles des Gentils « SAINCT CYPRIAN DES SPECTACLES. » pp. 155-193

Car quelle impudence d’appliquer les Oracles Diuins de la Saincte Escriture à la deffẽce des vices, puisque son intention est de nous en faire conceuoir l’horreur, & de nous porter à l’amour de la perfection Euangelique ; & que si elle a des lieux & des passages qui semblent en quelque façon s’accorder à leurs sentiments, on ne les y a pas couchés en faueur des spectacles, & des Chrestiens qui y assistent : mais au contraire pour nous donner dans leur sens mysterieux la connoissance des fruits que nous en pouuõs tirer, & pour nous animer à l’amour des bonnes choses, puisque les Payens mesmes s’échauffent si fort après des sottises, dont ils ne peuuẽt esperer de gloire, & qui ne leur sçauroient produire que de la peine. […] En effet si l’on agite quelque question sur nostre creance ou sur nos mysteres, en presence de ce suffisant, qui vante si haut ses recherches, & qui ne charge sa memoire que des remarques d’vn cheual, de sa race & du cõte de ses années ; si on luy en demande son sentiment, on voit aussi-tost son ignorance, ou s’il en sçait quelque chose, est-il pas bien criminel d’en negliger, ainsi la pratique ?

303. (1761) Les spectacles [Querelles littéraires, II, 4] « Les spectacles. » pp. 394-420

Rousseau, le conseil le plus dangereux qu’on pût donner, du moins tel est mon sentiment, & mes raisons sont dans cet écrit. » Quoique ces raisons semblent ne devoir convenir qu’à la constitution de Genève, elles sont pourtant exposées très-souvent d’une manière générale. […] On lui a répondu que, de quelques cas particuliers, il ne pouvoit pas tirer une preuve générale en faveur de son sentiment.

304. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre quatriéme. — Chapitre III. De l’Unité de lieu, de Tems & de Personne. » pp. 211-238

Pour moi, s’il m’est permis de dire mon sentiment après les gens habiles, je recommande sur-tout aux Poètes l’Unité de lieu. […] Le sentiment d’Aristote au sujet de la durée de l’action, n’est pas généralement suivi.

305. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre quatriéme. — Chapitre XI. Du jeu des Acteurs. » pp. 345-354

Mais la plupart des Comédiens croyent qu’ils n’ont autre chose à faire qu’à débiter leur role avec feu ; ils mettent du sentiment dans ce qu’ils doivent dire, & n’en mettent pas dans ce qu’ils écoutent ; comme s’il était naturel qu’on ne prit nul intérêt aux discours que l’on nous tient, sur-tout lorsqu’ils contiennent des choses qui nous touchent vivement.

306. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome II « De l’Art du Théâtre. — Chapitre VIII. Réfléxions sur le plaisir qu’on ressent à la représentation d’un Poème comique, & sur la douleur qui déchire l’ame des Spectateurs d’un Drame sérieux. » pp. 113-123

Sans nous arrêter à discuter les diverses opinions de ces trois Auteurs, disons en peu de mots quel est notre sentiment.

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