Cependant ce partisan de Moliere ne l’a jamais cité dans le nombreux Recueil de Pensées ingénieuses, de ses Entretiens, de ses Remarques sur la Langue.
Dans le Cid on parle d’un parricide commis, en ces termes : « Enfin n’attendez pas de mon affection, Un lâche repentir d’une belle action, Je la ferais encore, si j’avais à la faire. » Et la Fille du Père assassiné, loue l’assassin, « Tu n’a fait le devoir que d’un homme de bien. » On y trouve des Leçons de vengeance d’un Père à son Fils : « Va contre un arrogant éprouver ton courage, Ce n’est que dans le sang qu’on lave un tel outrage, Meurs, ou tue. » Dans Polyeucte cette Pièce prétendue sainte, on voit une Fille qui parle d’un Amant que ses parents ne voulaient pas qu’elle épousât : « Il possédait mon cœur, mes désirs, ma pensée, Je ne lui cachais point combien j’étais blessée, Nous soupirions ensemble et pleurions nos malheurs, Mais au lieu d’espérance il n’avait que des pleurs. » On dit qu’on a combattu le faux dévot dans le Tartuffe ; cependant après qu’on a détrompé Orgon, on le fait ainsi parler contre tous les gens de bien : « C’en est fait, je renonce à tous ces gens de bien, J’en aurai désormais un horreur effroyable, Et m’en vais devenir pour eux pire qu’un diable. » Dans le Festin de Pierre, on expose les maximes les plus impies ; et le tonnerre qui écrase l’Impie, fait moins d’impression sur les méchants qui assistent à cette malheureuse Représentation, que les maximes détestables qu’on lui entend débiter, n’en font sur leurs esprits.
» Ce sont les termes de ce Concile ; et il n’y a pas lieu de s’étonner de cette ancienne sévérité de l’Eglise à l’égard des Comédiens, et de ceux qui assistaient, ou qui participaient à leurs spectacles ; puisque les Païens mêmes, comme Sénèque, ont regardé les Comédies, comme la chose la plus contraire aux bonnes mœurs : « Nihil tam moribus alienum, dit ce Philosophe, quam in spectaculo detineri » ; et qu’il y eut même quelques Empereurs, du nombre desquels est Domitien, qui chassèrent de Rome tous les Comédiens, comme autant de gens, dont il regardait la profession, comme pernicieuse au bon Gouvernement de ses Etats : en quoi certainement il ne se trompait pas dans cette pensée.
Molière fait pis, il a déguisé cette Coquette, et sous le voile de l’hypocrisie, il a caché ses obscénités et ses malices : tantôt il l’habille en religieuse, et la fait sortir d’un Couvent, ce n’est pas pour garder plus étroitement ses vœux : tantôt il la fait paraître en Paysanne, qui fait bonnement la révérence, quand on lui parle d’amour : quelquefois c’est une innocente qui tourne par des équivoques étudiées l’esprit à de sales pensées, et Molière le fidèle Interprète de sa naïveté tâche de faire comprendre par ses postures, que cette pauvre Niaise n’ose exprimer par ses paroles : sa Critique est un Commentaire pire que le Texte, et un supplément de malice à l’ingénuité de son Agnès, et confondant enfin l’hypocrisie avec l’impiété, il a levé le masque à sa fausse dévote, et l’a rendue publiquement impie et sacrilège.
C’est aussi la pensée de St. […] « Chaque crime, dit Salvien de Marseilles, n’attaque qu’un de nos sens à la fois ; mais la Comédie corrompt en même tems, l’ame par les pensées, le cœur par les désirs, les oreilles, par les équivoques &c, & les yeux par les regards. » Ce fut pour ces raisons, que Philippe Auguste chassa les Comédiens de sa Cour, en 1182, il signala sa piété , dit Mezeray, par l’expulsion des Comédiens, Jongleurs & farceurs, comme des gens qui ne servent qu’à flatter & nourrir les voluptés.
» Ses inclinations naturelles allaient à la vertu : et outre les dons de la Grâce, il avait reçu de la nature une beauté, et une force d’esprit toute extraordinaire : il exprimait ses pensées d’une manière si agréable, si nette, et si propre à persuader, que les personnes les plus habiles ne pouvaient l’entendre sans l’admirer. […] Il faut que je dise ici quelque chose touchant la manière de ses prières, et de ses méditations : Il s’y préparait par une grande attention à la présence de Dieu ; et il y recherchait plus les mouvements du cœur, que les pensées de l’esprit : Il récitait l’office de l’Eglise ; et retenant dans sa mémoire les passages les plus touchants de l’Ecriture, il s’en entretenait souvent en lui-même durant la journée, et avant le repas il prenait quelque temps pour prier, et pour faire l’examen de sa conscience. […] Son esprit était rempli de cette pensée de S. […] Et afin de vous en dire librement ma pensée, ces jeux étaient très magnifiques ; mais ils n’eussent pas été certainement à votre goût, dont je juge par le mien. » Il faut avouer que Cicéron, ni Marius n’auraient point eu tant de mépris pour les Jeux, et pour les Spectacles, s’ils eussent cru qu’ils faisaient la plus grande, et la plus solennelle partie de la Religion. […] qu’aux jours de Fête nous ayons un grand soin de ne nous entretenir que de bons discours, de n’avoir dans notre esprit que des pensées honnêtes, et de nous rendre les uns aux autres des témoignages d’affection, considérant que l’amitié, et l’union des cœurs sont des dons dont les Dieux récompensent nos vœux ; et que les Fêtes sont, pour ainsi dire, des marques solennelles d’amitié ?
Quichotte, qui rend mal de fort bonnes pensées ; mais les Auteurs n’ont eu assurément en cela aucune idée de jouer le Ciel.
On frissonne à la seule pensée des horreurs représentées sur nos Théatres.
Rien n’insinue dans la piece qu’il en eût eu la pensée, & dans le fond elle étoit trop peu vraisemblable, pour lui tomber dans l’esprit : il faut prêter à Orgon un degré d’imbécillité & de fureur incroyable.
Il est vrai que par ordre du Prélat un Grand Vicaire ad hoc examine toutes les scènes d’opéra qu’on y chante, & pour écarter les mauvaises pensées a grand soin de substituer les mots d’ami & d’amitié aux termes profanes d’amant & d’amour, souvent, il est vrai, aux dépens de la mesure & de la rime, mais au grand profit des bonnes mœurs.
Cela est quelquefois bon dans le transport d’une passion, & dit beaucoup : il laisse entrevoir une pensée qu’on ne peut ou qu’on n’ose bien exprimer.
Que dans une occasion involontaire & inévitable on compte sur la grace de Dieu, & on espère la victoire ; mais que sans nécessité, volontairement, pour son plaisir, contre les défenses de l’Eglise, l’autorité de tous les Pères, l’expérience de tout le monde, on se jette dans le péril le plus grand & le plus certain, on se croie en sûreté, on se dise innocent, on se flatte qu’il n’échappe ni désir, ni regard, ni parole, ni pensée contraire à la vertu, que la chair & les sens, le démon & le monde seront toujours vaincus, est-ce connoître le cœur humain, & se connoître soi-même ?
L’arrangement symétrique de notre Prose est plus dans la nature ; la pensée se développe d’elle-même.
La première pensée, la réflexion constante d’un sage, que le mécontentement vient à désabuser de cette chimère de perfection, qui l’avait séduit dans son ami, c’est j’étais libre, et je ne le suis plus ; vos défauts, que je suis obligé de supporter, sont des chaînes qui s’appesantissent chaque jour.
Le prince de Conti, Traité de la comédie et des spectacles, selon la tradition des Pères ; Nicole, Essais de morale, tome 3 et tome 5, pensées sur les spectacles ; Bossuet, Maximes et réflexions sur la comédie, on a vu avec quelle force Bossuet s’élève contre le théâtre ; Desprez-de-Boissy, Lettres sur les spectacles ; Concina, théologien dominicain, de Spectaculis theatralibus ; Gérard, comte de Valmont ; enfin, une foule de théologiens français, comme Fromageau, Pontas, etc.
C’est que dans la vérité nos Auteurs lyriques & tragiques, ainsi que nos Poëtes champêtres, ne savent qu’un certain nombre de mots & de pensées qu’ils tournent, retournent, déplacent, arrangent, répettent sans cesse.
Du moins ne peut-on douter que l’un ne soit l’imitation de l’autre : style assez semblable, même ponctuation, mêmes sentimens, mêmes pensées, même sombre tragique semblent décéler le sieur Arnaud, qui s’applaudit d’en être l’inventeur.
.° Il est donc évident que les spectacles sont l'ouvrage du démon et déplaisent à Dieu, que c'est la pompe du démon, à laquelle nous avons renoncé au baptême, et qu'on ne peut sans devenir apostat y participer, ni par ses regards, ni par ses paroles, ni par ses actions, ni par ses pensées.