Il faut que cet Art sublime attendrisse le cœur sans l’amollir, peigne la vertu contraire aux penchans du Spectateur, & la lui fasse aimer ; représente les vices favoris, & les fasse haïr, tout séduisans qu’ils sont, même avant de montrer le châtiment qui les suit ; qu’il place sur la Scène non-seulement l’homme du monde, mais l’homme ami de la société, c’est-à-dire l’homme de bien. […] Le vice, dans la Comédie du Méchant, est détestable dès qu’il se montre ; les faiblesses de Florise excitent le mépris ; la prévention de son frère impatiente ; on a pitié du jeune étourdi, qui s’expose, en suivant les conseils du Méchant, à perdre une Maitresse qu’il aime. […] Quant aux Comédies-Ariettes, quoique ce soit une espèce monstrueuse*, il faudra bien, puisqu’on les aime, s’emparer des meilleures, jusqu’à ce que la fureur en soit passée1. […] D’ailleurs, les jeunes-gens de condition, destinés à représenter dans le monde, se formeraient sur le Théâtre ; ils se mettraient en état, de parler & d’agir, dans la suite, par eux-mêmes ; ils se feraient un nom d’avance, & deviendraient plus sensibles à la gloire de se faire estimer dans le cours de leur vie, d’un Peuple dont ils seraient aimés & connus. […] Voila pourquoi nous n’aimons pas le miraculeux, & que nous sommes sous des merveilles.
C’est donc un crime à un Chrétien de ne pas aimer le monde, d’en connoître la vanité ! […] Elle fortifie, répand, fait aimer le mal qu’elle trouve, & en introduit de nouveau.
Socrate dit le contraire à la fin du Banquet : mais comme c’est après avoir bu dans une coupe très-profonde, & devant deux Auditeurs qui aiment mieux s’endormir que de le refuter, je crois, malgré l’autorité de Socrate, qu’il est presque impossible que le même homme excelle également dans deux Genres aussi opposés que le Terrible, & le Plaisant. […] Outre cela Horace l’accuse de ne point aimer le travail, quand il se met à écrire, & de craindre d’effacer, metuitque lituram.
Il savait qu’une erreur ancienne devient sacrée ; qu’avec de l’esprit, on peut faire goûter aux hommes quelques vérités ; mais qu’avec plus d’esprit encore, on s’abstiendrait de les leur découvrir toutes : il savait que ces préjugés de naissance, que cette chimère, plus ridicule que celle des Fables, née de l’orgueil, nourrie par la flatterie, défendue par l’opinion, et couverte du voile épais des siècles, ne pouvait être attaquée impunément : il savait que les Grands lui pardonneraient de peindre leurs vices et leurs ridicules, et non de les dépouiller d’un éclat étranger, mais imposant, qui leur tient lieu du mérite qu’ils n’ont pas : il savait enfin qu’on aimait le merveilleux au théâtre, et c’est peut-être ce qui l’a déterminé à donner au vertueux Dom Sanche un père couronné. […] J’ajouterai que cette pièce a corrigé les hommes : car s’il est encore des maris infidèles et dissipés, il n’en est plus qui rougissent d’aimer leurs femmes, et d’avouer leur amour.
J’ai assez d’estime pour leur Mémoire pour ne rien dire de plus : j’aime mieux laisser parler leurs Ouvrages.
La conjuration de Cinna sera échauffée par l’amour d’Emilie : Pauline sera fidèle à son époux, mais elle aimera Sévère.
Si cette malheureuse passion vue de loin dans deux personnes qui s’aiment, et dont on n’entend pas même les discours, est souvent capable de faire de vives impressions sur celui qui les observe ; qu’arrivera-t-il, lorsque, sur la scène, un jeune homme et une fille, avec toute la vivacité que l’art peut inspirer, font parade de leur tendresse dans un Dialogue, où les pensées étudiées du Poète sont toujours portées à l’excès ?
Si pourtant le Conseil jugeait à propos d’en conserver quelques-unes, où la passion d’amour ne parût pas nuisible, ni capable de corrompre le cœur, il ne faudra l’insérer dans le Registre qu’après qu’on se sera assuré qu’elle est propre à corriger les mœurs, à inspirer une bonne morale, et à faire aimer la vertu ; ce qui doit être le premier objet de toutes les Pièces du nouveau Théâtre.
Elles la font aimer ; les avancoureurs du vice lui font d’avance le procès. […] Une muraille de boue qu’on recrépit, un sépulchre hydeux, qu’on blanchit, on ne sait s’il faut aimer l’enduit superficiel, qui en impose, ou haïr les traits trop rudes, qu’il dérobe à nos regards : Faciem incertam gestent novis semper coloribus speculo conciliante adumbratam, ne appareat fœditas innata, super inducitur spuria venustas mentiente larvâ. […] On prend ce petit animal pour le symbole de la pudeur, avec ces mots : Malo mori quàm fœdari ; parce que l’Hermine est si jalouse de la propreté, qu’elle aime mieux se laisser tuer par le chausseur qui la poursuit, que de se sauver en passant dans la boue, où elle se saliroit.
Anacréon aime fort la liberté, il ne veut point de cérémonies ni d’étiquette, il est aussi familier avec la Reine qu’avec le Roi, il fait rouler tout son éloge sur ce qu’elle veut agir librement, échapper aux costume & rire impunément . […] J’approuve ton projet, j’aime ta fantaisie. […] Bernard, auteur de Castor & Pollux, & du poëme très-licencieux de l’Art d’Aimer, & de plusieurs poësies galantes, charmantes aux yeux du libertinage.
La Comédie fut regardée, dans sa naissance, comme un effet de la sagesse des Grecs, & elle resta long-tems dans la plus haute estime ; mais quand un Poëte osa se mocquer publiquement des Dieux, des Ministres de l’Etat, & des Philosophes les plus respectés, les choses changerent de face, & ces Comédiens, auparavant si aimés, furent alors chassés comme ils le méritoient. […] On dira seulement, au sujet de la Morale qui y est répandue, que l’on ne croit pas qu’il y ait au monde une personne assez simple, ou environnée de gens assez simples, pour prendre des Chansons pour des vérités, que quand Quinault a dit : Est-on sage Dans le bel âge, Est-on sage De n’aimer pas ?
J’aime mieux les faire voir dans l’avenir. […] Cette histoire est du moins la preuve que ce n’est pas d’aujourd’hui que les Musiciens Français n’aiment pas leurs rivaux d’Italie : j’ai cru que le Lecteur la lirait ici avec plaisir.
Caligula embrassa avec tant d’affection le party de la couleur verte, qu’il en mit & qu’il en aima jusqu’à son cheval Cette passion qui peut raisonnablement passer pour brutale, alla encore plus loin, car pour l’amour de cette beste, il quittoit ses Salons, & ne vouloit manger que dans l’Ecurie : Il la fit bastir de marbre, y fit faire vne creche d’yvoire, & fit enfin servir à ce bien-heureux cheval (appellé Incitatus, & amené à sa table en ceremonie, comme vn veritable invité & convive,) de l’orge & de l’auoine dorée & en ragoust, & luy presenter à boire du plus excellent vin, dans des vases d’or. […] Les Poëtes en ont assez aimé & fait valoir cette conjecture qui faute de raison & d’authorité aura telle force qu’elle pourra.
Ils n’aiment la vertu que pour la réputation qu’elle donne. […] S’il eut de grandes qualités, il n’aima jamais la liberté et versa inutilement des torrents de sang humain pour assouvir son ambition déréglée.
Dans les premiers, on la voit, par des efforts opiniâtres, s’enfoncer dans les sentiers obscurs de la vérité ; dissiper les nuages qui renferment les belles découvertes dans un cahos impénétrable ; déchirer ces voiles multipliées, dont la nature aime à cacher ses refforts, ses secrets, & ses opérations.
J’ai dit à-peu-près ; car il seroit aisé de prouver que chacun aime, hait, ou est ambitieux, selon son tempérament.
Mais il me semble que le tutoyement entre gens qui s’aiment, annonce trop de familiarité.
Quel jugement porterons-nous encore de ceux qui ne font le bal, et n’assemblent du monde que dans ces intentions, soit qu’ils se regardent eux-mêmes, soit qu’ils veuillent par ce moyen satisfaire aux inclinations de quelque personne qu’ils considèrent, ou qu’ils aiment ?
Canons du IVe concile de Carthage, an 398 ; « 2° L’évêque aura sa chambre ; et pour les services les plus secrets, des prêtres de bonne réputation, qui le voient continuellement veiller, prier, étudier l’Ecriture sainte, pour être les témoins et les imitateurs de sa conduite ; ses repas seront modérés, et on y verra des pauvres ; il n’aimera ni les oiseaux, ni les chiens, ni les chevaux, ni les habits précieux, et s’éloignera de tout ce qui tient au faste ; il sera simple et vrai dans tous ses discours, et méditera continuellement l’Ecriture sainte, pour instruire exactement son clergé et prêcher aux peuples selon leur portée.