C. nous avons crû que pour les engager à abandonner les Spectacles, il n’y avoit point de moyen plus sûr que de leur faire voir l’opposition décidée entre les maximes de la Comédie & celles de leur Libérateur ; qu’elle réveille, nourrit, & porte à la révolte des passions qu’il est venu dompter.
On a senti la nécessité, non pas de penser mieux qu’un tel homme, cela était indifférent en ce cas, ou n’était pas l’affaire la plus importante ; mais de tenir une conduite opposée à la sienne, de ne pas marcher sur ses traces pour ne pas être soupçonné de vouloir arriver au même but, de ne rien dire, de ne rien faire qui ressemblât à ce qu’il avait dit, à ce qu’il avait fait pour attirer la confiance et tromper ; donc il a fallu abandonner ou négliger comme j’ai montré qu’on avait abandonné ou négligé les exercices pieux, ou les devoirs de la religion, les louanges de ses préceptes, et la pratique des autres vertus que le Tartufe en jugement observait si scrupuleusement pendant le temps qu’il méditait de faire des dupes, et pour mieux y parvenir ; donc cette satire, qui prête tant de vraisemblance au travestissement des plus belles actions d’un homme de bien, en indices d’un méchant qui médite le mal, devait nécessairement produire les désordres qui existent et que je lui impute en grande partie. On pourra nier cette conséquence et dire qu’il y avait un milieu entre s’acquitter de tous les devoirs que la religion et les autres vertus prescrivent, et s’abandonner aux désordres de la dernière école, se vautrer dans la fange du vice ; qu’il était possible de garder la pureté de son âme, de rester attaché de cœur aux principes, à la sagesse, à la piété, aux mœurs ; qu’il suffisait, pour éviter la persécution, de s’abstenir des vertus pratiques, en s’isolant des deux partis, en fuyant également les disciples des écoles qui étaient aux prises, et leurs errements, ou leurs exercices et habitudes, etc.
Vous avez abandonné l’Eglise votre mère, méprisé les Prophètes, outragé votre Dieu, assisté aux danses du démon, écouté les plus mauvaises paroles, perdu un temps précieux, sans en rapporter aucun fruit spirituel ni temporel ; vous êtes déchiré de remords, couvert de honte, abattu de tristesse. […] Si une femme négligemment parée, vue par hasard dans la rue, blesse mortellement ceux qui la regardent avec curiosité, que sera-ce de contempler les heures entieres au spectacle, de propos délibéré, & avec le plus grand goût, jusqu’à abandonner l’Eglise pour y courir, ces infames Actrices, communément belles, & toujours le plus dangereusement parées ? […] Vous leur appartenez autant qu’elles vous appartiennent, & vous leur faites le sanglant affront de vous abandonner à des Actrices.
Du reste, je vous abandonne le Comédien et la plupart de nos Poètes, et même Monsieur Racine en plusieurs de ses Pièces.
Si, malgré ce petit ouvrage, que l’on peut regarder, ainsi que tous ceux qui l’ont précédé, comme une nouvelle promulgation de la loi qui les condamne, comme un nouvel anathème et une nouvelle malédiction lancée contre eux, les loges et le parterre continuent à regorger de spectateurs, toujours est-il vrai que les principes qui y sont développés engageront quelques personnes à abandonner la résolution qu’elles avaient formée d’y aller, feront prendre à quelques autres la résolution de ne jamais y aller, en en éloigneront d’autres encore qui avaient contracté l’habitude d’y aller.
Mais notre Auteur fait tout le contraire, sans se mettre en peine du prodigieux nombre d’âmes dont il va causer la perte : Il abandonne le sentiment de tous les Conciles et de tous les Pères, pour se ranger du côté de quelques Scholastiques, qui se sont exprimés en apparence, comme s’ils tenaient la mauvaise cause qu’il défend. […] Entrecoupez tout cela de Musique, d’Instruments, de Danse, et de voix qui invitent tout le monde à suivre l’amour, à s’abandonner à la tendresse, et à s’aimer jusqu’au tombeau. […] Je laisse à part toutes ces autres passions de colères, de vengeance, d’ambition, d’amour propre qui paraissent dans leur excès avec honneur sur le Théâtre, et qui par ce moyen effacent dans les esprits ce caractère d’horreur que Dieu y a attaché, pour empêcher que les hommes ne s’y abandonnent. […] Celui qui y entre a dessein d’en goûter le plaisir tout entier, il y abandonne son âme : et au lieu qu’on voit souvent se retirer du jeu par prudence, ceux qui s’apperçoivent qu’ils sont prêts d’y faire mal leurs affaires ; on ne voit point sortir de la Comédie ceux qui commencent à en goûter le plaisir fatal. […] Il y a même plusieurs maux extérieurs, dans le détail desquels elle ne juge pas toujours à propos d’entrer, et qu’elle tolère pour empêcher l’homme dont elle ne guérit pas le cœur, de s’abandonner à de plus grands dérèglements.
De là vient qu’ils s’élèvent contre ceux qui leur représentent leurs vices et leurs passions injustes, ils les fuient, ils les évitent, et ne les peuvent supporter de peur que la vérité connue, ne les force d’abandonner ce qu’ils aiment. […] Mais ce qui vous oblige, malgré vous, d’abandonner ce malheureux divertissement, c’est une foule et un nombre presque infini de péchés, qui composent une longue chaine, dont on a de la peine à voir la fin. […] Comment voulez-vous que ces personnes, qui la composent, qui ont la même passion infiniment plus vive et plus ardente, dont le corps est nourri si délicatement, vêtu avec tant de mollesse, et de luxe, assiégées de jeunes gens, qui abandonnent tous leur sens, pour en boire le poison avec plus de liberté, qui jettent mille regards malhonnêtes, leurs yeux étant comme des canaux voluptueux par où passe l’amour, et comme les ambassadeurs de cette infâme passion, qui ont des entretiens pleins de tendresse, et souvent pleins de dissolutions : quand il ne se passerait point autre chose, pouvez-vous dire en bonne foi, que les uns et les autres sont chastes ? […] Vous voudriez bien abandonner le Sauveur, lorsqu’il va mourir pour vous, et voudriez-vous bien faire de cette vie, qui est une vallée de misères, un paradis de délices, où Jésus-Christ n’a trouvé que des amertumes, des peines et des douleurs.
Gresset vient d’abandonner le Théâtre ; il n’est pas douteux qu’il a bien fait, s’il a resolu de consacrer ses talents à des Ouvrages tous chrétiens. Mais s’il est vrai comme il est aisé de s’en convaincre, que le Théâtre peut faire d’honnêtes gens, peut-il en conscience, s’il ne se sent pas en état de remplir une carrière plus sublime, peut-il dis-je abandonner celle dans laquelle il était entré avec tant de succès ? […] J’aurais été trop heureux si le goût que j’avais pris pour les lettres et qu’il m’avait inspiré lui même m’eut abandonné en même temps que je me résignais à ses vues. […] Il fera bien, je le répète : on doit préferer le mieux au bien ; mais on ne doit pas abandonner le bien quand on n’est pas capable du mieux. […] Quel doit donc être l’état du cœur d’un homme qui aspire au nœud sacré de l’hymen, sinon une disposition prochaine à tout abandonner pour s’attacher uniquement à l’objet auquel il se destine ?
Mais si ce même homme est raillé sur ce défaut, non-seulement il n’en conviendra plus, mais il cherchera à perdre son impertinent Censeur ; d’où je conclus que la raillerie ne fait qu’humilier sans rendre meilleur, ou ce qui revient au même, qu’elle peut bien engager les hommes à déguiser leurs défauts, mais non pas à les abandonner. […] A l’égard des vices dont les suites peuvent être funestes à la Société, la Comédie doit se donner bien de garde d’y toucher, parce qu’elle les rendroit odieux, & qu’elle pourroit persuader aux hommes de les abandonner.
On l’abandonne aux gens de cabinet. […] Cette adresse du Poëte la dispense de répondre précisément sur le choix que ces Princes la pressent de faire de l’un d’eux, & amène cette belle Scène, où ces freres disputent de générosité, s’abandonnent réciproquement le droit d’aînesse & le Trône.
En tout cas, le Père Massillonf ne m’abandonne pas, puisqu’il est d’avis contraire au vôtre, à l’égard du Poème Dramatique ; j’ose glisser mon sentiment à la faveur du sien. […] Je vous sais bon gré de m’abandonner le Comédien et nos Poètes modernes, et même M.
Oüy M. ils violent premierement le vœu qu’ils ont fait de renoncer au diable, puis qu’ils s’engagent à son service, & abandonnent celuy de Dieu, qui est un crime d’infidelité, de desertion & de perfidie, c’est le solide raisonnement dont se sert Tertullien pour détourner les premiers Chrétiens des spectacles des Gentils, & qu’il tire de la discipline militaire. […] , comme un soldat est censé deserteur de milice, perfide à l’état, & traître à son Prince, qui passe dans le camp des ennemis, aprés avoir quitté son baudrier & ses armes, aprés avoir abandonné son drapeau & son étendart, & aprés avoit violé le serment de fidelité qu’il avoit prêté à son Capitaine ; de même le Chrétien est coupable d’une pareille trahison qui va à la comedie : car si l’Eglise est semblable à une armée rangée en bataille, ut castrorum acies ordinataCantic. 6. […] , je quite & j’abandonne derechef ce monde ; pour nous apprendre qu’il a abandonné deux fois le monde ; la premiere fois à sa naissance ; & la seconde fois à sa mort ; dés le moment de sa naissance il commença de quiter le monde en se separant de luy, de ses maximes & de ses coûtumes, par la saintete de sa vie, & par un dégagement de cœur & d’affection, & iterum relinquo, & à sa mort il se separa tout à fait de luy, de sa presence visible & corporelle, & par un abandon de cœur & d’esprit ; & afin d’inspirer son esprit à ses Apôtres & à ses élûs, & les obliger à suivre son exemple, voicy la belle leçon qu’il leur fit avant que de mourir. […] , a renoncé à la foy, & est pire qu’un infidele ; n’avois-je pas aussi raison de dire tantôt, selon la pensée de Salvian, que celuy qui n’a point de soin de soy-même, ny de zele de son salut, allant impunément à la comedie, a renoncé à sa religion & à son Baptême, a abandonné le service de Dieu pour s’engager à celuy du diable, & se rend par cette action plus criminel qu’un Payen. […] Ainsi le service divin est abandonné, la Religion est deshonorée, les Sacremens sont profanés, il faut que Dieu sorte d’une ville, si-tôt que les Comediens y seront entrés, & il faudra desormais fermer toutes les Eglises où l’on celebre nos mysteres, & toutes les écoles où on enseigne la vertu, sitôt qu’on ouvrira la sale de la comedie, parce qu’elle est, privatum consistorium impudicitiæ , le serrail privé où l’on donne des leçons du crime, & la Synagogue du diable où on celebre des mysteres d’iniquité.
Pourquoi ce Marquis, dont la femme est jeune, belle, spirituelle, du meilleur caractère & de grande Maison, l’abandonne-t-il pour courir après les caresses d’un minois ignoble qui n’en refuse à personne ?
mon amie, j’ai fait un infidèle : Mademoiselle *** est abandonnée : Florise, la belle Florise (c’est moi), a tous les vœux de monsieur D’Alzan.
Les Eglises sont désertes un jour de spectacle : Et si un Chrétien y vient sans savoir qu'on en donne quelqu’un, dès qu'il en est averti par les acclamations des Spectateurs, ou par le son des instruments, il abandonne l'Eglise, et l'Autel, pour aller au Théâtre prostituer ses yeux à des objets impudiques. » « Nos Ecclesiis ludicra anteponimus, nos altaria spernimus, et Theatra honoramus.
Qu’en pareil cas ils interprétent de leur mieux les Passages contraires à leur opinion, plutôt que de l’abandonner, que peuvent-ils faire autre chose ?