on n’y jure que par lui, on y prêche tous les jours ses sermons, on les écoute avec une attention toujours nouvelle, on les sçait par cœur, tous les Poëtes mettent leur gloire à l’imiter, c’est leur Apollon, ses farces sont des oracles. […] Souvent Moliere ne parle pas françois : on diroit qu’il joue en province, & en emprunte le jargon Au reste, ce changement de style est une foible digue à la corruption, ou plutôt par la malignité du cœur humain elle la favorise. […] Sophocle, Eurypide, étudierent les deux plus puissans ressorts du cœur, la terreur & la pitié, les mirent en œuvre avec cette grandeur & cette simplicité que la nature révelle aux génies qui l’interrogent. […] Les déclamations de Seneque, qu’on a honorées du nom de tragédies, ne sont pas faites pour changer les cœurs. […] Vous n’auriez pas besoin d’aller chercher au fond des cœurs le tableau des mœurs : il est sur le front, le masque est levé.
appelle-t-il vivre honnêtement employer son esprit et mettre tout son temps et sa peine aux jours mêmes qui sont consacrés au service divin, à apprendre son rôlet, à compasser ses pas, et à étudier ses gestes, ses postures et son ton de voix, pour s’imprimer dans le cœur les passions qu’ils veulent faire ressentir à leurs spectateurs ? […] Or il est constant que cette fin ne vaut rien, puisqu’elle est entièrement opposée à l’esprit du Christianisme, qui ne tend qu’à mortifier et à affaiblir de telle sorte les passions, durant le temps qu’on est dans cette misérable vie, qu’elles ne dominent pas dans le cœur : car l’esprit du Christianisme est un esprit de calme et de paix. Et c’est cet esprit que Jésus-Christ inspira à ses Apôtres un peu avant son Ascension, en leur disant que leur cœur ne devait pas être dans l’agitation et dans le trouble : « Pacem meam do vobis : non turbetur cor vestrum, etc. » L’esprit de la comédie au contraire qui ne tend qu’à fomenter les passions, est un esprit de trouble, d’agitation et de fureur. […] Ce n’a donc été que la corruption de leur cœur, et le désir de gagner davantage dans ce métier, qu’ils ne feraient dans un autre qui les y ont engagés. […] Elle corrompt, dis-je, l’âme par les mauvaises pensées ; le cœur par les mauvais désirs ; les oreilles par les paroles déshonnêtes et équivoques, et les yeux par les regards lascifs et licencieux.
— Qu’elle vous adore : qu’elle ne peut vivre sans la possession de votre cœur : mais qu’elle préfère votre bonheur au sien. — Mais, a dit Mademoiselle ***, cette calèche vous assomme —. […] je suis prête à tout pour regagner votre cœur… Il était à mes genoux : il fondait en larmes, la bouche collée sur une de mes mains. […] qu’il semble doux aux cœurs longtems agités !..
Henri parfait qui nous embrasse Ta mère cultivant Parnasse Nourrit un Apollon vainqueur De l’Hydre rampant d’ignorance, T’allaitant au lait de science, Qui source toujours en son cœur. […] Belle et rare fleur de science, Qui jeune est chenu de prudence, Nos cœur seront à l’avenir Un trône à l’autel de ta gloire, Pour éterniser ta mémoire Par un immortel souvenir.
Quels ravages de tels sentimens, s’ils sont reçus dans le cœur déja trop porté à l’enflure, ne doivent-ils pas produire ? […] Auroit-on oublié combien sont profondes les racines que les passions ont jettées dans le cœur ?
Ses transports, lorsqu’on lui a rendu la manière dont j’ai accepté, ne peuvent se concevoir, que par le cœur dans lequel ils ont tous passé. […] Inès a porté dans tous les cœurs, l’attendrissement dont elle était pénétrée : elle a vu des larmes, entendu des sanglots, mêlés aux cris de l’admiration.
C’est par de pareilles leçons de morale que des distinctions, imaginaires ou de convention, auxquelles la nature continue, malgré tout, d’avoir peu d’égards, et qui ne dirigeant pas dans leurs choix les jeunes cœurs sans ambition, deviennent plus tard, dans le temps, des préjugés, des prétextes à l’inconstance, des titres pour mépriser ses devoirs les plus sacrés. […] En effet, il le représente professant constamment qu’un homme d’honneur doit être franc et sincère, et ne rien dire qui ne parte du cœur ; qu’il se ferait plutôt pendre que de trahir sa conscience. […] que si de vos mains je ratrappe mon cœur, Je bénirai le ciel de ce rare bonheur ! […] Si on y supportait des fadaises, des petits raffinements de vanité, quelques manières ou des phrases de mauvais goût, l’homme pervers y était en horreur ; on y frappait d’anathème les cœurs corrompus. […] N’est-ce pas préférer aux cœurs purs, si rares, si nécessaires, les puristes ou rigoristes, les beaux esprits si communs, si indifférents pour le bonheur général, et qui fourmillent parmi les hommes odieux, parmi ces êtres dégradés qui préfèrent le nom de fripon à celui de sot ?
Voilà d'où procédait cet amour que j'avais pour les douleurs, lequel toutefois n'était pas tel que j'eusse désiré qu'elles eussent passé plus avant dans mon cœur et dans mon âme : car je n'eusse pas aimé à souffrir les choses que j'aimais à regarder ; mais j'étais bien aise que le récit et la représentation qui s'en faisait devant moi, m'égratignât un peu la peau, pour le dire ainsi ; quoi qu'en suite ; comme il arrive à ceux qui se grattent avec les ongles ; cette satisfaction passagère me causât une enfleure pleine d'inflammation d'où sortait du sang corrompu et de la boue. […] Ce sont ceux qui conforment leur cœur à la volonté de Dieu, qui règlent te conduisent leur volonté par la sienne. […] Nous imitons en cela celui qui payerait d'une injure le plaisir qu'il viendrait de recevoir, et qui percerait le visage et le cœur de celui qui lui se ferait des caresses. […] Où sont les Chrétiens qui retranchent de leurs cœurs ces appétits déréglés ; qui fassent profession de la piété, et tout ensemble de la sobriété, et qui témoignent par leurs actions qu'ils ont l'espérance d'une gloire qui doit toujours durer. […] Les paroles de l'Evangile sont-elles une plus vive impression sur les cœurs que celles des Théâtres ?
Ici, Messieurs, pour ne pas combattre en aveugle le prétendu Théologien, je me suis vu obligé de parcourir les principales pièces qu’on représente le plus souvent sur le Théâtre ; et si dans ce lieu uniquement destiné aux Sciences Ecclésiastiques, je n’ose vous lire des Vers, où les artifices de l’Amour déréglé et les démarches d’une ambition démesurée se montrent avec l’appareil le plus capable de séduire les cœurs, voyons du moins ce que pensent les gens du monde et les plus habiles connaisseurs touchant les divertissements du Théâtre d’aujourd’hui. […] nous l’apprendra dans le beau portrait qu’il a fait de l’Opéra, où il montre aux maris d’une manière également vive et naturelle l’impression que peuvent faire les spectacles dans l’esprit et dans le cœur de leurs Epouses, quelque pieuses qu’elles soient : « Par toi-même bientôt conduite à l’Opéra Satire X. […] Mais de quels mouvements dans son cœur excités, Sentira-t-elle alors, tous ses sens agités ? […] Là de nos voluptés, l’image la plus vive, Frappe, enlève les sens, tient une âme captive, Le jeu des passions saisit le spectateur, Il aime ce qu’il hait, et lui-même est Acteur ; D’un Héros soupirant là chacun prend la place, Et c’est dans tous les cœurs que la Scène se passe. […] Gardons-nous d’irriter ce perfide ennemi, Dans le cœur le plus froid il ne dort qu’à demi ; Et périsse notre art, que nos lyres se taisent, Si c’est à l’amour seul que les hommes se plaisent. » Mais en voilà bien assez pour montrer à quoi aboutit tout ce qu’on apprend aux spectacles, et pour faire rougir le prétendu Théologien, qui mérité si justement ces reproches de l’Ecriture Isaïe 5. 20.
Peu de son cœur profond ont sondé les replis. […] Ce sont les ressorts ordinaires dans les intrigues d’une Cour, plus efficaces en ce qu’ils vont au cœur, & sont cachés sous le voile d’une galanterie vraie ou feinte. […] Ces Troupes suivent dans les voyages, sans craindre que les ennemis de l’Etat les enlevent, & vont dans les armées sans avoir à combattre que les cœurs dont elles font une grande deconfiteure. […] Quelle idée nous donne-t-elle de la corruption de son cœur, de la foiblesse de son esprit, & de l’indécence de sa conduire. […] Elle avoit son cœur tout pareil avec celui de Leon X. son grand oncle, & de Come de Medicis le Magnifique.
Il pourrait arriver même qu’un homme dépourvu des qualités éssentielles, fit de très-mauvais Drames-Bouffons, après en avoir appris les règles par cœur. […] Je soupire après le fort des Auteurs qui s’y font connaître, mon cœur palpite, & je m’encourage à pénétrer dans la carrière des Lettres. — Etes-vous un peu sçavant ? […] Je démêle pourtant sans peine que l’amour propre livre dans son cœur un furieux combat. […] « Voulez-vous copier la Nature, (dit Horace dans son Art Poétique,) étudiez-là dans le cœur & dans les mœurs mêmes des hommes de différens états ; tous les traits que vous tirerez alors d’après elle, seront des traits vifs & animés8. » Ces paroles semblent avoir été faites en faveur des Poètes qui se destinent à la composition des Pièces du nouveau genre.
Ces grands et superbes spectacles, donnés sous le ciel, à la face de toute une nation, n’offraient de toutes parts que des combats et des victoires, des prix et des objets capables d’inspirer aux Grecs une ardente émulation, et d’échauffer leurs cœurs de sentiments d’honneur et de gloire. […] Dans tout autre temps on n’aurait pas besoin de le demander ; mais dans ce siècle, où règnent si fièrement les préjugés et l’erreur sous le nom de philosophie, les hommes, abrutis par leur vain savoir, ont fermé leur esprit à la voix de la raison, et leur cœur à celle de la nature. […] malgré mille précautions, une femme honnête et sage, exposée au moindre danger, a bien de la peine encore à se conserver un cœur à l’épreuve ; et ces jeunes personnes audacieuses, sans autre éducation qu’un système de coquetterie et des rôles amoureux, dans une parure immodeste, sans cesse entourées d’une jeunesse ardente et téméraire, au milieu des douces voix de l’amour et du plaisir, résisteront à leur âge, à leur cœur, aux objets qui les environnent, aux discours qu’on leur tient, aux occasions toujours renaissantes, et à l’or auquel elles sont d’avance à demi vendues !
On fixe l’attention, on exalte l’imagination, on va droit au cœur, on pénetre par tous les sens, parce qu’alors on paroît soi-même plus persuadé, plus animé. […] Paul défend d’aimer ; à plus forte raison de rendre aimable par une enveloppe séduisante qui la rend plus dangereuse Le dénouement tardif d’un mariage est un remede insuffisant au poison subtil qui s’est dejà glissé dans le cœur. […] On ne se joue point du scrutateur des cœurs, on ne mérite pas moins son anatheme : Pecunia tua tecum sit in perditione. […] Les femmes allument le feu des passions au cœur des hommes, comme les renards de Samson embraserent les bleds des Philistins. […] O aveuglement de l’homme, qui trouvant la mort de tous côtés, lui prête de nouvelles armes, ouvre son sein à ses coups, aiguise le poignard, & se le plonge lui-même dans le cœur !
Le théatre est un enfer, il le mérite, & y conduit ; les flammes de la passion, en brûlant les cœurs, allument celles de l’abyme. […] le délire de leur imagination, ou plutôt la corruption de leur cœur, a-t-elle si mal rencontré ? […] Elle porte dans le cœur une confiance fiere qui le ranime, dans l’esprit une vivacité aimable qui l’éclaire. […] Le grand art de la danse n’est que l’art d’empoisonner les cœurs : Mulieribus saltantibus, nihil turpius ; chorea diabolica, est incendium, & formax concupiscentia, & castitatis opugnatrix. […] Mais par-tout Vénus, l’amour, des danses galantes, des danseuses peu modestes, quoique le goût d’un Prince fort retenu, les rendît moins licencieuses, vinrent infecter le spectacle, & porter le flambeau du vice dans le cœur.
Le second est de juger par les Confessions des fidèles du mauvais effet que les Comédies produisent dans leur cœur. […] Le venin a entièrement gagné son cœur, il faut qu’elle en meure : ainsi cette jeune personne a pris plaisir à la Comédie. […] et ne sait-on pas que ceux qui réussissent le mieux à jouer les Rôles les plus tendres, ce sont ceux qui ont le cœur le plus passionné ? […] Cependant si on les examinait de prés, on trouverait sans doute généralement parlant plus de corruption de cœur parmi les Comédiens que partout ailleurs ; parce que portant eux-mêmes le poison dans le cœur des autres, comment pourraient-ils s’en garantir sans des préservatifs extraordinaires qu’ils n ont pas. […] Que dis-je, un simple Artisan pour peu de cœur et d’honneur qu’il eût, voudrait-il épouser une fille qui montât sur le Théâtre ?
Ils émeuvent les sens, ils flattent les passions, ils abattent la plus forte vertu: Ces corrupteurs agréables ne manquent pas d'approbateurs, qui leur servent à insinuer plus doucement leur poison dans les cœurs de ceux qui les écoutent. […] et comme tout le monde les regarde avec plaisir, ils apprennent par là ce qu'ils peuvent faire: Ces objets allument dans leurs cœurs le feu de l'impureté, qui s'enflamme par la vue. […] Il faut donc fuir les Spectacles, non seulement afin que les vices ne fassent aucune impression sur nos esprits, qui trouble la paix et la tranquillité de nos cœurs ; mais aussi afin que nous ne nous laissons point emporter par la coutume du siècle aux attraits des voluptés, qui nous détournent de Dieu, et des bonnes œuvres que nous devons faire.
L’amour nous en présente dans les Comédies sous une forme bien différente : le vice se montre presque toujours à découvert ; et on n’en remporte souvent que des impressions capables d’allumer ou de nourrir dans le cœur un penchant dangereux. […] En effet, quelque air de sagesse et de modestie que l’on puisse donner à cette passion, elle aura toujours trop d’empire sur le cœur des hommes, pour ne pas faire une impression dangereuse sur les Spectateurs. […] Je m’imagine qu’elle leur reprocherait que, d’une femme d’honneur, ils en ont fait une prostituée, qui n’est bonne qu’à amollir et à corrompre le cœur des hommes.
Il en impose aux yeux pour corrompre plus sûrement le cœur. […] Quelles bonnes leçons, par exemple, peuvent donner au cœur ? […] S’il en est dont le cœur soit neuf encore, il ne sera pas longtemps sans occupation ; il ne faut qu’une scène pour le séduire. […] La scène Française souffle aujourd’hui dans les cœurs un double poison, que nous devons regarder comme également funeste à la Religion et à l’Etat. […] Car on a beau se flatter et s’étourdir sur cette profession, il n’y a personne qui au fond du cœur ne sache l’apprécier.
Il faut que dans toutes ses études il ait pris bien peu, et du goût de la science qu’il professe, et de l’esprit de la Religion de Jésus-Christ, pour entreprendre la défense de ces spectacles, que les Pères et les Canons de l’Eglise ont condamnés comme contraires à la sainteté des mœurs et à la pureté du cœur, que nous veut inspirer Jésus-Christ par ses paroles et par ses exemples. […] La raison prétendue par laquelle on veut justifier la Comédie d’aujourd’hui, savait qu’elle est épurée de toutes les ordures et de toute l’idolâtrie, qu’y mélaient les anciens, est une raison si faible, qu’elle n’est pas digne du moindre petit Ecolier de Théologie, ni d’un homme tant soit peu versé dans la connaissance de la Morale de Jésus-Christ, et dans celle du cœur de l’homme.
A Rome on les écouta, on les respecta, chacun s’en retourna frappant sa poitrine & brisant son cœur, à la vue des malheurs qu’annonçoient ces prophêtes. […] Prude au cœur faux, se croyant philosophe, Et bel esprit, sans en avoir l’étoffe ; Elle eut toujours bien plus d’art que d’attraits. […] Quoique l’honneteté soit à present sur le théatre françois, chacun sait qu’une feinte bien representée fait des impressions réelles, & produit des sentimens véritables dans le cœur des assistans. […] Le vice n’est pas pou-elle un masque, il est dans le cœur, est dans toutes les allures ; c’est lui qui parle en elles & qui agit. […] Une des niéces jeune & jolie y joue un un grand rôle, & partage les cœurs.
surtout si vous compariez leurs esprits & leurs cœurs, leurs sentimens & leurs pensées, leurs désirs & leurs projets, leurs goûts & leurs souvenirs, leurs amours & leurs penchans ! […] un coup d’archet fait tout marcher, un coup d’œil, un geste fait voler leur cœur. […] L’opéra est de tous les spectacles le plus analogue au cœur des femmes, par conséquent le plus dangereux. […] La poësie les ravit, sur-tout une poësie légère, badine, vive, saillante, tendre, harmonieuse : celle du théatre, on l’apprend par cœur, on la récite, on en fait son langage ; jamais déclaration ne fera mieux reçue que quand elle sera prise dans quelque opéra. […] On ne sauroit vivre sans sentimens, c’est l’aliment du cœur d’une femme : ici tout ressent, tout exprime, tout inspire les plus vifs & les plus délicieux, de toute espèce ; pitié, fureur, langueur, fierté, chaque scène en fait naître.
soit parce que ces deux désordres éloignent également de Dieu, & tournent entierement vers la créature un cœur aveugle qui s’en fait une divinité ; soit parce que l’ame étant unie à Dieu par la grace, & que Dieu en conséquence daigne l’appeler son épouse, tout amour étranger, tout partage du cœur, est par rapport à Dieu un véritable adultere. […] D’autres Auteurs ont entendu le cœur par le milieu du Sein, c’est-à-dire, arrachez l’impureté de votre cœur. […] C’est aux amateurs raisonnables à sentir le ridicule & le danger d’une profession aussi criminelle, & les moyens que le vice met en œuvre pour corrompre les cœurs. […] Elle commence par se laver tout le corps ; ainsi faut-il se laver le cœur dans les larmes de la pénitence. […] Les Marchands font, pour gagner leur argent, ce qu’elles font pour gagner les cœurs.
Cet honnête Citoyen ne dit pas un mot qui ne soit d’accord avec la raison dans un cœur droit. […] Il n’est point ici question de galanterie : que Monsieur réponde selon son cœur, il sait que je ne cherche qu’à m’instruire. […] Si l’on entend, corrompre le cœur, inspirer le goût de la débauche ; cet effet ne peut résulter que de quelques Pièces, proscrites par le Plan de Réforme. […] Un culte d’autant plus ridicule, qu’il était plus composé, succède à l’hommage des cœurs. […] le pouvaient-ils, ô mortel abusé, puisque ce trône est dans ton cœur ; & que tu trouves Dieu sans sortir de toi-même !
Mais à des machiavélistes qui moulent la piété à la police et la police à leur volonté, il nous faut purger de tous points et voir si nos actions irrépréhensibles par les lois divines le peuvent être par les humaines, si elles sapent les fondements de la monarchie ou si elles divisent les cœurs des sujets de l’obéissance de leurs princesaa. […] Voilà comment notre profession causant ces assemblées, et elles unissant les volontés au lieu de les diviser, et bien souvent liant les cœurs envieillis de haine du vrai nœud de l’amitié nous purgeae de ce côté-là. […] Nos actions sont ouvertes comme nos cœurs : Notre Roi les voit journellement, y prend plaisir et les approuve. […] [NDE] Comprendre : le fait que notre profession cause ces assemblées et que celles-ci unissent les volontés et lient les cœurs nous lave de cette accusation.
« Sachez, Docteur, que les inconséquences du cœur mettent tôt ou tard en déffaut les conséquences de l’esprit. » Ne faut-il pas un Commentaire pour les éxpliquer ? […] … Sophie……………………………… Quand sous tes doigts naissent les roses, Les épines sont dans ton cœur. Comment se représenter un cœur rempli d’épines ? […] Tout-à-l’heure le bras marchait, à présent c’est un cœur qui parle par une main. […] Il est de la nature des Drames burlesques de ne contenir rien d’essentiel ; au lieu que les ouvrages que j’ai cité doivent parler au cœur comme à l’esprit.
Déja jusqu’en mon cœur le poison parvenu, Dans ce cœur expirant jette un froid inconnu, mon oreille est également satisfaite, en les entendant rendus ainsi par l’Abbé Conti : Io presi, io stillar fei nell’ ardenti mie vene Un velen, che Medea porrò seco d’Athene ; Gia dentro del miu core il veleno diffuso, Sparge nel cor spirante languor fredo non uso. […] Il est rapporté dans l’Histoire des Croisades, qu’un Chevalier amoureux de la femme de son voisin, obligé de partir pour la Guerre sainte, y mourut, après avoir ordonné par son Testament que son cœur seroit reporté à celle qui l’avoit toujours possédé. […] Canaye, si elle m’avoit commandé de vous tuer, je vous aurois enfoncé ce couteau dans le cœur. […] Un grand cœur cede un trône, & le cede avec gloire : Cet effort de vertu couronne sa mémoire. […] Monime & Xiphares savent aimer : mais quand ils voyent que pour leur malheur le Ciel a joint si tendrement Deux cœurs que l’un pour l’autre il ne destinoit point, aussi-tôt ils se disent un adieu éternel, & Monime n’ose se plaindre de son sort, puisqu’elle a dit à Mithridate, qu’elle n’aime point, Et même de mon sort je ne pouvois me plaindre, Puisqu’enfin aux dépens de mes vœux les plus doux, Je faisois le bonheur d’un Heros tel que vous.
… Si ce tyran, dont le nom seul serait une insulte aux tyrans les plus odieux, ne peut écouter Burrhus avec un cœur tranquille, est-il né des monstres qui se flattent d’être plus insensibles que lui aux charmes de la vertu, et au cri des remords ? […] D’abord, je conviens que je suis un de ces partisans du théâtre, qui vous diront que si les Auteurs abusent du pouvoir d’émouvoir les cœurs, cette faute doit être attribuée aux Artistes, et nullement à l’art même : et j’avoue qu’en consultant mon cœur, à la fin de plusieurs pièces dramatiques, je me suis senti plus disposé à régler mes passions, qu’après avoir lu tous les Moralistes anciens et modernes : j’avoue aussi ingénument que je ne conçois pas comment « le théâtre purge les passions qu’on n’a pas, et fomente celles qu’on a. » Cette métaphysique est trop au-dessus de mon faible entendement : je la respecte donc, et me contente de prouver qu’il purge en nous les passions, que nous avons, par des moyens plus sûrs, quoique plus agréables, qu’aucun de ceux qu’ont employés tous les Philosophes, et tous les Ecrivains sacrés et profanes. […] Et pourquoi, si le cœur de l’homme (comme vous le dites quelque part) est toujours droit sur ce qui ne se rapporte pas personnellement à lui, pourquoi cette pièce ferait-elle de ses auditeurs plus de Mahomet que de Zopire ? […] Voyez avec admiration sortir du cerveau créateur de ce grand Poète un Palamède ; supérieur peut-être à Burrhus, avec lequel l’ignorance et l’envie affectent de le confondre ; écoutez-le, ou consultez le cœur de ceux qui l’écoutent : en est-il un qui n’éprouve du moins le désir momentané de lui ressembler ? […] Quelle connaissance du cœur humain ne suppose pas l’admirable scène de ce vertueux Grec, entre Electre et Oreste son frère ?
Pour exciter ce sentiment dans le cœur du spectateur, il faut que le Poète amène avec art les aventures de son Héros ; et que la perfidie de ceux qui lui sont unis par les liens du sang, de l’amitié, ou de l’amour, le fassent tomber dans le malheur. […] Il faut avouer que les Anciens sont inimitables dans les peintures qu’ils font des caractères, des passions, des inclinations des hommes, et de tout ce qui dépend de la nature : Mais Corneille est allé plus loin ; il a fouillé jusques dans les replis du cœur humain, pour développer les principes des actions des hommes. […] Voilà pourquoi plusieurs Docteurs qui ne sont pas même les plus sévères, décident, qu’on ne peut assister, sans péché mortel, aux Comédies, telles qu’on les représente aujourd’hui, par le péril où l’on s’expose : Car quoique l’on en ait retranché les grossières équivoques, et tout ce qu’il y avait de trop libre dans les anciennes Comédies ; et que les Modernes soient plus délicates et plus fines, elles n’en sont pas pour cela moins dangereuses, parce qu’elles sont remplies de sentiments capables d’attendrir le cœur, et d’inspirer toutes les autres passions ; sans parler de l’action, des décorations, de la compagnie, qui ne sont pas d’un médiocre secours pour séduire le cœur. […] Ceux qui se vantent d’aller à la Comédie et d’en sortir, sans sentir de mauvaises impressions, ne la justifient pas pour cela ; c’est qu’ils ont déjà le cœur et l’imagination gâtés ; la Comédie ne fait autre chose, que de les entretenir dans leurs mauvaises habitudes. […] Il serait inutile de vous dire plus nettement ce que je pense sur cette matière ; mon suffrage n’est pas d’un grand poids, et je n’aime pas à décider : Mais si vous vouliez absolument, Madame, que je vous en parle selon mon cœur, je crois que les Chrétiens sont obligés de s’abstenir du Théâtre, comme de bien d’autres plaisirs : Il faut apporter tant de précautions pour conserver son innocence, que le plus sûr est d’y renoncer entièrement.
C’est le grand mérite auprès des femmes, leur cœur tient rarement contre l’élégance, & ne connoît point de plus grandes affaires. […] On admirera sa richesse, le cœur ne sera point touché de ces mobiles attraits. […] Les plafonds, les décorations, les loges sont pleins de chiffres galans, de portraits de quelque héroïne, d’amours qui tirent des flêches, de cœurs blessés, de flambeaux allumés, & jusqu’aux danses. […] Tout y decele le mystere d’un cœur gâté qui se moque des bienséances & du jugement des hommes ; la plaie saigne toujours. […] Il nous apprend que la chaussure de Judith fut un des traits qui au premier coup d’œil ravirent le cœur d’Holopherne.
Leurs épaules ont modéré la malignité de la satyre, mais leur cœur s’est encore plus livré à la corruption, & assurément, pour peu qu’on soit soigneux de conserver la chasteté, on ne se permettra la lecture ni de l’ancien ni du nouveau théatre Italien, fatras énorme de sottises aussi plattes que licencieuses, dont on diroit bien mieux que Ménage ne le disoit des épigrammes de Catulle, que l’obscénité en fait tout le sel & la pointe. […] Pour trouver cet assaisonnement qui fait avaler le crime avec plaisir, on n’a pas besoin de voyager à l’isle de Cythère, le cœur & l’esprit sont de grands maîtres, & la faim n’est pas moins irritée. […] Mais de quels mouvemens dans son cœur excités Sentira-t-elle alors tous ses sens agités ? […] 143.) disent : Si l’on ôte au théatre cette modesti nécessaire aux bonnes mœurs, si on cherche à corrompre l’esprit & le cœur par des peintures agréables du vice, comme dans tous les maquignonages de Dancour, avec quelque génie qu’on exécute un dessein si pernicieux, on doit être regardé comme un empoisonneur qui donne un goût agréable à des liqueurs mortelles. […] C’est qu’après tout l’Évangile est toûjours le même, le cœur humain est toûjours foible, toûjours porté au mal, les plaisirs également séduisans, les occasions périlleuses.
David n’est plus un homme selon le cœur de Dieu, un grand Prophète, le père du Messie, dont un Homme Dieu daigne porter le nom ; c’est un amant de Bethzabée. […] sera-ce avec ce religieux respect qu’inspire sa sainteté à un cœur chrétien ? […] Cette sainte veuve n’est dans la pièce qu’une coquette qui se pare avec affectation, qui compose ses regards, ses démarches, ses discours, pour séduire le cœur d’Holopherne, et demande a ses yeux des feux capables d’alarmer la pudeur. […] Mais l’Abbé auteur donne prudemment à son drame un passeport sans lequel il n’eût pas été reçu ; c’est une intrigue amoureuse, de son invention, d’un Prince Ammonite avec la fille de Jephté : « Je n’ai point, dit-il, osé bannir tout à fait l’amour profane d’un théâtre qui n’est fait que pour lui. » Il tâche d’excuser les danses sacerdotales et pastorales qu’il y mêle ; il assure qu’une grande Princesse versa des larmes à la seule lecture qu’il lui en fit (il fallait qu’elle eût le cœur bien tendre). […] Ce cœur double marche par des voies différentes ; cet Acteur me bénit dans la bouche, me maudit dans le cœur, ses discours sont chrétiens, ses œuvres Païennes, sa créance impie, il ne mérite que mes anathèmes : « Væ homini nequam, ingredienti duabus viis. » Le Sage fait dans ses proverbes deux comparaisons qui ne sont pas flatteuses, 1.° Les bonnes maximes dans la bouche d’un fol sont comme des épines dans la main d’un ivrogne : 2.° Comme il est inutile à un boiteux d’avoir la jambe belle, ainsi les sentences sont déplacées dans la bouche d’un insensé.
Il est vrai le langage en est plus pur, plus étudié, plus chatié ; mais vous savez si ce langage en ternit moins l’esprit, s’il en corrompt moins le cœur, & s’il peut-être il ne vaudroit pas mieux entendre les adultéres d’un Jupiter, & des autres divinitez, dont les excés exprimez ouvertement & sans reserve, blessant les oreilles feroient moins d’impression sur l’ame. […] Ils n’ont distingué ni qualitéz, ni conditions, ni tempéramens, ni dispositions du cœur. […] Vaine excuse qu’ils traitoient, ou de déguisement & de mauvaise foi, ou d’erreur au moins & d’illusion : de déguisement & de mauvaise foi, parce qu’ils n’ignoroient pas que c’est un pretexte, dont veulent quelquefois se prevaloir les plus corrompus, cachant les desordres secrets de leur cœur, afin de justifier en apparence leur conduite, d’erreur au moins & d’illusion, parce qu’ils savoient combien on aime à s’aveugler soi-même, & combien la passion fait de progrès, qu’on n’aperçoit pas d’abord & qu’on ne veut pas apercevoir, mais qui ne diviennent ensuite que trop sensibles.
Elle est brune, faite au tour ; & joint à la régularité de la beauté, toutes les grâces des jolies femmes ; voila pour l’extérieur : quant à ses qualités, elles surpassent ses attraits ; Honorine est spirituelle, modeste, franche, & paraît avoir un cœur formé pour l’amitié. […] Avec tous ses attraits, & même toutes ses vertus, la belle De Liane n’égale pas ma sœur : il n’est qu’un cœur comme le tien… O mon amie !
Esprit sur nos cœurs, ils lui faisaient employer Vulcain, les Naïades, Morphée pour dompter un cœur rebelle sans en pouvoir venir à bout.
3. « D'autoriser par sa présence des assemblées profanes, où toute la morale de l'Evangile est renversée, où toutes les maximes de l'amour se débitent au scandale de la Religion, où l'on n'entend que des chansons qui amollissent, et qui corrompent peu à peu le cœur. […] Dieu seul peut faire ce discernement, parce que seul il connaît les plus secrètes pensées des cœurs.
Il ne pouvait mieux exprimer l’effet de ces réjouissances, qu’en disant qu’elles donnent entrée « à une troupe de vices » : ce n’est rien, pour ainsi dire, en particulier ; et s’il y fallait remarquer précisément ce qui est mauvais, souvent on aurait peine à le faire : c’est le tout qui est dangereux ; c’est qu’on y trouve d’imperceptibles insinuations, des sentiments faibles et vicieux ; qu’on y donne un secret appât à cette intime disposition qui ramollit l’âme et ouvre le cœur à tout le sensible : on ne sait pas bien ce qu’on veut, mais enfin on veut vivre de la vie des sens et dans un spectacle où l’on n’est assemblé que pour le plaisir ; on est disposé du côté des acteurs à employer tout ce qui en donne et du côté des spectateurs à le recevoir. Que dira-t-on donc des spectacles, où de propos délibéré tout est mêlé de vers et de chants passionnés, et enfin de tout ce qui peut amollir un cœur ?
Les circonstances et l’appareil de la comédie, les décorations agréables et enchantées, la vue des Actrices, leurs parures, leur enjouement, leurs voix insinuantes, les airs tendres et passionnés des Acteurs, les tours délicats sur la pudeur et l’amour profane, les traits satiriques, lâchés en passant sur la vertu ; tout cela ne fait-il aucune impression sur les cœurs ? […] Dieu qui, par la sainteté de sa Loi, nous ordonne de veiller en tout temps sur nos sens, sur notre esprit, et sur notre cœur, pour en écarter les représentations et les pensées dangereuses, qui fera rendre compte d’une parole inutile et des moindres dépenses superflues, peut-il approuver des spectacles qui remplissent l’esprit et l’imagination de tant d’objets vains, ridicules et séduisants ?
Sa victoire passagere, dépendoit des applaudissemens du Peuple, & il ne pouvoit les attirer qu’en jettant ce Peuple dans une grande émotion, par la vivacité de l’Action ; il songeoit donc plutôt à peindre les Passions dans toute leur fureur, qu’à chercher ces finesses de l’Art, que l’Art sait cacher pour donner à l’esprit le plaisir de les chercher, par cette adresse à développer les ressorts du cœur humain, par cette délicatesse de sentimens, & toutes ces beautés, qu’on ne découvre pas dans une premiére lecture, loin qu’on en puisse être frappé dans la premiere Représentation. […] Notre Tragédie sans doute est plus propre que celle des Grecs à faire les délices de l’Esprit, elle est plus faire pour être lue que pour être représentée : cependant la Poësie Dramatique n’a pas été dans son origine, destinée à être lue, mais à être représentée : elle n’eut pas pour objet le plaisir de l’Esprit, mais celui du Cœur, qui consiste à être dans l’émotion. La Tragédie de Britannicus est parfaite en son genre, & il seroit à souhaiter que nous en eussions plusieurs dans le même genre : son succès fut cependant long-tems douteux, au lieu que celui d’Iphigénie fut tout d’un coup certain, parce qu’elle occupe le cœur plus que l’esprit. […] Puisque nous ne pouvons juger que très-imparfaitement de Piéces qui étant composées pour le plaisir du cœur & la satisfaction des oreilles, produisoient leur effet par la Représentation, & qu’elles nous paroissent dans leur caractere comme dans leur forme si différentes des nôtres ; comment les comparer ensemble ?
De tels hommes ne cherchoient point, dans les Lettres, un stérile amusement, ni la réputation plus stérile encore d’Ecrivains élégans : elles étoient, entre leurs mains, un moyen puissant de captiver les esprits, & de régner sur les cœurs ; au lieu que parmi nous, les Lettres ont été, ou entiérement méprisées, ou le plus souvent regardées comme le partage de quelques hommes obscurs qui ne pouvoient aspirer à rien de grand, & qui n’y cherchoient qu’un frele asyle contre l’indigence. […] Leurs plus grands exploits ont été de flatter adroitement un homme en place, de gagner le cœur d’une Maîtresse, ou de cueillir de vains applaudissemens. […] Il encouragea, par de solides bienfaits, l’étude des Langues savantes ; il conféra des Magistratures & des Charges aux hommes distingués par leurs talens, & ne négligea aucun moyen d’exciter l’émulation dans le cœur de ses Sujets. […] Enfin, que peuvent faire de mieux, ceux qui vont vous entendre, que d’armer leur cœur contre des impressions funestes à leur repos, & d’oublier si parfaitement ce qu’ils viennent d’apprendre, qu’il ne leur en reste aucun souvenir en rentrant dans le sein de leurs familles ? Tragiques François, répondez enfin ; ou, si vous vous obstinez à garder un silence majestueux, écoutez ce que le cœur me suggere pour votre défense, & jugez si c’est un ennemi qui vous poursuit.
On pourra nier cette conséquence et dire qu’il y avait un milieu entre s’acquitter de tous les devoirs que la religion et les autres vertus prescrivent, et s’abandonner aux désordres de la dernière école, se vautrer dans la fange du vice ; qu’il était possible de garder la pureté de son âme, de rester attaché de cœur aux principes, à la sagesse, à la piété, aux mœurs ; qu’il suffisait, pour éviter la persécution, de s’abstenir des vertus pratiques, en s’isolant des deux partis, en fuyant également les disciples des écoles qui étaient aux prises, et leurs errements, ou leurs exercices et habitudes, etc. […] Et si l’auteur, d’ailleurs aussi excusable et aussi estimable qu’un autre, s’étant conformé à un ordre de choses, ou à un usage qu’il a trouvé établi et bien reçu, pour faire plus d’effet encore, pour nous causer une plus profonde impression et une plus grande colère contre ce grand méchant, ne l’a pas fait en même temps voleur, assassin, empoisonneur, c’est qu’il ne l’a pas voulu ; car ces défauts sont concevables aussi dans le cœur d’un tel homme, et leurs traits ne nuiraient pas beaucoup plus à la vraisemblance du tableau. […] La plus dangereuse est la peinture à faux, dramatique, de l’homme et de la société, ou cette infidélité des tableaux vivants qui sont censés être ceux des mœurs ou de la vie commune de tel rang, de telle corporation, ou de tel âge ou bien de telles personnes que la malignité désigne, et qui vont être décriées, flétries, peut-être mises au désespoir ; il consiste aussi dans la solennité et l’éclat des représentations, avec tous les prestiges du théâtre ; c’est encore en réunissant la fiction à la vérité, en accumulant à plaisir les vices, en les combinant et faisant supposer une liaison naturelle entre eux ; c’est l’éternelle image des passions humaines les plus honteuses sous les traits sacrés de la vertu qu’enfin on ne croit plus voir nulle part qu’en apparence, que l’on méconnaît et décourage par trop de défiance, ou qu’on insulte par malignité ; enfin, c’est en créant ainsi et faisant agir avec toute l’énergie possible, sous les yeux de la multitude des personnages monstrueux qui servent d’excuse et d’encouragement aux méchants, qui font horreur aux bons et, comme je l’ai déjà dit, portent l’agitation dans les esprits faibles, l’inquiétude ou l’animosité dans les cœurs, exaltent la tête de tous, et vont de la scène publique provoquer la persécution, porter les désordres dans les scènes privées de la vie, où toutes les passions excitées imitent la hardiesse des auteurs, cherchent à réaliser leurs chimères jusques sur la vertu la plus pure : « Là de nos voluptés l’image la plus vive ; Frappe, enlève les sens, tient une âme captive ; Le jeu des passions saisit le spectateur ; Il aime, il hait, il pleure, et lui-même est acteur. » Voilà plus clairement comme il arrive que ces critiques vantées manquent leur but, sont de nul effet contre le vice audacieux, sur l’hypocrite impudent qui atteste Dieu et la religion en faisant bonne contenance au rang des victimes nombreuses des aggressions aveugles et des calomnies effrontées. […] L’élite des hommes éclairés de la Grèce, les juges d’Athènes blâmaient tellement le dernier que d’après un réglement appelé Mos civitatis, ils refusaient même d’entendre à leur tribunal, comme exaltant aussi l’imagination, égarant la raison, les discours trop fleuris, ornés de figures, ou soutenus de toute autre magie oratoire ; ils voulaient qu’on leur présentât la vérité en style simple et sévère, afin de pouvoir toujours prononcer avec l’esprit et le cœur libres. […] Et dans le même temps on disait contre à peu près aussi ce que disent les modernes contradicteurs, tout en rendant justice à l’art et aux talents de nos bons auteurs : que le recueil de ces ouvrages ne contient que des peintures dangereuses des passions les plus entraînantes, que des tableaux corrupteurs ; qu’on y voit l’intérêt sollicité le plus souvent en faveur du crime ; une plaisanterie perfide faisant naître le rire au lieu d’exciter l’indignation ; travestissant les vices en défauts brillants, les travers en agréments, les conventions théâtrales excluant la vraisemblance, le caprice des auteurs dénaturant les faits et les caractères ; des sentiments outrés, des mœurs postiches et des maximes bonnes pour amollir les cœurs et égarer l’imagination.
Nôtre cœur, tel qu’il soit, a une dureté naturelle, un fond de corruption, une opposition à la pieté : de là vient cette grande peine, qu’il a à goûter les choses divines. Quelle esperance pourra avoir cette personne, que le raison de la celeste lumiere éclairera son esprit dans l’oraison, & que la dureté de son cœur sera amollie par l’operation du Saint Esprit, tandis qu’elle ne remporte de la Comedie qu’une tête pleine de douces & charmantes idées, remplie de toutes les passions folles & imaginaires, que la declamation d’un Comedien folâtre lui a pû représenter ? Qu’on dise donc tant qu’on veut, que la Comedie n’est pas toûjours un écueil, contre lequel l’innocence chrétienne se brise : on m’accordera du moins, qu’elle desseche le cœur, & le rend incapable des tous les mouvemens que la grace y pourroit insinuer. […] Dieu par sa grace se trouve auprés d’elle les matins pour entendre de sa bouche quelque sacrifice, & être le depositaire des premiers soins de chaque jour : tourne-t-elle aussi le cœur vers lui pour l’offrir au Créateur ? […] Faute de crainte, on n’a point d’idée du malheur qui peut arriver à l’ame, & par consequent point de mouvement d’aversion pour le mal : faute de défiance, loin de se ténir sur ses gardes, & de se mettre en disposition de repousser l’ennemi du salut, on y apporte une imagination vive, un esprit dissipé, un cœur volage, des sens ouverts & subtils, dispositions fatales & propres à donner de l’entrée au peché.
Une foule de théologiens ont, au contraire, cherché à détruire cette morale éternelle que Dieu a créée au fond de nos cœurs. […] Mettant le comble à la perversité, ils virent qu’il était de leur intérêt de corrompre le cœur humain au moyen de maximes pernicieuses, entièrement opposées aux préceptes de la morale la plus pure. […] Il sera aisé de le comprendre, si on réfléchit que cette faction religieuse ancienne et moderne, s’est toujours appliquée à étudier le cœur humain, à en connaître les défauts et les vices, et à flatter ses inclinations perverses. […] Il ne suffit pas de régner par la force, il faut encore gagner les cœurs par la clémence et la douceur. […] La douceur paternelle, et la bonté, qui devraient toujours caractériser, non seulement les princes, mais même leurs agents, enchaînent les cœurs et commandent l’affection des sujets, tandis que les injustices, les mauvais traitements et les vengeances éternisent les haines.
D’Alzan, tout-à-l’heure, on m’entretenait d’elle, de ses vertus, de sa douceur, de sa tendresse envers vous ; une femme qui la connaît comme vous-même, celle qui m’a révélé ce secret qu’il m’eût été moins cruel d’apprendre de votre bouche, une inconnue en un mot qui me fit promettre, avant de parler, de ne point chercher à la deviner, vient de m’assurer qu’elle est toute belle, cette épouse que vous aimez……… Oui, vous l’aimez ; je connais trop bien votre cœur pour en douter : il n’est point fait pour l’ingratitude, l’inhumanité, la perfidie ; vous aimez votre épouse bien plus que vous ne le croyez : vous l’aimez plus que moi, plus que vous ne vous aimez vous-même. […] c’est moi, moi qui tremble pour la possession d’un cœur dont je croyais être sûre, & qui, pour le conserver, cherche à ressembler… Ma sœur !
Ce tableau, tracé par lui-même, de son cœur & de sa conduite n’est point suspect ; il n’a pas besoin de commentaire. […] Au reste, ce château divin, Ce n’est pas celui du Saint Pere, Mais bien celui de Caumartin, Homme sage, esprit juste & fin, Que de tout mon cœur je préfere. […] Mais l’apologiste a beau faire, l’un ne sauve pas l’autre ; il démontre au contraire la frivolité & la dépravation d’un cœur qui combat la vérité connue. […] J’ai connu des gens qui le lisoient chaque jour, qui en apprenoient des morceau par cœur. […] Mais, ne fussent-ils pas visibles, ils n’échapperont point aux yeux de celui qui sonde les cœurs & les reins ; & le péché qu’on commet on s’y exposant n’échappera pas à sa justice.
Il parle néanmoins encore avec une tout autre douceur, lorsqu’il se fait entendre dans le cœur, et qu’il y fait sentir ce feu céleste dont David était transporté en prononçant ces paroles : « Le feu s’allumera dans ma méditation »Ps. […] C’est de là que naît dans les âmes pieuses, par la consolation du Saint-Esprit, l’effusion d’une joie divine ; un plaisir sublime que le monde ne peut entendre, par le mépris de celui qui flatte les sens ; un inaltérable repos dans la paix de la conscience, et dans la douce espérance de posséder Dieu : nul récit, nulle musique, nul chant ne tient devant ce plaisir ; s’il faut pour nous émouvoir, des spectacles, du sang répandu, de l’amour, que peut-on voir de plus beau ni de plus touchant que la mort sanglante de Jésus-Christ et de ses martyrs ; que ses conquêtes par toute la terre et le règne de sa vérité dans les cœurs ; que les flèches dont il les perce ; et que les chastes soupirs de son Eglise, et des âmes qu’il a gagnées, et qui courent après ses parfums ? […] , des mensonges et des inventions de leur esprit : ou comme lisent les Septanteas, « Ils me racontent, ils me proposent des plaisirs ; mais il n’y a rien là qui ressemble à votre loi » : elle seule remplit les cœurs d’une joie, qui fondée sur la vérité, dure toujours.
La lecture des Romans et de la Comédie fait le même effet sur les esprits et sur les cœurs : Mais la Comédie a cela de plus, que comme elle est faite pour la représentation, la lecture en est encore plus dangereuse, parce qu’en lisant on s’imagine voir et entendre les Acteurs ; et ainsi la lecture même tient quelque chose de la force de la représentation. […] Quand on a dans le cœur un repentir sincère, on en donne des marques au dehors, et quand ce qu’on a fait a été public, les marques du repentir doivent être publiques ; car nous devons autant qu’il est en nous, ôter le scandale que nous avons causé.
Elle m’est un sûr garant des dispositions de votre Cœur. […] Ils gâtoient l’esprit & le cœur . […] formeroit lui-même les sons d’une voix qui corrompt les cœurs ! […] « Parmi les commotions, où consiste tout le plaisir de la Comédie, qui peut élever son cœur à Dieu ? […] de payer le luxe de celles-ci, d’entretenir par la leur corruption, de les aider à exposer leur cœur en proie, de s’exposer soi-même au danger de leur chants &c ?
La Nature nous a donné un cœur compatissant à tous les maux de nos semblables : ce qui nous porte à nous secourir les uns les autres. […] Ce cœur si disposé à la pitié, est un heureux présent de la Nature, qui permet que notre facilité à nous laisser attendrir, aille même jusqu’à la puérilité. […] Vouloir purger du cœur des hommes la Crainte & la Pitié, c’est vouloir émousser les deux éguillons de la Vertu. […] Quelle gloire pour la Poësie de faire entrer la Pitié dans le cœur de Néron ! […] Augustin, si ce n’est une compassion de la misere des autres, qui s’éleve en notre cœur & nous porte à les secourir quand nous le pouvons.
Ecoute-t on les loix de la décence, ne doit on pas avoir le cœur bien corrompu quand, dans une prétendue Héroïde, on vérsifie les douleurs, les regrets, les gémissemens d’une Réligieuse, sur ce que son amant est mutilé, & ne peut plus la satisfaire ? […] Sans doute, cette censure publique & si éclatante ; corrigeroit quelqu’un, & rendroit plus circonspect ; encore même est il rare que de pareilles corrections changent le cœur. […] Le Clergé frisé à la Greque, a traité les gens rigides de Jansénistes, & mêlant Saint Augustin, dont ils savoient le nom, avec le roi de cœur, qu’ils connoissoient parfaitement, ont proscrit par leur décision, la morale sévere qu’ils avoient déjà proscrit dans leurs actions. […] La beauté, comme de raison, regne sur le cœur d’un riche Abbé, & grand Prélat ; les autres se bornent à la Magistrature. […] Elles regnent sur tous les cœurs, le portier du Seminaire ne ferme pas la porte aux graces, & les Seminaristes ni sont pas insensibles.
………………………………………………………………………………… Ce saint Pasteur voulut que chaque année Celle de nous dont le cœur ingénu Plus tendrement eût chéri la vertu, Fût en public de roses couronnée. […] Oui, mon cœur me le dit tous bas, La vertu naît de la tendresse. […] Le souffle empesté du théatre souille les choses les plus saintes, corrompt les cœurs les plus innocens : d’une fète édifiante il en fait un libertinage scandaleux, & des filles les plus sages autant d’actrices. […] Un soupir, un désir, ô ma fille, peut ainsi troubler un cœur où la sagesse brille. Le repos sur les eaux peut renaître : mais il se perd sans retour dans un cœur dont l’amour est le maître.
Ses passions étoient des faillies d’un cœur facile à s’enflammer & facile à s’éteindre. […] Je laisse à l’amour & à votre cœur le soin d’en ménager les moyens. […] Il en fait même un honneur à la femme d’avoir gagné le cœur de Jupiter, & au mari d’être entré dans une maison de qualité, les loix le condamnoient à mort ; mais soit indulgence du Prince, soit négligence du Magistrat, à qui l’on disoit comme le Sauveur, que celui qui est sans peché, lui jette la première pierre l’adultere étoit impuni. […] La comtesse de Konismark sa mere, suédoise, d’une naissance distinguée, avoit le mérite des femmes, de la beauté, de l’esprit, des talens, faisoit des vers françois, médiocres à la vérité, mais assez bons pour une étrangere ; elle eut même des vertus, son cœur fut disputé quelque-temps. […] Enfin elle accepta une fête à qu’il lui donna à Mauricebourg Le bal, la comédie, les repas, les présens, les parures, qui peut tenir contre d’ennemis ligués qui attaquent en même-temps un cœur ?
Et qui ne riroit de voir une troupe imbécille aller admirer tous les ressorts de la politique & du cœur humain mis en jeu par un étourdi de vingt ans, à qui le moins sensé de l’assemblée ne voudroit pas confier la moindre de ses affaires ? […] Qu’un homme sage & courageux perde son fils, son ami, sa maitresse, enfin l’objet le plus cher à son cœur ; on ne le verra point s’abandonner à une douleur excessive & déraisonnable ; & si la foiblesse humaine ne lui permet pas de surmonter tout-à-fait son affliction, il la tempérera par la constance ; une juste honte lui fera renfermer en lui-même une partie de ses peines ; &, contraint de paroître aux yeux des hommes, il rougiroit de dire & faire en leur présence plusieurs choses qu’il dit & fait étant seul. […] L’homme ferme, prudent, toujours semblable à lui-même, n’est pas si facile à imiter ; &, quand il le seroit, l’imitation, moins variée, n’en seroit pas si agréable au Vulgaire ; il s’intéresseroit difficilement à une image qui n’est pas la sienne, & dans laquelle il ne reconnoîtroit ni ses mœurs, ni ses passions : jamais le cœur humain ne s’identifie avec des objets qu’il sent lui être absolument étrangers. Aussi l’habile Poëte, le Poëte qui sçait l’art de réussir, cherchant à plaire au Peuple & aux hommes vulgaires, se garde bien de leur offrir la sublime image d’un cœur maître de lui, qui n’écoute que la voix de la sagesse ; mais il charme les spectateurs par des caracteres toujours en contradiction, qui veulent & ne veulent pas, qui font retenir le Théâtre de cris & de gémissemens, qui nous forcent à les plaindre, lors même qu’ils font leur devoir, & à penser que c’est une triste chose que la vertu, puisqu’elle rend ses amis si misérables. […] Au contraire, nous estimons comme gens d’un bon naturel ceux qui, vivement affectés de tout, sont l’éternel jouet des évenemens ; ceux qui pleurent comme des femmes la perte de ce qui leur fut cher ; ceux qu’une amitié désordonnée rend injustes pour servir leurs amis ; ceux qui ne connoissent d’autre regle que l’aveugle penchant de leur cœur ; ceux qui, toujours loués du sexe qui les subjugue & qu’ils imitent, n’ont d’autres vertus que leurs passions, ni d’autre mérite que leur foiblesse.
On la cite à tous propos, on la sait par cœur, elle a formé nombre de proverbes, ce qui sans doute fait son éloge, mais non pas celui de l’état auquel tout le monde se croit en droit d’en faire l’application. […] Il est vrai que ni la distinction ni la confusion ne sauraient empêcher les mauvais effets que produit dans les cœurs la corruption des spectacles ; mais du moins on sauve par ces ténèbres l’éclat et le scandale. […] L’amour est-il un contrat entre deux cœurs ? peut-on acquérir un cœur par prescription, puisque l’inconstance ne permet guère de remplir le temps même de la plus courte ? L’amour est-il une propriété, puisque deux cœurs appartenant l’un à l’autre, ces deux propriétés semblent s’exclure ?
conviennent que le premier l’emporte sur le dernier pour le danger, & le trouvent plus propre à corrompre le cœur. […] que sont donc ces émotions, ces troubles, ces attendrissemens, tant d’autres impressions également vives & touchantes, tant d’autres mouvemens que le cœur éprouve dans le cours d’un spectacle, & qui continuent, & qui reviennent si souvent long-tems après la piece ? […] Une femme y étoit entrée vertueuse, elle en sort le crime & l’adultere dans le cœur. […] on rentre chez soi avec un cœur blessé, qui porte encore le trait empoisonné ; on a perdu le goût de la vertu & de la pudeur ; les plaisirs légitimes deviennent insipides ; le crime devient un assaisonnement nécessaire pour les rendre agréables & piquans ; on méprise tout ce qui ne porte pas écrit sur le front le caractere du vice, tout ce qui n’est pas marqué au sceau du démon.
Et ce qu'il y avait de plus au Théâtre, était un plaisir et une satisfaction publique, qui par un charme secret tirait du fond des cœurs et du battement des mains une approbation volontaire et manifeste de l'honneur qu'on y rendait aux Ministres de l'Enfer. […] avez le cœur si pesant que vous aimez la vanité des Spectacles, et que vous cherchez le mensonge en la bouche des Histrions ? […] Or les Démons prennent plaisir à ces Cantiques de vanité, à la turpitude des Théâtres, à ces Spectacles inutiles, aux folies du Cirque, aux cruautés de l'Amphithéâtre, et aux querelles de ceux qui se passionnant pour un Mime, pour un Pantomime, pour un Histrion, ou pour un Conducteur de Chariots, brûlent dans leur cœur de l'encens en faveur des Démons Symbol. ad Catec. l. 2. […] « Pensons-nous, dit-il, que Dieu reste en notre cœur au milieu des Cirques et des Théâtres des Païens ?
On y mène les enfants, afin qu’ils y apprennent, dit-on, de bonne-heure à connaître le cœur de l’homme, et à en éviter le ridicule. […] Ils se remplissent la tête de certains mots et de certaines figures, ils cousent diverses pensées des Auteurs qu’ils ont lus, ils apprennent par cœur avec bien de la peine, et puis vont débiter ce qu’ils appellent une Harangue, ou un Sermon. […] Il me vient une pensée de l’accoutumer peu à peu à considérer les merveilles de la nature, de lui montrer tantôt comment l’œil est fait, tantôt comment 1’oreille est faite ; tantôt la fabrique du cœur, etc. […] En lui montrant les deux cavités du cœur, on lui fera comprendre comment par le moyen des veines et des artères qui y aboutissent, le sang passe d’une cavité dans l’autre ; et comment se fait cette circulation merveilleuse qui entretient la vie de l’animal.
Qu’ils viennent aux représentations des Ouvrages de nos grands Maîtres ; ils verront la licence bannie d’un lieu qu’ils ont méprisé ; ils sentiront la vertu pénétrer insensiblement dans leur cœur ; ils apprendront à s’intéresser au sort des malheureux. […] La Vertu surmonte enfin les obstacles qui s’opposaient à sa félicité ; le Crime est terrassé, & nos cœurs sont satisfaits. […] Alexandre, cruel tiran de Phérès, ville de Thessalie, voyant jouer l’Hécube d’Euripide ; sentit son cœur barbare s’attendrir malgré lui.
« Je n’aime point qu’on ait besoin d’attacher incessamment son cœur sur la scène, comme s’il était mal à son aise au-dedans de nous. […] L’impudence ne peut exciter que la honte et la colère dans le cœur d’un honnête homme, il n’est pas besoin d’être un Saint ni même un Chrétien, pour penser comme S. […] « Demander si les Spectacles sont bons ou mauvais en eux-mêmes, c’est faire une question trop vague ; c’est examiner un rapport avant que d’avoir fixé les termes. »e Point du tout : puisque par le mot de « spectacle » on n’entend ordinairement que ceux où des Auteurs ingénieux s’efforcent de punir le vice et de faire aimer la vertu, des Tragédies et des Comédies et non pas tous les autres spectacles frivoles qui ne font rien pour le cœur ni pour l’esprit : on peut donc alors avancer la question et conclure en faveur des spectacles.
Ils glissent pour ainsi dire sur la superficie de notre âme sans la pénétrer, et ne font qu’agiter le cœur sans le remplir. […] Là, c’est un Dieu qui commande au néant ; une seule de ses paroles suffit pour créer tout le monde : ici, c’est l’homme rebelle chassé du Paradis terrestre, déchu de sa gloire primitive : les ténèbres ont inondé son esprit, la corruption s’est glissée dans son cœur ; la plus excellente créature qui vive sur la terre est dominée par les êtres inférieurs qui sont chargés de la punir. […] Ce ne sont pas des fables qu’ils contiennent, la vérité s’y rencontre de toute part ; ce ne sont pas des trophées brillants, où l’on ne recherche qu’à plaire à l’esprit, c’est votre cœur que l’on prétend charmer.
L’effet de la morale du Théâtre est donc moins d’opérer un changement subit dans les cœurs corrompus, que de prémunir contre le vice les âmes faibles par l’exercice des sentiments honnêtes, et d’affermir dans ces mêmes sentiments les âmes vertueuses. […] Tout spectateur sensible, je l’avoue, sort de cette Tragédie le cœur affligé, partageant en quelque manière le sacrifice qui coûte si cher à Titus, et le désespoir de Bérénice abandonnée. […] Ce sentiment exclusif et impérieux, si propre à nous consoler de tout ou à nous rendre tout insupportable, à nous faire jouir de notre existence ou à nous la faire détester, veut être sur le Théâtre comme dans nos cœurs, y régner seul et sans partage. […] Leurs peines viennent ordinairement du cœur, les nôtres n’ont souvent pour principe que la vanité et l’ambition. […] , p. 77 : « Le plus charmant objet de la Nature, le plus capable d’émouvoir un cœur sensible et de le porter au bien, est, je l’avoue, une femme aimable et vertueuse ; mais cet objet céleste où se cache-t-il ?
Est-ce que le lieu change tout à coup la disposition de leur cœur, et convertit en objet de plaisir ce qui était un objet d’aversion pour elles ? […] C’est à certainement avoir bien à cœur que la saleté passe en usage parmi nous. […] Or répandre le charme du vers et du chant sur le mal, n’est-ce pas pour en redoubler la force, pour le rendre plus présent à l’esprit et plus agissant sur le cœur ? […] Tes paroles sont des foudres de glace qui lancés dans mon cœur, le fondent en même temps et le gèlent. […] le système convient à la disposition du libertin ; il couvre la malice de son cœur : il autorise ses procédés : car rien ne lui blesse plus les yeux que les lumières de la conscience et de la vertu.
Je me crois autorisé maintenant à mal penser du cœur humain. […] Veut-on que le cœur de l’homme soit semblable au Caméléon, qui prend toutes les couleurs des objets dont on l’approche ?
Un rire de Cœur, quand quelque chose plait innocemment, & amuse : c’est le rire des honnêtes gens. […] Les meres pour former le cœur de leurs filles, mettent entre leurs mains, l’histoire & l’art du libertinage, & les exposent elles-mêmes à l’incendie des spectacles ; qui le croiroit ? […] On aime ce qui nourrit la corruption du cœur, pardonne t-on ce qui la combat, quoiqu’on sache dans le fonds à quoi s’en tenir ? […] l’Evangile prévient ces troubles, en défendant tout partage de cœur au mari, même à la femme, n’en faisant qu’une même chair. […] Peu de maisons brillantes, où il n’y ait deux appartemens, deux ménages des mariés, plus éloignés d’esprit, de cœur, d’interêt que s’ils étoient libres.
Cette nouveauté est intitulée, Le bon Angevin, ou l’hommage du Cœur Angevin, peuple en effet ingénieux, fidele au Roi, bon par caractere. […] avec les plus grands applaudissemens ; on en a donné plusieurs représentations gratis ; la ville l’a fait imprimer, & l’a répandu par-tout ; on y a mêlé plusieurs chansons, de la façon du poëte, à l’honneur du Roi, de la Reine, de Monsieur, de Madame, de tous les Princes & Princesses ; on les a apprises par cœur, toutes les rues en ont retentit : ce qui, joint à l’illumination générale & aux cris, vive le Roi, vive la Reine, vive Monsieur, vive Madame, a satisfait la nuit & le jour les yeux, les oreilles, le cœur & l’esprit des bons Angevins, à l’honneur du portrait de ce Prince. […] Ce Prince, par la bonté de son cœur & ses grandes qualités, mérite tous les honneurs : mais il n’en est point d’aussi marqué. […] On ne peut trop louer le zele & la bonne intention de l’auteur, & les grandes qualités du Roi & de la Reine : mais l’allégorie n’est pas heureuse ; il n’y a de trait ressemblant que la bonté du cœur de ces deux princes, tout le reste porte à faux. […] L’Etat , dit-il, avoit besoin d’un tel homme : il falloit débrouiller le cahos des affaires des vautours de l’Etat, rogner leurs serres, discerner les cœurs vrais des cœurs intéressés , &c.
Ces trois ou quatre mots lui tenoient plus à cœur que toute la harangue de leurs Excellences. […] Esprit supérieur, cœur le plus tendre, graces inexprimables, comment ne pas s’aimer ! […] Il en vouloit au trône d’Elizabeth plus qu’à son cœur, & ne se servoit de sa faveur que comme d’une échelle pour y monter. […] Il est déclaré Souverain ; & aussi-tôt on lui offre son trône & son cœur. […] Sur vingt favoris qu’on a connus à Elizabeth, Devonshire & d’Essex ont seuls véritablement possedé son cœur.
C’est un caractere aimable, un cœur tendre, un esprit tranquille, une imagination riante ; c’est un homme plein de la vie pastorale ; enchanté des agrémens de la campagne, il s’y épanche, il y pense, il en parle sans cesse, elle revient à chaque ligne au bout de sa plume. […] Tout son livre n’est en effet qu’un épanchement de cœur & d’imagination, qui s’entretient de ce qu’il aime. […] Je me transporte dans les temps fortunés de l’âge d’or, où la scène de la Nature non corrompue charmoit les cœurs des gens de la campagne, inaccessibles à la corruption (ce sont des saints). […] Quels sont ces gens de la campagne ; dont le cœur est inaccessible à la corruption ? […] Cœur tendres, amant malheureux, courtisan pauvre, érudit crédule, italien superstitieux, plume facile ; des malheurs, ses amours, son siecle, sa réputation, sa dévotion, son libertinage, routes ces choses réunies dans sa personne, ont fait un ouvrage plein de beautés & de défauts, plus dramatique qu’épique, qui n’est qu’une longue comédie, faite uniquement pour le Théatre.
Il n’est sûrement pas vrai que le plaisir du comique soit fondé « sur un vice du cœur humain »ck (sa malignité). […] Cet homme, de l’aveu même du Misanthrope, est homme de mérite ; il parle aussi bien de son cœur que de ses qualités extérieures : ne peut-il donc pas bien passer à un aussi galant homme l’erreur dans laquelle il est d’avoir fait un bon Sonnet, et la faiblesse qu’il a d’admirer ses vers, en faveur de toutes les bonnes qualités qu’il lui connaît ? […] Le tempérament parle chez lui plus souvent que le cœur, et voilà pourquoi il fait rire au lieu de faire horreur quand il dit ces quatre vers hyperboliques. […] Vous ne voulez pas faire à Dancourt l’honneur de parler de luidr, je n’ai pas le cœur assez corrompu pour vouloir excuser la licence des sujets qu’il a choisi ; aussi ne conseillé-je pas aux pères et mères d’affecter de faire voir ses Pièces à de jeunes filles. L’enfance, les premières années de l’adolescence, laissent encore trop de pouvoir sur leur cœur à des impressions libertines : mais vous m’avouerez que ce qui est très dangereux à douze ou quinze ans, est très indifférent à vingt-cinq ou trente.
Ne voit-on pas que leurs ouvrages sont composés d’un mélange agréable d’intrigues, d’intérêts, de passions et de personnes, où ils ne considèrent point ce qui est véritable, mais seulement ce qui est propre pour toucher les spectateurs, et pour faire couler dans leurs cœurs des passions qui les empoisonnent de telle sorte, qu’ils s’oublient eux-mêmes, et qu’ils prennent un intérêt sensible dans des aventures imaginaires ? Mais cet empoisonnement des cœurs, qui les rend ou gais ou tristes, au gré des Poètes, est le plus puissant effet de la Comédie, et les Poètes n’ont garde de s’offenser quand on leur dit qu’ils empoisonnent, puisque c’est leur dire qu’ils excellent dans l’art, et qu’ils font tout ce qu’ils veulent faire. […] Augustin que pour montrer qu’il avait le cœur trop sensible, et vous ne citez S. […] Je voudrais de tout mon cœur le pouvoir dire, mais je me tromperais et je le démentirais en le disant. […] Quelquefois ses vers peuvent être assez innocents, mais la volonté du Poète est toujours criminelle, les vers n’ont pas toujours assez de charmes pour empoisonner, mais le Poète veut toujours qu’ils empoisonnent ; il veut toujours que l’action soit passionnée et qu’elle excite du trouble dans le cœur des spectateurs.
Peut-on mieux pénétrer les replis du cœur humain, et en faire mieux connaître les ruses ? […] Il me semble qu’eux-mêmes s’en expliquent assez, et qu’ils font consister tout leur art et toute leur industrie à toucher l’âme, à l’attendrir, à imprimer dans le cœur de leurs lecteurs toutes les passions qu’ils peignent dans les personnes qu’ils représentent : c’est-à-dire à rendre semblables à leurs héros, ceux qui doivent regarder Jésus-Christ comme leur modèle, et se rendre semblables à lui. […] Y a-t-il rien de plus naturel que cette demande qui sort de la plénitude de votre cœur ? […] Mais c’est un cœur pressé qui se décharge et qui fait tout venir à propos. […] Desmarets, pourvu « qu’il ne lui porte point de coups qui puissent retomber sur les autres » (car c’est là ce qui vous tient au cœur), et qu’il vous laisse jouir en paix de cette « petite étincelle du feu qui échauffa autrefois les grands génies de l’antiquité », qui vous est tombée en partage.
« Si nous avons, dit-il, quelque mouvement de charité, s’il se trouve en nous quelque sentiment de bonté, et si nous portons dans nos cœurs quelque désir pour le bien éternel de nos frères, faisons tous nos efforts pour retenir ceux qui courent dans la voie de perdition, qui se laissent entraîner dans l’abîme, et qui semblent se hâter pour être bientôt dans les tourments de l’Enfer. » « Si qua sunt ergo viscera pietatis in nobis, si qua est in nobis contemplatio humanitatis, si qua nos habet fraternæ salutis affectio, abstrahamus eos qui sic ad perditionem currunt, trahuntur ad barathra, festini sunt ad gehennam. » Chrysol. […] Celui qui délivre son frère d’un si grand péril, se rend digne d’une récompense éternelle ; et celui qui néglige de l’aider, ne peut être que coupable devant Dieu ; parce que, comme dit saint Ambroise, celui qui pouvant empêcher le mal, ne l’empêche pas par négligence, sert à rendre plus hardi celui qui le commet, et participe par conséquent à son péché ; et celui-là semble commettre une mauvaise action, qui pouvant la défendre la souffre sans rien dire par lâcheté de cœur, et par défaut de zèle. […] Car encore bien que ce peuple nonobstant cette licence, qui a été sans doute arrachée de la Cour de Rome, et qui ne leur a été donnée que comme par contrainte, et à cause de la dureté de leur cœur ; ne laisse pas d’être coupable devant Dieu ; les fidèles néanmoins qui sont sous ma charge, et que je dois régler et conduire, s’appuient sur cet exemple ; et ils ont pris même, dis-je, cette liberté de déclarer qu’ils auront recours à votre Sainteté pour éviter de faire ce que je ne désire que pour leur salut.
Ils jettent dans l’esprit des idées, et dans le cœur des mouvements de vanité qui ruinent les saintes dispositions que nous voulons établir dans une âme dévote. […] Son âme est agitée en même temps de mille passions, de craintes, de désirs, et d’espérances, et son cœur est mis entièrement hors de son assiette.
D’autres soutiennent au contraire que la comédie d’aujourd’hui, tout épurée qu’elle est des infamies de l’ancienne, est encore une école très dangereuse, et que ce qu’on y voit et ce qu’on y entend ne peut que corrompre les mœurs ; et effectivement on y voit et on y entend tout ce qui peut fasciner les yeux, tout ce qui peut charmer les oreilles, tout ce qui peut séduire le cœur. La magnificence du spectacle, la parure des femmes qui s’y trouvent, la parure des comédiennes, la peinture vive des passions qu’on y représente, nommément celle de l’amour, qui règne dans toutes les pièces, sont autant d’objets dangereux qui laissent dans l’esprit et dans le cœur des spectateurs des sentiments de volupté et des impressions qui les disposent peu à peu d’abord au relâchement, ensuite au libertinage.
Leur cœur est comme un champ de bataille, où le vice et la vertu se donnent combat ; quelle paix, où la guerre est domestique et perpétuelle ? […] ne disons rien des gestes et des postures qui lui porteraient la mort dans le cœur. […] il y avait tant de charmes pour les yeux, et pour les oreilles, qu’il n’était point de cœur assez ferme pour résister au péché. […] Empereur, dont j'ai déjà dit un mot, garda sa Virginité dans le Mariage à la faveur de la Chasse, qu’il fut inspiré de pratiquer pour ne point amollir son cœur dans les délicatesses de la Cour. […] N’est-ce point pour cela qu’on tire cette conséquence que les Chasseurs ne sont point dévots ; car cet exercice les occupe si fort, que tout leur cœur y va et qu’il n’en reste rien pour Dieu ?
L’Esprit d’Henri IV, qui paroit depuis peu, ainsi que tant d’autres livres qui ont un pareil titre, & tous les Ana, Peroniana, Scaligeriana n’est qu’un recueil des bons mots attribués à ce Prince, objet de l’amour des Français par la honté de son cœur & les charmes de la familiarité naïve & ingénieuse de sa conversation. […] Il ne manque que de blesser tendrement le cœur de du Guesclin. […] La Maupin dont les passions furent toujours violentes, voyant que la danseuse la Marville, la suplantoit dans le cœur du Prince, lui donna un duel ; elles se battirent, on les sépara ; mais bientôt après la Maupin se poignarda réellement sur le théatre, sous les yeux du Prince infidele, jouant le rôle de Didon, dans l’opéra d’Enée. […] Des ribauds, en blanche chemise, agacer par leur beauté, liesse & gayeté, des animaux de toute espece marcher en procession, des enfans jouter dans un tournois, des Dames cajoler des beaux cœurs, le grand guet faire la garde ; toute la ville baler, danser, se déguiser, &c. […] Depuis qu’il a abandonné le théatre, il a fait vingt drames, personne n’est plus jaloux que lui de ces triomphes vains, dont son cœur n’est plus touché ; je ne sai ce que c’est que les feux de la clarté : la clarté ne frappe que la rue.
Un enfant qui fait des toupies du cœur des héros ? […] Cette corruption des cœurs la gata, & la fit tomber dans une maladie que les Médecins appellent Glacomanie, qui lui pervertit tous les sens, & la rendit presque folle. […] Lé jeune Bacon qui representoit l’Amour, & la Chammelé qui représentoit Psiché, se surpasserent dans leurs roles : ils jouoient d’après nature, ils avoient l’un pour l’autre la plus vive tendresse ; leurs talens supérieurs ne furent employés qu’à mieux marquer les sentiments de leurs cœurs : ces avantures ne sont pas rares au théatre. […] Dans le poëme du Remede de l’amour, il fait voir que si une parure recherchée peut être un piége dangereux pour les cœurs, autant la négligence de tous ces ornemens étrangers en est un remede, l’expérience en est la démonstration ; on ne voit donner des si grands soins à la parure, qu’à ceux qui ont des prétentions sur les cœurs ; un homme exempt de passions, en méprise les artifices : Nec compone comas, quando venturus ad illam, nec toga sit lano conspicienda sinu ; il se moque de ces vains ornemens, tout est couvert, dit-il, d’or & de pierreries, la personne & la plus petite partie d’elle même ; pars minima est ipsa puella sui , & parmi tant de belles choses, vous cherchez l’objet de votre amour ; sæpe ubi sit quod ames, inter tam multa requires , un des grands remedes de l’amour c’est de surprendre les femmes dans leur négligé, ou quand elles se fardent, leurs graces sont perdues, elles évitent avec grand soin ces facheuses rencontres où elles sont désarmées ; deprehendes tutus inermem cum collinet ora veneris , vous trouverez la toilette couverte de boëtes pleine de drogues, de pommade, des essences de mille couleurs, qui font soulever le cœur ; pixides invenies celantes mille colores, non semet in stamocho nulla facta meo ; enfin, dit-il, évitez avec soin le théatre ; ut tibi sit tanti non indulgere theatris . […] Le fard moral, le masque de l’hypocrisie ne trahit pas moins ; vous avez beau vous composer, le coloris étranger d’une vertu que vous n’avez pas n’est qu’un voile transparent ; on vous voit à travers, tels que vous êtes : l’affectation même à vous contrefaire, vous décéle : le cœur perce par-tout, à la moindre occasion.
quel sentiment dans le cœur ? […] Il fut absous dans la pénitence ; ses larmes, ses regrets touchêrent le cœur de Dieu, sa confession obtint sa grace : à quels traits sur ce théatre, dans cette danse, reconnoîtrez-vous un pénitent ? […] Il fut nourri du corps & du sang d’un Dieu qui sanctifia son corps & son ame : vous n’y verrez qu’un corps de péché, un cœur paîtri de corruption, un esprit rempli d’images impures. […] La disposition avec laquelle on s’y rend, y suffiroit seule ; c’est un esprit de dissipation livré au plaisir, qui ne cherche qu’à le goûter & le faire goûter aux autres ; toutes les portes du cœur sont ouvertes pour le recevoir, toutes les pensées, tous les désirs vont au-devant de lui pour le trouver ; le cœur tout entier le saisit pour en jouir. […] y forme-t-on son esprit & son cœur ?
Une coquette qui vient étaler ses charmes, un libertin qui voltige pour en repaître ses yeux & son cœur corrompu, sont-ils faits pour les entendre ? […] Ils sont si peu capables de satisfaire le cœur de l’homme, qu’un grand Roi a beau les ramasser tous, prodiguer ses richesses & épuiser celle de tous les arts, il ne rend personne, il n’en est pas lui-même plus heureux. […] Sa coquetterie & ses amans jetoient les plus violens & les plus amers soupçons dans le cœur d’un mari qui connoissoit mieux que personne la vertu des Actrices. […] Ses pieces sont l’histoire de sa vie, le portrait de son cœur, le tableau de sa maison. […] Il épanchoit son cœur, & donnoit des leçons à sa femme.
Je suis persuadé que ses vers appris par cœur entretenaient l’esprit de la Fronde et attisaient le feu de la révolte. […] Qui entend ce galimatias, verser l’âme dans le cœur.Un républicain n’aime pas l’autorité royale ; mais ne méprise pas le rang des rois, il ne serait pas grand, il serait fou. […] Retranchez des tragédies les plus belles ces affreuses beautés qui ne peuvent que gâter l’esprit et le cœur, que reste-t-il de bon ? […] L’esprit des amoureux est aussi amolli que leur cœur, leur style aussi blasé que leur corps, la fraîcheur, la couleur de leurs pensées, aussi ternies que leur teint, la physionomie de leurs écrits aussi efféminée que leur visage. […] Tout parle de l’abondance du cœur ; c’est le grand mobile qui met tout en jeu.
Pour peu que vous ayez le cœur tendre, vous aurez pleuré aussi bien que moi. […] Dites-moi donc, je vous prie, mon cher Cléarque, quel effet pensez-vous que puisse produire la vue d’une jeune Princesse, qui ne pense qu’à son Amour, qui ne parle que de son Amour, qui cherche avec empressement celui qu’elle aime, qui se réjouit quand elle l’a trouvé, qui lui explique avec des paroles tendres et passionnées tous les mouvements de son cœur ? […] Ceux qui se plaisent à ces livres, entrent insensiblement dans les sentiments des personnes dont ils lisent les aventures, et comme ils n’ont pas assez de force pour imiter leur vertu, tout le cœur se porte vers leur amour, le moindre mal qui en puisse arriver, est de se remplir l’esprit de toutes ces vaines idées de tendresse, qui nourrissent un esprit dans l’oisiveté, et qui ne tardent guère à gâter les mœurs. […] Ainsi le cœur s’accoutume insensiblement à l’amour : Une jeune fille souhaite de trouver un Amant aussi fidèle que celui qu’elle a vu sur le Théâtre ; elle trouve du plaisir à entretenir un commerce aussi tendre que celui-là ; elle voudrait être à la place d’une Amante si fort aimée ; elle ne trouve point qu’il y ait de mal à écouter un homme qui parle d’amour, puisqu’une Princesse si fière le souffre bien, et tout ce que la Morale Chrétienne lui avait persuadé de contraire à cela, s’évanouit bientôt dans son cœur par l’exemple qu’on lui propose sur le Théâtre. […] Pour la crainte, qui est le second effet de la Tragédie, vous savez que l’amour n’est guère capable de la faire naître en nos cœurs, et que les fureurs d’un Tyran, la jalousie, la vengeance, la haine et les autres passions sont les causes ordinaires de la terreur.
Vous les sentez comme moi, mon cher Ami ; votre cœur vous les dit assez, sans que je vous les explique.
Or on ne représente guère que des méchants, et on ne parle que devant des personnes du monde, qui ont le cœur et l'esprit corrompus par des passions déréglées et de mauvaises maximes.
Je comprends que les gens de bien qu’on forceroit à y aller, que leur charge obligeroit d’y accompagner le Prince, comme Naaman, par l’avis du Prophète Elisée, accompagnoit le Roi de Syrie son maître au temple des Idoles, pourroient, en détestant ce culte sacrilège, élevant leur cœur à Dieu & l’adorant seul, être excusables & acquérir des mérites en faisant les fonctions de leur charge, de même que plusieurs Vierges Martyres ont remporté de grandes victoires jusque dans les lieux infames où les tyrans les faisoient traîner. […] Ce Saint blâme cette musique molle, efféminée, vive, légère, dont Lulli réchauffa la morale lubrique de Quinaut ; il ne veut pas même qu’on la souffre dans les Offices divins, dans les motets, dans les orgues, parce qu’elle flatte l’oreille, amollit le cœur, dissipe l’esprit de piété : Nec permittendum misceri cantiones, balatas verba vana. […] Il n’y a pas jusqu’à cette espèce de lumiere magique, artistement graduée & distribuée, qui retrace, embellit, met dans le vrai jour d’une maniere si frappante, que rien n’échappe aux yeux & au cœur. […] il amolliroit un cœur de bronze. […] Que dans une occasion involontaire & inévitable on compte sur la grace de Dieu, & on espère la victoire ; mais que sans nécessité, volontairement, pour son plaisir, contre les défenses de l’Eglise, l’autorité de tous les Pères, l’expérience de tout le monde, on se jette dans le péril le plus grand & le plus certain, on se croie en sûreté, on se dise innocent, on se flatte qu’il n’échappe ni désir, ni regard, ni parole, ni pensée contraire à la vertu, que la chair & les sens, le démon & le monde seront toujours vaincus, est-ce connoître le cœur humain, & se connoître soi-même ?
Ces deux solennités si différentes, pour faire mieux sentir l’esprit qui les anime, sont quelquefois mises en contraste dans le même jour et le même lieu ; car dans bien des villes, sans aucun égard pour la décence, on a bâti les théâtres auprès des Eglises : les deux foules, dont l’une va prier et l’autre offenser Dieu, se croisent et s’embarrassent ; et si l’office est un peu prolongé, comme il arrive certains grands jours, le chant des psaumes et les violons de l’orchestre se troublent mutuellement, et dans un concert très irréligieux, forment des dissonances plus insupportables à un cœur chrétien qu’à une oreille délicate. […] La Purification nous fait admirer une Vierge qui vient dans le temple consacrer son Fils au Seigneur ; sur la scène on est enchanté d’une Actrice qui vient immoler les cœurs au Démon. […] Pour jeûner comme il faut, unissez-y la prière et l’aumône, le démon n’est vaincu que par ces armes ; offrez le sacrifice d’un cœur contrit, visitez les malades, rendez justice à vos frères, pratiquez les vertus, refusez-vous les plaisirs des sens ; faites jeûner vos yeux, détournez-les de la vanité ; faites jeûner vos oreilles, fermez-les aux mauvais discours ; faites jeûner votre langue, interdisez-lui les paroles inutiles ; faites jeûner votre cœur, n’y souffrez que de pieux mouvements ; faites jeûner votre esprit, rejetez toutes les mauvaises pensées. […] O vous à qui il reste encore quelque principe de piété, que le théâtre arrachera bientôt, si vous entretenez des liaisons avec lui, en voilà tous les fruits ; l’esprit, le cœur, les sens, tout y est souillé, tous les vices y règnent, toutes les vertus chrétiennes y sont anéanties.
Il est vrai qu'on y voit ordinairement un petit assaisonnement de condamnation des spectacles ; mais à couvert de ce sauf-conduit, le Journaliste vogue aussitôt du meilleur cœur, sur cette mer dont il a d'abord redouté les écueils, et se livre avec autant de plaisir que de goût et d'érudition à toutes ces discussions intéressantes ; il éclaircit, approfondit, apprécie, approuve, juge communément bien et trop bien ces matières profanes. […] Ceux qui par leurs règles font profession d'enseigner qu’en matière de pureté il n'y a point de faute légère, ont-ils pu tendre tant de pièges aux yeux, aux oreilles, aux cœurs, et se dissimuler que leurs exercices dramatiques ouvraient sous les pieds de leurs disciples l'affreux abîme du théâtre ? […] Il a affronté la poussière des bibliothèques, pour déterrer de vieux bouquins, Allemands, Polonais, Espagnols, dont personne ne soupçonnait l'existence, et il oublie les Auteurs les plus agréables, qui sont entre les mains de tout le monde, qu'on sait par cœur, dont on débite sur cent théâtres les pernicieux principes, parés de toutes les grâces de la poésie, de la déclamation, de la décoration, de la danse, de la musique. […] Il compte parmi les avantages de son projet l'abandon des drames et des Romans, espèce de littérature qui outre les autres vices, est très peu capable de nourrir le cœur, de former les mœurs, et de produire de vrais citoyens […] Qu'on juge par là s'il est difficile de rendre la tragédie innocente, et si les maîtres de la morale évangélique ont prononcé avec raison, que le théâtre le plus épuré aux yeux du monde, sera toujours incompatible avec la vraie piété, et ne servira jamais qu'à réveiller des passions d'autant plus dangereuses, que nous en portons le germe dans la corruption du cœur.
On doit considérer que la Comédie est une tentation recherchée de gaieté de cœur, ce qui éloigne bien plus la grâce de Dieu, et le porte davantage à nous abandonner à notre propre corruption, que celles où l'on tombe sans les prévoir.
Or on ne représente guère que des méchants, et on ne parle que devant des personnes du monde qui ont le cœur et l'esprit corrompus par de mauvaises passions et de mauvaises maximes.
On doit considérer que la Comédie est une tentation recherchée de gaieté de cœur; ce qui éloigne bien plus la grâce de Dieu, et le porte davantage à nous abandonner à notre propre corruption que celles où l'on tombe sans les prévoir.
N’est-ce pas là découvrir véritablement son cœur ? […] L’air y est infecté de paroles impures qui portent la contagion dans le cœur. […] Je voudrais que chacun sondât ici sa conscience, et descendît au fond de son cœur pour y convenir de ses devoirs. […] Les amusements doivent laisser notre cœur dans une assiette tranquille, et non point le dérégler. […] faut-il qu’ils puissent ravir les esprits et transporter les cœurs par la souplesse et l’agilité de leurs doigts ?
néanmoins si ces Chrétiens sont saisis au Théâtre même de quelque soudaine frayeur, ils font d'abord le signe de la Croix : et ils demeurent là avec ce signe sur le front ; mais ils en sortiraient bientôt, s'ils le portaient dans le cœur. » « Qui si forte in ipso circo aliqua ex causa expavescant, continuo se signant, et stant illic portantes in fronte, unde abscederent, si hoc in corde portarent in Psal. 50. n. 1. […] C'est se tromper grossièrement que de s'imaginer qu'on puisse conserver son cœur pour Dieu au milieu des pompes du monde.
C’est contre les deux premiers et principaux commandements, qui sont l’abrégé de tous les autres au dire de Jésus-Christ : Tu aimeras ton Dieu de tout ton cœur, et ton prochain comme toi-même. […] Donc ce casuiste ne peut, sans une grande imprudence et une horrible témérité, vous dire que vous ne ferez pas mal d’aller à ce jeu, au bal ou à la danse, s’il ne connaît parfaitement toutes les circonstances du lieu, du temps, de la manière et des personnes qui s’y rencontrent, et principalement s’il ne connaît certainement la posture et la disposition de votre cœur, qui est connu de Dieu seul : Inscrutabile cor hominis, et quis cognoscet illud ?
Toutes les passions dans la réforme pourront se montrer à découvert (ce sera quelque chose de bien édifiant), excepté l’amour, car même l’extrême circonspection avec laquelle il s’y montreroit, seroit un piege de plus pour les cœurs innocens. […] Voici une tirade vraie & bonne : Les étrangers, après avoir puisé au théatre nos passions nationales, & les ajoutant à celles de leur propre cœur, vont se précipiter dans l’abyme du luxe, du faste, enfin dans le désordre le plus déplorable & le plus ruineux. […] Le dévouement du Héros de Calais a remué tous les cœurs de la nation Qu’en conclure ? […] Ce fils d’une tige illustre (une tige a des rejetons, un père a des fils), au lieu du cœur de ses ayeux, ne trouvera au-dedans de lui qu’un cœur qui ne peut pas même l’élever aux vertus d’un homme né dans la foule. […] Toutes vos vertus sont publiées sur nos théatres, aucune n’est dans nos cœurs.
Il faut les abolir, dit-il, ce sont de très grandes amorces du vice, les plus propres à corrompre les cœurs ; non seulement ils sont inutiles pour conduire à la vie bienheureuse, mais ils y nuisent extrêmement : « Tollenda spectacula quoniam maxima sunt instrumenta vitiorum, ad corrumpendos animos potissime valent. » Il parle d’abord des cruautés des Gladiateurs, qu’il condamne avec raison, comme le comble de l’inhumanité, qui se fait un jeu barbare de l’effusion du sang humain. […] La retenue, la sévérité, la simplicité de l’Evangile peut-elle plaire à des cœurs que la scène a corrompus ? […] Ce ne sont que des fables ou des bouffonneries : « Mendaciis aut risu scutat. » Ces Divinités, ces Héros, ces grands exploits, ne sont que l’ouvrage des passions criminelles : « Divinitates fortia facinora ex vitiosis affectionibus. » Fuyez les lectures des livres licencieux, elles ne sont propres qu’à faire des plaies dans votre cœur, ou à rouvrir les anciennes ; les connaissances que vous y puisez sont pireae que l’ignorance : « Perniciosiores ignorantia cladem inferunt. » On n’exceptera pas les Auteurs dramatiques de ces justes condamnations ? […] 6.) qu’il est mal aisé d’expliquer combien sont dangereux les pièges que tend la volupté au théâtre : « Quam periculosos laqueos exhibeant mimicæ voluptates. » Si l’on pouvait fouiller dans le fond des cœurs, on verrait le spectateur pousser des soupirs à chaque son des instruments (combien plus vivement à chaque accent des Actrices !) […] Je n’en parle qu’avec peine, je voudrais ne pas même les connaître : « Piget malum illud, vel nosse. » On ne peut en rappeler le souvenir sans risque ; les autres péchés ne s’attachent qu’à une partie de l’homme : l’esprit est souillé par les pensées, les yeux par les regards, les oreilles par les mauvais discours ; tout se rend coupable à même temps au spectacle : « In theatre nisi reatu vacat. » L’œil, l’oreille, l’esprit, le cœur, tout est attaqué, saisi, corrompu à la fois ; gestes, attitude, parure, danse, chant, discours, sentiments, tout se réunit pour perdre les cœurs : la pudeur souffrirait d’en tracer le tableau : « Quis integro verecundiæ statu eloqui valeat ?
Tout est plein dans l’Écriture des consolations spirituelles que Dieu promet à ses serviteurs : Venez à moi, & je vous soulagerai : Mon joug est doux, & mon fardeau léger : Venez, & voyez combien le Seigneur est doux : L’accomplissement de la loi est plus délicieux que le miel le plus exquis : Le cœur qui m’aime est dans une fête continuelle, tandis qu’il n’y a aucune paix à espérer pour l’impie. […] L’histoire profane elle-même, dans la vicissitude de ses révolutions, la variété de ses évenemens, les sciences dans leurs découvertes, leurs démonstrations, &c. tout offre à l’esprit & au cœur de l’homme des théatres bien plus dignes de lui que ceux que la vertu lui interdit. […] Quel poëme, quel roman, aussi capable de plaire, de toucher, de frapper, d’instruire, d’élever l’ame, d’attendrir le cœur, d’éclaiter l’esprit, d’inspirer des sentimens nobles, de donner des idées sublimes ! […] Consultez votre cœur, quand vous allez à l’office divin ou au spectacle, à quel des deux vous conduit la vertu ?
Sonnet à la Seignore Isabelle, sur son voyage à Monceauxac Sans l’air de vos Zéphyrs, je languis et me pâme, De ce qu’un sort cruel me prive de vos yeux : Isabelle, mon cœur, que ses rais gracieux Avivent le saint feu qui sans cesse m’enflamme.
Je désire de tout mon cœur avoir atteint le but que je me suis proposé, et vous prie de croire aux sentiments d’estime et d’affection que vos talents inspirent à tout ami des sciences et des arts, et avec lesquels J’ai l’honneur d’être, Messieurs, Votre très humble et très obéissant serviteur.
Voici ce qu’elle dit de soi-même, parlant à Dieu dans la simplicité de son cœur. […] Et Salvien Evêque de Marseille les blâme, avec un cœur plein de zèle, et avec une éloquence très mâle et très forte, disant, que c’est une imitation du dérèglement des Païens ; et traitant les Chrétiens qui aiment et qui recherchent ces divertissements, comme des apostats, qui après avoir renoncé à Satan et à ses œuvres, se joignent à lui de nouveau, et suivent derechef son esprit. […] « Il faut, dit-il, éviter toute sorte de spectacles, non seulement de peur que nos cœurs qui doivent être purs et paisibles, ne soient corrompus ou troublés par quelque affection vicieuse, mais encore de peur que nous ne nous attachions au plaisir, et qu’ainsi nous ne soyons divertis de Dieu et des bonnes œuvres. » Arnob. advers.
Voilà justement ce qui se passe dans la Comédie pour l’ordinaire, la vue et l’imagination se satisfont de cette représentation vive et naturelle que fait le Comédien, sans y intéresser le cœur ; on loue l’Acteur et son action, sans approuver la chose qu’il représente. […] » En effet, comme, remarque ce même Auteur, un Chrétien doit toujours en avoir les sentiments dans le cœur, ce qu’il ne peut pas lorsqu’il assiste à ces sortes de divertissements21 ; « pourra-t-on penser à Dieu dans un temps et dans un lieu où il n’y a rien qui ait rapport à lui ». […] De sorte qu’au lieu que le devoir d’un Chrétien, selon l’esprit de l’Evangile, est de mortifier en soi les passions et de les détruire ; au contraire l’exercice ordinaire d’un Comédien est de les exciter en soi et dans les autres ; et pour faire aimer ces mouvements déréglés du cœur et les rendre agréables, on les colore du nom de vertus, comme l’ambition et la vengeance de grandeur d’âme ; le désespoir et l’opiniâtreté, de constance invincible, ainsi du reste. […] Si la chaussure de Judith fut capable de ravir les yeux et le cœur d’un homme guerrier, que fera le visage, la taille, la bonne grâce, la danse, le chant d’une femme qui n’a point d’autre dessein que de paraître belle et de plaire pour attirer plus de monde à la Comédie. […] On ne peut point appeler des ouvrages tout à fait honnêtes, dans lesquels on voit des intrigues d’amour, de vengeance, d’ambition ; que l’on commence, que l’on continue, que l’on achève avec beaucoup d’artifice, et d’adresse d’esprit, que l’on accompagne de belles paroles, que l’on représente avec des actions vives avec une prononciation agréable, ce qui imprime plus facilement, et plus fortement le mouvement de ces passions dans le cœur des spectateurs.
Ils veulent moins s’intéresser que s’attrister : on ne cherche plus à toucher les cœurs, on s’efforce de les déchirer, ce goût sauvage & atroce, nous replonge dans la barbarie : ces ouvrages sont licentieux, la mauvaise morale en action excite les passions & familiarise avec le vice. […] Il croit qu’on doit mettre de très-bonne heure la comédie de Térence entre les mains des jeunes gens, même des enfans, pour leur former l’esprit & le cœur à la vertu & aux bonnes mœurs, qu’au moyen de quelque changement peu considérable la morale de Térance est pure, & montre la vertu dans tout son éclat, & la récompense. […] Voilà vraiment une belle compagnie à donner à la jeunesse, de belle conversation à leur faire traduire & apprendre ; les beaux principes qu’ils débitent, les beaux artifices qu’ils enseignent, les beaux moyens qu’ils employent pour faire réussir leur intrigue : tout cela revient à propos dans l’occasion, & forme à la vertu l’esprit & le cœur de ses éleves ? […] Une comédienne nommée la Favart, agitoit son cœur par ses galanteries. […] Le cœur qui ne doit respirer que la vertu y applaudit, l’y confirme, l’y exhorte.
Sur le Théâtre, on dépouille le vice de sa laideur & de sa difformité ; on lui prodigue les couleurs les plus brillantes, les plus capables de lui concilier les cœurs.
Ainsi nous estimons que la lecture en sera utile aux Fidèles, qu’elle leur inspirera de l’horreur pour ces Assemblées dangereuses, si contraires à la piété, et dont l’effet ordinaire est d’amollir, et souvent même de corrompre tout a fait le cœur.
La représentation d'un amour légitime, et celle d'un amour illégitime font presque le même effet, et n'excitent qu'un même mouvement qui agit ensuite diversement selon les différentes dispositions qu'il rencontre ; et souvent même, la représentation d'une passion couverte de ce voile d'honneur est plus dangereuse, parce que l'esprit la regarde plus sûrement, qu'elle y est reçue avec moins d'horreur, et que le cœur s'y laisse aller avec moins de résistance.
Il y a bien des degrés avant que d'en venir à une entière corruption d'esprit et de cœur ; et c'est toujours beaucoup nuire à l'âme que de ruiner les remparts qui la mettaient à couvert des tentations.
Ce n’est qu’en soutenant la gloire de l’Inde, aux perils de ses jours, que Porus se flatte de mériter le cœur de Roxane, qui n’a pas moins d’élevation que d’amour. […] C’est par le choc tumultueux des passions & des sentimens que Crébillon épouvante & déchire nos cœurs.
Dans toutes les piéces tendres on voit toujours un Prince aimé, & qui rencontre des obstacles à son bonheur, ou un Prince qui n’est pas aimé, & qui se resout à tout pour gagner un cœur qui se refuse à ses vœux. […] L’amour n’en dépouillera pas moins la Tragédie de cet appareil terrible qui fait son essence, & ne la reduira pas moins au médiocre talent de toucher les cœurs, au lieu de les ébranler.
On y voit le sincère épanchement de deux cœurs que l’amour rassemble. […] Il faut garder les sons perçans & renforcés, le fortissimo de l’Orchestre pour des instants de désordre & de transports où les Acteurs semblent s’oublier eux-mêmes ; il faut, par une musique douce & affectueuse, avoir déjà disposé l’oreille & le cœur à l’émotion ».
vous lisez dans son cœur ? […] On m’a montré ton portrait ; on le porte sur son cœur ; on a presque pleuré.
Ce sont, dit-il, des gens qui ne servent qu’à flatter et à nourrir les voluptés et la fainéantise ; et à remplir les esprits oiseux de vaines chimères, qui les gâtent, et qui causent dans les cœurs des mouvements déreglés que la sagesse et la religion commandent si fort d’étouffer. […] Les cœurs des hommes sont si pervertis et si mal tournés, dit encore excellemment saint Augustin,S.
Je parle uniquement du pouvoir qu’ils ont pour déterminer l’esprit et le cœur dans la recherche, ou dans la fuite de ces objets, disant, par exemple, que le plaisir est aimable, que l’éclat est à souhaitter, que rien n’est plus terrible que la douleur, etc. Je dis donc qu’une partie considerable de cette corruption hereditaire que nous portons en naissant, consiste dans cette autorité illegitime, que les sens ont sur nôtre esprit et sur nôtre cœur.
La première Comédie que j’ai vue, fut Timon Misanthrope b : quand j’entendis Arlequin lui dire : « Et que me faisait cela ; je méritais, moi, de faire de bonnes actions » : je me sentis pénétré d’une lumière qui échauffa mon cœur, qui y fit éclore une autre forme de sentiments : il semblait que j’acquérais un nouvel être : il ne s’est pas encore passé un seul jour sans que cette idée ne me soit revenue : et depuis plus de trente ans, je cherche et m’empresse à faire tout le bien qui est en mon pouvoir. […] Il se dévoile lui-même, quand il dit dans ce même Livre contre les Spectacles, page 223 : « Le plus méchant homme est celui qui s’isole le plus, qui concentre le plus son cœur en lui-même : le meilleur est celui qui partage également ses affections à tous ses semblables.
Si la Pièce de Molière, où ce caractère est représenté, ne corrige pas les Avares, qui, de peur de se reconnaître, éviteront sans doute d’aller au Spectacle lorsqu’on la jouera ; du moins on peut espérer qu’elle jettera dans le cœur des jeunes gens des semences d’horreur et d’aversion pour l’avarice qui les disposeront à se garantir de ce vice : et c’est là le grand bien que l’on doit attendre de cette Comédie. […] Quand même l’effet de cette Pièce serait assuré par rapport au vice de l’avarice ; quand même on supposerait qu’elle doit faire une égale impression sur l’esprit de tous les jeunes gens, (et il pourra s’en trouver plusieurs pour qui l’avarice aura de l’attrait, malgré le tableau affreux qu’on leur en aura présenté) il n’en est pas moins incontestable que le mauvais exemple des deux enfants de l’Avare est un poison mortel pour la jeunesse, devant qui cette Pièce est représentée : les jeunes personnes de l’un et de l’autre sexe n’effaceront jamais de leur esprit ni de leur cœur les idées et les sentiments que les enfants de l’Avare y auront gravés ; et ils s’en souviendront jusqu’à ce qu’ils aient fait l’essai d’une leçon si pernicieuse.
J’avais un Aristarqueb sévère et judicieux, je ne l’ai plus, je n’en veux plus1 ; mais je le regretterai sans cesse, et il manque bien plus encore à mon cœur qu’à mes écrits. […] Loin des vices qui nous irritent, on en parle avec moins d’indignation ; loin des maux qui nous touchent, le cœur en est moins ému.
On ne cultive en elle que les qualités superficielles : bel esprit, imagination brillante, politesse effeminée ; on néglige le cœur, la raison, les vertus solides. […] Les cœurs tendres sont plus touchés que les autres de la musique. […] Ce dessein fut bien reçu ; on le jugea propre à polir l’esprit, & à exciter dans le cœur l’amour de le vertu. […] On l’écoutoit volontiers, on croyoit les passions plus pardonnables, les voyant autorisées par les personnes illustres ; il attendrissoit le cœur, & arrachoit des larmes. […] Le Duc Hamilton étoit très-aimable par les qualités du cœur.
Paul, aux Martyrs, l’instrument de leurs supplices, une croix, une couronne d’épines, un cœur enflammé, &c. l’embleme de S. […] C’est une très-grande découverte, plus intéressante que celle des longitudes ; c’est une vraie guerre déclarée à tous les cœurs des hommes, & à toutes les graces des femmes. […] La science des passions encore inconnue à leur innocence trouvera peut-être d’abord leur cœur fermé. […] Ces vains ornemens, ces piquans artifices allument dans votre cœur un feu violent. […] De l’abondance du cœur la bouche parle, de l’abondance du cœur la femme se pare, & parle aussi énergiquement par la parure.
La représentation d'un amour légitime et celle d'un amour qui ne l'est pas font presque le même effet, et n'excitent qu'un même mouvement qui agit ensuite diversement selon les différentes dispositions qu'il rencontre : et souvent même, la représentation d'une passion couverte de ce voile d'honneur est plus dangereuse, parce que l'esprit la regarde avec moins de précaution, qu'elle y est reçue avec moins d'horreur, et que le cœur s'y laisse aller avec moins de résistance.
» Si nous sommes donc obligés, en qualité de Chrétiens, de demander à Dieu qu'il nous ôte les yeux pour toutes les folies du monde, dont la Comédie est comme l'abrégé, et qu'il nous en imprime la haine et l'aversion dans le cœur: comment pourrons-nous croire que nous puissions repaître nos yeux de ces vains spectacles, et mettre notre contentement en ce qui doit être l'objet de notre aversion et de notre horreur ?
Fais descendre en ma faveur les cieux sur la terre ; élargis mon cœur, fais-en un petit paradis, viens y répandre une si grande abondance de ta lumière de grâce, qu’elle imite et approche la lumière de la gloire.
On ne considère pas que la vie Chrétienne doit être non seulement une imitation, mais une continuation de la vie de Jésus-Christ; puisque c'est son esprit qui doit agir en eux, et par eux, en imprimant dans leur cœur les mêmes sentiments qu'il a imprimés dans celui de Jésus-Christ.
Il fait plus toutefois, il condamne son geste et sa voix, et par un pur zèle de chrétien et qui part d’un cœur vraiment dévot, il dit que la nature lui a dénié des agréments qu’il ne lui faut pas demander, comme si, quand il manquerait quelque chose à Molière de ce côté-là, ce qui se dément assez de soi-même, il devrait être criminel, pour n’être pas bien fait. […] », et ne s’émanciper pas si aisément et au préjudice de la charité, de juger même du fond des âmes et des consciences, qui ne sont connues qu’à Dieu, puisque le même apôtre ditf qu’il n’y a que lui qui soit le « scrutateur des cœurs ». […] Enfin Molière est un impie, cet Observateur l’a dit : il faut bien le croire, puisqu’il a vu une femme qui secouait la tête, et sa pièce ne doit rien valoir, puisqu’il l’a connu dans le cœur de tous ceux qui avaient mine d’honnêtes gens.
Le Fils de Dieu étant venu en ce monde pour y apporter le feu céleste de l’amour de Dieu, comme il dit à l’Evangile ; l’esprit malin qui est un singe et son ennemi mortel, s’étudie aussi de son côté, et s’efforce de tout son possible, d’allumer dans le cœur des hommes, le feu infernal de l’amour sensuel et déshonnête.
» Ce qui marque que ceux qui vivent de la vie des sens et dans les plaisirs du monde sont souvent consumés par des passions dont l'effet est insensible au commencement comme celui de la tigne l'est sur les habits, et qu'ils attirent, comme dit un Prophète, l'iniquité dans leurs cœurs par ces vains amusements : « Vae qui trahitis iniquitatem in funiculis vanitatis.
» Si nous sommes donc obligés en qualité de Chrétiens, de demander à Dieu, qu'il nous ôte les yeux pour toutes les folies du monde, dont la Comédie est comme l'abrégé; et qu'il nous en imprime la haine et l'aversion dans le cœur: comment pourrons-nous croire que nous puissions repaître nos yeux de ces vains spectacles, et mettre notre contentement en ce qui doit être l'objet de notre aversion et de notre horreur.
Sa plume qui est le truchement de ses pensées, et ses écrits le symbole de ses mœurs, font connaître, que ses œuvres sont l’image de son esprit, et son visage étant l’âme raccourcie de son naturel et le miroir de son cœur, montre par la débilité de son cerveau, que ses sens sont égarés, et que son jugement a sorti les bornesc de la raison, par ce grand débordement d’injures dont son libelle est rempli : Ce Casuiste semble avoir mal pris ses mesures, d’avoir voulu faire un parallèle, de la Profession des anciens Histrions, à celle des Comédiens ; d’autant qu’il n’y a aucune affinité ni correspondance entre leurs exercices, l’une étant un pur batelage et souplesse de corps, et l’autre une représentation d’une fortune privée, sans danger de la vie, comme témoigne Horace, en son livre, de Arte d, « Comedia vero est Civilis privataeque fortunae sine periculo vitae comprehensio » ; Je sais bien qu’il y en a plusieurs, qui ne sachant pas la différence de ces deux professions, confondent l’une avec l’autre, et sans distinction de genre, prennent leur condition pour une même chose ; Mais il y a une telle inégalité entre elles, qu’il est facile de juger par la diversité de leurs fonctions, qu’elles n’ont nulle conformité ensemble, car celle des histrions n’est comme j’ai déjà dit qu’une démonstration d’agilité de corps et subtilité de main, mais l’autre étant une action plus relevée, fait voir qu’elle est une école des plus belles facultés de l’esprit, et où la mémoire fait un office digne d’admiration ; l’antiquité nous apprend qu’autrefois les Romains avaient ces Bateleurs en quelque considération, à cause du divertissement qu’ils donnaient à leurs Empereurs, mais ayant abusé du crédit qu’ils avaient obtenus du Sénat, s’adonnèrent à toutes sortes de licences pernicieuses, ce qui obligea la ville de Rome de les chasser, et particulièrement un nommé Hyster, qui s’étant retiré à Athènes, fut suivi d’une bande de jeunes hommes, auxquels il enseigna ses tours de passe-passe et autres parties de son métier, et furent appelés Histrions, du nom de leur Maître, ces Libertins s’ennuyant de demeurer si longtemps dans un même lieu, prirent résolution de revenir à Rome pour exercer leurs jeux : Mais l’Empereur Sévère, ne pouvant souffrir ces Ennemis des bonnes mœurs, fit publier un Edit, par lequel ils furent pour la seconde fois bannis de tout le pays latin ; Lisez ce qu’en dit Eusebius, et Prosper Aquitanus, sur la remarque des temps et des siècles : Pour le regard des Mimes, ou Plaisanteurse, ils ont pris leur source d’un certain bouffon appelé Mimos qui signifie en langue grecque Imitateur, d’autant qu’en ses représentations il contrefaisait divers personnages, et imitait les façons des uns et des autres. […] Ce qui m’étonne d’avantage, c’est de voir que celui, qui devrait avoir une domination de raison, sur les impétueux mouvements de son esprit, le laisse emporter à des licences qui sont non seulement indignes d’un Chrétien, mais même d’un Athée, que celui (dis-je) qui doit donner un calme et une tranquillité à la partie imaginative de son âme, et régler ses écrits à la dignité de sa vocation, s’altère l’esprit contre une chose que tout le monde approuve ; Je suis fâché qu’un Religieux qui doit être le miroir de soi-même pour servir d’exemple à la piété, ne résigne plutôt les affections de son cœur à des actions saintes, qu’à se jeter sur les invectives. […] Mais pour parler du malheur qu’a causé la médisance ; Voyons le fond de l’antiquité, nous trouverons un Moïse quitter la Cour de Pharaon pour aller aux déserts de Madian, l’emprisonnement d’un Joseph, un Prophète David chassé de la présence de Saül, un Daniel jeté dans la fosse aux lions, un peuple Hébreu à la veille de sa perte, une Suzanne sur le point d’être lapidée ; Bref il n’y a peste plus dangereuse que celle de la calomnie, c’est pourquoi le Prophète royal, au Psaume septante et deux, dit que le Détracteur échellev le Ciel pour y vomir le venin de sa médisance, « posuit in coelum os suum et lingua ejus transivit in terra » : Je ne trouve pas étrange de quoi les Calomniateurs dressent des assauts continuels, contre ceux qui sont accusés de quelques imperfections, puisque la pointe de leur langue s’attaque aux plus justes du monde ; plût à Dieu que ce vice n’eût aucune racine dans nos cœurs afin que la charité se trouvant en son lustre, l’amitié pût avoir son règne, et la paix entrant en son Empire, la concorde y trouvât le trône de sa félicité. […] Il croyait éblouir le Vulgaire par le fastueux titre de son livret, et rencontrer en nous des cœurs de cire, pour nous imprimer facilement le sceau de ses impertinences ; Mais n’ayant été qu’un mépris de sa réputation, et une risée de ceux qui l’ont une fois lu.
Vous avez raison, belle Honorine, & vous jugez la Nation d’après la bonté de votre cœur. […] Elle avait les Rôles tendres dans le Tragique & dans le Comique : le Ciel l’avait douée d’un organe propre à remuer les cœurs, avec une beauté qui se les attachait ; son nom signifie encore, tout ce que l’on peut imaginer de plus touchant. […] Cet excellent Acteur rend supérieurement quelques rôles de fripon : mais dans ceux d’honnête bonhommie des Drames nouveaux, on sent qu’il joue d’après son cœur, & les larmes qu’il fait verser sont délicieuses. […] Caillot : Sa présence inspire la joie ; son Jeu ravit ; sa voix gracieuse & sonore remue les cœurs. […] L’aimable Rosalie, que j’ai de même oubliée à dessein, fesait dernièrement l’Amour dans l’Acte de Psyché des Fêtes-de-Paphos ; mademoiselle Arnould, le rôle de Psyché : Jamais l’Amour ne fut si sûr de blesser les cœurs ; jamais Psyché ne fut aussi touchante, aussi belle………………* Amicus Socrates, amicus Plato ; magis amica veritas.
On ne peut donc point douter que danser ne soit un crime en ceux qui le font, cachant quelque mauvais dessein dans leur cœur.
Le second moyen est encore plus sûr ; c’est de juger par les confessions des fidèles du mauvais effet que produisent les comédies dans leur cœur : car il n’est point de plus grande accusation que celle qui vient de la bouche même du coupable.
Plaise au ciel que la vertu reprenne ses droits sur des cœurs faits pour l’aimer et la pratiquer, et que le gouvernement se déclare contre son ennemi secret et le plus dangereux, je veux dire l’ennemi de la religion et de la vertu.
La parole de Dieu, qui est la semence de la vie, et la parole du diable qui est la semence de la mort ont cela de commun qu'elles demeurent souvent longtemps cachées dans le cœur sans produire aucun effet sensible.
La parole de Dieu, qui est la semence de la vie, et la parole du Diable, qui est la semence de la mort, ont cela de commun qu'elles demeurent souvent longtemps cachées dans le cœur sans produire aucun effet sensible.
2. vous êtes un plus grand homme que vous ne croyez, votre élection pour les communes auroit fait un schisme en France, vos amis sont fâchés que vous n’ayez pas réussi, ils savent que votre esprit & votre cœur n’ont rien de votre profession, & sont infiniment au-dessus de votre fortune, quoique vous ayez deux millions de bien. […] On va la saisir dans son lit, interrogée sur ce vol, elle répond, je ne suis plus chez vous depuis quelques jours, je ne puis répondre de ce qui s’y passe ; il y a apparence que MM. deux rivaux, ont eu la curiosité de savoir qui regne dans votre cœur, & ont cru le trouver dans vos lettres ; l’un d’eux a fait le coup, voulez-vous, dit le Capitoul, qu’on dresse un verbal de cette réponse ? […] Vous qui connoissez si bien le cœur de l’homme, qui en avez cent fois développé tous les réplis, avez-vous pu ignorer ses foiblesses ? Les peintures vives de l’amour qu’on employe pour en garantir le cœur, suffisent pour l’y faire germer & y porter des impressions funestes, que la plus sage morale n’effraye point. […] Procope, qui dans son Histoire, rapporte ces belles qualités d’Esprit & de corps, qui rendirent Théodora si puissante ; & dans sa satire, l’abus qu’elle en fit, par la corruption de son cœur.
Tout ce beau systeme de morale théatrale s’évanouit à la lumiere de l’Evangile, sur l’idée que Dieu nous donne de la vertu véritable ; héroïsme chimérique, qui remplit de vanité, d’amour du plaisir, & corrompt le cœur qu’on veut qu’il éleve. […] Du côté du cœur & des bonnes mœurs, c’est encore pis ; il detruit la pudeur, la religion, la sincérité, la charité, l’humilité, la douceur, le goût de Dieu, la pensée des choses saintes, l’amour de la pauvreté, de la pénitence, la lecture des bons livres, les pratiques de piété, des Sacremens, l’étude, la parole divine, en un mot tout l’Evangile. […] Dieu ne veut point dans les cœurs de partages, de ces religions bigarrées : Qui non est mecum contra me est. […] Chacun des convives a donné & chanté à table quelques couplets à sa façon (ils sont tous Poëtes), tous également bons, par le motif qui est l’effusion du cœur (un motif n’est pas une effusion du cœur). […] Une ame honnête peut-elle laisser les amorces du vice pour étouffer les murmures, corrompre les cœurs pour conserver des esclaves ?
La matinée la mere de famille la passe au lit, à peine est-il jour à midi, les enfans, les domestiques, les affaires, tout est négligé : la comédie dérange les horloges comme les esprits & les cœurs. […] On peut en dire autant du vice, quand on le joue sur le théatre : il s’y revêt d’une forme visible ; la représentation le met sous les yeux, & des yeux au cœur, que la route est facile ! […] Pour une ame bien née qui écoutera, qui goûtera ces leçons & en profitera, cent & cent cœurs dépravés qui ne les écouteront pas, qui s’en moqueront, & ne s’arrêteront qu’au mauvais, dont ils se repaîtront avec délices. […] Le vice est d’intelligence avec le cœur, les avenues lui en sont ouvertes, la passion lui prépare la victoire, il est dejà à demi vaincu. […] Il en de même du spectateur : il a besoin des plus grands efforts pour démêler sur le théatre les traces de la vertu, pour en prendre les principes épars, les faire passer dans son cœur, les réduire en pratique.
L’une plus occupée à toucher le cœur qu’à recréer l’esprit, a sçu répandre d’un bout à l’autre de sa pièce un intérêt si vif, si bien ménagé, qu’on se plaît dans le trouble & dans les allarmes où elle jette. […] Les qualités de l’esprit ont cela de commun avec celles du cœur, qu’on les rencontre dans le petit nombre, & que ce nombre est en proportion avec le grand d’où il est tiré. » « Si vous n’avez pas encore découvert ce qu’il vous faut, est-ce une raison de cesser de le chercher ?
Remplissez vos scènes, non d’idées difficiles à combiner, à sentir, non d’expressions qui ne parlent qu’aux oreilles, mais de faits qui ébranlent l’ame, qui subjuguent le cœur ; mais de ces sentimens qui frappent les spectateurs, & s’emparent d’eux avec une douce violence. […] L’une par les tons hardis, par les éclats les plus nobles régnoit sur les cœurs.
Si la Tragédie représente des parricides, il faut convenir avec Lactance2 que la Comédie n’est qu’un tissu de galanteries scandaleuses ; on y voit des intrigues ingenieuses & séduisantes, un jeu de passions qui gagnent le cœur des Spectateurs, en charmant leur esprit par la pompe & les graces de leur langage. […] A présent tout s’y trouve conforme au génie délicat du siécle ; les portraits sont tirés d’après nature, il régne dans toute la piece une illusion séduisante ; le cœur qu’elle a le don d’intéresser, se suppose volontiers en la place des interlocuteurs, & puise des vices réels dans le spectacle des passions imaginaires.
Philippe n’étoit pas aimé, ce Prince n’étoit ni beau ni petit maître, sérieux, triste, sévère, pouvoit-il être du goût d’une Actrice, dont le cœur étoit déjà pris ; on a prétendu qu’il agissoit par intérêt, ce qui est plus croyable, il espéroit d’épouser Elisabeth si sa femme venoit à mourir, & de conserver ainsi la couronne, au lieu qne si Elisabeth étoit morte, la couronne auroit passé à Marie Stuart, Reine d’Écosse, mariée au Roi de France, qu’elle auroit rendu trop puissante. […] Cet étalage eut été moins déplacé après quelques victoires remportées sur les Irlandois, sous ses auspices & avec son armée ; mais l’amour traversa la vanité, elle eut diminuée la gloire d’Essex son général & son amant ; la perfidie d’ailleurs en détruisoit tout le plaisir ; goûte-t-on quelque conquête quand le cœur d’un amant échappe, tout l’orgueil, toute la dissimulation d’une Actrice se brise à cet écueil. […] Pour mieux gagner le cœur des Flamands chez qui l’hérésie étoit fort répandue, ce Prince affecta d’avoir, & peut-être en effet avoit-il du penchant pour le Calvinisme, ce qui lui eut formé un parti considérable. […] Il est rare qu’on règne sur les cœurs quand on a perdu les grâces de la jeunesse, & qu’on n’est recherchée que par intérêt. […] L’Église Romaine l’employe avec fruit pour maintenir la dévotion des Fidèles, & les Protestans qui absolument décharnent le culte, suppriment les cérémonies, dépouillent les Temples, & les Ministres connoissent mal le cœur humain, & ne ménagent pas les intérêts de la piété ; mais on a raison de se moquer d’un système de Religion bisarre & inouï dans le Christianisme, dont une partie détruit l’autre.
Quand on ne sent donc pas la même aversion pour les folles amours et les autres dérèglements que l'on représente dans les Comédies, et qu'on prend plaisir à les envisager, c'est une marque qu'on ne les haït pas, et qu'il s'excite en nous je ne sais quelle inclination pour ces vices, qui naît de la corruption de notre cœur.
Quand on ne sent donc pas la même aversion pour les folles amours, et les autres dérèglements qu'on représente dans les Comédies, et qu'on prend plaisir à les regarder, c'est une marque qu'on ne les hait pas, et qu'il s'excite en nous je ne sais quelle inclination pour ces vices, qui naît de la corruption de notre cœur.
« Evitez cette école où l’on instruit les cœurs A flatter la licence, à mépriser les mœurs. » Cardinal de Bernis.
[NDE] L’édition originale donne "cœur".
N'est-ce pas une preuve sensible que leur conscience dément leurs fausses lumières, et qu'ils sont eux-mêmes convaincus au fond de leur cœur du mal qu'il y a dans la Comédie, quoiqu'ils tâchent de se le dissimuler par les faibles raisons que leur esprit leur fournit.
Il termina les derniers temps de sa carriere littéraire par la traduction en vers des Pseaumes de la pénitence qui expriment les sentimens de son cœur, Il eut des ennemis ; il essuya bien des contradictions & des critiques. […] Vous reprocheriez-vous un cœur sensible & tendre ? […] Le Journaliste, plein du Théatre dont il parle toujours avec effusion de cœur, se sert du même pinceau pour sa Vénus qui brille de même à ses yeux. Cet amour platonique, que son enthousiasme pour le plus grand plaisir physique lui fait croire impossible, est la plus complette extravagance que la folie humaine puisse imaginer , quoique le divin Platon & l’admirable Fenelon l’ayent imaginé, sans être complettement extravagans ; cet amour est pourtant celui des anges qui n’ont point de corps, celui des saints pour Dieu qui n’est qu’un pur esprit, celui que Dieu demande de tout l’esprit, de tout le cœur, de toute l’ame, de toutes les forces ; c’est l’amour des ennemis, si fort recommandé dans l’Evangile, où n’entre pour rien le plus grand plaisir physique.
Mais une pièce dramatique régulière, partagée en scènes et en actes, formant un dessein, un nœud, un dénouement, accompagnée de chant, de danses, de machines, où l’on ne parle qu’en chantant, où l’on ne marche qu’en dansant, un spectacle où tout est réuni pour flatter le cœur, l’esprit, les yeux, les oreilles, que l’histoire de l’Opéra appelle « le spectacle universel, le triomphe de l’esprit humain, le grand œuvre par excellence », et qui en effet bien mieux que celui des Chimistes, fait couler des fleuves d’or dans la main des Acteurs, et une pluie d’or dans le sein des Danaé qui habitent ce pays des Fées ; on ne le connaissait qu’en Italie, il avait été ébauché en faveur de la maison de Médicis, à qui on doit en Europe la naissance des arts et du luxe. […] L’on a rassemblé à l’opéra tout ce qu’il y a de plus capable de flatter les passions ; la vue, par des décorations superbes ; l’oreille, par une musique harmonieuse ; le cœur, par les vers et les chants les plus tendres. […] Mais la passion aveugle les meilleurs cœurs. […] Une si basse vengeance et une si puérile sensibilité sont indignes d’un grand cœur ; combien sont-elles au-dessous d’un grand Prince, qui tout occupé des grands intérêts de l’Etat, doit ignorer les bas artifices de l’amour propre ?
La douceur de ses mœurs et la ferveur de sa piété ne ravissaient pas moins les cœurs, que la force de son éloquence. […] Lorsque l’homme se penche vers les affections de la terre, son cœur est comme courbé et appesanti ; mais quand il s’élève vers le Ciel, ce cœur se redresse, et devient l’objet de la bonté de Dieu ; car « Dieu est bon à ceux qui ont le cœur droit. […] » C’est donc justement que nous pouvons dire, que le Prince de Conti imitant la pénitence de David, a été un Prince selon le cœur de Dieu. Mais voyons quels ont été les moyens dont le Père des miséricordes s’est servi pour le rendre selon son cœur. […] , lui dont les yeux pénètrent dans les cœurs, et y découvrent souvent des plaies qu’ils ne sentent pas.
La jeunesse et même l’enfance durent longtemps parmi les hommes : ou plutôt on ne s’en défait jamais entièrement : quel fruit après tout, peut-on se promettre de la pitié ou de la crainte qu’on inspire pour les malheurs des héros ; si ce n’est de rendre à la fin le cœur humain plus sensible aux objets de ces passions ?
Qui ne sait pas que de tout temps l’ambition a changé la face des Etats ; que l’amour de l’or à éteint celui de la vertu ; que par-tout où il y a eu des hommes, on a vu régner tour-à-tour le mensonge, la calomnie, la trahison, le luxe, le libertinage, la perfidie, la mauvaise foi, & généralement tous les vices dont le cœur de l’homme est malheureusement la victime ? […] Il faut qu’elle sonde le cœur humain jusque dans ses replis les plus ténébreux, & que là, comme dans leurs sources elle étudie ces passions, qui font tant de ravage dans la Société, & qu’employant tout son art à les peindre d’après nature, elle montre sur la scène l’homme tel qu’il est, malgré ses déguisemens apparens.
Si pourtant le Conseil jugeait à propos d’en conserver quelques-unes, où la passion d’amour ne parût pas nuisible, ni capable de corrompre le cœur, il ne faudra l’insérer dans le Registre qu’après qu’on se sera assuré qu’elle est propre à corriger les mœurs, à inspirer une bonne morale, et à faire aimer la vertu ; ce qui doit être le premier objet de toutes les Pièces du nouveau Théâtre. […] J’ose donc assurer au contraire qu’ils seront charmés de voir leur génie en liberté, et que leurs premiers efforts feront connaître combien l’amour, qu’on croit aujourd’hui l’unique fondement du Théâtre, y est étranger ; pendant que la nature toujours féconde fournit abondamment, dans le cœur de l’homme, des sujets convenables pour former de bons Citoyens.
Enfin les jeunes gens qui sont maîtres de leur cœur, ne peuvent remporter de la représentation de cette Comédie que des exemples capables de les fortifier dans la vertu : et ceux qui sont tyrannisés par la malheureuse passion de l’amour, peuvent apprendre à éviter les risques qu’ils courent, et à détester les excès où elle porte ceux qui s’y livrent. […] Malheureusement les Poètes ont pris un autre chemin, qui sans contredit s’éloigne infiniment du but de la farce, et qui cependant réussit quelquefois, parce qu’ordinairement leurs Pièces sont pleines de traits de médisance sous le nom de critique ; Et par la raison que la passion d’amour la plus irrégulière plaît sur le Théâtre aux Spectateurs corrompus, de même la médisance ou la satyre y et applaudie et y fait rire, à cause de la méchanceté du cœur humain qui n’aime que trop à entendre déchirer son prochain.