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190. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 1 « CHAPITRE VI. De la Religion sur le Théâtre. » pp. 120-142

On les mettait dans la bouche d’un Acteur, qu’on faisait semblant de combattre, dont le sel piquant contrasté avec le sérieux dégoûtant et maussade d’un homme sage et pieux était un nouveau comique. […] On a beau les parer de la pompe des vers, et les mettre dans la bouche de quelque Prince ; sont-ce moins des infamies, et n’en sont-elles pas plus dangereuses ? […] Mettre des cendres au-dessus de la puissance suprême des Dieux qu’on adore, est-il rien de plus faux et de plus insensé ? […] Mettons le Roi, l’Etat, les maximes du gouvernement, à la place de Dieu, de l’Eglise, de la morale évangélique. […] « Depuis peu Baro a mis sur la scène le martyre de S.

191. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 2 « Chapitre VII. De l’infamie canonique des Comédiens. » pp. 153-175

Les objets de toutes les trois y sont artificieusement rassemblés et mis dans le jour le plus séduisant. […] Des tentations pressantes commencent à l’ébranler, elle ne résiste presque plus que pour mettre un plus haut prix à ses charmes. […] Sa mort mit fin à ses variations ; mais le procès subsista entre la fille, dont l’état était un problème, et les parents, qui demandaient la succession de la mère. […] » Cette pensée a été mise en vers par Voltaire lorsque la le Couvreur fut enterrée sur les bords de la Seine, après le refus que fit le Curé de « S. Sulpice de la mettre au cimetière.

192. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Avertissement. » pp. -

Au spectacle d’un beau drame, le sentiment s’éveille, digére pour ainsi dire, & met dans la balance du goût, les traits qui le frappent. […] C’est que la gloire des beaux siécles a inspiré à ceux qui les suivent, le désir de se faire aussi une espèce de fortune, en ramassant & en publiant les moyens que les grands hommes ont mis en usage pour plaire. […] Puisque ne mettre que des sentimens dans une Tragédie, c’est n’exciter, comme on l’a éprouvé, que de l’admiration, & que c’est par leur seul mélange avec les passions que les grands Poétes sont parvenus à nous inspirer la pitié & la terreur.

193. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Causes de la décadence du goût sur le théâtre. — Chapitre V. De la Musique ancienne & moderne, & des chœurs. De la Musique récitative & à plusieurs parties. » pp. 80-93

Dans la seconde supposition, l’attention est trop dissipée par la longueur du chant ; on a besoin d’un effort de mémoire pour se mettre ou l’acte précédent a laissé. 1°. […] C’est donc l’ordre universel qui prescrit certe division, dans celles qu’on met sur le Théâtre, parce que celui-ci imitant la verité, ne le peut qu’à l’aide de la vraisemblance. […] Pour que la musique causât un véritable délassement, il faudroit qu’elle fût chez nous, comme elle l’étoit chez les Anciens, propre aux incidens de chaque Acte ; & qu’en diminuant notre attention, elle soutint nos idées & nos sens, dans l’état où ils ont été mis.

194. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre quatriéme. — Chapitre VII. De la Vraisemblance. » pp. 277-286

Le Poète qui se contenterait de mettre sur le Théâtre des événemens vrais, sans autre préparation, se montrerait peu instruit ; le possible est même banni de la Scène. […] Un Frère est assez barbare pour envoyer à son Frère une boète remplie de poudre, & disposée de façon qu’en s’ouvrant elle fasse périr le malheureux objet de sa rage ; nous en sommes assurés ; pourtant un pareil tableau mis sur la Scène, révolterait tous les Spectateurs ; parce qu’il peindrait des choses trop éloignées de la Nature : il est possible qu’un Père, livré au fanatisme, ait pendu lui-même son Fils, mais on refusera toujours de croire une pareille probabilité. […] Il ose quelquefois abandonner cette Vraisemblance si précieuse, pour mettre sur la Scène de l’incroyable & des actions qui répugnent au bon sens.

195. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome II « De l’Art du Théâtre. — Chapitre VII. Des Duo, Trio & Quatuor. » pp. 329-339

« Il faut ne placer les Duo que dans des situations vives & touchantes ; n’y mettre qu’un Dialogue court, peu phrasé, formé d’interrogations, de réponses, d’èxclamations vives & courtes. […] « Les règles du Duo, & en général de la Musique à deux parties, sont les plus rigoureuses pour l’harmonie ; ces règles étaient bien plus sévères autrefois ; mais on s’est relâché sur tout cela dans ces derniers tems où tout le monde s’est mis à composer. […] Ce que j’ai dit ailleurs(73) au sujet du commencement des Pièces qui ne saurait être trop animé, me porte à désirer qu’on mît quelquefois à l’ouverture des Pièces du nouveau Théâtre un duo, un trio, ou bien une ariette.

196. (1694) Sentiments de l’Eglise et des Pères « CHAPITRE IV. Deux conséquences que les Pères de l’Eglise ont tirées des principes qui ont été établis ci-devant. » pp. 82-88

C’est sur ce principe que le Concile de Paris, tenu en 829. sous Louis le Débonnaire, exhorte ce Prince à ne les pas entretenir ; et il les met en parallèle avec les impudiques, « impudicos et histriones non nutrire. » C’est sur ce principe que Philippe Auguste les chassa de sa Cour les regardant comme les ministres du diable, dit Rigord son Historien ;V. […] Cet incomparable Docteur met encore ailleurs les Comédiens en parallèle avec les femmes de mauvaise vie, qu’on sait bien ne pas devoir être entretenues dans leurs désordres. […] qu’ils s’imaginent que le monde est heureux, lorsque ceux qui l’habitent, ne travaillent qu’à embellir leurs maisons ; et qu’ils ne font pas d’attention à la ruine de leurs âmes, lorsqu’on s’amuse à bâtir des Théâtres magnifiques, et qu’on détruit les fondements de la vertu ; lorsque les riches dans l’abondance des biens où ils se trouvent, mettent leur gloire à entretenir les débauches des Comédiens, pendant que les pauvres gémissent dans la misère, et que les choses les plus nécessaires à la vie leurs manquent.

197. (1760) Critique d’un livre contre les spectacles « FRAGMENT D’UNE LETTRE A ME. DE ****. SUR LES SPECTACLES. » pp. 82-92

Une de nos espèces d’Automates, sans aucun fonds propre, Dogmatistes, Formalistes, Compilateurs et Dissertateurs, qu’on nomme Savants, se sont arrogés le droit de donner des préceptes sur un Art qui n’a de loi que la nature : ils ont jeté les Auteurs dans un labyrinthe de règles embarrassantes et ridicules : ils leur ont mis des entraves jusqu’à la façon de rendre leurs idées ; continuellement resserrés et contraints dans la froide et pénible méthode, le but leur échappe : cette méthode, si étrangère aux passions, produit quantité de petites beautés de détail, mais qui ne sortant pas essentiellement du sujet, forment un ensemble de pièces de rapport, sans force, et incapable de causer de grandes émotions. […] L’esprit saisit bien une pensée, il s’en amuse, mais le profit en appartient au cœur, et la principale affaire est de le mettre de la partie. […] Tout à coup l’objet change, ce n’est plus une conjuration, c’est une intrigue amoureuse ; sans à propos, sans vraisemblance, on met gratuitement sur le compte de l’amour les crimes de l’ambition ; et M. de Voltaire se résout à s’écarter d’une histoire connue en faveur d’une épisode qui détruit le fonds de son sujet.

198. (1758) Lettre de J. J. Rousseau à M. D’Alembert « PRÉFACE » pp. -

Comme tout le monde n’a pas sous les yeux l’Encyclopédie, je vais transcrire ici de l’article Genève le passage qui m’a mis la plume à la main. […] Le préjugé barbare contre la profession de Comédien, l’espèce d’avilissement où nous avons mis ces hommes si nécessaires au progrès et au soutien des arts, est certainement une des principales causes qui contribuent au dérèglement que nous leur reprochons ; ils cherchent à se dédommager par les plaisirs, de l’estime que leur état ne peut obtenir. […] Tant de choses ont concouru à le mettre au-dessous du médiocre où je pouvais autrefois atteindre, que je m’étonne qu’il ne soit pas pire encore.

199. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Seconde partie « Causes de la décadence du goût sur le théatre. — Chapitre XXIV. Le sentiment, juge plus sûr que le goût. Celui-ci préféré au premier. Pourquoi ? Amour du Théatre, funestes à ses progrès. Honneurs avilis en devenant trop communs. Cabales. Leurs effets, & les moyens qu’on employe pour les éluder.  » pp. 129-150

Après avoir mis aux pieds de leurs Trônes, ce tribut d’admiration & de respect, rentrons dans notre sphère. […] Comment pouvons-nous voir, sans rougir, ces ruses qu’ils sont contraints de mettre en usage pour échapper aux traits de notre malignité ? […] Un bruit terrible les arrête plusieurs minutes : ils oublient l’esprit de leur rôle : ils sortent de l’état où ils s’étoient mis avant d’arriver : ils n’y rentrent qu’avec effort, & souvent aux dépens de la vérité & de l’illusion. […] Ce Chapitre, égaré pendant le cours de l’impression de cet Ouvrage, ne s’est retrouvé que quand il n’étoit plus tems de le mettre à sa véritable place, & on a été obligé de l’imprimer le dernier.

200. (1825) Encore des comédiens et du clergé « CHAPITRE IX. Des entreprises de la puissance spirituelle ecclésiastique, contre la puissance temporelle séculière. » pp. 149-173

Cette société à jamais déshonorée par l’immoralité de ses principes et par la doctrine du régicide qu’elle prêcha audacieusement en bravant les tribunaux, et que malheureusement elle ne mit que trop souvent en pratique, est atteinte de la manie de vouloir à tout prix se donner la mission de régenter les gouvernements et d’asservir les ministres d’Etat auxquels elle s’arroge insolemment le droit d’accorder sa protection. […] C’est alors que sous prétexte de faire observer par contrainte, les pratiques religieuses, ils mettraient en action leur principe favori, que la religion ne peut se soutenir que par la force et la terreur, tandis qu’elle ne doit obtenir de succès, que par la persuasion, la douceur, l’humilité et la charité. […] Il ne cesse d’annoncer aux ignorants, et de faire accroire aux imbéciles que les prêtres, étant les ministres de la Divinité, sont au-dessus des autres hommes, que tous les princes temporels doivent s’humilier devant la puissance spirituelle et temporelle du pape, et qu’ils s’exposent aux plus grands malheurs en lui désobéissant, parce que le sacerdoce, disent-ils, a reçu de Dieu le pouvoir de déposer les rois sur terre, et de mettre sur les trônes de véritables chrétiens. […] Il prétendra que j’ai voulu exciter la haine contre les bons prêtres, néanmoins si respectables à mes yeux, lorsqu’ils mettent en pratique la charité, cette vertu divine qui est au-dessus de la foi, ainsi que l’a dit saint Paul (voyez ci-dessus page 17). De quelque manière que M. de Sénancourt et ses semblables, jugent à propos de m’attaquer, je proteste avec toute la force dont je suis capable, contre une calomnie aussi jésuitique et à laquelle très certainement je succomberais, non seulement devant des tribunaux d’inquisition présidés par des jésuites, mais encore par-devant tout tribunal chargé de mettre à exécution des lois de tendance ; heureusement je puis placer toute ma confiance dans la sagesse de notre gouvernement, et dans la surveillance éclairée de notre illustre magistrature.

201. (1760) Critique d’un livre contre les spectacles « REMARQUES. SUR LE LIVRE DE J.J. ROUSSEAU, CONTRE LES SPECTACLES. » pp. 21-65

« Qu’on mette pour voir sur la Scène Française un homme droit et vertueux, mais simple et grossier, sans amour, sans galanterie, et qui ne fasse pas de belles phrases ; [...] j’aurai tort si l’on réussit. […] « Dieu veuille qu’on n’y mette pas des lanternes, (chez les Montagnons.) […] Qu’on la mette vis-à-vis des principes que j’ai rappelés sur les conditions d’une bonne Pièce. […] Rousseau met ces Montagnons, dont il a oublié les mœurs, la société et le caractère, au-dessus de tous les peuples de la terre. […] La pudeur ou timidité naturelle, qui naît de la délicatesse des organes, n’est point trouvée ridicule ; mais peut-être la loi qui la met en précepte, qui en donne des règles, et qui honore et déshonore les femmes pour le même acte.

202. (1603) La première atteinte contre ceux qui accusent les comédies « A Monseigneur de Nemours » pp. -

Puis laissant la Mathématique, Pour repos tu prends la Musique, Et redonnant la vie aux Airs, Aussitôt que tu t’y récrée, Le ton de ta voix ensucrée Met les Sirènes dans les Airs. […] Heureux fils d’une sage mère, Portrait des prouesses d’un père, Dont tu secondes la valeur, Pour louer tant d’Astres ensemble ; Au peintre sans art je ressemble, Qui met l’ombre au lieu de couleur.

203. (1576) De la Censure. pp. 611-613

 » Si on dit que les Grecs, et Romains permettaient les jeux : je réponds que c'était pour une superstition qu'ils avaient à leurs Dieux. mais les plus sages les ont toujours blâmés. car combien que la Tragédie a je ne sais quoi de plus Héroïque, et qui moins effémine les cœurs des hommes, si est-ce toutesfois que Solon ayant vu jouer une tragédie de Thespis, le trouva fort mauvais : de quoi s'excusant Thespis disait, que ce n'était que jeu, Non, dit Solon, mais le jeu tourne en chose sérieuse, beaucoup plus eût-il blâmé les comédies, qui étaient encore inconnues. et maintenant on met toujours à la fin des tragédies, (comme une poison ès viandes) la farce, ou comédie. […] [NDE] débiffer : Gâter, mettre en désordre (Dictionnaire de l'Académie).

204. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre XVII. Accidents arrivés dans les spectacles. » pp. 150-153

On célébrait le jour anniversaire de la conspiration des poudres : pendant qu’on jouait la comédie dans la salle du bal, le feu prit à de la poudre qu’un épicier avait imprudemment mise sous le théâtre. L’explosion fit sauter le plancher et une chambre qui était au-dessus, et mit le feu à la couverture, qui, en tombant, renversa une partie des murs et embrasa le théâtre ; la plupart des spectateurs sautèrent en l’air avec l’édifice, ou furent ensevelis sous ses ruines embrasées.

205. (1766) Réflexions sur le théâtre, vol 5 « Réflexions sur le théâtre, vol 5 — REFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE CINQUIÈME. — CHAPITRE VIII. Comédie du Tartuffe. » pp. 161-179

C’est une trahison tramée par un tissu de mensonges & un acquiescement si mulé à toute la morale scélérate qu’on met dans la bouche de l’Imposteur, ce qui n’est pas moins un renoncement à sa religion qu’à son devoir. […] tous ceux que Moliere met sur la scène dans ses autres pieces, sont-ils des dévots ? […] (Ce n’est qu’ici, qu’enfin rougissant de ces honteux excès, on met en note, c’est un scélérat qui parle. […] Qu’elle est peu intraitable quand elle est si peu émue sur la perte d’un trésor si fragile & si précieux, & qu’en souffrant, d’un air aisé & en riant, les plus coupables attentats, elle enhardit, elle invite, elle fait tout espérer, & se met soi-même dans le plus grand danger ! […] Mais n’en voilà que trop sur une piece monstrueuse dans l’ordre des bonnes mœurs, où on semble avoir voulu ramasser & mettre sous les yeux tout ce qui est capable de les corrompre.

206. (1825) Encore des comédiens et du clergé « CHAPITRE II. Réflexions sur le titre de l’ouvrage intitulé : Des Comédiens et du Clergé, et sur les charlataneries littéraires, politiques et religieuses. » pp. 52-86

Le pire d’une position aussi humiliante, c’est que dans tous les gouvernements où les jésuites dominent, les ministres d’état y sont réduits à la dure nécessité de mettre en pratique les principes de corruption, qui sont si bien établis dans les constitutions, les règlements et les instructions publiques et secrètes de l’ordre monastico-politique des disciples de Loyola ! […] Cette évaluation ne paraîtra pas exagérée, si indépendamment de plus de trente millions par an, payés par le gouvernement, on met en ligne de compte tout ce que les évêques et les prêtres dans les départements, reçoivent des communes et des particuliers, pour leurs établissements et pour l’administration des sacrements, sans compter les donations testamentaires qui se multiplient progressivement toutes les années. […] Voudrait-on rouvrir cette source d’abus qui mit de si grands biens à la disposition des prêtres, et qui fit jadis tant de mal à l’Etat et à la religion ? […] Doué de cette forte volonté, et après avoir entrepris de grandes choses avec quelques succès, il n’a plus mis de bornes à son ambition, et il voulut entreprendre des choses encore plus grandes. […] Les plus grands ennemis des souverains sont les adulateurs et les prêtres qui leur souhaitent le pouvoir absolu, qui leur conseillent de se mettre au-dessus des lois et de déchirer les chartes ou les constitutions qui sont les pactes tutélaires des droits du souverain et du peuple.

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