Si nous les prenons pour du Tragique, c’est parce qu’on nous l’a donné pour tel, que nous sommes accoutumés à nous en tenir à quelque ressemblance ; & qu’enfin, quand il s’agit de plaisir, nous ne croyons pas toujours nécessaire de calculer exactement ce qu’on pourrait nous donner. […] Les Stances tenaient à-peu-près la place des Chœurs : mais Corneille, à chaque pas fesait des découvertes : bientôt il n’y eut plus de Stances ; la Scène fut occupée par le combat des passions nobles ; les intrigues, les caractères, tout eut de la vraisemblance ; les unités reparurent, & le Poème Dramatique eut de l’action, des mouvemens, des situations, des coups-de-Théâtre : les évènemens furent fondés, les intérêts ménagés, & les Scènes dialoguées. […] Il créa le Théâtre Anglais, par un génie plein de naturel, de force & de fécondité, sans aucune connaissance des règles : on trouve dans ce grand génie le fond inépuisable d’une imagination pathétique & sublime, fantasque & pittoresque, sombre & gaie ; une variété prodigieuse de caractères, tous si bien contrastés, qu’ils ne tiennent pas un seul discours que l’on pût transporter de l’un à l’autre.
Le concile de Lérida (canone ultimo), tenu sous le pape Jean II, l’an 524, dit qu’il n’est jamais bienséant aux chrétiens de danser, pas même aux noces et aux solennités du mariage.
Toute volupté donc doit être suspecte, pource que par ses attraits et allèchements elle engage l’homme peu à peu, jusques au point auquel il ne tient plus de mesure. […] Que les joueurs publics et mercenaires, de Comédies et Tragédies ont été tenus pour infâmes, qui est un argument que leur métier ne vaut rien. […] Nous tenons cela des premiers hommes, qui ne passaient pas condamnation, même étant rédarguésdp de Dieu. […] Le seul Dieu est tenu pour vil entre nous, en comparaison de toutes autres choses. […] Que personne donc ne se tienne excusé, pour le lieu, ou pour son absence.
.° On fait tenir au Moine son amant les discours les plus impies & les plus extravagans, on lui fait faire des sermens exécrables, ce qui non-seulement est scandaleux contre la religion & les mœurs, mais contre la vrai-semblante. […] Ce n’est point Dieu qui l’a touché ; son amour, sa fureur, sont toujours les mêmes : il tient le langage affreux du pécheur, de l’impie le plus endurci, qui est absurde dans sa bouche. […] Jamais Corneille, Racine, Voltaire, n’ont fait tenir ce langage à leurs amans ; Moliere même & les autres comiques ne le font tenir qu’à des valets ou des pay sans. […] Ici tout ce qu’il y a de plus respectable tient un langage de damné, qu’il ne doit pas même connoître.
) » L’assemblée du Clergé à Melun, en 1579. titre des Fêtes, tient le même langage. […] Il en est de la sainteté des temps comme de celle des lieux ; un péché commis dans l’Eglise en est plus grief, il tient du sacrilège. […] Tous les Pères, tous les conciles tiennent ici le même langage. […] Dieu n’en tient aucun compte. […] Est-ce donc moi qui tiens ce langage ?
Je pretends donc satisfaire suffisamment à vôtre demande, en vous répondant que c’est peché, & même peché mortel à l’égard de plusieurs ; & puisque c’est des circonstances que dépend la décision que vous me pressez de vous donner, sur une chose qui vous tient au cœur ; je vous donne trois ou quatre regles, par lesquelles vous conclurez vous-mêmes, à quels spectacles il vous est défendu de vous trouver, & quelles sont les personnes qui ne peuvent s’y trouver, sans commettre un grand peché. […] ou bien, n’est-ce pas mettre en question, si les pensées volontaires, & les desirs que ces objets sont naître, & que l’on entretient ensuite ; sont défendus par la Loy Chrétienne, qui pour nous obliger à la pureté, se sert des termes les plus forts, & qui tiennent davantage de l’exaggeration, sçavoir, de nous arracher les yeux, s’ils nous sont une occasion de scandale, & où l’Autheur de cette Loy met au rang des crimes les plus énormes, les regards que l’on jette sur une femme à mauvais dessein : Matth. […] Ce qui en fait le sujet, n’est-ce pas toûjours une passion d’amour, conduite par une intrigue ingenieuse, qui tient l’esprit attentif par divers incidens, dont le dénouëment se termine par là conquête & la possession de l’objet, que l’on a poursuivi avec tant d’ardeur, & tout risqué pour l’obtenir ? […] il est évident que ce sont ceux, qui à raison de leur dignité, & du rang qu’ils tiennent parmy les autres sont obligez de leur donner exemple, & qui doivent prudemment juger, que leur presence authorifera ces divertissemens, dont on a tout sujet de se défier, & qui par-là, leveront tout scrupule à ceux qui ne sont pas obligez d’avoir les mêmes ménagemens ; parce que leur exemple ne fait point de consequence ; ainsi un Ecclesiastique, un Magistrat, une personne considerable pour sa Charge, pour son Employ, ou pour l’opinion qu’on a conçuë de sa probité ; qu’une personne, dis-je, de ce caractere distingué, se permette ces divertissemens, & contribuë à y porter les autres, & à les faire passer pour des choses absolument permises & indifferentes, c’est un scandale, & plus ces personnes sont reglées dans toutes leurs autres actions, plus ils donnent de hardiesse de les imiter en celle-cy. […] Ainsi comme l’on tient un livre pour dangereux, lorsqu’à la faveur de quelques sentimens Orthodoxes, qui y sont bien touchez & répandus çà & là, on en fait couler d’autres qui sont impies ou suspects ; parce qu’on juge avec raison, que c’est un serpent caché sous des fleurs, & que le venin, sans cet artifice, en seroit sans effet ; pourquoy n’en diroit on pas le même de ces Tragedies, où le profane est confondu avec le sacré, & où les maximes les plus opposées au Christianisme sont mises en la bouche de ces Chrétiens de Theâtre, qui soutiennent si mal le personnage qu’ils representent ?
Ils sont maintenus dans le droit d’examiner les mœurs de leurs filles, de juger celle qui a tenu la meilleure conduite, & de lui adjuger la Rose. […] Elle tient aux bonnes mœurs & à l’humanité ; puisqu’il s’agit de défendre les prérogatives de la vertu, comme dit le Mercure d’octobre 1774, qui en fait l’éloge. […] Ce bal champêtre, ces filles, ces rubans en baudrier, ces garçons qui les tiennent par la main, cette Rosiere poudrée, frisée à cheveux flottans en grosses boucles, toute cette décoration théatrale imaginée par Favart, pour contenter ses actrices, fut en effet exécutée sur la scène italienne, lorsqu’on y joua la Rosiere. […] C’est un libertin qui devient amoureux des prétendantes à la Rose, leur tient des mauvais discours, prend avec elles des libertés auxquelles elles se prêtent : il ne réussit pas, parce qu’elles aiment ailleurs. […] Les habitans y ont applaudi, & se sont chargés des frais de son mariage & des dépenses de sa premiere couche, promettant de tenir son premier enfant sur les fons de Baptême.
Je pretends donc satisfaire suffisamment à vôtre demande, en vous répondant que c’est peché, & même peché mortel à l’égard de plusieurs ; & puisque c’est des circonstances que dépend la décision que vous me pressez de vous donner, sur une chose qui vous tient au cœur ; je vous donne trois ou quatre regles, par lesquelles vous conclurez vous-méme, a quels spectacles il vous est défendu de vous trouver, & quelles sont de personnes qui ne peuvent s’y trouver, sans commettre un grand peché. […] ou bien, n’est-ce pas mettre en question, si les pensées volontaires, & les desirs que ces objets font naître, & que l’on entretient ensuite, sont défendus par la Loy Chrétienne, qui pour nous obliger à la pureté, se sert des termes les plus forts, & qui tiennent davantage de l’exaggeration, savoir, de nous arracher les yeux, s’il nous sont une occasion de scandale, & où l’Autheur de cette Loy met au rang des crimes le plus énormes, les regards que l’on jette sur une femme à mauvais dessein : Qui viderit mulierem ad concupiscendum eam, jam mœchatus est eam in corde suo. […] Ce qui en fait le sujet, n’est-ce pas toûjours une passion d’amour, conduite par une intrigue ingenieuse, qui tient l’esprit attentif par divers incidens, dont le dénouëment se termine par la conquête & la possession de l’objet, que l’on a poursuivi avec tant d’ardeur, & tout risqué pour l’obtenir ? […] il est évident que ce sont ceux, qui à raison de leur dignité, & du rang qu’ils tiennent parmy les autres, sont obligez de leur donner exemple, & qui doivent prudemment juger, que leur presence authorisera ces divertissemens, dont on a tout sujet de se défier, & qui par-là, leveront tout scrupule à ceux qui ne sont pas obligez d’avoir les mémes ménagemens, parce que leur exemple ne fait point de consequence ; ainsi un Ecclesiastique, un Magistrat, une personne considerable pour sa Charge, pour son Employ, ou pour l’opinion qu’on a conçuë de sa probité ; qu’une personne, dis-je, de ce caractere distingué, se permette ces divertissemens, & contribuë à y porter les autres, & à les faire passer pour des choses absolument permises & indifferentes, c’est un scandale, & plus ces personnes sont reglées dans toutes leurs autres actions, plus ils donnent de hardiesse de les imiter en celle-cy. […] Ainsi comme l’on tient un livre pour dangereux, lorsqu’à la faveur de quelques sentimens Orthodoxes, qui y sont bien touchez & répandus çà & là, on en fait couler d’autres qui sont impies ou suspects ; parce qu’on juge avec raison, que c’est un serpent caché sous des fleurs, & que le venin, sans cet artifice, en seroit sans effet ; pourquoy n’en diroit on pas le même de ces Tragedies, où le profane est confondu avec le sacré, & où les maximes les plus opposées au Christianisme sont mises en la bouche de ces Chrétiens de Theâtre, qui soutiennent si mal le personnage qu’ils representent ?
Qu’on se tienne en garde contre un pareil éxemple. […] Trois heures nous suffisent, & c’est encore beaucoup que nous ayons la force d’y tenir. […] Tout ce qu’ils éprouvent doit tenir à l’action principale, & doit y avoir un si grand rapport, qu’on ait pour ainsi dire pu le prévoir. […] Les discours que tient Rodogune, ceux des autres Acteurs de la Pièce, & les événemens entiers du Drame, ne se rapportent-ils pas à ce qu’on nous annonce d’abord ?
Bien que les Amphitheatres fussent beaucoup plus petits que le Cirque, ils ne laissoient pas d’estre fort spacieux : L’on peut conjecturer & conclure leur grandeur par le grand nombre de personnes qu’ils pouvoient contenir : Le Theatre de Scaurus dont nous parlerons au Chapitre suivant, pouvoit tenir quatre-vingt mille personnes. […] Enfin, par la supputation d’un nommé Torelly, il y avoit de l’espace pour tenir vingt-trois mil & tant de personnes. […] Pour lors ils estoient veritablement tenus de se batre & de s’exposer à la rage de ces animaux en faveur du Peuple & des Spectateurs ; mais ils avoient la liberté de se deffendre, & d’user de leur vertu & de leur adresse pour se tirer du peril & pour éviter la mort. […] Cependãt, quãd ie devrois étre blâmé d’inserer icy des choses trop suspectes, le ne puis me tenir de toucher legerement les plus illustres & les plus curieuses raretez que j’ay remarqué parmy tous ces grands hommes, qui se sont picquez d’en remplir Rome, & d’en divertir le public.
Il en est peu que nous’ ne tenions de l’intelligence de nos Peres, & que nous ne devions ou à leur curiosité ou à leur delicatesse.
Comme la passion de l'amour est la plus forte impression que le péché ait faite sur nos âmes, ce qui paraît assez par les désordres horribles qu'elle produit dans le monde, il n'y a rien de plus dangereux que de l'exciter, de la nourrir, et de détruire ce qui la tient en bride et qui en arrête le cours.
Néanmoins les personnes illustres de naissance ou de condition ne les ont pas traités de même sorte ; car les premiers étaient estimés jusqu'à ce point que Sophocle qui joua lui-même quelques-unes de ses Tragédies, eut le commandement de leurs armées, et les autres furent toujours méprisés, et regardés comme des gens qui tenaient le dernier rang en la société civile. […] Max. l. 2 c. 4 étaient originairement venus d'Etrurie, et leurs Fables tenaient beaucoup des vieilles Satires, mais avec une modération digne de la sévérité Romaine ; et pour cela, dit-il, jamais ils ne furent notés d'infamie ; ils ne perdirent point leur droit de suffrage dans les assemblées publiques, ni le privilège de servir dans les Armée, avec la solde et les avantages de leur milice. » Pouvait-il s'expliquer plus clairement ? Et si les Acteurs des Fables Atellanes ont été si favorablement traités, nous peut-il rester quelque scrupule pour les Comédiens et les Tragédiens, que les Romains tenaient dans un plus haut rang, qu'ils honoraient d'une bien plus grade estime, et que le cours des années n'a pas empêché de passer jusqu'à nous avec les règles de l'art, et les exemples des ouvrages qui les ont rendus si célèbres, et qui leur ont mérité l'affection des Grands, et l'applaudissement des peuples.
Les discours que leur fait tenir une audace insensée, une logique artificieuse ou une plaisanterie piquante, & qu’il faut leur faire tenir pour remplir leur rôle, ébranlent les foibles, jettent des doutes, accoutument à l’erreur, au blaspheme, & répandent le germe de l’impiété, qui ne se développera que trop. […] Voyez comme il les excuse : Si des jeunes gens font des fautes, ils sont entraînés par la violence des passions, & le conseil des valets ; belle leçon pour se tenir en garde. […] Ils demandent pourquoi nous avons des hommes spécialement consacrés à Dieu, puisque tous sont également tenus envers lui, & que les devoirs de la Réligion doivent être communs à chaque membre de la société. Leur gouvernement tient à la République de Platon ; quand à l’égalité des citoyens, & sur-tout à la communauté des femmes & des enfans, ce qui donne en tout point l’idée de la désapropriation la plus parfaite, sans excepter la pauvreté religieuse. […] Eschile, selon Quintilien, est grave & pompeux jusqu’à l’enflure, son entousiasme tient de la fureur.
Elles sont en très-grand nombre plus libres, plus hardies, plus entreprenantes que les hommes, souvent obligés de se tenir en garde contr’elles. […] Cyprien ; la main qui tient le pinceau fait parler ces innombrables & trop irréprochables témoins. Chaque nuance dépose, chaque ruban-atteste, chaque parure crie à haute voix, & chaque jour ces graces renouvelées tiennent le même langage ; graces meurtrieres qui nous trahissent. […] Elles vivent dans le calme, & se tiennent volontiers cachées. […] Quel scandale, de perdre ceux qu’on est chargé d’edifier, & dont par état on est tenu d’être les défenseurs & les modeles !