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46. (1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « XI. Si on a raison d’alléguer les lois en faveur de la comédie. » pp. 46-48

 : sans songer que saint Thomas, dont il abuse, a décidé que les lois humaines ne sont pas tenues à réprimer tous les maux, mais seulement ceux qui attaquent directement la sociétéI. 2. q. 39. 3. ad. 3. q. 96. 2. c. […] n les défenseurs des spectacles «  criaient que les renverser c’était détruire les lois » : mais ce Père sans s’en émouvoir disait au contraire, que l’esprit des lois était contraire aux théâtres : nous avons maintenant à leur opposer quelque chose de plus fort, puisqu’il y a tant de décrets publics contre la comédie que d’autres que moi ont rapportés : si la coutume l’emporte, si l’abus prévaut, ce qu’on en pourra conclure, c’est tout au plus que la comédie doit être rangée parmi les maux dont un célèbre historieno a dit qu’on les défend toujours, et qu’on les a toujours. […] p  : pendant que les lois du siècle qui ne peuvent pas déraciner tous les maux permettaient l’usure et le divorce, ces grands hommes disaient hautement que si le monde permettait ces crimes, ils n’en étaient pas moins réprouvés par la loi de l’Evangile : que l’usure qu’on appelait légitime, parce qu’elle était autorisée par les lois romaines, ne l’était pas selon celles de Jésus-Christ, et que les lois de la cité sainte et celles du monde étaient différentes.

47. (1694) Réfutation d’un écrit favorisant la Comédie pp. 1-88

C’est un scandale actif de la part des Comédiens, et de tous ceux qui entraînent leur prochain ; parce qu’ils contribuent au mal, et qu’ils mettent leur frère en danger. […] Il devrait bien plutôt les avertir du danger évident où ils sont que Dieu n’alloue jamais aucune des œuvres sur lesquelles ils se confient, et leur répéter ces paroles qui suivent immediatement les reproches ci-dessus : Lavez-vous, soyez purs, ôtez le mal de vos pensées de devant mes yeux, cessez de mal faire, et apprenez à bien faire. […] Un moment funeste ne peut-il pas rallumer en vous ce feu peut-être mal éteint…. […] Le mal du jeu de hasard est moins contagieux : on n’y voit point ordinairement s’assembler les jeunes filles et les jeunes garçons, qui s’y ennuient beaucoup. […] Voila pourquoi il est à présent moins d’usage dans l’Église de s’élever contre ces sortes de jeux, que contre la Comédie, qui est du nombre de ces maux qui ont d’abord une difformité suffisante pour être condamnée.

48. (1752) Essai sur la comédie nouvelle « ESSAI SUR LA COMEDIE MODERNE. » pp. 1-160

Elles causeront d’autant plus de mal, qu’on se persuadera qu’elles en ont moins, et qu’on s’y exposera avec moins de crainte et de scrupule. […] Le mal serait toujours aussi grand. […] Le meilleur Maître, s’il enseigne le mal, est le pire de tous les Maîtres. […] Que le comble des maux, est que le mal ose se revêtir de tous les caractères du bien. […] [NDE] draper = dire beaucoup de mal de quelqu'un (Littré).

49. (1689) Le Missionnaire de l’Oratoire « [FRONTISPICE] — Chapitre » pp. 15-18

) Il y a donc du mal à se divertir ? […] d’où vient qu’un tel casuiste m’a dit que je ne fais point de mal, et que le bal et la comédie sont des actions indifférentes ? […] Donc ce casuiste ne peut, sans une grande imprudence et une horrible témérité, vous dire que vous ne ferez pas mal d’aller à ce jeu, au bal ou à la danse, s’il ne connaît parfaitement toutes les circonstances du lieu, du temps, de la manière et des personnes qui s’y rencontrent, et principalement s’il ne connaît certainement la posture et la disposition de votre cœur, qui est connu de Dieu seul : Inscrutabile cor hominis, et quis cognoscet illud ? […] Ce casuiste vous peut-il assurer que quelque jeune fille ne dira point en soi-même : Une telle dame qui est d’âge, qui est dévote et qui communie souvent, va bien au bal ; il n’y a donc point de mal : votre exemple lui donne la hardiesse d’y aller, et quelque jeune homme l’y convoitera.

50. (1689) Le Missionnaire de l’Oratoire « [FRONTISPICE] — Chapitre » pp. 7-8

Augustin, parlant des filles qui perdent le temps des jours de fêtes en folâtreries et en danses impudiques, dit qu’elles ne feraient pas tant de mal si elles filaient leurs quenouilles ; ni l’un ni l’autre ne vaut rien, mais la danse est un plus grand mal. […] Augustin, et par conséquent plus voisins des apôtres, et ils jugeaient ces divertissements si contraires au christianisme, qu’ils ont fait des livres entiers (Tertul. de Spectaculis, cap. 27.) pour les réprouver et condamner ; et pour montrer qu’ils ne parlaient pas seulement contre les spectacles des païens, où se commettaient des homicides et des impudicités publiques, Tertullien apporte l’objection que vous avez coutume de faire : On n’y fait point de mal, on n’y dit rien qui ne soit honnête, et il répond : Celui qui veut empoisonner son ennemi, ne détrempe pas le poison dans du fiel ou dans du vin d’absinthe, mais dans un bouillon bien assaisonné ou dans du vin délicieux.

51. (1665) Réponse aux observations touchant Le Festin de Pierre de M. de Molière « Chapitre » pp. 3-32

Mais ne m’avouera-t-on point qu’il s’y prend bien mal pour nous persuader que la véritable dévotion le fait agir, lorsqu’il traite Monsieur de Molière de démon incarné, parce qu’il a fait des pièces galantes et qu’il n’emploie pas ce beau talent que la nature lui a donné à traduire la vie des saints Pères ? […] Elle est, dit-il, tout à fait scandaleuse et diabolique ; on y voit un enfant mal élevé qui réplique à son père, une religieuse qui sort de son couvent, et à la fin ce n’est qu’une raillerie que le foudre qui tombe sur ce débauché. […] Et puisqu’il nous dit qu’il voudrait que tout le monde fût heureux, ne se contrarierait-il point en nous laissant une pente si naturelle pour le mal, s’il ne nous réservait une miséricorde plus grande que notre esprit n’est faible et léger ? […] Je ne prétends point ici prouver que les vers de Monsieur de Molière sont pour les jeunes gens des instructions paternelles à la vertu, mais je veux vous montrer clairement que les esprits les plus mal tournés ne sauraient trouver la moindre apparence de vice. […] Nous sommes dans un siècle où les hommes se portent assez d’eux-mêmes au mal, sans avoir besoin qu’on leur explique nettement ce qui peut en avoir quelque apparence.

52. (1777) Des divertissements du Carnaval « Des divertissements du Carnaval. » pp. 92-109

Mais quel mal y a-t-il, dit-on, de se divertir en carnaval ? […] On demande quel mal il y a de se divertir en carnaval ; c’est-à-dire, de renouveler au milieu du Christianisme la plupart des fêtes des Païens, de déshonorer la profession de Chrétien par toutes sortes de plaisirs mondains, et d’en faire même trophée. Quel mal il y a de se déguiser pour n’avoir plus honte de rien, et pour s’exposer à tous les dangers sans crainte. […] Et l’on demande après cela quel mal il y a dans tous ces plaisirs du carnaval ! Et quel mal n’y a-t-il pas ?

53. (1774) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre seizieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre III. De l’Éducation. » pp. 60-92

Le mal est fait quand le remede arrive, on en sort tout plein de l’amour & le cœur corrompu. […] En voyant la beauté, l’immodestie des Actrices, entendant les discours libres, en fuit-il moins un mal actuel, parce que Valere va se marier ? […] L’épreuve est trop dangereuse, il augmenteroit le mal & le rendroit incurable. […] Il eût mieux fait encore de conseiller au Prince d’arracher la racine du mal en détruisant le théatre. […] Tout cela même s’enseigne mal ; le théatre ne peut enseigner que ce qu’il sait & ce qu’il pratique.

54. (1771) Sermons sur l’Avent pp. 103-172

vous augmenterez vos lumiéres, & vous éviterez avec plus de zele le mal que vous connoîtrez mieux. […] Mais à quels maux ne vous y exposez-vous pas ? […] La Religion, que vous professez, vous engage indispensablement à fuir le mal & à faire le bien : vous fuyez le bien, & vous courez au mal, vous renversez donc toutes ses maximes. […] presserez-vous encore de vous dire précisément le mal qu’il y a dans les spectacles ? […] Et ne nous faites pas toujours cette mauvaise réponse, que vous en sortez sans y avoir reçû la moindre impression de mal.

55. (1710) Instructions sur divers sujets de morale « INSTRUCTION II. Sur les Spectacles. — CHAPITRE I. Que les Spectacles sont des plaisirs défendus. Preuves de cette défense tirées de l'Ecriture sainte, des Pères de l'Eglise, des Conciles, des Rituels, et des Lois civiles. » pp. 43-53

C'est une preuve sensible que leur conscience dément leurs fausses lumières, et qu'ils sont eux-mêmes convaincus du mal qu'il y a dans la comédie. » Essais de mor[ale]. […] L'idolâtrie n'était pas le seul mal que les Pères condamnaient dans les spectacles. […] Si elles les tolèrent, c'est qu'elles ne sont pas établies pour remédier à tous les maux, mais seulement à ceux qui attaquent directement la Société. Cette tolérance n'empêche pas qu'on ne doive dire que les maux que le monde permet, ne laissent pas d'être condamnés par l'Evangile.

56. (1694) Sentiments de l’Eglise et des Pères « CHAPITRE IV. Deux conséquences que les Pères de l’Eglise ont tirées des principes qui ont été établis ci-devant. » pp. 82-88

« Ne dederis impio, prohibe panes illi dari » ; car vous trouverez un double mal dans tout le bien que vous lui ferez, parce que le Très-haut hait les pécheurs, et qu’il exerce sa vengeance sur les méchants. […] Augustin soutient que c’est faire un péché énorme, que de donner quelque chose aux Comédiens, parce que c’est louer et entretenir le pécheur dans les désirs criminels de son âme, et donner des bénédictions à celui qui fait mal. […] Les cœurs des hommes sont si pervertis et si mal tournés, dit encore excellemment saint Augustin,S. […] Or la raison souffre-t-elle qu’on fasse son divertissement du péché des autres, qu’on les porte à offenser Dieu, et qu’on se rende complice du mal qu’ils font ?

57. (1707) Réflexions chrétiennes « Réfléxions chrétiennes, sur divers sujets. Où il est Traité. I. De la Sécurité. II. Du bien et du mal qu’il y a dans l’empressement avec lequel on recherche les Consolations. III. De l’usage que nous devons faire de notre temps. IV. Du bon et mauvais usage des Conversations. Par JEAN LA PLACETTE, Pasteur de l’Eglise de Copenhague. A AMSTERDAM, Chez PIERRE BRUNEL, Marchand. Libraire sur le Dam, à la Bible d’Or. M DCCVII — Chapitre XII. Du temps que l’on perd à la Comedie, et aux autres spectacles de même nature. » pp. 269-279

Mais ce qu’on le voit repurgé des grossieretés qu’on y remarquoit autrefois fait qu’on y va sans scrupule, et qu’on reçoit tout sans distinction, en sorte que les semences du mal, qui y sont répanduës, penetrent jusques dans le fond de l’ame, et trouvent le moyen d’y germer, et d’y fructifier. […] J’avoue que cette lecture n’emporte pas autant de temps, et ne fait pas une impression aussi vive et aussi profonde que la representation ; Mais on ne peut nier qu’elle ne fasse quelque chose d’assés approchant, et l’on sait d’ailleurs que le mal est toûjours mal, et merite toûjours d’être évité, en quelque quantité qu’il paroisse. Je croi donc que c’est mal employer le temps que de le consumer dans cette lecture.

58. (1758) Lettre de J. J. Rousseau à M. D’Alembert « PRÉFACE » pp. -

Voilà le sujet de mes alarmes, voilà le mal que je voudrais prévenir. […] Loin des vices qui nous irritent, on en parle avec moins d’indignation ; loin des maux qui nous touchent, le cœur en est moins ému. […] D’ailleurs, le mal qu’ils m’ont fait à moi-même m’ôte le droit d’en dire d’eux. […] Les maux du corps épuisent l’âme : à force de souffrir, elle perd son ressort.

59. (1684) Sixiéme discours. Des Comedies [Discours sur les sujets les plus ordinaires du monde. Premiere partie] « Sixiéme Discours. Des Comedies. » pp. 279-325

Et comme cette matiere estant publique ne regarde pas moins les peres & les meres, les Puissances ecclesiastiques & seculieres, que les particuliers : Comme les Pieces de theatre sont ou entierement criminelles, ou en partie innocentes, en partie criminelles, & qu’il n’y a point d’Auteur qui n’en puisse composer de criminelles, voyons le zele avec lequel il faut fuïr & interdire les criminelles, reformer celles qui sont en partie innocentes, en partie criminelles ; empescher de paroistre celles qui peuvent estre criminelles ; ce sont les moyens d’arrester le mal qu’elles sont ou par elles-mesmes, ou par quelqu’une de leurs parties ; ce sont les moyens de prévenir le mal que les Pieces nouvelles pourroient faire. […] Ils composent leurs pieces avec tant d’artifice, que les plus méchans y trouvent suffisamment dequoy se contenter, & que les bons, à moins d’estre bien éclairez, ont de la peine à y découvrir ce qui merite la censure, & sont presque contraints de suspendre leur jugement, & de dire comme ces anciens Senateurs, la chose n’est pas constante : Non liquet, nous ne pouvons pas justifier ces Pieces comme innocentes, parce qu’elles prennent le party du vice en apparence ; on ne peut pas les condamner comme mauvaises, parce qu’elles semblent soûtenir & relever la vertu : elles se mettent à couvert de la censure des bons par cette apparence d’innocence, elles évitent le mépris des méchans par cette apparence de malice : l’apparence du mal couvre l’apparence de l’innocence, celle de l’innocence couvre celle du mal, ce mélange continuel ne laisse pas le temps de reconnoistre lequel l’emporte ou du bien ou du mal ; & ce venin, comme celuy de Pelage, ne s’apperçoit qu’aprés qu’il a eu le temps d’agir avec toute sa force, & qu’il a tout perdu. […] Ces personnes n’ont pas toûjours la mesme apprehension pour des Pieces déguisées, & où le mal ne paroist pas assez pour les diffamer. […] Il ne peut pardonner, parce qu’il ne peut changer la resolution qu’il a prise de les punir ; il ne peut pardonner, parce qu’il n’a promis de pardonner qu’aux penitens, & qu’il est presque impossible que ces coupables fassent penitence d’un peché qu’ils ne remarquent pas ; il ne peut pardonner, parce que les maux qui procedent de ces déguisemens, les maux multipliez par cette mollesse, & par cette complaisance, ne sont presque jamais reparez, jamais ils ne sont égalez par ce qu’on prend pour une veritable penitence ? […] Prévenir le mal qui peut arriver des Comedies.

60. (1819) La Criticomanie, (scénique), dernière cause de la décadence de la religion et des mœurs. Tome I « Préambule » pp. -

Fort de la pureté de mes intentions et de la certitude que mon opinion nouvelle, en cas d’erreur, et du reproche imminent d’avoir négligé ce précepte : Sumite materiam vestris qui scribitis æquam viribus , ne peut causer aucun mal, et pourrait encore, au contraire, donner quelques indications neuves et faire naître des idées utiles à d’autres écrivains plus exercés, qui considéreraient ce sujet sous de nouveaux points de vue ; j’aurai le courage d’écrire, de soumettre à la discussion la plus solennelle, et au jugement des hommes les mieux éclairés ce que je crois avoir remarqué de plus, en continuant de chercher de bonne foi, et sans d’autre passion que celle du bonheur commun, comment il s’est fait que, malgré toutes nos lumières et nos belles institutions, malgré nos immenses bibliothèques renfermant tant de plans et de systèmes, ou de bons livres destinés à nous améliorer, comme ceux qui paraissent encore tous les jours sous toutes les formes ; et malgré les exemples, les efforts successifs et continuels des orateurs les plus éloquents et les plus vertueux, et des sages les plus instruits, les plus persuasifs, secondés par les plus vigoureuses satires et censures ou critiques vivantes de nos personnes, de nos défauts et de nos vices, nous soyons toujours tombés en effet de plus en plus dans le relâchement, et soyons arrivés sitôt au degré de cette effrayante dissolution de mœurs dont un parti accuse aujourd’hui avec si peu de discernement ces moyens mêmes de réformation. Je vais peut-être encore une fois être moi-même accusé de cynisme et de morosité ; vu que je ne dissimule point le mal, ce que je fais, pour mieux faire sentir l’urgence des remèdes que je propose. […] Rien ne peut faire mieux sentir que cette expérience habituelle, l’étendre du mal, et la difficulté du retour au bien. […] C’est d’après ces documents certains, dont le principal est le fait incontestable que l’irréligion et l’immoralité ont commencé à croître et s’étendre plus sensiblement chez nous, comme chez les autres, à dater de l’époque des plus fortes des leçons satiriques données en leur faveur, sous la forme dramatique ; c’est d’après ces documents, dis-je, qui, abstraction faite de tout ce qui a été dit pour et contre sur cette question, m’ont mis à portée de comparer les temps, d’apprécier moi-même les causes qui ont agi sur les mœurs aux différentes époques, par le rapprochement des effets, que j’ose avancer et entreprendre de prouver à mon tour et à ma manière, sans prétendre le faire mieux que mes prédécesseurs, mais, pour appuyer leur jugement, que l’amalgame ou le concours irrégulier de la joyeuse et attirante instruction théâtrale avec le sérieux, l’austère et premier mode d’instruction et de réformation, a été funeste à celui-ci ; qu’il l’a d’abord fait négliger et ensuite étouffé ou paralysé presque entièrement en le suppléant fort mal, en le remplaçant comme un étourdi spirituel et malin remplacerait un patriarche grave et prudent. […] Ces répétitions d’ailleurs sont dûment autorisées par la continuation du mal qui va toujours en augmentant, et ne peut diminuer qu’à proportion que le nombre des hommes qui en sont véritablement effrayés, et cherchent de concert à l’arrêter, approchera du nombre de ceux qui se plaisent et s’accordent à le commettre.

61. (1768) Réflexions sur le théâtre, vol 10 « Réflexions sur le théâtre, vol 10 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE DIXIEME. — CHAPITRE VI. De l’Iconomanie théatrale. » pp. 141-158

Iconomanie est donc la passion pour les images, comme Bibliomanie, passion pour les livres ; Scénomanie, passion pour le théâtre ; Métromanie, passion pour les vers ; Musicomanie, goût excessif pour la musique ; Anglomanie, fureur pour les idées, les manieres angloises : Malicomanie, fureur de dire du mal, idée juste d’un calomniateur, définition juste que fait de lui-même un libelle diffamatoire. […] Cette secte, pendant près de deux siécles, a causé les plus grands maux. Guerres, incendies, martyrs sans nombre, destruction des Eglises, abolition des Communautés, déposition des Evêques, translation de l’Empire, Conciliabules pour l’erreur, mépris des Conciles Œcuméniques ; il n’est point d’espece de mal qu’ils n’ayent faits. […] Si quelque sauvage, au fonds des bois, a pensé différemment, c’est un ignorant qu’il faut instruire, un malade qu’il faut guérir, ou un insensé qu’on abandonne ; mais ce n’est pas un mal universel, pour lequel il faille abolir toutes les images ; il est dangéreux qu’on n’en abuse, & qu’on ne tombe dans l’idolâtrie. […] L’Iconoclaste qui détruit les saintes images, à raison du danger qu’y trouvent les simples ; combien doit-il anathématiser les images indécentes, infiniment plus dangéreuses pour tout le monde, & le Catholique qui ne conserve les images de piété, qu’à raison du bien qu’elles font ; épargneroit-il les licencieuses qui ne sont que du mal ?

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