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37. (1759) Apologie du théâtre « Apologie du théâtre » pp. 141-238

Je lui abandonne tous les exemples vicieux et reconnus tels ; mais de cent Tragédies, il n’y en a pas une où l’intérêt soit pour le crime. […] Rousseau s’il croit que l’intérêt de l’amour l’emportât dans nos cœurs sur l’intérêt sacré de la nature ou de la patrie ? […] Quand je viens d’entendre et d’admirer Lise, Constance ou Cénie, j’oublie la cause, la seule cause de l’intérêt vif et tendre, dont je suis encore tout ému ? […] L’âme prend, à la longue, une teinture des affections vertueuses dont elle se pénètre : l’intérêt qu’elles lui inspirent leur sert comme de mordant. […] Or, si cet état peut être honnête, il est de l’équité, de l’humanité, de l’intérêt des mœurs de l’y encourager.

38. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre II. Le métier de comédien est mauvais par lui-même, et rend infâmes ceux qui l’exercent. » pp. 15-28

Les prêtres païens, plus favorables que contraires à des spectacles qui faisaient partie de jeux consacrés à la religion, n’avaient aucun intérêt à les décrier, et ne les décriaient pas en effet. […] Enfin, leurs théâtres n’étaient point élevés par l’intérêt et par l’avarice ; les spectateurs n’y étaient pas mis à contribution. […] Et, de peur que ses maximes sévères ne fissent un progrès nuisible à son intérêt, l’actrice est toujours la première à parodier son rôle, et à détruire son propre ouvrage.

39. (1689) Le Missionnaire de l’Oratoire « [FRONTISPICE] — Chapitre » pp. 15-18

Pensez-vous être excusé au jugement de Dieu, de croire plutôt à un homme qui vous flatte, qui vous parle en secret, et qui ne vous apporte aucune preuve de son dire, qu’aux prédicateurs qui n’ont point d’intérêt que la vérité, qui vous parlent en public de la part de votre pasteur, de votre évêque, de votre Dieu, et qui prouvent leur dire par les textes de la Bible, par les Pères et les conciles ? […] On ne condamne dans le monde que les péchés extérieurs et grossiers ; mais Dieu juge plus rigoureusement, il condamne plus sévèrement les péchés spirituels, les péchés de démon : être idolâtre de soi-même, être horriblement attaché à soi et à ses propres intérêts.

40. (1643) Les Morales chrétiennes « Des Théâtres. » pp. 511-519

On y voit les premières complaisances, d’une beauté qui se terminent en des adultères, en des sacrilèges, en des jalousies enragées ; l’on y déploie tous les artifices de la perfidie, toutes les fureurs du désespoir ; tous les massacres, tous les venins de la cruauté, toutes les horribles cérémonies des démons ; les éléments sortent de leurs places, les furies de l’enfer, les morts des sépulcres, les Dieux de leur trône ; on va chercher les autres mondes pour soutenir les intérêts de cette funeste et malheureuse passion. […] Leur face nous semble déjà bien sévère, la nature n’appréhende que trop leurs difficultés, sans qu’on leur ôte tout ce qui leur reste de crédit, en faisant voir leurs entreprises, et leurs fins toujours malheureuses : déjà les hommes ne sont que trop portés, à l’ambition, à l’ennui, aux vanités, aux colères, aux vengeances, aux injustices qui cherchent leur propre intérêt dans la ruine des autres, et qui pensent bien acquérir tout ce qu’ils peuvent usurper ?

41. (1772) Réflexions sur le théâtre, vol 9 « Réflexions sur le théâtre, vol 9 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE NEUVIEME. — CHAPITRE II. Melanie. » pp. 29-71

Qui sait même si ce panégyriste ne prend pas un intérêt de parti à ces sentimens peu chrétiens ? […] Il peut s’y glisser des vues d’intérêt, des motifs de paresse, des raisons de dépit. […] Dans les conditions communes on y a peu d’intérêt : l’entrée dans un Couvent ne coûte guère moins que l’établissement dans le monde. […] Les vers sont traînans, & les scenes soporifiques ; l’intérêt est divisé, jamais l’action n’avance, on ne fait que dialoguer sans aller au but. […] Son pere n’eût-il point d’intérêt de famille pour la faire Religieuse, il devroit vouloir se débarrasser d’une folle.

42. (1833) Discours sur les spectacles « [Discours sur les spectacles] » pp. 3-16

un lieu où sont représentés avec une étonnante précision tous les ridicules de la pauvre humanité, depuis ceux du prince assis sur le trône, jusques à ceux du pauvre couché sur la poussière ; où l’hypocrisie mise à nu, succombe sous le poids des anathèmes publics ; où la liberté trouve toujours des applaudissements, et la tyrannie des sifflets ; où le fanatisme excite l’indignation, la pitié ou le mépris, et où la charité, la tolérance sont toujours accueillies avec transports ; où enfin tout ce qui est juste, noble, généreux, désintéressé, trouve sympathie, et où l’on ne repousse que ce qui est contraire aux vrais intérêts des peuples et au bonheur de l’humanité : voyez l’épouse de Thésée, bourrelée de remords, et expirante au milieu des plus cruelles angoisses, victime d’une flamme coupablee ; quel cœur de femme n’a pas frissonné d’horreur aux accents de désespoir, de rage et de fureur de notre immortelle tragédienne dans le rôle de la belle-mère d’Hippolytef ! […] Les intérêts de la religion ne sont donc pour rien dans la prohibition du spectacle : le vrai motif des anathèmes de l’Église de France contre les acteurs et la comédie, c’est la perte du monopole, d’une influence acquise, le dépit de ne plus pouvoir jouer les autres, et la douleur de se voir jouer soi-même. […] Nos évêques seuls, s’aveuglant sur les vrais intérêts de la religion, leur refusent les prières de l’Église ; au mépris de la charité chrétienne, ils admettent une distinction des personnes que Jésus-Christ a défendue.

43. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Causes de la décadence du goût sur le théâtre. — Chapitre XI. De l’amour & de ses impressions dans le Poéme Tragique. » pp. 165-178

J’ose le dire, si les gens de Distinction ne fréquentent plus la Comédie que par coutume, ou pour s’y donner eux-mêmes en spectacle, on doit moins l’attribuer à un certain goût de frivolité, qu’à une juste satiété, qu’à ces intrigues amoureuses, qui, leur rabattant éternellement les mêmes intérêts, les mêmes situations, ne méritent de leur part qu’une inattention dédaigneuse. […] Telle est la source où les anciens ont puisé ces intérêts, ces passions, qui emportent nos ames comme dans des tourbillons de feu.

44. (1760) Critique d’un livre contre les spectacles « FRAGMENT D’UNE LETTRE A ME. DE ****. SUR LES SPECTACLES. » pp. 82-92

Quel talent malheureux que celui de nous faire prendre intérêt aux crimes les plus atroces, et de nous faire courir à des monstres qui effrayent la nature ! […] L’unité d’intérêt (ou de mouvement), est rompue : elle est plus nécessaire encore que l’unité de temps et de lieu : Titus ne doit pas être amant38.

45. (1760) Lettre à M. Fréron pp. 3-54

Engagé donc par serment à bien servir les intérêts de la Ferme, excité par une ardente émulation je fermai les yeux sur ce qu’il y avait de vil dans un emploi pour la possession duquel j’avais fait le vœu de bien persécuter mon prochain, je me proposais bien de me faire un cœur de fer, de fermer l’oreille à tous les mouvements de la charité, pour n’avoir rien à me reprocher sur l’exécution de mon serment. […] Les auteurs Dramatiques qui se sont imaginés que la politesse, les mœurs et le bon esprit avaient triomphé de l’avarice et percé jusqu’au cœur de ces Messieurs se sont étrangement abusés ; qu’ils seraient détrompés bientôt, si leur intérêt les conduisait dans les Anti-chambres de ces Tirans pour solliciter quelques graces ! […] Si la bonne foi a tant à souffrir dans toutes les professions, si les devoirs de la Religion s’accordent si peu avec l’intérêt de ceux qui les exercent il n’est donc qu’un seul état où l’on puisse se supposer à couvert des tentations : c’est l’Etat Ecclésiastique. […] L’intérêt et l’ambition des familles pourraient alors se concilier avec la tendresse paternelle. […] Qu’ils sachent que l’intérêt de sa gloire ne lui fera jamais haïr une nation estimable par tant d’endroits et que les grandes âmes comme la sienne savent estimer et reconnaître le mérite dans leurs ennemis même.

46. (1781) Lettre à M. *** sur les Spectacles des Boulevards. Par M. Rousseau pp. 1-83

, suit de près la dépravation des mœurs, quel intérêt n’ont pas ceux qui gouvernent, à veiller sur elles & à les conserver, autant qu’il est possible, dans toute leur pureté ? […] Leur intérêt est de n’en laisser représenter aucune qui puisse entrer en comparaison avec celles dont elles sont en possession. […] non, sans doute, puisqu’il est avoué & reconnu qu’ils sont également contraires aux intérêts du Souverain, & à ceux de ses Peuples. […] 5.° Les intérêts des Pauvres souffriraient de la suppression de ces mêmes Jeux. […] félicite-toi d’avoir un Monarque qui connaît tes vrais intérêts, & qui saisit les occasions de te prouver qu’eux seuls reglent tous les mouvemens de son cœur !

47. (1666) Dissertation sur la condemnation des théâtres « Extrait du Privilège du Roi. » pp. -1

Et défenses sont faites à tous Imprimeurs, libraires et autres personnes de quelque qualité et condition qu'elles soient, de l'imprimer, vendre et débiter, à peine de quinze cents livres d'amende, confiscation des Exemplaires, et de tous dépens, dommages et intérêts, comme il est plus amplement porté par lesdites Lettres.

48. (1664) Traité contre les danses et les comédies « A MADAME. MADAME LA PRINCESSE DE CONTI. » pp. -

Je supplie très humblement votre Altesse, de préférer l’intérêt de la charité à celui de la modestie, et d’agréer que sous un nom glorieux comme le vôtre, j’Imprime un Ouvrage qui est de lui-même si excellent, qu’il ne saurait être honoré d’une dédicace moindre que celle que je fais ; il n’en peut pas avoir une plus glorieuse, si votre Altesse m’en accorde l’honneur, avec celui de lui dire que je suis, avec tout le respect que je dois.

49. (1774) L’homme du monde éclairé « L’homme du monde éclairé » pp. 150-171

C’est l’artifice ordinaire au vice, comme à l’erreur, qui ont intérêt de s’étayer par la division des deux puissances. […] Il a trouvé des apologistes, cet art pernicieux, qui n’eût dû trouver que des ennemis, ou plutôt, qui, pour l’intérêt de la vertu, n’auroient jamais dû naître. […] Le même intérêt de passion qui les y mene, leur met les armes à la main pour les soutenir.

50. (1768) Réflexions sur le théâtre, vol 7 « Réflexions sur le théâtre, vol 7 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SEPTIÈME. — CHAPITRE VIII. Sentimens de S. Chrysostome. » pp. 181-192

Mais quand ils entendent vos applaudissemens, qu’ils voient la foule des spectateurs, & l’argent qui leur en revient, n’eussent-ils aucun goût, ils y viendroient par intérêt. […] Ne cherchassiez-vous que votre satisfaction, il seroit de votre intérêt de ne pas courir après une proie dont la facilité affadit la conquête. […] Je vous parle comme on parleroit à un aveugle débauché, peu touché & peu capable de l’être des grands objets de la religion, du paradis, de l’enfer, & qu’il faut tâcher de prendre par les motifs humains d’un intérêt temporel.

51. (1752) Traité sur la poésie dramatique « Traité sur la poésie dramatique —  CHAPITRE XI. Les Grecs ont-ils porté plus loin que nous la perfection de la Tragédie ? » pp. 316-335

Mais ordinairement il le contredit, parce qu’il y trouve son intérêt particulier. […] Quand Corneille contredit Aristote sur l’Unité du lieu & du tems, il est certain que l’intérêt qu’il trouve à se justifier lui-même, est cause qu’il se trompe. […] La lecture de cette seule Piéce nous jette dans une émotion que ne nous cause point celle d’Athalie, où la Reconnoissance produit une Catastrophe qui remet le Spectateur dans la tranquillité ; mais en même tems cette Piéce aussi recommandable que celle de Sophocle, par la simplicité, la vraisemblance de la conduite, & la vivacité de l’Action, d’où naît un très-grand intérêt, étant outre cela recommandable par la beauté des caracteres, & les vérités qu’elle enseigne, forme un Tout ensemble, qui la rend digne d’être comparée au Chef-d’œuvre de la Grece.

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