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108. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre douzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et litteraires, sur le théatre. — Chapitre VII. Troisieme suite du Fard. » pp. 171-194

Cette petite production suppose moins d’esprit, de goût, de finesse, de lecture, que le Dictionnaire Neologique de l’Abbé des Fontaines, qui est une longue comédie de précieuses ridicules. […] Toutes les têtes sont devenues blanches ; cela a changé le goût de la Nation pour la couleur des cheveux. […] Pour contenter un goût si bizarre, on s’avisa de renfermer les queues des chevaux dans un sac, qu’on ôtoit ou remettoit à fantaisie. […] Ces deux cœurs pensent si différamment leurs goûts sont si opposés ! […] La Glose y ajoute deux vers dans le goût du tems.

109. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre prémier. — Chapitre prémier. Déssein de cet Ouvrage. » pp. 2-7

On a lieu d’être surpris qu’on n’ait point encore rassemblé dans un même ouvrage tout ce qui concerne les différens genres des pièces Théâtrales tant anciennes que modernes, & les diversités que le goût & les usages des Peuples y repandent. […] Lorsque je me hasarderai de proposer mon sentiment, je croirai que le goût de mon siècle éxige que je prenne cette liberté ; ou bien ce sera pour rapporter plus au long tout ce qui concerne un article intéressant.

110. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — Seconde partie. Notes. — [Q] » pp. 444-446

Une quatrième espèce de Parodie de mots, consiste à faire des vers dans le goût & dans le style de certains Auteurs ridicules ; tels sont, dans notre langue, ceux où Despréaux a imité la dureté des vers de la Pucelle : Maudit soit l’Auteur dur, dont l’âpre & rude verve Son cerveau tenaillant rima, malgré Minerve, Et de son lourd marteau martelant le bon sens, A fait de méchans vers douze fois douze cens. […] e Olympiade lui paraît incontestablement l’Auteur de la Parodie Dramatique, qui était à-peu-près dans le goût de celles qu’on donne aujourd’hui sur nos Théâtres ; comme Agnès-de-Chaillot, Parodie d’Inès-de-Castro ; le Mauvais-Ménage, Parodie de la Mariamne ; les Magots, Parodie de l’Orfelin-de-la-Chine, &c.

111. (1759) Apologie du théâtre « Apologie du théâtre » pp. 141-238

Par le goût excessif des Genevois pour la campagne, où ils passent six mois de l’année. […] Est-ce le goût du vice, ou l’amour de la vertu, que ces spectacles y excitent ? […] Cependant le goût des Grecs fut-il en cela préférable au nôtre, M. […] Ayant à plaire au public, il a consulté le goût le plus général de ceux qui le composent. […] Voilà donc le personnage que Molière a voulu humilier, pour flatter le goût de son siècle.

112. (1838) Principes de l’homme raisonnable sur les spectacles pp. 3-62

Que de jeunes gens, l’espoir de la Religion et de la Patrie, ne sont devenus des sujets inutiles ou dangereux, que pour avoir respiré cet air contagieux qui pervertit le jugement, et ôte le goût de toute application solide ! […] Nous avons vu que Platon et les sages législateurs du paganisme rejetaient loin de toute république bien policée les fables et les instruments de musique qui pouvaient amollir une nation par le goût de la volupté. […] Gresset, ce Poète plein de grâces et de goût, a publiquement manifesté son repentir, des succès qu’il a obtenus en parcourant la carrière du Théâtre. […] « Ce qui établit la prétendue nécessité des Spectacles, n’est point la bonne conscience qui éteint le goût des plaisirs frivoles : c’est le mécontentement de soi-même ; c’est le poids de l’oisiveté ; c’est l’oubli des goûts simples et naturels.. […] Mais tel est le goût qu’il faut flatter sur la scène ; telles sont les mœurs d’un siècle instruit.

113. (1778) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre vingtieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre VI. Machiavel. » pp. 198-214

Sa Politique n’est qu’un extrait de l’histoire fait avec trop de vérité, dans le goût de malignité qui lui est propre : il déchire les voiles de la politique & la réduit en art trop à découvert : sans doute ce qui l’a rendu odieux, & a fait passer son nom en proverbe. […] Après l’action on n’eut plus de goût pour reprendre un spectacle devenu trop tragique. […] Outre ses comédies & son histoire de Florence, ses poësies érotiques des plus licencieuses, il a composé des contes infames, tels que l’Asne d’or, où il a copié Lucien & Apulée dans toute leurs infamies, Beelphegor, dont Lafontaine a fait un de ses contes dans le même goût, & Mandragore, piece de théatre la plus licencieuse. […] Machiavel étoit naturellement comédien & satyrique : c’est le goût de sa nation. […] On peut faire toutes sortes d’ouvrages systêmatiques dans ce goût, comme l’Abbé commandataire, l’Evêque de Cour, le magistrat, le militaire, le négociant, le ministre ; c’est-à-dire, ramasser tout ce qu’on pourra des vices & des défauts de chaque état, l’oppression des foibles, la vénalité de la justice, la bassesse de l’adulation, le despotisme de la grandeur, le luxe de l’opulence, l’hypocrisie, la mauvaise foi, le masque de la gravité, la molesse de la volupté, la présomption de l’ignorance, les coudre, les découper, en faire un systême, & dire, voilà l’évêque, l’abbé, le magistrat, le financier, l’officier, &c.

114. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 4 « CHAPITRE VIII. De la Folie. » pp. 163-179

Une infinité de pièces, je ne dis pas de la Foire, mais des Comédiens Français, portent des titres dans ce goût ; que peut-on attendre de sensé de la Famille extravagante, les Fêtes nocturnes, les Folies de Cardenio, la Métempsycose des Amours, la Guinguette, le Carnaval, le Roi de Cocagne, Cartouche, l'Esprit follet, les Fous divertissants, Ragotin, le Mirliton, le Baron de la Crasse, les Bottes de sept lieues, etc. […] diversifiées de mille manières, selon le goût et le caractère des lieux, des temps et des peuples. […] Toute la fête n'était même qu'une farce ambulante, dans le goût du siecle. […] Tous les peuples du monde sont dans le même goût, et quoique le christianisme ait inspiré plus de gravité, on voit encore dans toutes les campagnes les fêtes célébrées par des danses. […] Les Juifs sur les arts de goût n'en savaient pas davantage.

115. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — PREMIERE PARTIE. — CHAPITRE VI. Les obstacles qu’on peut rencontrer pour parvenir à la Réformation du Théâtre. » pp. 59-68

Il est vrai que, dans notre siècle, le goût pour les Spectacles paraît être extrême. […] Il y a déjà plus de trois siècles que le Public est dans une habitude successive et, pour ainsi dire, héréditaire de fréquenter et de suivre le Théâtre ; et le goût en est aujourd’hui si général, qu’on peut dire que tout le monde s’intéresse à sa conservation.

116. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre onzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre VIII. Anecdotes illustres du Théatre. » pp. 186-214

C’étoit un des mysteres des confreres de la Passion, dans le goût du tems. […] Mais aussi il est fait comme les autres, sans choix & sans goût. […] &c. c’est un amphigouri de toutes sortes d’idées tragiques, ramassées çà &c là, & entaffées sans goût & sans ordre, contre la vérité, & sans vraissemblance. […] On joua pour la premiere fois la comédie en Suéde sous le Roi Jean III, on y joua la Passion selon le goût du tems. […] Ces deux grandes ames inséparablement unies, par la conformité des goûts, & des sentimens, & l’assiduité du commerce, tiennent beaucoup au théatre ; le Poëte comme auteur, la Dame comme actrice.

117. (1774) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre seizieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre VII. Autre suite de diversités curieuses. » pp. 173-202

C’étoit le goût du Cardinal de Richelieu, son protecteur & son fondateur, qui lui même, comme nous avons dit ailleurs, s’abaissoit jusqu’à composer, & qui voulut que la premiere occupation de l’Académie naissante fût la critique du Cyd. […] Pourquoi vouloir forcer les goûts, & réduire tout au sublime ? […] Ainsi le peint leur mémoire ; l’intégrité inflexible, les lumieres supérieures, le goût infaillible des Comédiens l’emporte sur tous les gens de lettres, & toutes les Académies. […] On est à Bruxelles dans le goût des mascarades. […] La qualité de l’ouvrage lui donne un nouveau poids ; il faut que la vérité soit bien évidente pour avoir percé les ténebres, & bravé le goût & les préjugés du climat.

118. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme. — Chapitre VI. Dorat. » pp. 141-175

Cette amabilité, cette divinité, cette adoration, cette gloire immortelle ne deshonorent-elles pas un homme de condition, un homme d’esprit, un homme poli, qui affiche des goûts & des jugemens si indignes de lui ? […] Il est des sujets dont nous privent la délicatesse, la timidité de notre goût, la bienseance de notre Théatre. […] Son goût décidé pour la fainéantise & l’insouciance le tenoit naturellement dans la bassesse, il lui falloit des efforts pour se guinder plus haut. […] Voici un correctif bien plus violent, un ouvrage dans le goût de Philotanus de Grécour. […] Peut-on être flatté de l’entendre dire & voir imprimé : Je l’ai vu par un goût volage séduire & tromper la beauté ; changer chaque jour d’esclavage, être pris, repris & quitté.

119. (1768) Réflexions sur le théâtre, vol 7 « Réflexions sur le théâtre, vol 7 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SEPTIÈME. — CHAPITRE IV. Traité de la Danse de Cahusac. » pp. 76-104

L’Histoire Poëtique lui compte au moins trois amans dont elle a eu des enfans, entr’autres Archéloüs, dont on prétend que sont venues les Sirenes, qui ont hérité des goûts & des talens de leur mère. […] Auguste connoissoit les hommes & l’art de les gouverner, & le goût des Romains pour les spectacles. […] Les théatres publics déjà établis étoient beaucoup pour les vues de l’Empereur ; mais on y étoit accoutumé, il falloit réveiller & rendre ce goût plus vif par des nouveautés piquantes. […] Tel est ce goût si général, si vif, si dominant pour les spectacles, que tout favorise, que tout augmente. […] Mais par-tout Vénus, l’amour, des danses galantes, des danseuses peu modestes, quoique le goût d’un Prince fort retenu, les rendît moins licencieuses, vinrent infecter le spectacle, & porter le flambeau du vice dans le cœur.

120. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre onzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre premier.  » pp. 4-42

De là vint le goût du Cardina pour les Lettres & les Savants, auxquels il faisoit un accueil favorable, & bien de libéralités. […] Ce fut alors que pour marquer sa réconnoissance il donna à ses frais des Fêtes du goût de son Protecteur. […] Ces scénes si déplacées, que le goût du théatre & son air contagieux sont souvent donner, par des hommes d’ailleurs estimables, ne doivent porter aucune atteinte à la Réligion. […] Ce goût frivole a si bien pris dans cette nation livrée au plaisir, qu’il s’y est soutenu à travers les miseres & la barbarie des siécles d’ignorance. […] Riccoboni pretend que l’usage des masques vient des anciens Attellanes qu’on jouoient à Rome, toujours en masques ; c’étoient des vraies farces, dont le goût s’est conservé.

121. (1760) Lettre à M. Fréron pp. 3-54

En veut-on deux mille, que l’on suive la conduite des jeunes gens qui en sortant du Collège pour entrer dans le monde, ont le bonheur de prendre du goût pour le spectacle et de le préferer à tous les amusements auxquels la jeunesse a coutume de se livrer. […] quel goût ne prendrait-on pas pour la vertu, en voyant ces Personnes vénérables l’applaudir dans la bouche de nos Acteurs et sacrifier un Cagotisme mal entendu à l’avantage de faire remarquer au peuple des vérités auxquelles il ne fait pas peut-être assez d’attention. […] J’aurais été trop heureux si le goût que j’avais pris pour les lettres et qu’il m’avait inspiré lui même m’eut abandonné en même temps que je me résignais à ses vues. […] J’avais eu dès ma plus tendre jeunesse du goût pour cette profession, mon Père m’avait mené de bonne heure à la Comédie, et je puis assurer que la premiere fois que j’ai vu le spectacle, a décidé ma vocation pour ce genre de vie. […] J’avais joué souvent depuis mon retour à Paris quelques pièces avec des jeunes gens qui partageaient mon goût pour cet amusement.

122. (1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « XXXV. Conclusion de tout ce discours. » pp. 138-152

Qui ne voit donc que la comédie ne se pourrait soutenir, si elle ne mêlait le bien et le mal, plus portée encore au dernier qui est plus du goût de la multitude ? […] Le génie des pièces comiques est de chercher la bouffonnerie : César même ne trouvait pas que Térence fût assez plaisant : on veut plus d’emportement dans le risible ; et le goût qu’on avait pour Aristophane et pour Plaute, montre assez à quelle licence dégénère naturellement la plaisanterie. […] Pour déraciner tout à fait le goût de la comédie, il faudrait inspirer celui de la lecture de l’Evangile, et celui de la prière.

123. (1766) Réflexions sur le théâtre, vol 5 « Réflexions sur le théâtre, vol 5 — REFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE CINQUIÈME. — CHAPITRE I. Préjugés légitimes contre le Théatre. » pp. 4-29

Les femmes y deviennent plus dangereuses par l’état où elles s’y montrent, par l’esprit de liberté, de hardiesse, qu’elles y prennent, le goût de parure, de mollesse, de vanité. […] Qu’il est agréable au goût savourez les délices de ces passions vives, de ces tendres sentimens, de ces intrigues amoureuses, de cette musique voluptueuse, de ces commerces que vous y formez : Ad vescendum suave. […] Le paganisme n’a jamais porté jusques-là ses plus grande excès : il avoit à côté du théatre des coulisses, qu’on appeloit des caves, où régnoit la licence, dans le goût de nos foyers & de nos coulisses ; mais il respectoit le public. […] Le goût même, le ton du siecle suffiroit ; les grossieretés révoltent. […] Encore même ces excès doivent faire éviter les spectacles, car c’est là qu’on apprend à les commettre, qu’on en reçoit le germe, qu’on en prend le goût, qu’on en apprend se langage, qu’on en découvre les moyens, qu’on en trouve les objets à un prix raisonnable, qu’on en concerte l’exécution, qu’on en prélude le plaisir.

124. (1769) Réflexions sur le théâtre, vol 8 « Réflexions sur le théâtre, vol 8 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE HUITIEME. — CHAPITRE IV. Suite des Masques. » pp. 82-109

Le théatre ne fît-il qu’enseigner & entretenir le goût des masques, il seroit un mal. Voici une autre mascarade dans le même goût. […] C’est une partie de la mascarade, & un reste du goût de l’ancien théatre de la Basoche. […] De ces hommes innombrables qui peuplent la terre, il n’y en a pas deux qui se ressemblent ; les traits, la physionomie, le coup d’œil, la couleur, la taille, la démarche, le geste, la voix, les talens, les goûts, les passions, les vices, les vertus, le caractère, &c. sont différens. […] Quoi qu’il en soit, on peut en tirer ce fruit, & c’est dans ces vues que je vais donner un extrait de ces pieces ridicules, dans le goût des siecles passés.

125. (1768) Réflexions sur le théâtre, vol 7 « Réflexions sur le théâtre, vol 7 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SEPTIÈME. — CHAPITRE II. De la Danse. » pp. 30-51

Ce goût d’Académie de Terpsichore a passé le Rhin. […] Tout cela doit suivre la mesure, agir en cadence, entrer dans le goût, le mouvement d’un air, avec l’oreille la plus exacte & la plus prompte. […] La danseuse, qui n’a autre chose à faire, est toute concentrée dans l’expression de la passion, le goût du crime & la vue de l’objet. […] Rien ne peint mieux le goût François que le compliment fait par une Actrice pour prévenir favorablement le public dans une piece composée par une femme, qui quoique médiocre ne put à ce titre manquer de réussir. […] Tout danse dans le Béarn, où ce Prince passa sa jeunesse, c’est le goût général du pays.

126. (1695) Preface [Judith, tragedie] pp. -

Indigné contre une opinion si fausse et si pernicieuse, je crus d’abord qu’elle n’était fondée que sur la prévention qui n’examine rien, et dont la force impérieuse entraîne ordinairement la multitude ; mais après avoir creusé jusques dans la source de cette erreur, je vis qu’elle venait de l’ignorance de l’art, de la faiblesse du genie, de la stérilité des inventions, et surtout du peu de goût et de sensibilité qu’on a pour les choses de la Religion. […] Je répondrai encore moins à la critique qui est fondée sur le goût et non pas sur la règle.

127. (1819) La Criticomanie, (scénique), dernière cause de la décadence de la religion et des mœurs. Tome II « La criticomanie. » pp. 1-104

Je ne le cèle pas, je fais tout mon possible, A rompre de ce cœur l’attachement terrible… Il dit plus bas à cette coquette …… Que quand il en devrait mourir, Elle a des goûts qu’il ne saurait souffrir. […] Je crois même devoir attribuer à elle seule l’épuration graduelle du style et du goût. […] Les femmes ont encore moins su auquel entendre ; sous la minorité de Louis XIV, on les critiquait sur la légèreté de leurs goûts ; elles ont été sensibles à ces reproches et se sont livrées à l’étude des sciences et des lettres ; elles fréquentaient les savants et voulaient avoir dans leur cercle leur mathématicien, ou leur littérateur ; Molière est arrivé, et s’est mis à crier de toutes ses forces, aux précieuses, aux femmes savantes ! […] Son grand succès à faire rire de tout, même des hommes vertueux, (contre son intention, j’en suis persuadé, et je le répète) a causé des désordres d’autant plus rapides qu’en même temps qu’il rendait la vertu ridicule, il faisait naître généralement la passion de ridiculiser ; car c’est surtout à son exemple et à l’influence de ses comédies spirituelles et malignes que les Français et autres doivent leur manie de critiquer et de faire des satires, leur goût dominant pour le ridicule, la moquerie et les sarcasmes, où les pointes, qui percent partout, ne ménagent rien. […] Que si même, aurait pu ajouter le prudent ami, les circonstances, votre talent et votre goût, vous portent à mêler à vos instructions une certaine dose de raillerie, de finesse, de pointes ou d’ironie, de la gaîté, du comique, même de la poésie, en un mot un peu de comédie, faites-le à la manière d’Horace, de Pascal et de Michel Cervante.

128. (1774) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre seizieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre I. Diversités curieuses. » pp. 5-37

Le théatre est trop de son goût, pour n’y être pas florissant. […] Ce peuple conserva quelque temps, & représentoit chaque année une piece dans l’ancien goût. […] Il y a d’autres couplets dans le même goût ; celui ci les fait peu regretter. […] C’étoit un goût chez les anciens, c’est une folie, un délire chez les modernes. […] C’est un très-mauvais goût, parce que le plaisir que donne une imitation, doit avoir un peu de vrai & un peu de faux.

129. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme. — Chapitre VIII. Du Clergé comédien. » pp. 176-212

Peut-être son goût pour la morale sévere & la composition de ses dernieres œuvres sont-ils le fruit de sa conversion, comme la traduction en vers du livre de l’Imitation de J. […] Il y en a fort peu en France qui passent comme lui de la Scène au Chœur & du Chœur à la Scène ; ce ne sont que des Abbés à Bénéfices simples : La gêne du Chœur n’est pas de leur goût, une Paroisse le seroit encore moins. […] Young, Prêtre & Curé Anglois ; est un Ecrivain singulier dans le goût sombre de l’Abbé Prévot & du sieur Arnaud, mais bien inférieur pour le style. […] La dédicace d’un goût nouveau est une inscription à la tête du livre, comme celles des Empereurs sur les colonnes, Trajane, Antonine, &c. […] Le succès éclatant & soutenu qu’elle eut à la réprésentation, justifia le goût de l’Abbé & le talent de l’Auteur.

130. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quatorzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littérairesn sur le théatre. — Chapitre VI [V]. Élizabeth d’Angleterre. » pp. 142-187

L’inconstance du Roi, qui prit du goût pour une autre, prépara sa disgrace. […] Dans le goût François, rien de plus pressé que de publier les faveurs qu’on a reçues ou qu’on espere. […] Chaque actrice a son goût. […] Plusieurs familles s’étoient ruinées pour paroître avec éclat à la Cour, selon son goût. […] N’importe, la comédie n’en fut que plus amusante, & plus de son goût.

131. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre treizieme « Réflexions morales, politiques, historiques,et littéraires, sur le théatre. — Chapitre VI.  » pp. 193-217

Les Espagnols sont dans ce goût pour leurs équipages. […] Quelle bizarrerie de goût & de mode ! […] Le goût de la liberté, qui croît avec la frivolité, ne peut s’accommoder de ce qui gêne, & on met de la dignité à s’embarrasser dans de longues queues. […] Ce goût a passé aux armoiries, Toutes y est blasonné de queues. […] Le grand usage qu’il en fait, la grace, la dignité qu’il y donne, en a inspiré le goût assez nouveau en France, qui remonte à l’établissement fixe de la scene.

132. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quatorzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littérairesn sur le théatre. — Chapitre V [IV]. De la Chaussure du Théâtre. » pp. 115-141

Ce blason est plus facile à entendre & à exécuter, il est plus du goût des acteurs & des spectateurs. […] Les femmes de toutes les nations, chacune selon son goût, sont également éprises des graces de leur chaussure. […] On croit que par une raison de politique on a voulu les empêcher de courir, en les retenant chez elles comme emprisonnées, ce qui est fort dans le goût des Chinois. […] Les anciens masques du théatre étoient dans le même goût, c’étoient des casques qui enveloppoient toute la tête, avec de grandes ouvertures aux yeux & à la bouche : on croyoit qu’ils grossissoient la voix. […] C’étoit le goût de la galanterie de ce siécle, qui étoit le regne de la Chevalerie.

133. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome II « De l’Art du Théâtre. — Chapitre VI. Des Ariettes, & des autres parties du Chant théâtral à une seule voix. » pp. 297-328

C’est sur ces impertinens amphigouris que nos musiciens épuisent leur goût & leur savoir, & nos acteurs leurs gestes & leurs poumons ; c’est à ces morceaux èxtravagans que nos femmes se pâment d’admiration ». […] Puisqu’on veut absolument conserver les Ariettes dans le Spectacle moderne, disons qu’il peut être aisé aux Poètes & aux Musiciens de les perfectionner davantage, de leur ôter les fautes qui les ternissent, de les rendre plus utiles aux Drames dans lesquels elles sont comme enchassées ; & d’obliger enfin l’homme de goût à les applaudir & à les approuver. […] Il parviendra à détourner une partie des applaudissemens sur lui seul, si sa Poèsie est douce, harmonieuse, si rien ne choque le goût & la délicatesse. […] « On ne saurait croire combien l’esprit & la subtilité nuisent à la musique, s’écrie un illustre Amateur de cet art, dont on connaît le goût & les lumieres(69). « La musique, dit M. de Voltaire, èxprime les passions, les sentimens, les images ; mais où sont les accords qui peuvent rendre une Epigramme ?  […] Je ne fixerai point au Poète la quantité d’ariettes & de duo qu’il peut insérer dans les Drames du Théâtre Moderne, sans crainte de lasser les Spectateurs ; c’est au goût seul à lui enseigner ce qu’il doit faire à ce sujet.

134. (1824) Du danger des spectacles « DU DANGER DES SPECTACLES. » pp. 4-28

« Lorsque l’âme s’abandonne à de faux plaisirs, elle perd bientôt le goût des jouissances spirituelles, et ne trouve bientôt plus que dégoût et qu’ennui dans la parole de Dieu. « Lorsque une fois l’on s’est accoutumé à se nourrir des vaines jouissances du monde, le goût des choses spirituelles s’amortit et s’éteint insensiblement, et bientôt on arrive à une complète ignorance des choses divines. […] Si nous avions pour la gloire et le service de Dieu seulement la moitié de la sensibilité et du zèle que nous témoignons à nos amis ou à nos partisans politiques, trouverions-nous quelque plaisir dans des lieux où la débauche enflammée par les fumées du vin, guidée par la licence, vient puiser des impressions conformes à son état et à ses goûts ; ces lieux qu’on a osé appeler des écoles de morale, et du voisinage desquels s’empressent de se retirer la morale, la modestie, la décence, tandis que la débauche et le libertinage s’empressent de s’y rendre, et y établissent leur résidence de prédilection ; ces lieux où le saint nom de Dieu est journellement blasphémé, où l’on applaudit des gestes et des paroles qui ne seraient pas tolérés dans une société quelconque, mais qui peuvent hardiment dépasser toutes les limites les plus reculées assignées à la licence dans nos cercles, sans franchir les limites tout autrement larges de la décence théâtrale ; ces lieux enfin où la morale qu’on débite n’est pas celle que doit chérir et respecter tout chrétien, mais celle à l’extirpation de laquelle doivent tendre ses efforts de tous les jours ; non celle que nous recommandent les saintes Ecritures, mais celle qu’elles condamnent comme fausse et criminelle, fondée sur l’orgueil, l’ambition et la faveur. […] C’est aux puissances inférieures de notre nature qu’ils ont coutume de s’adresser, c’est à nos sens, à notre imagination, à nos passions ; ils accoutument notre âme aux émotions fortes et factices, de manière à nous blaser en peu de temps, et à nous donner bientôt un profond éloignement pour des lectures et des compositions d’un goût plus pur et plus sévère, surtout pour les saintes Ecritures et pour tous les livres religieux, dont la lecture forme l’un des plus importants devoirs de la vie, et contribue à notre bonheur en ce monde et en l’autre. […] Il est surtout un argument spécieux contre lequel ils doivent se tenir en garde : on leur dira qu’on peut profiter à l’école du théâtre, et y puiser des principes de religion et de morale ; on leur parlera encore du mérite littéraire et de la connaissance du cœur humain qu’on trouve dans plusieurs de ces œuvres dramatiques, comme si ces avantages devaient compenser les blessures profondes et souvent mortelles que font ces représentations dangereuses, à l’innocence, à la pureté et à la religion ; pour nous, convaincus que la corruption s’appelle toujours la corruption, et que ce serait acheter trop chèrement les plaisirs d’une composition savante, ainsi que l’élégance et le goût littéraire, que de l’acheter au prix de notre innocence, prenons la résolution ferme et invariable de combattre le mal, de quelque masque qu’il se couvre, de quelques formes attrayantes qu’il se revête.

135. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — TROISIEME PARTIE. — Tragédies à conserver. » pp. 128-178

Racine savait très bien ce qui convenait à la Tragédie ; et, je le répète encore, s’il n’eût pas craint de révolter le Public, en critiquant le goût général de son siècle, il aurait dit ; « que les tendresses et les jalousies des Amants ne sauraient trouver que fort peu de place parmi le majestueux, l’intéressant et le lugubre d’une action tragique. » Racine savait et sentait à merveille cette vérité ; mais, par malheur pour le Théâtre moderne, non seulement il n’eut pas la force de la déclarer dans la Préface de sa Thébaïde ; il n’osa pas même la pratiquer, si ce n’est dans Esther et dans Athalie : il se livra, malgré ses lumières, à la corruption générale de ses prédécesseurs et de ses contemporains : il ne se contenta pas même de mettre de l’amour dans toutes ses autres Tragédies ; il fit aussi, de cette malheureuse passion, la base de tous les sujets tragiques qu’il a traités. La Thébaïde est écrite dans le goût des Tragédies Grecques, où la mort et le carnage dominent ; si on voulait en faire usage pour le Théâtre de la Réforme, il y aurait peu de chose à changer dans la Scène d’amour entre Hémon et Antigone ; je crois même qu’on pourrait se dispenser d’y toucher ; et, telle qu’elle est, je donnerais mon suffrage en sa faveur. […] Crébillon, j’étais d’une certaine façon prévenu contre elle ; on m’avait dit qu’elle était si atroce qu’on ne pouvait, sans frémir, en voir la représentation : après l’avoir lue, sans condamner tout à fait ceux qui m’en avaient fait ce portrait, je me sentis engagé à faire quelques réflexions sur la différence du goût des hommes dans les différents temps. […] Voilà presque généralement la mode et le goût de notre siècle. […] Martelli, Italien : c’est une étude digne d’un homme d’esprit et de goût, que de comparer à l’original Grec les imitations des deux Poètes que je viens de nommer, et d’examiner l’art avec lequel chacun d’eux a tourné, selon son génie, la Tragédie d’Euripide : pour moi j’admire également tous les deux ; car, en suivant des routes très différentes, chacun d’eux a réussi parfaitement, et a trouvé moyen d’ajouter des beautés nouvelles à l’original Grec : cet examen et les remarques qu’il ferait naître fourniraient aisément matière à une dissertation très curieuse, et surtout utile pour les Poètes ; mais je reviens à mon sujet.

136. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « Avertissement de l’Éditeur, En forme de Table des Matières. » pp. 7-16

D epuis la renaissance du Dramatisme, le goût des Spectacles n’avait pas encore été si général qu’aujourd’hui ; par conséquent jamais leur influence sur les mœurs ne fut si grande, & jamais l’on ne dut autant espérer ou craindre de leurs effets. […] Si l’on voulait donner au Théâtre plus de magnificence, au-lieu des trottoirs élevés, il conviendrait mieux, que l’on construisît autour de la Place, des portiques colonadés, dans le goût de ceux des Théâtres Grecs & Romains, qui prendraient tout l’emplacement qu’occupent aujourd’hui les maisons : l’on découvrirait le fleuve des deux côtés ; l’air serait en été plus frais & plus pur : l’isolement de l’Edifice donnerait la facilité d’y pratiquer des ventouses, des ventilateurs, & tous les moyens de purifier l’air & de rafraîchir usités en Italie. […] Si la Nation Française, dans les siècles de sa gloire, ne laisse rien à la Postérité qui prouve son goût pour les Spectacles, & l’estime qu’elle fait des chefs-d’œuvres Dramatiques en tout genre dont les Siècles de Louis xiv & de Louis xv l’ont enrichie ; c’est à leur opposition à sa Religion qu’il faut s’en prendre, & à l’espèce d’infamie que cette opposition répand sur le Dramatisme.

137. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre second. — Chapitre III. Recherches nécessaires pour s’éclaircir si les Anciens ont connus l’Opéra-Bouffon. » pp. 101-108

Platon le Philosophe, car il en éxista un autre, si je ne me trompe, point Philosophe, compositeur de Mimes ou de Comédies dans le goût d’Aristophane ; on les confond souvent l’un avec l’autre. […] Le goût éprouva, sans doute, chez les Romains une pareille révolution & l’on eut recours à la même politique.

138. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre V. De la Dépense des Spectacles. » pp. 75-88

Elles prouvent le nombre des fainéants et leur goût pour la fainéantise, qui nourrit d’autres fainéants, qui se piquent d’esprit agréable, non d’esprit utile. […] Autre source de dépense aussi ruineuse, c’est le goût de la parure, du luxe, de la dissipation qu’il inspire, les débauches, les repas, les parties de plaisir qu’il occasionne, non seulement avec les Comédiens avec qui l’on se lie, mais encore avec les gens qu’on y mène ou qu’on y trouve. […] Le théâtre l’a ennobli, l’a rendu nécessaire, en a donné le goût, en fournit les modèles et les maîtres, et charge le public de frivolités aussi dispendieuses que dangereuses. […] Ce goût se communique, se perpétue, s’augmente, s’étend sur tout.

139. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quinzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre V. Du Faste. » pp. 154-183

Le théatre fut toujours coupable de ces excès, il étale le plus grand faste, il en entretient le goût ; la simplicité & la modestie y sont des vertus inconnues, & y passent pour des vices chez les amateurs. […] C’est le foible de la nation ; chez le sexe c’est une fureur : une femme le matin à la toilette consume les heures entières à se parer des nippes qu’elle a acheté la veille, elle va à la comédie, la mode a changé de midi à trois heures, elle est surprise de voir des robes d’un goût différent ; elle est vêtue à l’antique, elle souffre à regret qu’on la regarde, elle en est au désespoir, n’y pouvant plus tenir, elle sort du spectacle au second acte, & va s’enfermer jusqu’à ce que dix couturières qui veillent toute la nuit, la mettent en état de paroître avec honneur le lendemain. […] Cet esprit, ce goût de parure, ce génie inventif des modes ne fut jamais l’esprit de Dieu, mais l’esprit du démon, il favorise trop la tentation pour ne lui être pas agréable ; le démon tient le pinceau qui vous farde, il dirige l’œil qui en juge, il donne l’adresse à la main qui travaille, les couleurs sont ses armes, les rubans sont ses liens, les habits sont ses piéges. […] La tentation de la parure n’est que la répétition de la tentation du serpent qui perdit la première femme dans le Paradis terrestre ; l’espérance de son embélissement, le fruit défendu est agréable à la vue, il est délicieux au goût : ses attraits sans doute sont dangereux, mais ce ne sont pas les plus puissans ; le démon ne les fit pas valoir, ce ne sont pas ceux qui perdirent Eve ; l’amour de la beauté fournit contre elle bien d’autres armes : vous serez comme des Dieux par l’étendue de vos lumières, vous connoîtrez le bien & le mal. […] 11.° Il est permis d’aider ses sens, l’oreille dans la surdité, les yeux dans la vue foible, le palais dans le dégoût, & de leur plaire ; à l’ouïe par la musique, à la vue par la beauté des objets, aux goûts par des assaisonnemens, à l’odorat par des parfums ; pourquoi non pas par le fard, par les couleurs du visage par l’embonpoint ?

140. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 1 « CHAPITRE IV. Des Pièces pieuses. » pp. 68-95

Elle fut mal obéie : ce qui est du goût de la passion ne s’abolit pas aisément. […] La sainteté de la religion fait mépriser la frivolité de la fable, les gens de bien en sont indignés ; ou, ce qui est plus ordinaire et bien triste, le goût de la corruption fait mépriser la sainteté de la religion. […] Ces fictions dévotes, dans le goût de leur temps, peuvent avoir édifié quelques bonnes âmes, mais sont depuis longtemps oubliées. […] Je n’ai vu dans ce goût que les deux comédies de la Femme Docteur, et du Saint dévalisé, composées par un Jésuite contre le Jansénisme, et leur critique par un Janséniste. […] Non : c’est l’esprit, c’est le goût, c’est l’intention de tout ce qui compose le spectacle.

141. (1752) Traité sur la poésie dramatique « Traité sur la poésie dramatique — CHAPITRE PREMIER. De la Passion de presque tous les Peuples pour la Poësie Dramatique. » pp. 8-16

Les Missionnaires trouvant dans cette Nation cet amour pour les Spectacles, y firent exécuter des Piéces sur nos Mysteres, c’est-à-dire, des Autos Sacramentales dans le goût Espagnol. […] Elles sont cause quelquefois que les Arts se perfectionnent ; quelquefois aussi leurs progrès sont arrêtés par un certain goût répandu dans une Nation.

142. (1751) Nouvelles observations pp. 393-429

En vain les Théologiens croyent-ils s’être assez rapprochés, & avoir suffisamment étendu leur charité, en établissant, que l’on peut tolérer ceux qui vont aux Spectacles ; & qu’à l’égard des Acteurs, dans les momens pressans, on est prêt à recevoir leur abjuration ; en vain d’autres Philosophes pensent-ils, d’après Pope, que tout est bien, tel qu’il soit, & qu’il faut des ombres au Tableau ; en vain la Politique croiroit-elle entrevoir, dans une innovation, quelques inconvéniens : il n’en est pas moins vrai, que de vouloir diffamer une Troupe de Gens à talens, que l’on reconnoît d’ailleurs être nécessaires, est une contradiction insoutenable, & qui ne peut pas long-tems subsister dans un Etat, dont le goût & les décisions sont des Loix pour toutes les autres Cours de l’Europe. […] Les Spectacles étoient dans le même goût. […] Jérôme tenoit ce goût de Donat, dont il avoit été Disciple à Rome, & qui a fait des Commentaires sur Térence & sur Virgile. […] Cette Piéce, adoptée par Moliere, & ensuite par Thomas Corneille, est, comme l’on sçait, tirée de l’Espagnol ; & l’on y reconnoît aisément le goût de la Nation, pour mettre des moralités dans la bouche des Valets. […] Doit-on, d’ailleurs, parmi les Théologiens de France, ne compter pour rien la protection marquée que les Cardinaux de Richelieu & de Mazarin ont accordée à la Comédie ; l’un par sa passion pour la Poësie, & l’autre par son goût exquis pour les Machines Théâtrales ; & M. le Cardinal de Fleuri a-t-il dérogé à cette protection ?

143. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre onzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre IV. Fêtes de Théatre. » pp. 95-114

La même Gazette de Monaco, 16 Juillet, rapporte un trait singulier, d’un goût différent. […] Moyen de faire estimer la nation chez des peuples chez qui le metier de comédien, plus infâme & plus scandaleux qu’en France, s’il étoit possible, n’est exercé que par des femmes prostituées, qui, pour de l’argent, vont de maison en maison, se livrer au goût du public. […] C’est un nouveau goût, un nouveau genre de culte. […] Sur-tout à Nîmes où les belles Arénes qu’on voit encore, sont un monument du goût qu’on y avoit pour les combats sanglants des Gladiateurs. […] n’avoit garde de fronder le goût décidé de son maître, pour les spectacles.

144. (1767) Réflexions sur le théâtre, vol 6 « Réflexions sur le théâtre, vol 6 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SIXIÈME. — CHAPITRE VII. De la Dévotion des Comédiens. » pp. 160-179

J’ai du moins le plaisir de voir que mon mari a dans ses goûts quelque délicatesse : vous avez l’air de la décence, & des graces qui seroient faites pour embellir la vertu. […] Le goût des filles de l’opéra est à la mode, elles sont séduisantes & d’un accès facile. Ce qui n’est qu’un goût & un ton pour bien des gens, peut être une passion dans un jeune homme sans expérience. […] On joue encore dans ce goût en Espagne ; le Roi y vient, les gens de qualité y sont invités par billets. […] Ce qu’on vient de rapporter suffit pour faire sentir combien l’esprit du théatre corrompt les choses les plus saintes, porte l’irréligion & le vice jusque dans le sanctuaire ; dégrade les Ministres qui en prennent le goût, fait mépriser les mysteres, les cérémonies, les exercices pieux, les images, les habits, les lieux, les livres saints, tout ce qui tient au christianisme, dont il est le renversement, & en abuse, pour les tourner contre la religion & la vertu.

145. (1715) La critique du théâtre anglais « CHAPITRE V. Remarques sur L’Amphitryon, Le Roi Arthur, Don Quichotte et Le Relaps. » pp. 302-493

Dryden suit un peu pour la beauté de l’esprit l’opinion et le goût des Africains pour la beauté du visage. […] Tout cela lui semble d’un bien meilleur goût que les lois de la bienséance. […] c’est-à-dire qu’il fut extrêmement fâché que les Dames eussent du goût et de la modestie. […] Ne faut-il pas le rendre agréable au goût, afin d’engager à le prendre ? […] D’affreux détails des lieux infâmes seraient-ils de leur goût ?

146. (1781) Réflexions sur les dangers des spectacles pp. 364-386

Le génie sinistre qui semble diriger les opérations et fixer le goût de ce siècle, a imaginé de substituer des enfans aux comédiens, et de ne plus se servir de ceux-ci que comme d’instituteurs et de curateurs de ces jeunes baladins, qui parfaitement modelés sur le ton et les talens mimiques des anciens, ajouteroient aux attraits ordinaires des spectacles la candeur et l’intéressante naïveté de la jeunesse. […] Que des adultes, maîtres de leur sort, fixés par goût et par l’empire d’une longue habitude dans un genre de vie analogue au théâtre, se dévouent à la frivolité publique, et traînent dans les coulisses une existence presque réduite à une simple végétation ; l’Etat ne perd rien dans ce sacrifice. […] Que tous les individus fixés par choix et par goût dans la profession de l’histrionisme y persévèrent en toute liberté : mais que l’enfance reste intègre ; que les plantations dont la postérité doit recueillir les fruits, ne soient point livrées à la rapacité d’une jouissance meurtrière ; et qu’un siècle n’ait pas le malheureux avantage de dévorer la substance des siècles suivans, en préparant de loin le moyen fatal qui doit leur donner la honte ou le néant. […] Mais que fait-on si la succession rapide des goûts et des principes ne leur prépare pas une place dans le tombeau qu’ils ont creusé aux mœurs ? […] On voit combien il est aisé de tourner le goût du peuple, de lui ôter sa marotte sans le mécontenter.

147. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre onzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre VI. Du Fard. » pp. 143-168

Tous les corps se colorent mutuellement, l’assemblage des couleurs directes & refléchies, fait pour la vue ce que l’assemblage des tons, des odeurs, des assaisonnements font pour l’ouie, l’odorat, le goût. […] Pour contenter tous les goûts, en ménageant artistement les nuances, les manufactures travaillent des étoffes de toutes couleurs, des nuances & des mêlanges de toutes especes. Les marchands s’en approvisionnent, & ne manquent pas d’en faire l’étalage aux acheteuses, & de suivre leur goût ; ils font une étude particuliere de l’assortiment des couleurs ; on les y dirige dans leur apprentissage, & le premier coup d’œil tombe sur le teint de la Dame, pour juger ce qui convient à la blonde, à la brune, à la pale, leur offrir ce qui sied le mieux, & leur donner des sages conseils. Les femmes riches donnent des ordres aux manufactures, avec le modele de la couleur qu’elles ont fait tracer par un habile peintre, & font faire des étoffes exprès à leur goût. […] Après avoir médité sur le Crucifix, contemplent un visage prophane, & emploient leur tems, leur goût, leur adresse à y tendre des piéges aux hommes.

148. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quatorzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littérairesn sur le théatre. — Chapitre IIbis. Autre suite du Fard. » pp. 61-89

Elles s’en peignoient le front, les joues, les sourcils ; les paupieres, selon leur caprice ; comme il seroit impossible & inutile aujourd’hui de détailler tout ce que la mode, la fantaisie, les goûts des amans, les circonstances, font faire tous les jours aux actrices & aux coquettes, pour embellir, ou plutôt pour défigurer leur visage. […] Il n’y a point de femme qui ne conserve jusqu’à la mort le goût de la parure. […] Le luxe est un goût très-vif & une recherche excessive de toutes les commodités & de toutes les délices de la vie, & de la superfluité la plus dispendieuse en tout genre. […] Il a créé tous les arts, qui le servent pour satisfaire ce qu’il appelle besoins, c’est-à-dire, les goûts & les fantaisies. Le luxe est le corrupteur universel des mœurs, dont il nourrit, étend & perpétue la licence, des ames qu’il amolit, des esprits qu’il dégrade, des corps qu’il énerve, de la religion qu’il détruit ; des sciences sérieuses & des arts utiles, dont il éteint le goût & l’étude, pour ne s’appliquer qu’à la frivolité qui flatte le vice.

149. (1778) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre vingtieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre IV. Maurice de Saxe. » pp. 118-145

Le comte de Saxe, dit-il, avoit un tempéramment violent qui le livroit aux femmes (aussi étoit-il fils de l’amour) : mais, peu constant dans ses goûts, il ne cherchoit qu’à les varier, & souvent sans délicatesse. […] Si ce n’est pas là de la saine morale ni de la bonne tactique, il y a du moins de l’esprit de savoir couvrir ses goûts, ses passions, sa frivolité du voile du bien public. […] C’étoit un débauché crapuleux, sans goût, sans délicatesse, à qui tout étoit bon. […] Aussi Maurice fut toujours grand amateur du théatre & des actrices, quoique d’un goût peu délicat. […] Cette fête dura quinze jours, & fut suivie de beaucoup d’autres dans le même goût jusqu’à ses couches.

150. (1766) Réflexions sur le théâtre, vol 5 « Réflexions sur le théâtre, vol 5 — REFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE CINQUIÈME. — CHAPITRE II. Du Mariage. » pp. 30-54

Le théatre le plus raisonnable est infecté d’un esprit de pélagianisme, d’un goût de naturalisme, qui donne tout au libre arbitre & à la nature, & ne connoît que des vertus morales qu’il veut faire croire suffisantes & possibles jusques dans le monde, qui en est le renversement : systême aussi démenti par l’expérience que faux dans les principes de la foi. […] ce n’est que par galanterie dans le mari, vengeance, dédommagement dans la femme, amour de la liberté, goût naturel, besoin physique dans tous les deux ; on applaudit aux tours d’adresse qui ont sû tromper, on loue le haut ton que le coupable a sû prendre pour secouer le joug, & la patience de l’innocent qui a sû tout dissimuler. […] A mesure que le goût s’en répandit, ils devinrent communs, & grace à la loi Chrétienne, qui déclare le mariage indissoluble, la comédie est forcée de se borner aux séparations, dont l’usage parmi les amateurs est journalier. […] c’est à elle seule à faire le procès, si le mari sauvage, ou trop régulier, ou trop économe, ne veut pas fournir au jeu, à la toilette, aux parties de plaisir ; s’il n’approuve la dissipation, l’amour du monde, le bal, le spectacle, la compagnie ; si maître chez lui, il ne veut pas souscrire à l’indépendance & recevoir le joug de la domination ; la seule inconstance, la diversité des goûts, la gêne bourgeoise de l’uion conjugale, l’ennui de l’uniformité, le ton du jour, &c. suffisent pour autoriser le divorce au tribunal de Thalie, & sous peine du ridicule l’arrêt souverain en est porté, & exécuté par provision. […] Il conserve des parties défectueuses que le goût régnant soûtient encore (quel goût du vice !).

151. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 1 « CHAPITRE VII. De l’idolâtrie du Théâtre. » pp. 143-158

Malgré son autorité, Pompée fut fort blâmé, et peut-être aurait-il tôt ou tard reçu quelque affront ; mais, comme nous l’avons dit, il s’avisa d’y bâtir un temple à Vénus et de le lui consacrer : « Pompeium à majoribus incusatum quòd mansuram theatri sedem posuisset. » Cette innovation de Pompée paraît à Tacite l’époque de l’entière dépravation des mœurs, par le goût et l’habitude du théâtre qu’elle inspira, l’occasion et la facilité qu’elle donna de rassembler et d’étaler au public tout ce qui était le plus propre à le corrompre : « Abolitos paulatim patrios mores funditus everti per accitam lasciviam, ut quodcumque corrumpi, et corrumpere queat, in urbe videatur degeneretque juventus gymnasia, et otia et turpes mores exercendo. » Je ne sais pourquoi on n’a pas craint dans plusieurs collèges d’imiter cette innovation de Pompée, en y construisant des théâtres à demeure, comme si ce n’était pas assez d’en élever dans l’occasion, quand on voulait donner quelque pièce. […] Décorations, paroles, habits, acteurs, tout eût été du goût des Païens. […] Voyez ces loges peuplées d’amateurs, qui viennent à l’envi puiser à la source ; ils écoutent religieusement leurs savantes leçons, forment leur goût à leur toilette, se familiarisent avec leurs fonctions religieuses, apprennent à secouer le joug d’une incommode décence, à braver les lois gênantes de l’Evangile et de l’honneur, à se débarrasser d’un importun remords, et employer mille ruses pour faire réussir leurs projets, tromper la jalouse vigilance d’un père, d’une mère, d’un mari, d’un maître, et tourner en ridicule leur gothique régularité et leur dévot radotage. […] Le spectacle, d’abord grossier et sans règle, devint régulier, poli, agréable, et mérita d’être adopté par les passions d’un goût plus délicat : il devint l’hôtel de la comédie.

152. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quatorzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littérairesn sur le théatre. — Chapitre I. De la Pudeur. » pp. 4-35

Ce goût, cette fréquentation forment une sorte de phisionnomie, & il seroit aisé d’ajouter au Traité de phisionomie un chapitre particulier de la phisionomie théatrale ; & cela doit être. […] Si le goût de la scene y eût été dominant, jamais ils n’eussent été bâtis. […] Depuis que ce goût domine parmi nous, il ne se fait plus d’établissement Religieux, on ne travaille au contraire qu’à les détruire. […] Il a mal consulté le goût commun des hommes. […] Le second est chargé de juger des modes, & de fixer le nombre des jours que doit regner une certaine couleur, une étoffe d’un certain goût, ou une certaine façon de s’habiller.

153. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-huitieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre III. Suite de Mêlanges. » pp. 84-120

Les têtes & les attitudes sont toutes différentes ; le dessein, les proportions, le coloris, tout y est du meilleur goût. […] Il signifie les habits, armes, physionomie, usages, goût ; en un mot, tout ce qui caractérise les personnages du tableau, la vérité physique & morale du temps & du lieu où on a placé la scène : ce qui a du rapport à une infinité de chose, & rarement est bien observé. […] Les deux rangs de loges qui sont au-dessous de cette colonnade sont séparées par des consoles en amortissement, & chargées de médaillons d’un goût très-agréable. […] L’auteur qui a imaginé ces absurdités, le Journaliste qui en fait l’éloge, donnent-ils de grandes preuves, l’un de la justesse de son goût, l’autre de l’impartialité de ses jugemens. […] Saint-Foix, au contraire disoit, je ne douterai plus de la perte du goût, si des hommes de quarante ans ne regardoient Corneille comme le plus grand homme qui ait jamais été .

154. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre treizieme « Réflexions morales, politiques, historiques,et littéraires, sur le théatre. — [Introduction] » p. 2

Il est certain que dans ce siecle, qu’on peut appeler le Siecle des Théatres, ce goût est devenu si dominant que son poison insecte tout.

155. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — [Première partie.] — section »

Madame Des Tianges & sa sœur jouirent d’une égale félicité : le volage D’Alzan, sûr que son épouse pouvait tout charmer ; qu’elle possédait les grâces les plus séduisantes & tous les talens, l’aima par goût, par vanité, par tous les motifs imaginables ; eh !

156. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Avertissement. » pp. -

Au spectacle d’un beau drame, le sentiment s’éveille, digére pour ainsi dire, & met dans la balance du goût, les traits qui le frappent. […] 2 Les siécles qui servent d’époque à la décadence du goût, abondent en principes, & manquent de bons ouvrages.

157. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Causes de la décadence du goût sur le théâtre. — Chapitre XI. De l’amour & de ses impressions dans le Poéme Tragique. » pp. 165-178

J’ose le dire, si les gens de Distinction ne fréquentent plus la Comédie que par coutume, ou pour s’y donner eux-mêmes en spectacle, on doit moins l’attribuer à un certain goût de frivolité, qu’à une juste satiété, qu’à ces intrigues amoureuses, qui, leur rabattant éternellement les mêmes intérêts, les mêmes situations, ne méritent de leur part qu’une inattention dédaigneuse. […] En vain on rapporteroit la cause de cette invention funeste à la galanterie, goût dominant de la nation.

158. (1762) Lettres historiques et critiques sur les spectacles, adressées à Mlle Clairon « Lettres sur les Spectacles à Mademoiselle Clairon. — LETTRE IV. » pp. 68-81

Mais si vous avez un son de voix plus agréable, un langage plus poli, des sentimens plus délicats, cette maniere de flatter les passions est nécessaire, relativement aux gens qui vous écoutent ; la populace n’entendroit rien aux maximes que vous débitez & les sottises des Histrions choqueroient les personnes qui fréquentent vos Spectacles ; il faut un aliment préparé selon le goût respectif des Convives que l’on veut regaler. […] Outre l’impression générale du Spectacle sur la Religion des assistans, les Acteurs ont souvent sur les lévres le langage de l’impiété : il faut des traits hardis pour réveiller l’attention, & pour flatter le goût peu chrétien du siécle ; c’est un moyen sûr d’être applaudi, & d’en imposer aux sifflets du Parterre.

159. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — [Première partie.] — Neuvième Lettre. De la même. » pp. 233-241

Jamais le goût du Théâtre ne fut si vif, si général. […] Je trouverais bien un autre inconvénient dans ce goût des Spectacles devenu trop commun : c’est que les Grands dédaigneront peut-être de le partager avec le Peuple : alors plus de chef-d’œuvres à espérer dans le Dramatisme ; plus de grands Acteurs, dans le Mimisme ; la Comédie retournerait sur les tréteaux : car, qui voudrait écrire pour le peuple ?

160. (1823) Instruction sur les spectacles « Conclusion. » pp. 195-203

Vous, qui ne fréquentez les théâtres que pour vous décharger du poids de l’oisiveté, et qui n’y éprouvez que de l’ennui, cessez donc de rechercher un divertissement dont vous sentez bien le vice et le faux : craignez que votre assiduité à y aller ne vous en fasse naître le goût, et ne le rallume en vous, s’il était éteint ; souvenez-vous que l’on apprend facilement à faire ce que l’on a coutume de voir. […] C’est pour satisfaire votre goût déréglé pour les plaisirs, qu’ils renoncent en quelque sorte à leur salut.

161. (1760) Critique d’un livre contre les spectacles « FRAGMENT D’UNE LETTRE A ME. DE ****. SUR LES SPECTACLES. » pp. 82-92

Le goût seul devrait être le conseiller des talents ; il serait à souhaiter qu’il fût toujours le père de la critique, et que le fiel et la noirceur n’en composassent pas autant de satires empoisonnées. […] Il n’y a peut-être aujourd’hui que M. de Voltaire qui puisse, par la force de ses Tableaux, s’opposer avec succès au goût efféminé de ce siècle.

162. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre VII. Est-il de la bonne politique de favoriser le Théâtre ? » pp. 109-129

Avant le jeu se passe le temps en devis impudiques, jeux de dés, gourmandises, ivrogneries, querelles, etc. » L’historien Matthieu, pour faire sa cour à Henri III, composa la Guisiade, mauvaise pièce dans le goût du temps, où il jouait le Cardinal et le Duc de Guise, que ce Prince n’aimait pas, et qu’il fit mourir. […] Qu’on rabatte, à la bonne heure, de la grossièreté de ces termes, qui en effet ne sont pas du goût de notre siècle, qu’on accorde de la politesse, de la civilité aux Acteurs de Paris ; mais les mœurs des troupes sont toujours les mêmes, et les Etats du royaume n’auraient pas moins de doléances à faire que dans le seizième siècle. Le théâtre, comme tout le reste, doit sans doute, selon le génie des nations ou des siècles, le goût de la Cour ou de la ville, la diversité des modes, la variété des circonstances, le caractère des Auteurs, prendre des tons différents de modération ou de débauche, de différentes nuances de décence ou d’effronterie ; mais ce n’est que changer d’habit, le fond est toujours le même, c’est toujours une troupe de gens sans religion et sans mœurs, qui ne vit que des passions, des faiblesses, de l’oisiveté du public, qu’il entretient par des représentations le plus souvent licencieuses, toujours passionnées, et par conséquent toujours criminelles et dangereuses, et qui enseigne et facilite le vice, le rend agréable, en fournit l’objet, et y fait tomber la plupart des spectateurs. […] Les attraits de la passion, le goût du vice, le langage du péché, les mouvements du cœur, les nudités, les attitudes séduisantes, la magie de la décoration et des parures, les pièges de la coquetterie, les agaceries, la vénalité des Actrices, les adresses de l’hypocrisie, les artifices de la fourberie, etc. toutes ces batteries de l’enfer sont autant et plus que jamais dressées au théâtre. […] Auguste, moins grand que son père adoptif, se prêta au goût de son temps, parut aimer, peut-être aima-t-il les spectacles, donna beaucoup de fêtes, pour amuser un peuple remuant, dont sa domination naissante avait à craindre les cabales.

163. (1675) Traité de la dévotion « Prière. » p. 68

Ô Mon Dieu, mon divin Sauveur, viens remplir mon âme de ces douceurs que tu communiques à tes fidèles serviteurs ; donne-moi le pain descendu des cieux, la vraie manne et le pain des Anges qui me fasse goûter des plaisirs lesquels étouffent le sentiment des plaisirs du monde, et le goût de ses divertissements ; que tes sabbats fassent mes délices ; que ta parole me soit plus douce que le miel, et que les rayons de miel ; et que la méditation des joies que tu me prépares dans ton ciel me ravisse de telle manière, que je ne sois plus ni au monde ni à moi, mais que je sois tout entier à toi.

164. (1694) Réfutation des Sentiments relâchés d'un nouveau théologien touchant la comédie « AVERTISSEMENT »

Cependant comme je vois que ceux qui ont écrit sur cette matière, ne laissent pas pour cela de donner leurs Ouvrages au Public, sans doute parce que les raisonnements de la Lettre subsistent toujours, et qu’on ne doit rien oublier pour les détruire : je me trouve engagé à joindre mon Ouvrage à ceux qui ont déjà paru, croyant qu’on ne peut trop écrire là-dessus, et qu’il est bon pour contenter les goûts différents, qu’on écrive en différentes manières.

165. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme. — Chapitre II. Charles XII. » pp. 32-44

El semble que la foiblesse y ait établir son empire avec la mollesse ; & la comédie que Frederic fit jouer à Dresde, & où il mena la Famille royale, le jour même où il s’empara de cette capitale, est très-conforme au goût régnant de cette cour, quoique très-opposée à l’humanité & la décence. […] Le Czar prit goût aux triomphes. […] Leibnitz n’influa point sur les sentimens du Roi de Suede : ce guerrier le vit à peine un instant à Leipsick, & ne s’embarrassa gueres de toute sa science ; il étoit trop occupé de la guerre de Pologne & de Saxe, pour s’amuser à des discussions philosophiques fort peu de son goût, & où il n’eût rien entendu.

166. (1768) Réflexions sur le théâtre, vol 7 « Réflexions sur le théâtre, vol 7 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SEPTIÈME. — CHAPITRE VIII. Sentimens de S. Chrysostome. » pp. 181-192

Mais quand ils entendent vos applaudissemens, qu’ils voient la foule des spectateurs, & l’argent qui leur en revient, n’eussent-ils aucun goût, ils y viendroient par intérêt. […] Chrysostome n’a presque laissé que des sermons à un peuple livré au théatre & à la débauche, & tout ramène à cet objet, parce que le théatre influe sur tout par les passions de toute espèce qu’il représente & qu’il excite, & que tout à son tour influe sur le théatre par la nécessité où il est pour plaire de se conformer au goût dominant, & de flatter les vices du siecle, par conséquent d’en prendre les sentimens, les erreurs & les modes. On pourroit ajouter une foule d’autres passages sur les objets qui tiennent à celui-ci, sur les maximes de l’Evangile qu’ils proscrivent, sur les vertus qu’ils condamnent, sur les vices qu’ils favorisent, sur la chasteté qui y fait naufrage, sur l’humilité dont il méprise la bassesse, sur la charité dont il éteint les feux, sur la foi dont il affoiblit la soumission, la mortification dont il redoute les rigueurs, la pauvreté dont il abhorre les besoins, la piété dont il desseche l’onction, la patience dont il ne peut souffrir l’égalité, la fidélité conjugale dont il se fait un jeu, en un mot toute la religion dont il renverse jusqu’au fondement ; sur la vengeance dont il allume les fureurs, la vanité dont il exalte les délires, sur le luxe & le faste dont il étale les excès, sur la médisance dont il verse à grands flots le poison, sur l’immodestie des parures dont il présente le modelle, sur le mépris des parens dont il donne des leçons, la jalousie dont il répand le motif & le germe, l’oisiveté à laquelle il consacre tous les temps de la vie, la fourberie dont il enseigne les artifices, l’irréligion dont il seme le goût & les principes, en un mot le corps entier du péché dont il établit puissamment l’empire.

167. (1759) L.-H. Dancourt, arlequin de Berlin, à M. J.-J. Rousseau, citoyen de Genève « CHAPITRE VI. Où l’on examine si le Bal public proposé par M. Rousseau ne serait pas plus préjudiciable aux mœurs de Genève, que le spectacle qu’il proscrit. » pp. 211-224

Les hommes iront au Cercle se dessécher les poumons avec la pipe, et boire à la Suisse, pour édifier tous les Philosophes de votre goût. […] « Le goût du Vin, dites-vous, n’est pas un crime. »fv La maxime est nouvelle. Je vous ai prouvé que le goût du spectacle n’en est pas un non plus.

168. (1667) Traité de la comédie et des spectacles « Sentiments des Pères de l'Eglise sur la comédie et les spectacles — 6. SIECLE. » pp. 180-181

Nous quittons le manger, nous abandonnons notre maison, nous négligeons nos affaires importantes, pour nous occuper à ces vanités, et à ces infâmes divertissements; et nous ne voulons pas demeurer une heure dans l'Eglise pour vaquer à la prière, et à la lecture, et pour nous tenir en la présence de Dieu: Nous nous hâtons d'en sortir aussi vite que si nous nous retirions d'un embrasement: Si la Prédication de l'Evangile dure un peu trop, nous faisons éclater notre indignation, et notre impatience : Si le Prêtre fait des prières un peu longues, nous sommes sans goût, et sans attention : Si celui qui offre le sacrifice non sanglant tarde tant soit peu, nous nous ennuyons, et nous regardons la prière comme un procès dont nous voudrions avoir une prompte expédition ; et cependant suivant les mouvements du Diable, nous nous emportons dans les vanités, et dans les voluptés.

169. (1752) Traité sur la poésie dramatique « Traité sur la poésie dramatique —  CHAPITRE VIII. Dans quelle Nation la Poësie Dramatique Moderne fit-elle les plus heureux progrès ? » pp. 203-230

Celles du Cardinal Delfino, qui suivant Crescembeni, doivent confondre notre jalousie, sont dans le même goût. […] C’est dans ce même goût qu’il a composé les siennes, qui étant celles d’un homme plein de la lecture des bons Ouvrages de l’Antiquité & des nôtres, sont malgré leurs défauts, préférables à toutes celles que Gravina & Crescembeni vouloient nous faire admirer. […] Les exemples que j’ai rapportés de la maniere dont ils ont imité quelques-unes de nos meilleures Piéces, font connoître leur goût. […] C’est encore Pope qui nous apprend à placer l’époque d’un meilleur goût dans la Tragédie Angloise, au Caton d’Addisson, lorsque dans le Prologue qu’il a fait pour cette Piéce, il s’adresse en ces termes à ses Compatriotes : Voici, Anglois, un Ouvrage digne de votre attention.

170. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 1 « LIVRE PREMIER. CHAPITRE I. Le Clergé peut-il aller à la Comédie ? » pp. 10-27

Il y avait à Alexandrie, sous le nom de Parabolani, une espèce d’Ecclésiastiques fort nombreux, qui n’avaient d’autre fonction que de veiller et de soigner les malades, surtout les pauvres, à peu près dans le goût de nos Sœurs grises, qui vont leur porter le bouillon, et dans celui des compagnies de Pénitents blancs, noirs, gris, bleus, rouges, jaunes, etc., établis dans les provinces méridionales de France, qui vont chaque semaine visiter les pauvres malades. […] On lui en inspire le goût dès le collège, on lui en donne les allures, on en cultive les talents, on en loue les succès, on en admire les ouvrages. […] Le goût a si bien gagné dans le Clergé, que la plupart des ouvrages sur le dramatique ont été composés par des Ecclésiastiques ou des Religieux, et presque tous Jésuites ou ex-Jésuites. […] Rollin, en donnant aux jeunes gens le goût et la curiosité du théâtre, ne contribue pas peu à les y livrer quand ils sont dans le monde.

171. (1775) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-septieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre III. Théatre de Pologne. » pp. 80-105

Il y a du goût, de l’art, de l’esprit dans ce spectacle : il est difficile de croire que les Russes l’aient imaginé & exécuté ; sur-tout ceux qui étoient en Pologne ne sont que des soldats & des officiers, qui ne faisoient depuis plusieurs années d’autres métier que de piller, de ravager le royaume. […] C’est faire souffrir à ce saint d’une des plus illustres famille du Royaume, un second martyre dans le goût du premier. […] Tous les goûts seront satisfaits, c’est-à-dire, toutes les passions, tous les vices. […] Le goût du spectacle est devenu si dominant chez les Sarmates, que le Grand-Général Braniki, Ambassadeur à la Cour de Russie, pour menager les intérêts du Roi & de la République, dans une crise si violente, étant venu de Petersbourg à Varsovie, aulieu d’aller rendre compte au Roi & aux ministres du succès de son ambassade, courut dès son arrivée à la comédie, & alla ensuite parler des affaires de l’Etat. […] Ce noble goût gagne de proche en proche, & semble refluer dans les royaumes voisins, à mesure qu’on fait des conquêtes.

172. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme. — Chapitre I. Continuation des Mêlanges. » pp. 7-31

Gesner, fils d’un Imprimeur & Imprimeur lui-même, a reçu une éducation conforme à son état : son goût l’a fait monter au Parnasse. […] Il choisit la partie la plus facile, les Operas saints & profânes, dans le goût italien. […] Voulez-vous, dit-il, les histoires des grands hommes de tous les siecles traitées avec goût ? Choisissez dans nos bons tragiques les traits les plus frappans de leurs vies ; composez de ces magnifiques lambeaux des histoires à la portée & conformes au goût des enfans. […] Le même goût de singularité lui fait étudier l’histoire dans l’Esprit des Loix du Président de Montesquieu.

173. (1759) L.-H. Dancourt, arlequin de Berlin, à M. J.-J. Rousseau, citoyen de Genève « CHAPITRE II. De la Tragédie. » pp. 65-91

Votre goût s’accorde bien mal avec celui de nos critiques, qui sont reconnus pour en avoir beaucoup : ils reprochent à M. de Crébillon de n’avoir pas, au contraire, assez fait parler Cicéron. […] Ne dirait-on pas enfin que le Public vous ait fait le dépositaire de ses intérêts ; et que prévenu pour vos lumières il ait renoncé à se servir des siennes, et qu’il ait mis sur votre conscience toutes les erreurs dans lesquelles il peut tomber, en matière de goût ou de sentiment ? […] Le goût et les lumières de Madame D., digne nièce du plus célèbre des Oncles, suppléait à la privation des leçons de notre cher maître. […] Le Cicéron de Rome sauvée, si éloquent, si ferme, si grand dans ses démarches au goût de tout le monde, se serait-il métamorphosé à vos yeux seuls en « vil rhéteur » ? […] Il faut avoir l’âme bien sanguinaire, le jugement bien faux et le goût bien dépravé pour croire les massacres des gladiateurs un spectacle moins odieux que celui de Mahomet ou d’Atrée : ceux-ci sont dévoués l’un et l’autre à l’exécration publique, les autres étaient dévoués à une curiosité sanguinaire, et au caprice le plus détestable.

174. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 1 « CHAPITRE V. Des Pièces tirées de l’Ecriture sainte. » pp. 96-119

Non : on lira par curiosité, pour comparer l’ouvrage du Poète avec celui de Dieu ; la sécheresse de celui-ci auprès de la pompe du drame, ne sera plus qu’une narration insipide ; comment y trouver ce goût, cette onction céleste dont se nourrit l’âme sainte ? […] Le peu qu’ils en savent, ne l’accommodent-ils pas à leur goût et à celui du public ? […] La conduite et le théâtre de Pélegrin étaient dans le même goût ; il disait la messe tous les matins, et parcourait le soir les spectacles. […] « On ne pût souffrir, dit Fontenelle dans la vie de son oncle, la seule idée du péril de la prostitution, quoiqu’on sût qu’il n’aurait point d’effet. » Il attribue la délicatesse du public au goût de décence que Corneille avait inspiré. […] Qui peut ne pas rire entendant une Comédienne dire fort dévotement à Dieu : « Pour moi que tu retiens parmi ces infidèles, Tu sais combien je hais leurs fêtes criminelles ; Que cette même pompe où je suis condamnée, Ce bandeau dont il faut que je paroisse ornée, Dans les jours solennels à l’orgueil dédiés, Seule et dans le secret je les foule à mes pieds ; Qu’à ces vains ornements je préfère la cendre, Et n’ai de goût qu’aux pleurs que tu me vois répandre. » Athalie eut d’abord le même sort, dit la Baumelle, par la même raison.

175. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 1 « CHAPITRE VI. De la Religion sur le Théâtre. » pp. 120-142

elles ont le goût du théâtre. […] Le théâtre Anglais est dans ce goût d’irréligion. […] peut-on avoir un goût si faux pour se repaître de chimères si palpables ? […] « Bien des gens disent fort sérieusement à Paris que Molière a plus corrigé de défauts à la cour et à la ville, lui seul, que tous les Prédicateurs ensemble, et je crois qu’on a raison, pourvu qu’on ne parle que de certaines qualités qui ne sont pas tant un crime qu’un faux goût, comme l’humeur des prudes et des précieuses, de ceux qui outrent les modes, qui s’érigent en Marquis, qui ont toujours quelque pièce de leur façon à montrer, etc. […] Ce mélange fait qu’elles deviennent odieuses par la sainteté du sujet, ou que la sainteté du sujet est méprisée par le goût de la coquetterie.

176. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 3 « Chapitre III. Du Cardinal de Richelieu. » pp. 35-59

Le goût du Prince ayant changé à leur égard, ils n’y paraissent plus, ils y seraient sifflés, et leur banc a été donné aux Officiers des Gardes du corps, auxquels il convient mieux. […] Jugeons par ce trait des largesses et du goût du Cardinal : Colletet, un des cinq favoris, n’avait en naissance, en fortune, en talents, en ouvrage, en bonnes mœurs, d’autre mérite que d’avoir su s’insinuer dans le bureau politique. […] Il a même survécu à la critique ; toute belle qu’elle est, elle est peu connue ; le Cid subsiste, quoique sa vogue ait bien diminué, peut-être même que la haine qu’on avait pour le Ministre, et le mépris qu’on faisait de sa basse jalousie, donnèrent un nouveau lustre à ce qu’on persécutait avec tant d’acharnement : « En vain contre le Cid un Ministre se ligue, Tout Paris pour Chimène a les yeux de Rodrigue ; L’Académie en corps a beau le censurer, Le public révolté s’obstine à l’admirer. » Je doute qu’aujourd’hui une tragi-comédie pût produire ni ce mouvement dans le ministère, ni cette jalousie dans les Poètes, ni cet enthousiasme dans le public ; on a trop de goût et de lumières, on a trop vu de bonnes tragédies, pour admirer avec cet excès un petit nombre de traits vraiment sublimes déparés par bien des défauts, et noyés dans un tas de choses médiocres et triviales. […] Bien des gens qui ne peuvent se persuader que la faiblesse d’un homme si célèbre pût aller si loin, ont cru qu’il n’agissait que par politique, et il est vrai que le goût des spectacles pouvait servir à ses vues, et qu’il était trop habile pour ne pas tirer parti même de ses plaisirs. […] Il ne pouvait y travailler plus efficacement qu’en employant deux moyens qui se soutiennent et s’aident mutuellement, le luxe et le théâtre : ce luxe, ce faste, jusqu’alors inconnu en France, qu’il étala jusques sous les yeux du Roi, honteux d’être moins bien logé, meublé, nourri, habillé que son Ministre, et qui après la mort du Cardinal alla occuper sa maison, pour être logé d’une manière plus décente : goût de luxe continué et porté au comble par Louis XIV, qui de proche en proche a infecté tous les états, même le Clergé ; les grands Bénéficiers depuis ce temps-là le disputent en magnificence aux plus mondains.

177. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre douzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et litteraires, sur le théatre. — Chapitre III.  » pp. 68-96

Psiché qui avoit du goût & du génie ne se contenta pas de la mithologie, dont on ui joua les fables, elle voulut de l’histoire. […] Elles lui expliquent les diverses façons d’aimer en usage chez tous les peuples ; leur goût, leurs rafinemens, les nuances de leurs passions. […] Cette piéce très-mediocre, oubliée depuis plusieurs années fut extrêmement célébre dans son tems, par les soins & le goût de Louis XIV ; & la reputat on de cès quatre auteurs, qui sembloient y avoir fondu tous leurs talents. […] La place du fard n’est pas moins arbitraire que la couleur, selon l’usage du pays & le goût des coquettes. […] le grand Corneille, le grand Rousseau, le petit Dom-Pelegrin, &c ont exercés leur verve sur ces anciens modeles, des magiciennes du théatre : la peinture, la musique, la danse n’ont eu garde de négliger un si riche fond ; ce n’est, il est vrai, qu’un tissu de forfaits horribles, & assez peu vraissemblables, dans des Princes qu’on n’auroit jamais du représenter ; il n’en sont que plus au goût de la scéne, & des Medées qui les remplissent, qui s’y peignent si naturellement elles-mêmes & leurs Jasons.

178. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quatorzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littérairesn sur le théatre. — Le Comte de Chavagnac & le Marquis de… » pp. 188-216

Il fit en entrant plusieurs révérences grotesques, s’avança à travers la foule des Courtisans, & fit cette harangue dans le goût des maîtres à danser, à chanter du Bourgeois Gentilhomme, en ces termes : Je viens présenter à Votre Majesté une nouvelle merveille du monde, inconnue jusqu’à nos jours. […] On y trouve, pour contenter tous les goûts, des filles de joie de tous les pays, parées comme des Reines, qui attrapent tous ceux qu’elles peuvent. […] On prétendoit en tirer une moralité : les six yeux représentent la curiosité des femmes qui veulent tout voir les trois bouches leur caquet, les trois nez leur goût pour le parfum, la fumée leur inconstance, le paon leur vanité, l’épée leurs querelles avec leurs maris. […] Le détail de religion n’est guere du goût de ce siecle : peut-on ne pas gêmir que ce siecle ait eu le malheur de perdre ce goût ? […] C’est assez le goût d’Angleterre ; les piéces de théatre y sont les plus licentieuses, les actrices les plus indécentes.

179. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Causes de la décadence du goût sur le théâtre. — Chapitre XIII. De l’éducation des jeunes Poëtes, de leurs talents & de leurs sociétés. » pp. 204-218

Ils y donnent des leçons de goût, de Philosophie, & d’une judicieuse littérature. […] Mais l’étude du grand monde, achevant de perfectionner leur goût naturel, ils augmentent le nombre des connoisseurs.

180. (1762) Lettres historiques et critiques sur les spectacles, adressées à Mlle Clairon « Lettres sur les Spectacles à Mademoiselle Clairon. — LETTRE VII. » pp. 115-130

Quantité de personnes disent fort sérieusement à Paris, que Moliere a plus corrigé de défauts à la Cour & à la Ville, que tous les Prédicateurs ensemble ; & je crois qu’on ne se trompe pas, pourvu qu’on ne parle que de certaines qualités qui ne sont pas tant un crime, qu’un faux goût, ou un sot entêtement : comme vous diriez l’humeur des Prudes, des Précieuses, de ceux qui outrent les modes, qui s’érigent en Marquis, qui parlent incessamment de leur noblesse, qui ont toujours quelques poësies de leur façon à montrer aux gens, &c. […]           Aimable jeunesse,           Profitez du tems,           De vos jeunes ans,      Donnez-vous à la tendresse, Ne perdez point ces précieux momens           La beauté se passe,           Le tems s’efface,            L’âge de glace            Vient à la place, Qui vous ôte le goût de ces doux passe-tems.

181. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — Seconde partie. Notes. — [N] » pp. 431-435

Le moyen que je viens de proposer, pour rendre utile le Théâtre-Ephébique, n’est pas le seul ; il en est un autre, peut-être moins avantageux pour les jeunes Acteurs, mais dont l’effet serait plus présent pour le Public : Qu’on abandonne tout-à-fait le mauvais genre de Pièces, adopté, faute de pouvoir mieux par le Néomime soumis au caprice des Grands-Comédiens : au lieu d’intrigues communes & triviales, de passions froides, dont l’expression est aussi gauche que messéante dans la bouche des Enfans-acteurs, qu’ils jouent de petites Pièces plus proportionnées à leur âge ; par exemple, que ces nouvelles Atellanes peignent les passions, les goûts, les défauts de l’Enfance : qu’on prenne encore des sujets naïfs dans les Fables de Lafontaine de Lamotte &c. […] Ceux que la proximité, le goût d’un Actricisme enfantin, & le peu de dépense attirent chez le Néomime, n’iraient que rarement aux autres Spectacles. 4.

182. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — Seconde partie. Notes. — [O] » pp. 436-440

En effet, tel était alors le goût des plaisirs, que lui seul pouvait faire perdre aux Romains cette idée de liberté si chère à leurs ancêtres. […] Sénèque le père, qui exerçait une profession des plus grâves, confesse que son goût pour les Représentations des Pantomimes, était une véritable passion.

183. (1715) La critique du théâtre anglais « AVERTISSEMENT DU TRADUCTEUR. » pp. -

Un autre avantage, c’est qu’on sera désormais au fait sur le goût Anglais, en matière de composition et d’ouvrage purement de belles lettres. […] Il me pardonnera aussi d’avoir accommodé à notre goût, comme il a fait à celui de son pays, la version des Pères de l’Eglise qu’il rapporte : quoiqu’à dire le vrai, je les aie le plus souvent traduits d’après lui, tant ils m’ont paru semblables à eux-mêmes dans la traduction.

184. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — PREMIERE PARTIE. — CHAPITRE VII. Quelle doit être la Comédie après la réformation du Théâtre. » pp. 69-85

Mon véritable sentiment serait donc que l’on imitât, en cela, les Anciens qui ont diversifié la Comédie, en l’accommodant au temps, aux mœurs et au goût des Spectateurs. […] Concluons donc, avec les Partisans du Théâtre, que, si on abolissait la Comédie, on ferait un grand tort à la République ; puisqu’il ne resterait plus de moyen d’inspirer de l’horreur pour le vice et de donner du goût pour la vertu à ce grand nombre d’hommes qui, comme nous l’avons déjà dit, ne vont guère à d’autre Ecole que le Théâtre, et qui, sans les leçons qu’ils y reçoivent, ignoreraient, toute leur vie, leurs défauts, loin de travailler à s’en corriger.

185. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre quatriéme. — Chapitre prémier. Le sujet. » pp. 160-182

Avant que notre Spectacle ait fait passer en revue tous les Arts & Métiers, il se sera fait de grands changemens dans le goût, dans la façon de penser des Français. […] Il est pourtant probable qu’un Auteur Dramatique doit saisir dans ses Pièces le goût de sa Nation. […] Je dirai peut-être encore ailleurs combien le goût d’un Peuple influe sur les actions de ses Drames ; mais j’espère qu’on me pardonnera de parler souvent du Théâtre de nos Voisins.

186. (1823) Instruction sur les spectacles « Table des chapitres. » pp. 187-188

Les spectacles éteignent le goût de la piété. 131 Chap. 

187. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 1 « [Introduction] » pp. 1-9

[Introduction] Le goût des Spectacles est devenu dominant en France : l’Italie et l’Angleterre l’adoptent, l’Espagne ne s’en éloigne pas, il gagne les royaumes du nord. […] Les pièces dramatiques font les délices des gens de goût, nulle fête n’est bien solennisée sans elles ; en être le spectateur, c’est un devoir ; amateur, un mérite ; auteur, quelle gloire !

188. (1756) Lettres sur les spectacles vol.1 pp. -610

dans son état actuel, est-il même une école du génie & du goût ? […] L’on craindroit que les Spectacles n’y diminuassent le goût du travail, & n’y introduisissent la licence. […] Une Nation varie dans son langage, dans le goût de ses plaisirs, comme dans la maniere de s’habiller. […] Voilà d’où naît la diversité des Spectacles, selon les goûts des diverses Nations. […] Mais tel est le goût qu’il faut flatter sur la Scene ; telles sont les mœurs d’un siecle instruit.

189. (1758) P.A. Laval comédien à M. Rousseau « P.A. LAVAL A M.J.J. ROUSSEAU, CITOYEN DE GENÈVE. » pp. 3-189

Petit à petit le goût changera lorsqu’on en connoîtra la dépravation. […] Il faut servir tout le monde à son goût. […] Premierement tout le monde sait que le goût de la Comédie est général parmi vos compatriotes. […] Vous craignez qu’on en perde tout-à-fait le goût. […] Mais enfin le goût du vin n’est pas un crime, il en fait rarement commettre (rarement !

190. (1774) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre seizieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre V. Suite des Parfums. » pp. 112-137

Il avoue que c’est une affaire de goût & de mode, que tel qui avoit eu la plus grande vogue, est aujourd’hui méprisé, & tel autre dont on faisoit peu de cas, fait aujourd’hui les délices. […] On porte ses goûts dans la dévotion comme dans tout le reste. […] Gregoire de Nazianze, un des grands hommes qu’ait eu l’Eglise par ses vertus & ses talens, n’étoit pas au goût du monde ni du Clergé de son temps, à cause de sa simplicité & de sa modestie. […] Des sons harmonieux réjouiront l’oreille, des objets agréables plairont aux yeux, des goûts délicieux flatteront les palais ; l’odorat aussi aura sa satisfaction propre, toutes les délices sont réunies dans le Ciel. L’enfer ne rassemble pas moins tous les tourmens, des monstres hideux tourmentent la vue ; la faim, la soif, le siel & l’absinthe sont les supplices du goût.

191. (1775) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-septieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre IV. Suite d’Anecdotes Ecclésiastiques. » pp. 106-132

Il n’a pas exercé le métier de comédien, mais il en portoit la décoration, & il en avoit le goût & les talens. […] Il a des titres bisarres & des idées singulieres : rayons du soleil de justice, bouquet de fleurs célestes, discours sentencieux, selon le goût du temps : du reste rempli de piété, morale solide, connoissance de l’Ecriture sainte. […] la Rue, jésuite, célebre prédicateur & bon poëte, a eu pour le théatre dans sa jeunesse un goût plus décidé qu’il ne convenoit à son état. […] Malgré ces décorations théatrales, condamnées par les anciens, mais si fort goûtées par les élégans, malgré le goût régnant de philosophie & de théatre, croira-t-on (telle est la force de la vérité) que ces constitution si mitigées défendent absolument tous les spectacles, ba’, comédie, opéra, jeux publics, & toutes les folies de ce caractere ? […] Il est surprenant qu’en observant ces regles pour les spectacles publics, on se permettre d’en représenter dans les couvens ; quoiqu’à la vérité moins licencieux, ils inspirent le même goût & produisent les mêmes effets.

192. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 2 « Chapitre VI. Suite de l’infamie civile. » pp. 126-152

., n’ont jamais aimé le théâtre, goût bien différent des folies des derniers siècles, qu’on traiterait mal à propos de gothique. […] Bien plus, elles donnent le ton et le goût de la parure (la plus modeste sans doute), elles inventent les modes ou les accréditent ; rien n’est bien, s’il n’est fait sur ce modèle ; la marchande de modes achète leur faveur pour se mettre en vogue. […] Ces lois, faites pour tous les états, ont une application naturelle aux Comédiens, soit par rapport à leur état et à leur personne, puisque étant dans la dernière classe, ils n’ont droit à aucune prérogative, et doivent être habillés de la manière la plus simple ; soit par l’abus qu’ils en font et qu’ils en font faire, personne ne porte plus loin les excès du luxe des habits, et par le goût et l’exemple rien n’est plus contagieux dans le public. […] N’y eût-il que le goût du théâtre et l’envie d’y aller, qu’ils ne peuvent manquer de leur donner, ce seraient les leçons les plus pernicieuses. […] Car en tolérant les spectacles pour éviter un plus grand mal, aucun Prince, aucune loi ne s’est jamais avisé de les déclarer innocents, encore moins la profession de Comédien, que toutes les lois civiles et canoniques sans exception ont condamnée, même en la tolérant ; surtout un Prince aussi pieux que Louis XIII, qui n’avait point de goût pour la comédie, et désapprouvait la conduite et les dépenses énormes du Cardinal à cet égard, oserait-il tenir un langage si contraire à la religion.

193. (1782) Le Pour et Contre des Spectacles « Seconde lettre contre les spectacles. » pp. 60-145

« Cet Académicien, qui fut plus d’une fois utile à son corps, par son goût &c, » est Auteur d’un excellent traité de l’Éducation des filles. […] Voltaire au contraire fait l’humiliant aveu de flatter le goût du Corrége. […] Prenez son temple du goût. […] Je pouvois, sans doute, exclure celui des Poëtes Dramatiques, & de tous ceux qui sont attachés aux Théatres par goût, par intérêt, ou par passion. […] Cette réponse ne fut pas du goût d’une Dame fort partisante des spectacles, & Mademoiselle sa fille fut fort aise de la voir en prendre la défense.

194. (1752) Essai sur la comédie nouvelle « ESSAI SUR LA COMEDIE MODERNE. » pp. 1-160

C’est un fort méchant plat que sa sotte personne, Et qui gâte à mon goût tous les repas qu’il donne. […] Depuis que dans la tête il s’est mis d’être habile, Rien ne touche son goût, tant il est difficile. […] On est persuadé qu’il n’y en met que pour céder à la nécessité, et pour servir les spectateurs, suivant le goût où les Poètes ses prédécesseurs l’ont accoutumé. […] Poète par goût, plus que par étude, ce fut un feu de jeunesse, non la malignité de la fortune qui le fit Comédien. […] Comment un Discours qui blâme des plaisirs que le monde chérit, pourrait-il respirer le goût du monde ?

195. (1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « XII. De l’autorité des Pères.  » pp. 49-51

Que si on veut pénétrer les principes de leur morale, quelle sévère condamnation n’y lira-t-on pas de l’esprit qui mène aux spectacles, où pour ne pas raconter ici tous les autres maux qui les accompagnent, l’on ne cherche qu’à s’étourdir et à s’oublier soi-même, pour calmer la persécution de cet inexorable ennui qui fait le fond de la vie humaine, depuis que l’homme a perdu le goût de Dieu ?

196. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — A SA MAJESTÉ IMPERIALE ELISABETH PREMIERE, IMPERATRICE DE TOUTES LES RUSSIES. » pp. -

Cette réforme, si difficile à faire chez les Peuples que l’usage et le temps ont accoutumé à ne pas sentir les défauts de leurs Spectacles, peut facilement être embrassée par une Nation, qui n’a connu les Spectacles qu’en passant, et dont le goût n’est encore fixé sur aucun genre.

197. (1783) La vraie philosophie « La vraie philosophie » pp. 229-251

Le goût des spectacles reparut-il ? […] Aussi que de jeunes sujets en qui l’on avoit admiré les germes des talens les plus intéressans pour la patrie, ne sont devenus que des citoyens inutiles & dangereux, immolés à l’oisiveté & au libertinage ; que pour avoir été respirer imprudemment aux théatres cet air de frivolité & de corruption qui pervertit le jugement, & fait perdre le goût de toute espece d’application, C’est l’aveu que faisoit le Prince de Conty, en écrivant contre les spectacles. […] C’est sur ces impertinens amphigouris que nos Musiciens épuisent leur goût & leur savoir, & nos Acteurs leurs gestes & leurs poulmons. […] On nous dit chaque jour que le théatre épuré par le goût & la décence, est devenu pour les modernes, une école de mœurs.

198. (1766) Réflexions sur le théâtre, vol 5 « Réflexions sur le théâtre, vol 5 — REFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE CINQUIÈME. — CHAPITRE IV. De la Médisance. » pp. 80-99

Ce goût bizarre, cet assemblage ridicule n’a pas fait fortune chez les autres nations, où l’on a assez constamment séparé ces deux genres. […] Tel est en effet le goût nationnal, qu’il seroit utile au public d’affoiblir & de corriger. […] Quand le goût du spectacle s’est répandu, il n’a fallu que battre la caisse, il s’est formé de toutes parts cent troupes d’Acteurs pour les théatres particuliers ou pour les publics. […] Mais il est surprenant qu’on ne sente pas que le bien public demande qu’on arrête cette funeste source de désordres, & qu’on souffre des jeux qui l’ouvrent à tout le monde, font boire de ses eaux, & en donnent le goût.

199. (1769) Réflexions sur le théâtre, vol 8 « Réflexions sur le théâtre, vol 8 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE HUITIEME. — CHAPITRE VI. Euphemie. » pp. 129-148

Je ne doute pas que le goût aujourd’hui dominant du théatre ne contribue à cette haine & à ce mépris, & je ne comprends pas comment les Communautés Religieuses ont pu s’aveugler sur leurs intérêts, jusqu’à le favoriser, à composer, à faire représenter des pieces dans leurs maisons, à donner des règles de l’art dramatique, dont une bonne politique devoit les rendre ennemis déclarés. […] Voilà le poison de trois pieces qui ont paru depuis peu, le Comte de Comminges, Ericit, ou les Vestales, Euphemie, ou le Triomphe de la Religion, & apparemment des autres que le sieur Arnaud menace de nous donner dans le même goût. […] Maître de mon sort, de mes goûts, à la face du ciel m’avouer ton époux. […] C’est un goût infernal.

200. (1769) Réflexions sur le théâtre, vol 8 « Réflexions sur le théâtre, vol 8 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE HUITIEME. — CHAPITRE VIII. Sentiment de S. Thomas. » pp. 178-198

Thomas ajoute que si on y représente des choses indécentes ou capables de porter au péché, turpium vel ad peccatum provocantium, on pèche en les regardant avec plaisir ; ce plaisir & ce goût peuvent être si grands, que le péché sera mortel : Tanta potest exhiberi libido ut sit mortale. […] A quoi il répond que sans doute en général, regarder la représentation de quelque chose n’est point un mal, mais que la vue des spectacles devient vicieuse, vitiosa redditur inspectio spectaculorum, parce que par ce moyen l’homme prend du goût & de l’inclination pour les vices d’impureté ou de cruauté : Per hæc homo fit pronus ad vitia lasciviæ vel crudelitatis. […] Ce jeune homme, qui s’étant converti, avoit renoncé au spectacle, y fut entraîné par ses amis, & d’abord tint les yeux fermés ; mais les ayant ouverts par curiosité, au cri que fit le parterre, ne put résister à la tentation, & revint à ses premiers goûts, & à son dérangement. […] L’air enjoué, le ton d’insinuation, la vivacité de la passion, le goût des spectateurs, la licence des Acteurs, l’immodestie des Actrices, le fonds du sujet, les épisodes, les intermèdes, &c. tout en fait un poison mortel.

201. (1758) Lettre à M. Rousseau pp. 1-42

Elles peuvent réussir aux petits ouvrages, qui ne demandent que de la légéreté d’esprit, du goût, de la grâce, quelquefois même de la philosophie et du raisonnement. […] L’image positive que vous vous êtes fait de la pudeur, suppose nécessairement une estime et un goût intérieurs pour les femmes ; cependant vous en parlez de façon à faire croire aux meilleurs esprits, que vous les méprisez souverainement, et que votre mépris est formé de haine et d’aversion. […] Toutes les qualités qui ne dépendent pas de la qualité du sang, il les avait ; droiture, fermeté, esprit, force, pénétration, goût, profondeur, philosophie. […] Ce n’étaient pas seulement de belles femmes, des femmes tendres ; le plaisir et la beauté n’eussent pas suffi pour séduire un homme tel que Zima : les vertus s’unissaient aux attraits ; l’esprit au sentiment ; les graces au génie, au goût, à la pénétration, aux qualités les plus touchantes et les plus rares, et formaient de ces tableaux qui forcent l’esprit à croire les prodiges, et le cœur à les adorer.

202. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 1 « CHAPITRE VIII. De la Comédie les jours de fête. » pp. 159-179

avez-vous du goût pour le ridicule, et voulez-vous fournir la matière de quelque scène comique ? […] Il faut de l’esprit et du talent pour bien rendre un personnage, comme il en faut pour faire un habit de goût, un ameublement bien entendu, une menuiserie, un équipage, etc. Mais l’œuvre n’est pas moins servile ; le corps et ses attitudes, la voix et ses inflexions, les pas, les gestes y dominent plus que l’esprit, qui n’est ici qu’une sorte de goût et de routine. […] L’idée de la comédie, portée à l’Eglise, portée partout, dégoûte de toute pratique de religion : le théâtre inspire un esprit de dissipation et de frivolité, un goût de mollesse et de volupté, un penchant à la satire et à la malignité, une tournure de mensonge et de fausseté, un ton d’irréligion et d’impiété, le mépris de tout objet sérieux, l’opposition à toute réflexion religieuse ; prière, lecture, instruction, visite des pauvres, pénitence, modestie, en un mot il éloigne de tout ce qui forme la vie Chrétienne.

203. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Seconde partie « Causes de la décadence du goût sur le théatre. — Chapitre XXII. De l’usage du Théatre relativement au Comédien. » pp. 104-121

Une routine aveugle, qui nous entraîne sans que nous sachions pourquoi ; qui détermine la volonté sans consulter la raison ; qui dirige nos actions sans égard pour le goût, pour la perfection, & pour nos intérêts. […] Au goût du public.

204. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre quatriéme. — Chapitre IV. Des Personnages. » pp. 239-251

Le goût du pays qu’ils habitent en est la vraie cause, aussi bien que leur siècle. […] Au reste, le Poète ne doit point se contraindre ; il peut à cet égard suivre son goût & ses idées particulières.

205. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre troisiéme. — Chapitre V. Il n’est point de Drame sans Mœurs. » pp. 139-141

« Les caractères des Drames comiques, s’écrie-t-il, sont fort communs, & toujours les mêmes. » Les siens sont variés avec goût, par une suite de cette éxactitude qu’on a de donner à chaque Artisan le genre qui lui convient.

206. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome II « De l’Art du Théâtre. — Chapitre dernier. Conclusion. » pp. 345-347

Si mes vœux étaient remplis, la gloire du Spectacle moderne & de ses Auteurs en deviendrait plus éclatante, plus réelle, & le goût de la Nation serait justifié.

207. (1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « XIV. Réponse a l’objection qu’il faut trouver du relâchement à l’esprit humain : que celui qu’on lui veut donner par la représentation des passions est réprouvé même par les philosophes : beaux principes de Platon. » pp. 58-60

Mais si notre goût corrompu ne peut plus s’accommoder des choses simples, et qu’il faille réveiller les hommes gâtés par quelques objets d’un mouvement plus extraordinaire ; en laissant à d’autres la discussion du particulier qui n’est point de ce sujet, je ne craindrai point de prononcer qu’en tout cas, il faudrait prouver des relâchements plus modestes, des divertissements moins emportés.

208. (1775) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-septieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre V. Remarques Angloises. » pp. 133-170

J’ai vu, par une mode bisarre & ridicule, ce goût poussé jusqu’à fermer les fenêtres & allumer les bougies, dans des repas donnés en plein jour. […] Il attribue aux révolutions d’Angleterre ce goût dominant d’irréligion, si contraire à la piété qui y avoit toujours régné. […] L’Etat y gagneroit : aulieu d’aller en France prendre le goût de la parure, ou en faire venir à grand frais les modeles, nous les aurions tous à Londres. […] La plupart des tragédies sont aussi terminées par quelque mort ; souvent par le suïcide, de toutes les morts la plus horrible : le goût du théatre anglois en offre même à découvert le spectacle révoltant. Il faut que le goût du théatre soit bien dépravé, il fait trouver d’affreuses délices dans le spectacle de la barbarie.

209. (1702) Lettre de M. l’Abbé de Bellegarde, à une Dame de la Cour. Lettre de Lettres curieuses de littérature et de morale « LETTRE. de M. l’Abbé de Bellegarde, à une Dame de la Cour, qui lui avait demandé quelques réflexions sur les pièces de Théâtre. » pp. 312-410

Avec le secours de ces deux livres, on sait tout ce qu’il faut savoir pour se former le goût sur les pièces de Théâtre, et pour en faire la critique ; car voilà précisément, Madame, ce que vous demandez. […] de Corneille a faite de ses propres ouvrages, vous instruira mieux, Madame, que toutes les poétiques du monde, et vous formera mieux le goût, que tous les autres livres ne sauraient faire. […] Despreaux ; il a travaillé selon le goût d’Horace ; le Moderne a égalé, s’il n’a surpassé l’Ancien. […] La cruauté qu’Ulysse exerça contre Astyanax ; les massacres que Pyrrhus fit des enfants de Priam, les parricides d’Atrée et de Tantale ; toutes ces actions pleines d’horreur, qui étaient si fort au goût des Anciens, ne seraient pas maintenant souffertes sur notre Théâtre, et il faut les dérober aux yeux du spectateur. […] Les Auteurs de ces Comédies n’avaient nul goût de la Fiction, de la Fable, de la Versification ; on ne se paraît point pour aller à ces sortes d’Assemblées ; les Dames n’empruntaient point le secours de l’art, ni des ajustements, pour relever l’éclat de leur beauté, et pour paraître avec tous leurs avantages, comme elles font aujourd’hui : Ainsi il ne faut pas s’étonner, que les Directeurs et les Docteurs de ce temps-là aient toléré des spectacles, qui n’étaient nullement capables d’exciter les passions dans ceux qui y assistaient.

210. (1675) Entretien sur les tragédies de ce temps pp. 1-152

Je ne sais pas pourquoi l’on prétend qu’il y a tant de différence entre le goût des Anciens, et celui des Français : est-ce que le bon sens n’est pas toujours le même ? […] Vous voyez bien que c’est le goût ou plutôt la fureur d’un peuple insensé, qui a introduit cet usage parmi eux, et qu’une coutume établie sur ces principes n’oblige nullement les personnes sages. […] Ce grand Poète n’aurait jamais donné ni l’Œdipe ni l’Ajax, s’il n’eût consulté que le goût des Dames Athéniennes. […] Je n’ai jamais pu en lire une tout entière, tant j’y ai peu trouvé de goût. […] Il faut plaire à la Cour, il faut être au goût des Dames pour réussir.

211. (1775) Voyage en Italie pp. 206-208

On ajuste certains spectacles au goût du peuple ; parce qu’enfin il est compté pour quelque chose.

212. (1768) Réflexions sur le théâtre, vol 10 « Réflexions sur le théâtre, vol 10 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE DIXIEME. — CHAPITRE IV. Spectacles singuliers. » pp. 106-127

Il en est sans nombre, de toute espece, dans tous les goûts. […] Et tous dans le goût des ballets, entremêlé de danses, de pas de trois, de dix, de vingt, de trente ; leur Chorégraphie embrasse un très-grand nombre d’actrices, leur orchestre n’est pas si régulier que celui de l’opera ; ils n’ont pas de Francœur pour battre la mesure ; mais ils ont de tambours, de siflets, de flutes, de grêlots, une boëte en machée où l’art a renfermé des bales de plomb, de petites pierres qui en les agitant plus ou moins vite rendent des sons moins harmonieux ; il est vrai que la Chacone de Phaëton, mais qui marque pourtant une mesure à laquelle leurs oreilles sont accoutumées, leurs pas, leurs bras, leurs contorsions, s’accommodent fort exactement. […] C’est un appas pour engager à venir au spectacle, ceux dont l’état leur en interdit l’entrée, ou plutôt un piege pour se mocquer d’eux quand ils y viennent ; car malgré les grilles, c’est le secret de la Comédie, qu’on a un goût singugier de publier sur les toits. […] Les Anglois plus accommodans ne faisoient payer que la moitié à ceux qui venoient après le troisieme acte de la premiere piéce ; ainsi ils avoient pour la moitié du prix la petite piéce toute entiere, la plus au goût de bien de gens.

213. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — QUATRIEME PARTIE. — Tragédies à corriger. » pp. 180-233

Je ne pus faire alors ce que M. de Voltaire désirait, parce que mon Livre était sous presse ; mais je ne veux pas l’omettre dans cette occasion, pour rendre toute la justice qui est due à son goût, à sa modestie, et à sa politesse. […] Il semble donc que Corneille, en parlant ainsi, ait voulu faire la critique du goût de son siècle ; et qu’il s’excuse auprès de ses Lecteurs de ce que le dessein de sa Pièce ne lui a pas permis d’y placer la tendresse et les emportements si fort à la mode sur la Scène, c’est-à-dire de flatter la corruption générale ; puisqu’il est certain que, du temps de Corneille, aussi bien que de nos jours, on voulait dans la passion d’amour cette lâche faiblesse qui déshonnore notre Théâtre, en lui faisant perdre cette grandeur et cette austère majesté, dont les Anciens se servaient si avantageusement pour corriger le vice, et que les premiers de nos Modernes ont eu si grand soin d’imiter. […] De son temps le goût et le cœur de la plus grande partie des Spectateurs étaient également corrompus par l’effet d’une longue habitude à ne voir, sur le Théâtre, que des personnages livrés à tous les emportements de la passion d’amour. […] L’amour d’Artemise et celui d’Ilione paraissent très raisonnable et très permis ; car Artemise est promise en mariage à Adherbal, et elle l’aime par devoir autant que par goût.

214. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre prémier. — Chapitre II. Utilité des Spectacles. » pp. 8-21

Ces mortels si farouches, qui ne respiraient que le carnage, & dont la vaste ambition voulut conquérir tout l’univers, n’auraient toujours été que des monstres barbares & grossiers, sans leur amour pour les spectacles du Colisée, & sans leur goût pour les Belles-Lettres. […] Ce n’est qu’en déclinant, qu’en retombant au sein de la barbarie, qu’une Nation laisse éteindre son goût pour les Spectacles.

215. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre XVI. Il y a des divertissements plus utiles et plus décents que les spectacles. » pp. 138-149

Cette joie est inaltérable comme la vertu qui la produit, et n’est jamais sujette à de fâcheux retoursbj. » « Une âme belle et sensible n’a-t-elle pas au sein de sa famille, et dans le goût même des lettres et des arts, des plaisirs plus purs qu’elle puisse se permettre ? […] Ce sont des plaisirs bien plus dignes de nous que tous ces faux plaisirs des spectacles qu’on n’aime et qu’on ne recherche avec tant d’ardeur que parce qu’ils flattent et nourrissent le penchant et le goût qu’on a pour les plaisirs criminels de la voluptébk. » « Tertullien et saint Cyprien nous invitent à des spectacles bien différents des spectacles profanes : ils introduisent l’homme raisonnable et chrétien dans le sanctuaire de la religion et de la nature, pour charmer tour à tour sa raison et sa foi.

216. (1834) Discours sur les plaisirs populaires « Discours sur les plaisirs populaires, les bals et les spectacles » pp. 1-33

Ces plaisirs diffèrent suivant nos goûts, nos habitudes, le genre de notre travail et de nos occupations. […] La jeunesse studieuse, surtout, s’y presse pour admirer sur la scène les œuvres classiques des maîtres après les avoir étudiées dans le cabinet ; elle les fréquente pour y former son goût, purifier son langage, modifier ses usages et ses habitudes ; elle y cherche, elle y trouve le complément de son éducation. […] Dans les ouvrages de nos auteurs modernes, son goût accueille, approuve tout ce que nos pères auraient approuvé, accueilli, et ce goût épuré d’après nos nouvelles mœurs, réprouve ce que nos pères, plus indulgents, auraient peut-être permis et souffert, soit dans l’action, soit dans le langage. […] Ainsi, mes chers auditeurs, dans notre goût pour les spectacles, nous cherchons dans la tragédie l’attendrissement, le trouble, la terreur même, en un mot de vives émotions indépendamment de l’instruction, et dans la comédie, nous voulons trouver et de la gaîté franche, et un rire pur et innocent, et encore d’utiles leçons.

217. (1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « XIX. Autre principe de Platon sur cette matière. » pp. 69-71

C'est encore un nouveau motif à ce philosophe pour bannir de sa République les poètes comiques, tragiques, épiques, sans épargner ce divin Homère, comme ils l’appelaient, dont les sentences paraissaient alors inspirées : cependant Platon les chassait tous, à cause que ne songeant qu’à plaire, ils étalent également les bonnes et les mauvaises maximes ; et que sans se soucier de la vérité qui est simple et une, ils ne travaillent qu’à flatter le goût et la passion dont la nature est compliquée et variable.

218. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre XI. Les pères et mères perdent leurs enfants en les conduisant ou en leur permettant d’aller aux spectacles. » pp. 105-107

Néanmoins ils sont ensuite au désespoir, quand leurs enfants donnent dans des désordres préjudiciables à leur fortuneaq . » Quel jugement terrible n’ont pas à craindre les pères et mères qui, par leurs exemples, ont inspiré à leurs enfants le goût et l’amour du théâtre ?

219. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — PREMIERE PARTIE. — CHAPITRE III. Réflexions sur le renouvellement du Théâtre. » pp. 36-41

Pendant cette altercation le Public s’érigea en Juge ; et ne consultant, à son ordinaire, que son propre goût, il décida que le Théâtre était un soulagement nécessaire pour les esprits occupés, et une occupation décente pour les paresseux.

220. (1733) Theatrum sit ne, vel esse possit schola informandis moribus idonea « Theatrum sit ne, vel esse possit schola, informandis moribus idonea. Oratio,  » pp. -211

S’agit-il d’inspirer le goût de la vraye pieté, ou l’horreur de l’impieté ? […] Avez-vous du goût pour de grands & d’illustres évenemens, dont la pompe & l’éclat frappent vivement vos esprits ? […] Poëte par goût plus que par étude, ce fut un feu de jeunesse, non la malignité de la fortune qui le fit Comédien. […] Est-il surprenant, Messieurs, que l’Auteur compose licentieusement suivant leur goût, & que l’Acteur y conforme sa licence ? […] C’est aux goûts vitiés que l’on impute, à juste titre, les assaisonnemens homicides dont on empoisonne les mets naturels.

221. (1756) Lettres sur les spectacles vol. 2 «  HISTOIRE. DES OUVRAGES. POUR ET CONTRE. LES THÉATRES PUBLICS. —  HISTOIRE. DES OUVRAGES. Pour & contre les Théatres Publics. » pp. 101-566

Comment un discours qui blâme des plaisirs que le monde chérit, pourroit-il respirer le goût du monde » ? […] Temple du Goût. […] Periclès l’embellit avec beaucoup de magnificence & de goût. […] La corruption du goût tient plus qu’on ne pense aux mœurs. […] Causes de la décadence du goût sur le Théatre.

222. (1761) Les spectacles [Querelles littéraires, II, 4] « Les spectacles. » pp. 394-420

quel goût ! […] Richelieu a fait bâtir la salle du palais royal ; Mazarin a eu les mêmes goûts. […] Le panégyriste de l’ignorance & des brutes a du être le censeur de l’école de la politesse & du goût.

223. (1774) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre seizieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre IV. Du Législateur de Sans–souci. » pp. 93-109

L’hymen est grave, sérieux, saint, austere ; il écarte la dissipation, l’inconstance, la frivolité, par la perpétuité d’un lien qu’on ne peut ni relâcher ni rompre ; il bannit toute idée de conquête, de triomphe de la beauté, de cour d’adorateurs, par l’unité de l’objet à qui seul il est permis de plaire ; il affadit le goût de la parure, du faste, de la mode, du fard, en concentrant les graces dans les yeux d’un homme qui n’en désire pas, & n’en approuve pas l’étalage suspect. […] On a chez les Turcs le droit d’employer cette apologie, elle est fort dans le goût de Colombine. […] C’est sans doute le goût du Législateur.

224. (1766) Réflexions sur le théâtre, vol 5 « Réflexions sur le théâtre, vol 5 — REFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE CINQUIÈME. — CHAPITRE IX. Spectacles de la Religion. » pp. 180-195

La magnificence de nos temples, la majesté de nos cérémonies, la régularité de nos offices, la dignité de nos Ministres, la mélodie de nos cantiques, le pathétique de nos sermons, ne valent-ils pas ces bruyans orchestres, ces ridicules pantomimes, ces chants efféminés, ces danses lubriques, ces décorations licencieuses, ces Actrices immodestes, ces accens passionnés, ces attitudes voluptueuses, dont tout le mérite est d’allumer la passion, de nourrir le vice, d’amuser la frivolité, de fournir le modelle au luxe, l’attrait à la volupté, la facilité au crime, la voie à l’endurcissement, le goût de l’irréligion ? […] Ce sont des goûts si différens, si opposés ; la piété & le vice, la messe & la scène, les chants de Lulli & les pseaumes de David, l’idole de Dagon & l’arche d’alliance, sont-ils faits pour être unis ? […] Il lui a formé une compagne aimable, semblable à lui, qu’il lui a unie par des liens indissolubles ; il lui fait naître d’autres lui-même qui lui font tous les jours goûter les douceurs de la société, les charmes de la tendresse & du respect ; il peut avec des amis vertueux, par un commerce de sentimens, de services & de plaisirs, goûter des délices pures & innocentes ; des exercices honnêtes, un travail conforme à son goût & selon ses talens, n’est pas moins utile à sa santé qu’amusant & récréatif ; la campagne lui déploie ses richesses, & paye avec usure le soin qu’il prend de la cultiver, les arbres lui présentent des fruits, les prairies font éclorre des fleurs, les troupeaux font couler des ruisseaux de lait, il peut déclarer une guerre innocente aux habitans de l’air.

225. (1767) Réflexions sur le théâtre, vol 6 « Réflexions sur le théâtre, vol 6 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SIXIÈME. — CHAPITRE VIII. Sentimens de S. Chrisostome. » pp. 180-195

Si une femme négligemment parée, vue par hasard dans la rue, blesse mortellement ceux qui la regardent avec curiosité, que sera-ce de contempler les heures entieres au spectacle, de propos délibéré, & avec le plus grand goût, jusqu’à abandonner l’Eglise pour y courir, ces infames Actrices, communément belles, & toujours le plus dangereusement parées ? […] Ces paroles dissolues, ces chants lascifs, ce son de voix séduisant, ce visage fardé, ces attitudes voluptueuses, ces instrumens de musique, cette harmonie, cette mélodie qui énerve l’ame, & par un goût de volupté prépare & livre les spectateurs aux pièges des Actrices, ne les perd-il pas tous (on diroit qu’il y avoit opéra à Constantinople) ? […] Je ne vous annoncerai pas la divine parole, si je vous vois sans goût, sans estime, sans respect pour elle, & la foulant aux pieds.

226. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Causes de la décadence du goût sur le théâtre. — Chapitre VIII. Des Sentences mélées à l’action Théatrale, chez les Anciens & les Modernes. » pp. 153-158

Il faut avoir une grande expérience pour les employer à propos ; il faut être consommé dans l’étude des Poëtes, & avoir mûrement observé leurs ouvrages, & réfléchi sur l’objet du théatre, sur le goût des spectateurs, & sur la nature des applaudissemens que l’ignorance accorde au tissu, à l’éclat emprunté des maximes mal enchassées.

227. (1752) Lettre à Racine « Lettre à Racine —  AVERTISSEMENT DE. L’ÉDITEUR. » pp. -

Ceux qui savent apprécier l’heureux accord des talens Littéraires & des sentimens de sagesse & de retenue que la Religion & la vraie philosophie inspirent, verront avec plaisir cet illustre Ecrivain, autrefois néanmoins si injustement outragé, traiter avec autant de goût & de lumière, que d’aisance & de précision, les Principes de l’art dramatique, & les resserrer dans les justes bornes de la décence & de l’utilité.

228. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — Seconde partie. Notes. — [H] » pp. 416-417

Les Décorations de pur ornement n’ont de règle que le goût.

229. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — SIXIEME PARTIE. — Comédies à rejeter. » pp. 313-318

Les gens de talent et de goût diront sans doute que c’est un grand malheur de ne pas trouver des expédients pour corriger ces deux Pièces, qui du côté de l’art et du génie, sont des modèles si parfaits et si propres à servir d’Ecole aux Poètes : peut-être même me reprochera-t-on de ne l’avoir pas tenté ; mais je réponds qu’après les avoir examinées avec soin je les ai trouvées telles que je les avais d’abord envisagées, c’est-à-dire non susceptibles d’aucune correction ; quant aux Poètes qui les regretteront, je les exhorterai à les étudier dans leurs cabinets, à condition néanmoins qu’ils proposeront ces deux Comédies, autant comme des modèles à fuir par rapport aux mœurs, qu’à imiter par rapport au talent.

230. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre onzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre III. De la Dédicace de la Statue de Voltaire. » pp. 71-94

Cette inscription dont Voltaire est peut-être l’auteur, (car elle est dans son goût & dans son style,) & que tous ses entousiastes régardent comme un chef-d’œuvre, est très-maladroite, & trop sincere ; celle de la statue de Louis XIV à la place de Montpellier est bien mieux entendue, & plus glorieuse à ce Prince, à Louis XIV après sa mort ; ces deux inscriptions, tout à fait opposées, precisément sur le même objet, par la même raison, ne sauroient être toutes deux bonnes ; & ce n’est pas celle de Montpellier qui est mauvaise   : Lauda post mortem, magnifica post consummationem , dit l’Ecriture. […] Voltaire notre Dieu, s’écrioit on, le Dieu du goût, le Dieu de l’histoire le Dieu du théatre, le Dieu de la philosophie, voilà tous les Dieux ; c’est un vrai pantheon pour mieux représenter le Parnasse & l’Olympe ; on avoit habillé plusieurs personnes en prêtres & prétresses de différents Dieux, dont chacun célébroit son Dieu, & en portoit les attributs ; mais tous rendoient hommage au pere des Dieux, ce divin Arouet, qui leur avoit fait rendre un culte réligieux, & réunissoit en sa personne toutes leurs divines qualités. […] Un double mont, un chœur de poëtes, la Harpe, Marmontel, &c. avec les journalistes, une multitude d’Anglois, de Prussiens, de Russes ; un collége de Prêtres & de Prétresses d’Apollon : il paroissoit convenable que le grand Prêtre de ce Dieu, à la tête de tout, eût fait les honneurs ; mais le Sacerdoce féminin est plus du goût du chaste Héros de la piece ; ce fut la belle, la jeune, la savante, la dévote, l’incomparable Fretillon, qui, d’une voix unanime, en fut chargée. […] C’étoit en effet en partie par dévotion, & en partie par goût de singularité.

231. (1772) Réflexions sur le théâtre, vol 9 « Réflexions sur le théâtre, vol 9 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE NEUVIEME. — CHAPITRE I. Réformation de Moliere. » pp. 4-28

Pour le goût de la comédie, je crois sans peine que Moliere l’a épuré. […] Tous ces grands défauts, à la correction desquels on veut qu’il se soit appliqué, ne sont pas tant des qualités vicieuses ou criminelles, que quelques faux goûts, quelque sot entêtement, quelque affectation ridicule, qu’il a repris à propos dans les précieuses, les prudes, & ceux qui outrent les modes, qui s’érigent en Marquis, qui parlent incessament de leur noblesse, qui ont toujours quelque poësie de leur façon à montrer. […] Amateurs stupides du spectacle, que la foule y entraîne machinalement, faut-il s’étonner que le Temple du faux goût soit si rempli ? […] En entrant dans la carriere, dit-on, Favart trouva l’opéra comique en train de s’épurer pour le goût, & pour les mœurs.

232. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 2 « Chapitre III. Jurisprudence du Royaume. » pp. 51-74

Ce n’est que peu à peu, à mesure que l’esprit de frivolité et le goût du vice ont pris le dessus, qu’on a souffert, après bien des oppositions des voisins, et des gens de bien, que la folie et le scandale eussent des établissements fixes et des maisons publiques, où tout le monde fût reçu et invité à en aller prendre des leçons et voir des exemples. […] Mais Montaigne jugeait du goût et des idées du public par les siennes, et appelait passetemps bien réglés une liberté pareille à celle qu’il se donne dans son livre, où l’obscénité, l’irréligion et la hardiesse des sentiments sont répandues à pleines mains, et souvent d’une manière plus révoltante que dans nos comédies, dont le grand nombre est plus châtié que ses essais. […] Chacun s’en forme des idées à sa mode, où le goût et l’intérêt sont plus consultés que la raison et l’Evangile. […] Les Actrices arborèrent une parure si fort de leur goût, elles y parurent à demi nues.

233. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 2 « Chapitre IV. Bassesse légale du métier de Comédien. » pp. 75-100

Si l’on demandait grâce pour le compositeur des pièces ou du chant, on serait plus excusable, la poésie et la musique sont des arts libéraux, et sont des productions de l’esprit et du goût. […] Marguerite de Valois, sœur de François I, et Reine de Navarre, composa six pièces de théâtre, qu’elle appelait Pastorales, deux Farces, et quatre Mystères ou Moralités dans le goût du temps. […] C’est un recueil de contes dans le goût de Boccace, partagé en journées, dans lequel la Fontaine a pris plusieurs des siens qu’il a mis en vers, et quelques Poètes dramatiques des sujets de farce, mais qui la plupart plus dignes d’une Comédienne que d’une grande Princesse, ne font pas l’éloge de sa modestie. […] Fréron (Année Littéraire 8 octobre 1760) donne l’extrait d’une brochure singulière, où pour remédier à l’inconvénient de la roture et de l’infamie des Comédiens, on propose un expédient qui, je crois, sera peu du goût de la noblesse d’épée ou de robe.

234. (1725) Mr. de Moliere [article des Jugemens des savans] « Mr. de Moliere, » pp. 339-352

Tous ces grands défauts à la correction desquels on veut qu’il se soit appliqué, ne sont pas tant des qualités vicieuses ou criminelles que quelque faux goût, quelque sot entêtement, quelques affectations ridicules, telles que celles qu’il a reprises assés à propos dans les Prudes, les Précieuses, dans ceux qui outrent les modes, qui s’éxigent en Marquis, qui parlent incessamment de leur noblesse, qui ont toujours quelque Poësie de leur façon à montrer aux gens. […] Aussi peut-on dire qu’il se soucioit peu d’Aristote1 & des autres Maîtres, pourvû qu’il suivît le goût de ses Spectateurs qu’il reconnoissoit pour ses uniques Juges.

235. (1777) Il est temps de parler [Lettre au public sur la mort de Messieurs de Crébillon, Gresset, Parfaict] « Il est tems de parler. » pp. 27-36

« Pour corriger cet abus, ne seroit-il pas possible que, parmi les Auteurs les plus estimés, on en choisît quelques-uns connus par leur goût, leurs lumieres & leur honnêteté, à qui seroit confié l’examen des Ouvrages Dramatiques, & le droit de prononcer sur leur refus ou leur acceptation. […] « Moi-même, si je puis me citer, s’écrie M. le Chevalier du Coudray, en entrant dans le monde je me sentois, ou du moins croyois me sentir, un goût décidé pour la composition des Poëmes Dramatiques, une noble passion pour le Théâtre ; mais né, malheureusement pour moi, avec de la timidité, des sentimens, de l’ame, sans intrigues, sans cabale, d’ailleurs avec de la naissance & un nom, je n’ai pû avoir ces viles complaisances, ces basses flatteries que certains Auteurs semblent avoir pour ces Messieurs & ces Dames ; par conséquent ma noble passion s’est éteinte, & mes talens ont été avortés : sans cela, peut-être aurois-je été loin dans la carriere dramatique. » Lettre à M. 

236. (1756) Lettres sur les spectacles vol. 2 «  AVERTISSEMENT. DU LIBRAIRE. » pp. -

Elle ne sera point assurément la derniere ; j’en crois votre zele, vos lumieres, vos recherches, ainsi que les desirs, & le goût soutenu de vos Lecteurs.

237. (1825) Des comédiens et du clergé « Des comédiens et du clergé. —  piété et bienfaisance d’un comédien.  » pp. 365-370

Le cardinal Mazarin, prince de l’Eglise, et le chancelier Séguier, eussent-ils accordé leurs soins protecteurs à un enfant qui n’avait puisé le goût de la poésie que dans la propre profession de son père, si cette profession avait été frappée d’une excommunication réelle ?

238. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-huitieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre IV. Henri IV. » pp. 121-168

Ce ne sont que des apologies de leurs ouvrages dont on tâche de justifier le goût & les défauts, par des regles faites après coup. […] Le respect doit l’emporter sur ce goût dépravé du peuple dramatique, qui veut par-tout trouver l’image & l’aliment de la dépravation : l’acteur & le poëte se rendroient également vils & scandaleux. […] Ce n’est pas un Roi qui s’abaisse jusqu’au peuple, c’est un homme élevé comme le peuple, qui porte sur le trône ses goûts, son esprit, sa physionomie, ses sentimens. […] Cette plaisanterie, si elle est vraie, est dans le goût de la Partie de Chasse d’Henri IV. […] Il n’y a ni justice, ni bon goût, ni vérité, ni respect pour la majesté royale, de lui faire tenir des propos de hales : mais c’est le goût du Théatre de croire honorer les Princes, en faisant d’eux des tabarins.

239. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre troisiéme. — Chapitre prémier. Qu’on ne doit pas se figurer que la composition des nouveaux Drames soit aisée. » pp. 116-120

Si l’on doutait encore qu’il soit nécessaire d’employer dans les Drames modernes le goût & l’esprit dont on est capable, Boileau nous forcerait de changer d’avis.

240. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre VI. Les spectacles produisent et favorisent l’incrédulité. » pp. 86-89

Quand on n’aurait pas à imputer à un auteur d’une tragédie tous les mauvais sentiments qu’il étale, il y a des affectations qui découvrent ce qu’on doit mettre sur son compte. » Il n’arrive que trop souvent qu’ils emploient, sans détour, le langage de l’impiété ; il faut des traits hardis pour réveiller l’attention, et pour flatter le goût peu chrétien du siècle.

241. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre XXI. Les spectacles condamnés par les auteurs profanes anciens et modernes. » pp. 179-182

Bayle, si cher à tous les libertins, dont le cœur était comme dissous dans la corruption, croyait que nos comédies modernes n’ont pas fait beaucoup de mal aux désordres réels ; qu’il n’y a rien même de plus capable de les inspirer, et que, si elles ont corrigé quelques défauts, ces défauts sont certaines qualités qui ne sont pas tant un crime qu’un faux goût et qu’un sot entêtement.

242. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre douzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et litteraires, sur le théatre. — Chapitre IV.  » pp. 97-128

Voltaire dit vrai dans le détail de ces folies, il auroit du ajouter que ce n’étoit là que le théatre dans le goût du tems. […] Cette tragédie est dans le goût de celles d’Eschile (qui dans le fond ne sont pas grand chose, malgré les éloges outrés de ses traducteurs). […] Léon X joignoit le goût le plus fin à la magnificence la plus récherchée ; son couronnement couta cent mille écus d’or, il y fit representer la comédie du Penulus de Plaute , qui n’est rien moins que chaste. […] Deux Cardinaux soupçonnés d’avoir conspiré contre lui, furent mis à la question ; l’un fut pendu, l’autre racheta sa vie par ses tresors ; mais il en couta la vie à plusieurs coupables ; pour faire oublier leur supplice, le Pape créa 30 Cardinaux, qui selon son goût, l’imiterent dans les plaisirs, les autres Prélats suivirent son exemple, tous les auteurs Catholiques & Protestants, gemissent de la désolation de ce tems, &c. […] Le goût de la Cour se repandit dans les provinces : de-là cette multitude d’exécutions de sorciers, que le zèle peu éclairé des Magistrats se crut obligé de faire, qui ne servit qu’à donner un air de réalité à ces folies, que la sagesse a fait évanouir, en les méprisant.

243. (1775) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-septieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre VI. Anecdotes de Cour. » pp. 171-202

Point d’histoire plus remplie d’évenemens dramatiques ; c’est un spectacle perpétuel, sur-tout depuis que, devenus maîtres de la moitié de l’Empire Romain, ils étoient au comble de la gloire, des délices & de l’opulence, & pouvoient sans crainte se livrer à leur goût. […] Ce n’est ailleurs qu’un plaisir médiocre, l’assaisonnement de la scène y donne un goût exquis. […] Un roi fugitif, détrôné par sa fille & son gendre, a peu de goût pour la comédie. […] Ce cercle lui donne libéralement le goût, les graces, les talents, le génie, le discernement & toutes les connoissances, Entraîné par le tourbillon de ces suffrages, & par le vent d’une gloire si brillante, il n’imagine pas seulement qu’il puisse faire des fautes, & qu’il puisse exister ailleurs quelque merite. […] Tout ce qui peut prendre quelque intérêt aux vers n’est déja que trop frivole, grace au goût dominant du théatre.

244. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Causes de la décadence du goût sur le théâtre. — Chapitre I. Du Théâtre des Anciens. » pp. 2-24

Qu’on se rappelle avec quel pompeux appareil, les prix du goût & du génie, étoient distribués aux jeux Olympiques, Neméens, Histmiques, &c. […] Le goût pour les ouvrages dramatiques, n’éclata à Rome, qu’après les guerres de Carthage, au milieu des délices de la paix.

245. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre prémier. — Chapitre IV. Histoire de l’Opéra-Bouffon, autrefois Opéra-Comique & ses progrès. » pp. 50-66

Comment les Français prirent du goût pour l’Ariette Italienne. […] Il est du moins certain que Molière lui-même travailla, sûrement sans y penser, dans le goût des Drames qui sont l’objet de notre estime.

246. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Seconde partie « Causes de la décadence du goût sur le théatre. — Chapitre XVII. Du gouvernement & de la Police intérieure du Théâtre. » pp. 12-18

S’ils se trompent quelquefois à cet égard, cela ne prouve pas qu’ils n’ayent pas joué en travaillant ; mais seulement qui ont manqué de goût, ou s’en sont laissé imposer par la prévention.

247. (1760) Sur l’atrocité des paradoxes « Sur l’atrocité des paradoxes —  PRÉFACE. » pp. -

« Il suffit qu’on soit homme, & qu’on soit malheureux. » Voilà ma façon de penser ; elle ne sera pas du goût de tout le monde ; on pourra soupçonner trop d’orgueil dans l’aveu que j’en fais, mais je répondrai que je ne la détaille pas pour en être loué : tant d’autres ont pris ce tour, que j’aurais mauvaise grace de m’enservir ; ce n’est point là mon caractère : non, Messieurs, & vous pouvez m’en croire.

248. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — [Première partie.] — Quatrième Lettre. De madame Des Tianges. » pp. 28-32

Imagine avec quelle surprise, mêlée de joie, j’ai vu, en achevant de lire, que monsieur D’Alzan est un honnête-homme, qu’un goût passager a surpris ; qui se l’avoue, reconnaît ses torts, & cherche à intéresser à son retour vers toi jusqu’à la vanité de celle qui lui a trop plu… Elle veut s’immoler… Elle n’est donc pas… Tu as oublié de me la nommer : mais je la crois une Actrice.

249. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-huitieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre II. Madame de Longueville. » pp. 40-83

J amais, sans le goût séducteur du Spectacle, la fameuse Duchesse de Longueville n’eût été une intriguante, rébelle à son Roi, & l’ame de la révolte. […] Outre son goût pour le Spectacle, elle y trouve une diversion consolante. […] La plénipotentiaire ne parut pas s’y ennuyer : elle satisfaisoit son goût, & faisoit sa cour à la Régente & au Ministre. […] Il vouloit la tirer de cette vie orageuse qui n’etoit pas de son goût : mais elle, qui en faisoit ses délices, refusa d’y venir, & aima mieux s’aller confiner dans une province éloignée. […] Cette pratique en usage chez les Jésuites, dont on a un modele admirable dans la Retraite du P. la Colombiere, fut sans doute l’effet du goût qu’elle avoit toujours eu pour les Carmelites.

250. (1759) Lettre de M. d'Alembert à M. J. J. Rousseau « Chapitre » pp. 63-156

En intéressant les Philosophes par les vérités répandues dans votre ouvrage, et les gens de goût par l’éloquence et la chaleur de votre style, vous avez encore su plaire à la multitude par le mépris même que vous témoignez pour elle, et que vous eussiez peut-être marqué davantage en affectant moins de le montrer. […] » Le reproche était moins d’un casuiste que d’un homme de goût ; on sait la réponse que Racine lui fit ; « eh, Monsieur, sans cela qu’auraient dit les petits-maîtres ?  […] Mais je crois en même temps avec vous, que d’autres chefs-d’œuvre du même Poète et de quelques autres, autrefois justement applaudis, auraient aujourd’hui plus d’estime que de succès ; notre changement de goût en est la cause ; nous voulons dans la Tragédie plus d’action, et dans la Comédie plus de finesse. […] Il me semble qu’ils doivent produire sur tous les gens de goût le même effet qu’un son aigre et discordant qui se ferait entendre tout à coup au milieu d’une musique touchante. […] Cependant je doute que votre éloquente censure vous fasse parmi elles beaucoup d’ennemies ; on voit percer à travers vos reproches le goût très pardonnable que vous avez conservé pour elles, peut-être même quelque chose de plus vif ; ce mélange de sévérité et de faiblesse (pardonnez-moi ce dernier mot) vous fera aisément obtenir grâce ; elles sentiront du moins, et elles vous en sauront gré, qu’il vous en a moins coûté pour déclamer contre elles avec chaleur, que pour les voir et les juger avec une indifférence philosophique.

251. (1707) Réflexions chrétiennes « Réfléxions chrétiennes, sur divers sujets. Où il est Traité. I. De la Sécurité. II. Du bien et du mal qu’il y a dans l’empressement avec lequel on recherche les Consolations. III. De l’usage que nous devons faire de notre temps. IV. Du bon et mauvais usage des Conversations. Par JEAN LA PLACETTE, Pasteur de l’Eglise de Copenhague. A AMSTERDAM, Chez PIERRE BRUNEL, Marchand. Libraire sur le Dam, à la Bible d’Or. M DCCVII — Chapitre XIII. Du temps que l’on perd au bal et à la danse. » pp. 280-284

Et se peut-il qu’un homme qui fait la moindre attention à quel que ce soit des deux, puisse ni penser aux réjouïssances des mondains, ni y trouver quelque goût et quelque plaisir ?

252. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre douzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et litteraires, sur le théatre. — Chapitre VIII.  » pp. 195-221

Je ne crois pas ces représentations convenables, elles nuisent aux mœurs, inspirent l’esprit du monde, donnent, le goût des spectacles, dissipent la jeunesse, lui font perdre beaucoup de tems, quoique moins rapidement & moins griévement que le théatre public ; mais il ne faut pas envénimer les choses même mauvaises, & calomnier même les coupables, même les Jésuites, quelque haine qu’on aie pour eux. […] Cet homme étoit amateur du théatre, & singuliérement idolâtre de Térence, il vouloit inspirer ce goût à tout le Clergé, à la vérité il ne fit pas bâtir de théatre public, & n’appella point de troupe de comédiens, qui n’ont jamais brillé dans le Querci ; il auroit par un tel éclat, reveillé l’Evêque Chartreux, trop dévot pour aimer la comédie, qui vraisemblablement l’eût condamné ; mais il imagina de faire étudier les comédies de Térence dans le Seminaire ; il fit entendre à l’Evêque que pour faire entendre le Latin d’Akempis à ses Ecclésiastiques, il faloit les obliger d’apprendre les bons poëtes Latins, Virgile, Horace, & sur-tout Térence. […] L’Evêque lui survecût peu, son successeur n’est pas dans le goût de mener son Clergé à la comédie. […] Le goût de la musique semble attaché à ce bénéfice, le dernier possesseur l’aimoit beaucoup aussi ; mais il étoit moins élégant, il n’aimoit que la musique sainte, il avoit composé & fait imprimer des cantiques, pour les missions, des livres d’Eglise pour le chant ; il en donnoit des leçons aux enfans & aux jeunes chantres.

253. (1775) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-septieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre I. La Rosiere de Salenci. » pp. 10-37

Ce sanctuaire de Vénus est d’un goût différent de la chapelle de S. […] Au lieu de tâcher par une belle émulation de mériter l’estime publique, on ne songeroit qu’a lui plaire : ce ne seroit plus que des coquettes, des ames basses & rampantes, qui n’étudieroit que ses goûts. Et quels goûts ? […] Musique à la mode, toute en arietes & papillonage, au goût du temps.

254. (1767) Réflexions sur le théâtre, vol 6 « Réflexions sur le théâtre, vol 6 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SIXIÈME. — CHAPITRE III. Immodestie des Actrices. » pp. 57-84

On pourroit impunément les heures entieres avoir l’esprit & le cœur attaché à des intrigues amoureuses, toujours souillé par des images, ému par les sentimens les plus vifs, l’imagination toujours remplie de beauté, de plaisir, d’obstacles, de succès, l’oreille frappée de discours galans, & de sons tendres & harmonieux, toute l’ame occupée de situations attendrissantes & délicieuses, & au milieu de tous ces pieges, les objets les plus immodestes continuellement sous les yeux, sans être séduit par l’erreur, & entraîné par la passion, sans apprendre à cette école à mépriser, à braver la pudeur qui retient, la loi qui défend, le remords qui trouble, le péché qui effraie, en entendant cent fois dire & redire, chanter avec grace, débiter avec assurance, déclamer avec feu, exécuter avec goût cette morale anti-chrétienne, si conforme à la nature, canonisée dans le monde, si agréable à un cœur corrompu, qui fait du crime un mérite, de la résistance un ridicule, de la volupté un besoin, de la passion une nécessité ! […] Qu’on vienne nous parler de l’amour Platonique, si différent du penchant naturel & physique des deux sexes l’un pour l’autre, de cet amour moral, le seul que Madame la Marquise de Lambert s’imagine avoir ressenti, & dont elle fait un portrait si ingénieux, si subtil & si sublime, qu’il échappe à nos regards (Métaphis. de l’amour), de ce goût épuré de la matiere, borné à l’estime, au devoir, à l’admiration, qui n’a pour objet que le mérite, le caractère, la beauté, l’esprit, la vertu. […] L’esprit ne va pas immédiatement à l’esprit, il n’y va que par l’entremise des sens, & s’ils trouvent sur leur pas quelque être matériel de leur goût, l’esprit est pris au piege, comme l’oiseau, par l’appas du plaisir. […] Entre ces deux coutumes la femme de bien n’hésitera pas dans son choix ; la Courtisanne & l’Actrice hésiteront aussi peu dans le leur : chacune prendra parti selon son goût.

255. (1686) Sermon sur les spectacles pp. 42-84

Attentif à profiter du goût des hommes pour les vanités du monde, il les leur présente sous la forme des Spectacles les plus séduisants, et il triomphe de leur défaite, dans le temps même qu’ils s’imaginent être à l’abri de ses fureurs et de ses traits. « Et ostendit ei omnia regna mundi, et gloriam eorum. […] Aussi voyons-nous que les Spectacles changent comme les mœurs, et qu’il n’y a point d’Auteur qui n’étudie le goût dominant de sa nation pour le bien rendre ; point d’Acteur qui ne fasse tous ses efforts pour entrer dans les sentiments du rôle qu’on lui donne, et pour les communiquer à tous ceux qui l’écoutent. […] Alors les pompes de Satan se déploient dans tout leur éclat, le goût de la parure et de la vanité se communique de rang en rang, les yeux s’ouvrent, ainsi que les oreilles, et le cœur reçoit la moisson de tout ce que la corruption a recueilli pour empoisonner les âmes. […] N’est-ce pas là qu’il domine, en foulant aux pieds les lois de l’Evangile, et les règles de la pénitence ; qu’il vous arrache des pleurs sur des aventures criminelles et scandaleuses ; qu’il attache votre esprit et votre cœur à des récits pernicieux ; qu’il remplit votre mémoire d’images impures ; qu’il vous fait avaler un poison d’autant plus dangereux, qu’il flatte votre goût, et qu’il est mieux préparé ?

256. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome II « De l’Art du Théâtre. — Chapitre IV. De la Pastorale Dramatique. » pp. 59-77

Malgré les éfforts que nous avons faits pour saisir le vrai goût de la Pastorale, nous sommes à peine parvenus à la rendre supportable sur nos Théâtres. […] Notre goût déterminé pour le léger, le vif, le badin, & nos mœurs mêmes, nous empêcheront toujours d’estimer fortement la Pastorale : des peintures si douces, si tranquilles, nous causent bientôt un ennui mortel, ou nous font rire à force d’être naturelles, comme il arriva dans la Bergère des Alpes du Théâtre Italien,(12) lorsque l’on vit deux Bergers boire du laid, ou manger de la bouillie.

257. (1777) Des Spectacles « Des Spectacles. » pp. 75-92

La Religion n’est pas entendue dans un si grand fracas de plaisirs ; rien n’est du goût que ce qui flatte les sens, et parmi tant d’objets si capables de plaire, et qui plaisent en effet, l’âme sera-t-elle maîtresse de ses désirs ? […] Et au sortir des spectacles, reste-t-il beaucoup de goût pour la dévotion ?

258. (1752) Traité sur la poésie dramatique « Traité sur la poésie dramatique — CHAPITRE IX. Défauts que les Etrangers ont coutume de reprocher à notre Tragédie. » pp. 231-259

Si nos premiers Poëtes eussent connu leur Art, ils eussent pensé tous, qu’un Poëme dont l’objet est d’exciter la plus grande émotion, ne devoit point prendre pour Passion ordinaire, celle qui ne cause ordinairement qu’une foible émotion : mais aucun de nos premiers Poëtes Tragiques n’avoit, comme je l’ai dit plus haut, étudié son Art : ils ne songeoient qu’à satisfaire le goût de leurs Spectateurs. […] Instruit des vrais principes de son Art, nourri dès son enfance des Poëtes Grecs, obligé cependant de se conformer au goût de son siécle opposé au sien & à ses lumieres, quel parti pouvoit-il prendre ? […] C’est lui au contraire qui a fait ce qu’il a pû, pour réformer en cela le Goût de sa Nation.

259. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre second. — CHAPITRE IV.  » pp. 109-114

Elle y verra d’abord quel était le goût du dix-huitième Siècle ; nos mœurs, notre façon de penser lui seront connues.

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