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68. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — PREMIERE PARTIE. — CHAPITRE III. Réflexions sur le renouvellement du Théâtre. » pp. 36-41

On ne peut pas douter que, dans les commencements, les Poètes, les Spectateurs et les Gouvernements n’ayent reconnu, d’un aveu unanime, que le Théâtre n’avait rien de mauvais, et qu’il méritait, au contraire, d’être soutenu et suivi ; mais, lorsque le profane fut resté en possession de la Scène, les sentiments se trouvèrent partagés. […] Dans ce cas, il change de sentiment en apparence, et soutient que le Théâtre est épuré, et qu’il n’y a pas une Pièce qui ne tende à la correction des mœurs.

69. (1731) Discours sur la comédie « Lettre Française et Latine du Révérend Père François Caffaro, Théatin ; à Monseigneur L’Archevêque de Paris. Imprimée à Paris en 1694. in-quarto. » pp. -

Mais je ne puis me dispenser de reconnaître humblement, comme je le dois, ce qui peut avoir donné lieu à me l’attribuer, d’avouer ingénument les sentiments que j’ai eu sur ce qui en fait le sujet, et de marquer en réparation, ceux où je suis sur cela présentement. C’est, Monseigneur, ce qui me fait prendre la liberté d’écrire à VOTRE GRANDEUR vous reconnassant pour mon Juge né et d’institution divine en matière de Doctrine, comme vous l’êtes aussi de tout le Troupeau qui vous est confié, dont je me fais honneur d’être, et auquel le saint Esprit vous a donné pour Pasteur, établi par Jésus-Christ même, et me tenant par cette raison obligé de faire cette déclaration de mes sentiments entre vos mains, pour la rendre publique sous votre autorité, si vous le jugez convenable. […] Il ne m’a pas été difficile de changer mon premier sentiment sur la Comédie, et de prendre celui où je suis présentement.

70. (1752) Lettre à Racine « Lettre à Racine —  LETTRE A M. RACINE, Sur le Théatre en général, & sur les Tragédies de son Père en particulier. » pp. 1-75

C’étoient néanmoins des hommes de génie, parce qu’ils avoient du sentiment. […] L’amour n’inspire point le sentiment, mais le sentiment donne du génie à l’amour. […] Mais distinguons ici l’intérêt du sentiment. […] Il falloit du Sentiment ; l’Auteur n’a eu que de l’Esprit. […] Et quelle variété dans le même sentiment !

71. (1772) Sermon sur les spectacles. Pour le Jeudi de la III. Semaine de Caresme [Sermons pour le Carême] « Sermon sur les spectacles » pp. 174-217

D’abord, j’en conviendrai, Messieurs, si c’est former l’esprit de le repaître de vanité, de mensonge & de fable, de remplir le cœur de sentiments outrés qui sont de l’héroïsme une chimere, enflent les passions jusqu’à rendre l’homme méconnoissable à l’homme même, & défigurent jusqu’à travestir en romans toute l’Histoire ; & je défie que personne méconnoisse le théâtre le plus châtié à ces traits. […] dans les sentiments, dans les pensées d’un auteur tout profane que la passion seul inspire, on puise plus de leçons de vertu que dans cette parole que vous nous mettez à la bouche, que dans les sentiments & les pensées des Peres, que dans notre Evangile ! […] Or ne sont-ce pas là les sentiments & le langage de tout théâtre ? […] Admonentur quid facere possint ; quand les exemples des héros, leurs sentiments, leurs discours, leurs actions, leur bonheur, jusqu’à leur infortune, tout autorise la passion : Admonentur quid facere possint, & inflammantur libidine. […] Mais que vous changerez un jour, au Tribunal de Jesus-Christ, de sentiment & de langage !

72. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre III. L’amour profane est la plus dangereuse de toutes les passions. » pp. 29-31

L’amour est, de tous les sentiments de l’âme, celui dont on doit le moins se faire un jeu. Lorsque ce sentiment n’a d’autre objet que ce qui peut flatter les sens, on perd souvent de vue les principes qui doivent assujettir la conduite à la raison.

73. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre XIX. Les Spectacles condamnés par les saintes Ecritures. » pp. 164-167

« Quels sentiments aurait eus Jésus-Christ des fidèles qu’il formait, s’il avait jugé nécessaire de leur interdire, par une loi expresse, des plaisirs païens ? Quels sentiments auraient eus des fidèles, les païens eux-mêmes, s’ils avaient vu qu’avec cette loi si pure, si sainte et si parfaite, qui condamne jusqu’à la pensée du mal, qui oblige de tendre sans cesse à la perfection, ces fidèles eussent eu besoin d’un commandement particulier pour n’aller pas aux spectacles ?

74. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Avertissement. » pp. -

L’homme de génie, guidé par un sentiment pur, par un enthousiasme qui tient de l’instinct, suit les principes de son art, quoique leur influence soit insensible. […] Au spectacle d’un beau drame, le sentiment s’éveille, digére pour ainsi dire, & met dans la balance du goût, les traits qui le frappent. […] Dans ce sacrifice ne voit-on pas le sentiment le plus héroïque, triompher d’une passion au moins excusable ?

75. (1710) Instructions sur divers sujets de morale « INSTRUCTION II. Sur les Spectacles. — CHAPITRE I. Que les Spectacles sont des plaisirs défendus. Preuves de cette défense tirées de l'Ecriture sainte, des Pères de l'Eglise, des Conciles, des Rituels, et des Lois civiles. » pp. 43-53

doit être non seulement une imitation, mais encore une continuation de la vie de Jésus-Christ, puisque c'est son esprit qui doit agir en lui, et imprimer dans son cœur les mêmes sentiments qu'il a imprimés dans celui de Jésus-Christ. […] Les spectacles sont absolument défendus, parce qu'ils sont absolument mauvais, et qu'on ne saurait les mettre au rang des choses qui peuvent être bonnes ou mauvaises, selon le bon ou le mauvais usage qu'on en fait ; et que rien n'est plus opposé à la vie, aux sentiments, et aux devoirs d'un véritable Chrétien. […] Ainsi ceux qui montent sur le Théâtre, sont moins coupables, au sentiment de saint Chrysostome, que ceux qui leur applaudissent, et les approuvent : « Otez les Spectateurs, et vous ôterez les Acteurs. » In Epist[ola]. ad Eph[ésii]. hom[ilie]. 17.

76. (1760) Critique d’un livre contre les spectacles « FRAGMENT D’UNE LETTRE A ME. DE ****. SUR LES SPECTACLES. » pp. 82-92

Pour parvenir à un succès si désirable, je crois qu’il serait nécessaire d’avoir un génie neuf, élevé, nerveux, qui, ne reconnaissant de règles que son sentiment, ne bâtisse point sur le dessein d’autrui : un tel homme serait notre Démosthène ; mais la servitude et le dégoût ne le formeront jamais, et je ne cesse pas d’être étonné que nous ayons encore de si bons Auteurs. […] L’amour est pour lui un sentiment tellement attrayant, qu’on peut l’amener aux vertus les plus difficiles, en se servant habilement de cette passion. […] Le sentiment qu’il nous dépeint ainsi, nous est aussi propre que notre existence, et ne nous étant pas possible de le haïr, n’est-il pas à craindre que nous ne nous accoutumions enfin aux vices sous lesquels on s’efforce de nous le montrer ?

77. (1758) Lettre de J. J. Rousseau à M. D’Alembert « PRÉFACE » pp. -

Par ce moyen Genève aurait des spectacles et des mœurs, et jouirait de l’avantage des uns et des autres ; les représentations théâtrales formeraient le goût des citoyens, et leur donneraient une finesse de tact, une délicatesse de sentiment qu’il est très difficile d’acquérir sans ce secours ; la littérature en profiterait sans que le libertinage fît des progrès, et Genève réunirait la sagesse de Lacédémone à la politesse d’Athènes. […] Du moins, tel est mon sentiment, et mes raisons sont dans cet écrit. […] Rien de tout cela ne pouvant être, il faut donc parler, il faut que je désavoue ce que je n’approuve point, afin qu’on ne m’impute pas d’autres sentiments que les miens.

78. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Seconde partie « Causes de la décadence du goût sur le théatre. — Chapitre XXIV. Le sentiment, juge plus sûr que le goût. Celui-ci préféré au premier. Pourquoi ? Amour du Théatre, funestes à ses progrès. Honneurs avilis en devenant trop communs. Cabales. Leurs effets, & les moyens qu’on employe pour les éluder.  » pp. 129-150

Le sentiment, juge plus sûr que le goût. […] On comprend que nous voulons dire le sentiment, beaucoup plus difficile à séduire que le goût. […] La voilà établie juge du génie, d’une maniere plus honorable que par le sentiment, qui ne laisse rien à faire à l’esprit. […] Pour moi je ne puis m’empêcher de répéter que l’art Tragique se propose d’ébranler l’ame par de violentes sécousses ; que le sentiment perd de son activité à proportion que l’esprit fait des progrès ; que le goût analytique est le plus cruel fléau de l’imagination & de l’enthousiasme ; que c’est à l’empire qu’il exerce de nos jours sur le Parterre, qu’il faut attribuer en partie, la foiblesse de nos Poëmes, & la décadence du Théatre.

79. (1697) Histoire de la Comédie et de l’Opéra « HISTOIRE ET ABREGE DES OUVRAGES LATIN, ITALIEN ET FRANCAIS, POUR ET CONTRE LA COMÉDIE ET L’OPERA — CHAPITRE III » pp. 42-76

Mais le cœur ému par cette représentation n’a pas les mêmes bornes, il n’agit pas par mesures ; dès qu’il se trouve attiré par son objet, il s’y abandonne selon toute l’étendue de son inclination, et souvent après avoir résolu de ne pousser pas les passions plus avant que les Héros de la Comédie, il s’est trouvé bien loin de son compte ; l’esprit accoutumé à se nourrir de toutes les manières de traiter la galanterie n’étant plein que d’aventures agréables et surprenantes, de vers tendres,délicats et passionnés, fait que le cœur dévoué à tous ces sentiments n’est plus capable de retenue. […] N’est-ce pas par ce sentiment qu’Alcionée mourant par sa propre main, dit à Lidie: « Vous m’avez commandé de vaincre, et j’ai vaincu, Vous m’avez commandé de vivre et j’ai vécu : Aujourd’hui vos rigueurs vous demandent ma vie, Mon bras aveuglément l’accorde à votre envie, Heureux et satisfait dans mes adversités, D’avoir jusqu’au tombeau suivi vos volontés. » Rodrigue ne parle t-il pas de même à Chimène, lorsqu’il va combattre dom Sanche. […] Mais il se plaint à la fin de cet Ouvrage par ces paroles : « Il est certain que depuis quelques années notre Théâtre se laisse retomber dans sa vieille corruption, et que les Farces impudentes, et les Comédies libertines, où l’on mêle bien des choses contraires aux sentiments de la piété et aux bonnes mœurs, ranimeront bientôt la Justice de nos Rois.  […] Le Sieur de Voisin a mis ensuite un Abrégé très édifiant de la vie de Monsieur le Prince de Conti, où les principales actions de ce pieux Prince sont décrites, principalement celles que la piété lui a fait pratiquer, et les sentiments chrétiens qu’elle lui avait inspiré. […] Et s’ils chantent, il faut, dit saint Augustin, que ce soit des Psaumes, des Hymnes et des Cantiques spirituels, afin que par le plaisir qui touche l’oreille, l’esprit encore faible s’élève dans les sentiments de piété, et qu’etant plus ardemment touché de dévotion par les chants animés de la parole divine, il reçoive avec plus de respect et de douceur les vérités qu’elle renferme et s’en occupe plus utilement.

80. (1804) De l’influence du théâtre « DE L’INFLUENCE DE LA CHAIRE, DU THEATRE ET DU BARREAU, DANS LA SOCIETE CIVILE, » pp. 1-167

pouvons-nous bien, avec quelque pudeur, vanter nos bienfaits, et demander quelque sentiment de reconnaissance ? […] Celle du sentiment le plus tendre que nous puissions éprouver, peut avoir une bien autre influence. […] Elle offre du sentiment, de la noblesse, de la générosité, de la gaieté, et quelquefois d’excellent comique. […] S’il a de l’âme et du sentiment, c’est là qu’il en doit montrer toute la chaleur et l’énergie ; c’est là que dans un vaste champ, il peut appeler à son secours le Dieu même de l’éloquence. […] Comme tout y entretient la confiance et la sécurité, tout y respire aussi la noblesse des sentiments et des idées.

81. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre VI. Les spectacles produisent et favorisent l’incrédulité. » pp. 86-89

Quand on n’aurait pas à imputer à un auteur d’une tragédie tous les mauvais sentiments qu’il étale, il y a des affectations qui découvrent ce qu’on doit mettre sur son compte. » Il n’arrive que trop souvent qu’ils emploient, sans détour, le langage de l’impiété ; il faut des traits hardis pour réveiller l’attention, et pour flatter le goût peu chrétien du siècle. […] Ce sont des héros qu’ils produisent sur la scène, et les sentiments impies qu’ils leur prêtent charment les spectateurs et attirent leurs suffrages.

82. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre XXI. Les spectacles condamnés par les auteurs profanes anciens et modernes. » pp. 179-182

Celles qui ne respirent pas l’amour profane excitent les sentiments les plus violents d’ambition, de vengeance, de cruauté, de perfidie ». […] Leur sentiment unanime appartient à la foi.

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