En un mot, toute cette pièce est très édifiante : on n’y donne que des leçons de piété, on n’y chante que de saints cantiques ; et on ne la joue point sur un Théâtre public. […] Shakespeare se donne la liberté de faire entrer des gens d’Eglise dans plusieurs de ses pièces : mais il en soutient d’ordinaire la dignité, et ne leur attribue rien qui ne soit dans les règles. […] Dès que les Grands de la terre furent convertis à la Foi de Jésus-Christ, ils ne donnèrent pas au Sacerdoce une médiocre part dans les choses mêmes temporelles, témoin Constantin, ses Successeurs, etc. […] Le nom de Prêtre, malgré l’ignorance orgueilleuse de quelques petits esprits, est un nom honorable, eu égard à la Religion et au monde même qui lui donne avec justice de la considération. […] Celui, par exemple, à qui le Prince donne une Charge, peut-il ne s’en pas acquitter par je ne sais quelle timidité qui l’arrête ?
Avant de la constater, je dois vous donner une idée de cette espece de censure, pour la tirer du cahos où votre Avocat l’a noyée dans son Mémoire ; il confond tout, faute de Théologie. […] La question ne roule pas sur l’existence des peines ecclésiastiques : Saint Augustin la prouveroit1 par ces paroles de Saint Matthieu : Je vous donnerai les clefs du Royaume des Cieux2, & tout ce que vous lierez ou délierez sur la terre, sera lié ou délié dans le Ciel. […] Les Souverains ne sont plus aujourd’hui dans le cas des censures Ecclésiastiques ; Jean XXII. accorde1 à certains Moines le privilége de n’être pas excommuniés ; combien plus faut-il supposer une semblable prérogative attachée à la personne des Rois ; mais ils la tiennent des mains de l’Eglise qui l’a jugée nécessaire, sa puissance lui ayant été donnée pour l’édification des peuples. […] Je prie l’Auteur du Mémoire de faire attention aux termes de ce dernier Capitulaire : il suppose dans les Prêtres le pouvoir d’instituer des jeûnes, il ne donne aucun droit aux Comtes d’y trouver à redire : A Sacerdotibus indicta jejunia observent & suis observare doceant. […] La pénitence que le Confesseur impose est souvent trop légere, pour éteindre tous les droits de la Justice divine : on ne le prétendoit pas même dans la primitive Eglise où les pénitences étoient si rigoureuses, parce qu’il n’est pas donné aux hommes de connoître la satisfaction que nous devons à Dieu dans toute son étendue.
Gémissant sur l’empressement que font paraître les peuples, et quelquefois même les Magistrats pour des pratiques condamnables, elle n’ose en venir à des extrémités, et se contente d’ordonner à ses Ministres de travailler à désabuser les peuples et à leur donner de l’horreur de tous les divertissements dangereux qui les enchantent. […] Epoux de l’Eglise ouvrez les yeux de ce Prêtre, et faites-lui voir son égarement, afin qu’il le déteste et qu’il travaille à lever le scandale qu’il a donné. […] Racine ont été loués, comme, les deux Auteurs qui ont donné les pièces de Théâtre les plus chastes ; Qui est-ce néanmoins qui n’a pas loué davantage ces célébrés Auteurs, d’avoir enfin regardé ce travail comme des péchés de la jeunesse ? […] Racine a donné au public ; et il paraît ce semble assez persuadé que l’exercice auquel il s’est appliqué lui-même, n’est guère compatible, ni avec la piété, ni avec la maturité de l’âge. […] Mais supposons que quelques Prélats y soient allés ; est-ce sur leurs actions qu’il faut régler sa conduite, ou n’est-ce pas plutôt sur ce qu’ils enseignent publiquement dans les Conciles, dans leurs Statuts Synodaux, dans les Chaires soit par eux-mêmes, ou par les Prédicateurs à qui ils donnent mission ?
L’idée la plus juste qu’on puisse donner d’un Acteur, est celle d’un homme qui s’empoisonne lui-même & qui empoisonne les autres. […] Le tître de mere qu’ils donnent à l’Eglise n’est donc qu’un vain nom ?
Mettant eux-mêmes en musique leurs Pièces chantantes, ils en rendraient davantage l’esprit ; ils peindraient avec plus d’énergie les sentimens qu’ils veulent donner à leurs Personnages. […] Je suis tenté de comparer le Compositeur de la musique d’un Drame qui lui est étranger, à ces nourrices qu’on charge d’élever les enfans : ont-elles pour leurs nourrissons les mêmes soins, la même tendresse que si elles leur avaient donné le jour ?
On veut donc que l’Ouverture donne une juste idée du genre de l’action qui fait le sujet d’un Poème lyrique, & qu’elle soit travaillée avec beaucoup de soin ; on désire d’y trouver de l’èxpression, du génie, & non de vains bruits. […] Il est du moins bien difficile à un Compositeur de lui faire peindre & èxprimer quelque chose ; Quelle peine ne doit-il pas se donner, s’il a dessein de la rendre èxpressive, & s’il veut qu’elle soit l’image de ce qui va se passer au Théâtre !
En ouvrant ta Lettre, j’ai cru que ton mari, affichant le desordre, profitait de notre absence ; pour avouer publiquement une de ces Créatures dont le crime est l’état, que l’impudence annoblit, & dont les hommes mesurent la gloire, par l’atrocité du scandale qu’elles ont donné. […] Tel Artiste, tel Marchand, dont la fortune commence, n’attendent pas qu’elle soit assurée non-seulement pour étaler un faste qu’ils prétendent nécessaire, mais pour se donner une Maitresse, qui certainement ne l’est pas.
Ces yeux doubles que vous lui donnez, et dont les uns servent à regarder danser et les autres à veiller sont peut-être le Symbole de cette direction d’intention si célèbre dans votre Morale qui fait qu’on peut, selon vous, prendre part extérieurement à une chose défendue, pourvu que par d’autres yeux on se porte intérieurement à un objet permis. […] Vous vous accommodez mieux de celles qui s’éclipsent quelquefois et même assez souvent, pourvu qu’on ne manque pas de faire quelque compliment d’excuse, comme fait l’Argus dans votre Ballet ; c’est-à-dire, pourvu qu’on aille chez vous toties quoties demander l’Absolution, que vous êtes toujours prêts de donner suivant la Maxime de votre P.
[NDE] Bossuet donne à la fois la numérotation de la congrégation de S. […] [NDE] Bossuet donne à la fois la numérotation de la congrégation de S.
« Si les histrions poussaient le jeu et le divertissement jusqu’à l’excès, ils seraient tous en état de péché ; tous ceux qui se serviraient de leur ministère ou leur donneraient quelque chose, seraient dans le péché. » Saint Thomas laisse passer ces propositions qui en effet sont incontestables, et il n’excuse ces histrions, quels qu’ils soient, qu’en supposant que leur action, de soi, n’a rien de mauvais ni d’excessif, secundum se. […] Voilà donc comment Saint Thomas favorise la comédie : les deux passages de sa somme, dont les défenseurs de cet infâme métier se font un rempart sont renversés sur leur tête, puisqu’il paraît clairement, en premier lieu, qu’il n’est pas certain qu’il ait parlé de la comédie ; en second lieu, que plutôt il est certain qu’il n’en a pas voulu parler ; en troisième lieu sans difficulté et démonstrativement, que quand il aurait voulu donner quelque approbation à la comédie, en elle-même, spéculativement et en général, la nôtre en particulier et dans la pratique, est excluse ici selon ses principes, comme elle est ailleurs absolument détestée par ses paroles expresses.
Et si d’aventure il s’excuse de ce qu’il est pauvre et nécessiteux, il pourra bien être soulagé et aidé en sa nécessité, avec ceux qui sont entretenus et nourris aux dépens de l’église : pourvu qu’il se contente de si peu de viandes, que l’Eglise donne par raison, et mesure, sans excès. Et qu’il n’estime pas, qu’on lui doive donner salaire, pour désister de ses offenses, vu que c’est à son dam, qu’il vit ainsi, et non au nôtre.
Pour en donner de l’horreur, le Poète auroit dû, non pas feindre ces succès imaginaires qui n’arrivent jamais ; mais rapporter simplement les malheurs où s’engage infailliblement un jeune homme, qui se marie à l’insu ou contre la volonté de ses parents. […] Les vices dont elle donne de l’horreur, paraissent horribles d’eux-mêmes sans artifice.
Bien plus, il donne au Théâtre François le titre d’académique, jugeant la Comédie Françoise digne d’être érigée en Académie Royale. […] Thomas qui rapporte ce dernier trait, entre volontiers dans l’idée de Saint Chrysostome, il juge les Spectacles3 vicieux par le scandale qu’ils donnent ; on y reçoit des leçons de cruauté & d’incontinence. […] Ces autorités ne vous persuaderont pas, Mademoiselle, vous les prendrez pour des déclamations vagues, qui ne portent point sur les représentations de la Comédie Françoise : ainsi je dois leur donner pour appui un principe que vous ne puissiez contester.
Tous les employés du gouvernement qui sont l’organe des lois et les délégués du prince, doivent sans doute donner eux-mêmes les marques du plus profond respect pour la religion, et témoigner de la vénération pour les ministres du culte, lorsque ceux-ci sont pénétrés de la majesté de leurs fonctions et qu’ils méritent l’estime de leurs ouailles, par leur conduite sage et éclairée : mais lorsque ces derniers s’écartent de leurs devoirs, lorsqu’ils commettent des délits et lorsqu’ils troublent l’ordre social par des actes de fanatisme, il faut que les agents du ministère public, aient le sentiment de la dignité du poste qui leur est confié ; il faut qu’ils ne s’en laissent point imposer par le crédit du clergé, ni se laisser effrayer par l’ascendant que les prêtres n’usurpent que trop souvent sur le gouvernement ; et enfin ne pas courber honteusement la tête, sous le joug de la secte ultramontaine, si puissante et si menaçante, qui, aujourd’hui, sème de toute part, la division, le trouble et le désordre. […] De là naîtraient des pensées, des discours et des actes séditieux ; car le prêtre par sa conduite, semble dire publiquement, le prince et les lois ont tort d’honorer ce qui est digne d’anathème, mon autorité dans l’état est supérieure à celle du prince et à celle des lois, et j’ai la puissance de punir, d’anathématiser publiquement, et sans opposition, les actions sacrilèges du prince. » MM. les procureurs du roi doivent donc punir ce délit réel, qui est d’autant plus dangereux, qu’il laisse propager une usurpation de pouvoir, qui met le clergé au-dessus du prince et des lois, et qui lui donne les moyens terribles de punir audacieusement et publiquement, ce que le roi et les lois constituent et protègent. […] Telle est la volonté du prince, manifestée dans l’article 6 de la Charte, qui s’exprime ainsi : « La religion catholique, apostolique, et romaine, est la religion de l’Etat. » L’Eglise n’a donc aucun droit de faire invasion dans l’Etat, car c’est par la volonté et l’autorité du prince et de la loi, que la religion existe dans l’Etat ; si cette volonté avait été contraire, cette religion n’y existerait pas, ou du moins elle n’y aurait pas la supériorité que la Charte lui donne ; par conséquent, la religion n’est là que parce que le prince l’a voulu, c’est sa puissance qui l’a instituée religion de l’Etat ; or, la puissance qui institue, est toujours la puissance supérieure ; le clergé qui doit son institution à cette puissance supérieure, ne peut ni ne doit la censurer, ni la blâmer, et encore moins la guerroyer, à la manière du jésuite Guignard, qui fut pendu et brûlé comme régicide, en place de Grève.
par la grâce de Dieu Roi de France, savoir faisons, à tous présents et avenir : Nous avons reçu l’humble supplication de nos bien-aimés, les Maîtres, Gouverneurs et Confrères de la Confrérie de la Passion et Résurrection de Notre-Seigneur, fondée en l’Eglise de la Trinité à Paris : contenant que comme pour le fait d’aucuns Mystères de Saints, de Saintes, et mêmement du Mystère de la Passion, qu’ils ont commencé dernièrement, et sont prêts de faire encore devant Nous, comme autrefois avaient fait, et lesquels ils n’ont pû bonnement continuer, parce que Nous n’y avons pas pû être lors présents, ou quel fait et Mystère ladite Confrérie a moult frayé et dépensé du sien, et aussi ont fait les Confrères chacun d’eux proportionnablement ; disant en outre que s’ils jouaient publiquement et en commun, que ce serait le profit de ladite Confrérie ; ce que faire ils ne pouvaient bonnement sans notre congé et licence ; requérant sur ce notre gracieuse Provision : Nous qui voulons et désirons le bien, profit et utilité de ladite Confrérie, et les droits et revenus d’icelle être par Nous accrus et augmentés de grâce et privilèges, afin qu’un chacun par dévotion se puisse adjoindre et mettre en leur Compagnie ; à iceux Maîtres, Gouverneurs et Confrères d’icelle Confrérie de la Passion de Notredit Seigneur, avons donné et octroyé de grâce spéciale, pleine puissance et autorité Royale, cette fois pour toutes, et à toujours perpétuellement, par la teneur de ces présentes Lettres, autorité, congé et licence, de faire jouer quelque Mystère que ce soit, soit de la Passion et Résurrection, ou autre quelconque, tant de Saints comme de Saintes qu’ils voudront élire, et mettre sus toutes et quantes fois qu’il leur plaira, soit devant Nous, notre Commun ou ailleurs, tant en recors qu’autrement, et d’eux convoquer, communiquer, et assembler en quelconque lieu et place licite à ce faire, qu’ils pourront trouver en notre Ville de Paris, comme en la Prévôté et Vicomté ou Banlieue d’icelle, présents à ce trois, deux ou un de nos Officiers qu’ils voudront élire, sans pour ce commettre offense aucune envers Nous et Justice ; et lesquels Maîtres, Gouverneurs, et Confrères dessus dits, et un chacun d’eux, durant les jours desquels ledit Mystère qu’ils joueront se fera, soit devant Nous, ou ailleurs, tant en recors qu’autrement, ainsi et par la manière que dit est, puissent aller et venir, passer et repasser paisiblement, vêtus, habillés et ordonnés un chacun d’eux, en tel état ainsi que le cas le désirera, et comme il appartiendra, selon l’ordonnance dudit Mystère, sans détourner ou empêcher : et en pleine confirmation et sûreté, Nous iceux Confrères, Gouverneurs et Maîtres, de notre plus abondante grâce, avons mis en notre protection et sauvegarde, durant le recors d’iceux jeux, et tant comme ils joueront seulement, sans pour ce leur méfaire, ou à aucuns d’eux à cette occasion, ne autrement. Si donnons en mandement au Prévôt de Paris, et à tous nos autres Justiciers et Officiers présents et à venir, ou à leurs Lieutenants, et à chacun d’eux, si comme à lui appartiendra, que lesdits Maîtres, Gouverneurs et Confrères, et à chacun d’eux fassent, souffrent et laissent jouir pleinement et paisiblement de notre présente grâce, congé, licence, don et octroi dessus dits, sans les molester, ne souffrir et empêcher, ores et pour le temps à venir ; et pour que ce soit chose ferme et stable à toujours, Nous avons fait mettre notre scel à ces Lettres ; sauf en autres choses notre droit et l’autrui en toutes. Ce fut fait et donné à Paris en notre Hôtel lés saint Pol, ou mois de Décembre, l’an de grace mil quatre cent deux, et de notre reigne le vingt-troisième, Par le Roi, Messeigneurs Maîtres Jacques de Bourbon, Lamiral, Devieulaines, et plusieurs autres présents, signé, Poupom.
général du Spectacle est de renforcer le caractère national, d’augmenter les inclinations naturelles, et de donner une nouvelle énergie à toutes les passions. […] Donnez-lui des fêtes, offrez-lui des amusements qui lui fassent aimer son état, et l’empêchent d’en envier un plus doux ; des jours ainsi perdus feront mieux valoir les autres. […] » « Il était tard, les femmes étaient couchées, toutes se relevèrent : bientôt les fenêtres furent pleines de spectatrices qui donnaient un nouveau zèle aux acteurs : elles ne purent tenir longtemps à leurs fenêtres, elles descendirent ; les maîtresses venaient voir leurs maris, les servantes apportaient du vin, les enfants même éveillés par le bruit accoururent demi-vêtus entre les pères et mères : la danse fut suspendue ; ce ne furent qu’embrassements, ris, santés, caresses : il résulta de tout cela un attendrissement général que je ne saurais peindre, mais que dans l’allégresse universelle on éprouve assez naturellement au milieu de tout ce qui nous est cher.
Augustin dit : Pensez-vous, mes frères, que Dieu donne son paradis à des fous ; et ceux à qui il ne donnera son paradis, quel autre séjour peuvent-ils attendre que la compagnie des réprouvés11 ?
Ceux qui protègent la farce, en donnent pour raison que, puisqu’on y va, on s’y amuse ; que tout le monde n’est pas en état de goûter le bon comique, et qu’il faut laisser au public le choix de ses amusements. […] Lui donner des salles décentes et une forme régulière, l’orner de musique, de danses, de décorations agréables, et y souffrir des mœurs obscènes et dépravées, c’est dorer les bords de la coupe où le public va boire le poison du vice et du mauvais goût.
Les Acteurs et les Actrices du Théâtre de la Réforme seraient logées, comme nous avons déjà dit, et jouiraient chacun d’une pension proportionnée à leurs services : ils conserveraient leur pension et leur logement même en se retirant ; bien entendu cependant que dans le temps qu’ils exerceraient, la pension serait plus forte, et qu’en quittant elle serait moindre : de même si par accident ou par maladie quelqu’un des Acteurs devenait hors d’état de travailler, on lui donnerait la pension et le logement comme s’il avait servi le temps prescrit. […] Afin que le Théâtre ne puisse jamais manquer de Sujets, outre les Comédiens de Province, sur lesquels il faut peu compter ainsi que sur les enfants de la Capitale, je crois qu’il serait de la prudence d’élever et d’instruire pour le Théâtre une demie douzaine de garçons, et autant de filles ; une ancienne Comédienne, et un ancien Comédien auraient le soin de les former dans des logements séparés ; on leur donnerait en même temps des principes de religion et de piété, et on leur ferait apprendre un métier pour leur préparer une ressource, si par hasard à un certain âge on ne leur trouvait pas les talents nécessaires pour le Théâtre, ou s’il leur survenait quelque défaut qui ne leur permit pas d’y jouer : dans ces deux cas la bonne éducation qu’ils auraient reçus, jointe aux secours qu’on leur procurerait, les mettrait en état de trouver un autre établissement que celui du Théâtre.