Or combien que selon les occasions nous fassions devoir de représenter la turpitude de ces spectacles, notre intention pour le présent n’est pas de nous y arrêter. […] Tantôt on y représentera un Magicien, qui fait ses enchantements, et y invoque et évoque les esprits malins. Tantôt on y représentera une Phèdre qui est éprise d’une flamme maudite, et brûle d’un amour incestueux. […] Tantôt on y représentera une fille, qui transportée de sa passion, et perdant toute honte, s’opiniâtrera à vouloir un mari contre la volonté de ses Père et Mère. […] Ainsi il n’eût pas donné aveu à cette conséquence, que saint Paul eût trouvé bon qu’on eût représenté sur le Théâtre celles de ce Poète, poli et savant, à cause qu’il les avait lues.
Ils sont comme autant de mignatures qui représentent en petit ce que la Comedie nous offre en grand. […] Si on ne sçaurait faire un pareil reproche aux Français, on a lieu de s’étonner qu’ils ayent été plus d’un siecle à ne représenter sur la Scène tragique que des Héros Grecs & Romains, sans considérer que leur propre Histoire offrait des sujets aussi frappans & plus dans leurs mœurs. […] Ignore-t-on qu’il ne doit point perdre la vie, puisque ce n’est point une Tragédie qu’on nous représente ? […] On compte au moins dix Œdipe, tant représentés qu’imprimés.
L’an 400, après la fondation de Rome, les Censeurs ayant proposé au Sénat de faire construire un théâtre de pierre, le grand Scipion représenta que les spectacles corromproient infailliblement les Romains ; & sur sa remontrance qui ne se vérifia que trop dans la suite, le Sénat fit vendre aussi-tôt les matériaux préparés pour la construction du théâtre. […] n’est-ce pas de ce qu’ils ont des passions plus fortes que celles qu’on y représente, & qu’ils sont si corrompus, que les spectacles ne trouvent plus rien à faire en eux ? […] On y représente des incestes & des parricides qui devroient être ensevelis dans un éternel oubli. […] Lorsque les spectacles sont une occasion prochaine de péché mortel, quoiqu’on ne s’y trouve qu’à regret & par nécessité : c’est, dis-je, un péché mortel dans ce premier cas, 1°. parce qu’on autorise les acteurs par sa présence ; 2°. parce que l’on contribue à leur entretien, & que l’on coopere par conséquent au péché qu’ils commettent en représentant : s’il n’y avoit point de spectateur, il n’y auroit point d’acteur ; 3°. à cause du scandale ; 4°. à cause de la perte du tems ; 5°. par rapport au mauvais emploi de l’argent, qui est dû aux pauvres, s’il est superflu, ou aux autres besoins, s’il est nécessaire ; 6°. parce qu’on s’y expose presque toujours à l’occasion prochaine, & au danger presqu’inévitable d’offenser Dieu ; 7°. parce qu’en s’exposant ainsi à l’occasion prochaine de pecher, on tente Dieu ; 8°. parce qu’on fait une action que l’on ne peut rapporter à Dieu, & qui est directement contraire à l’esprit du christianisme, qui est un esprit de vigilance, de priere, de recueillement, de pénitence ; 9°. parce qu’on viole les loix de l’Eglise, qui condamnent les spectacles & ceux qui les représentent.
Cette passion, si j’ose le dire, doit être représentée avec ce caractere rude & farouche qui inspire la terreur, & jamais l’attendrissement. […] Le Prélat s’éleve contre les chants passionnés de Lulli, contre les dangers de représenter, même l’amour légitime à cause des circonstances qui l’accompagnent, contre les scandales mêlés aux représentations du Théâtre ; il ramene à son opinion les Peres, les Philosophes anciens, Platon, & même le Philosophe Grec ; enfin il combat la Comédie par la vie sérieuse que commande l’esprit de la Religion. […] Je dois d’abord, disoit-il à MM. de l’Académie Françoise, déclarer que je ne souhaite point qu’on perfectionne les Spectacles où l’on ne représente les passions corrompues que pour les allumer… Il ajoute : il me semble qu’on pourroit donner aux Tragédies une merveilleuse force, suivant les idées très-philosophiques de l’Antiquité, sans y mêler cet amour volage & déréglé qui fait tant de ravages ***.
Dans l’action qu’elle représente, le succès ou la chûte sont également funestes à l’injustice : le plus cruel châtiment est l’horreur & le mépris qu’elle inspire. […] C’est toujours le crime représenté avec les couleurs les plus fortes & les plus capables de redoubler l’horreur naturelle qu’il inspire. […] Vous êtes à plaindre si vous les avez trouvées dans la societé si différentes de celles qu’on représente sur la scene. […] Est-ce à l’école des tyrans, que le Theatre représente toujours comme des monstres, qu’ils avoient puisé ces principes d’inhumanité ? […] Le Comédien représente des passions qui ne sont pas les siennes.
Mais je vous prie de considérer un moment sous quel point de vue tous ces vices nous sont représentés sur le Théâtre. […] Après avoir dit tant de mal des Spectacles, il ne vous restait plus, Monsieur, qu’à vous déclarer aussi contre les personnes qui les représentent et contre celles qui, selon vous, nous y attirent ; et c’est de quoi vous vous êtes pleinement acquitté par la manière dont vous traitez les Comédiens et les femmes. […] Comment n’avez-vous pas senti, que si ceux qui représentent nos pièces méritent d’être déshonorés, ceux qui les composent mériteraient aussi de l’être ; et qu’ainsi en élevant les uns et en avilissant les autres, nous avons été tout à la fois bien inconséquents et bien barbares ? […] Il ne fallait pas moins qu’un Philosophe exercé comme vous aux paradoxes, pour nous soutenir qu’il y a moins de mal à s’enivrer et à médire, qu’à voir représenter Cinna et Polyeucte. […] Représenté devant Louis XV et la cour en octobre 1752 et à la ville en mars 1753, il rencontra un grand succès.
Tantôt le libertinage y est successivement représenté dans ses divers degrés. […] Nos Poètes représentent indifféremment, et les femmes du commun et les femmes de qualité, tout le sexe en un mot sous les mêmes traits de libertinage. […] Je demande à mon tour : s’il n’est rien au monde qu’il ne soit convenable de dire ou de représenter ? […] Cette riposte caractérise bien Hercule ; elle le peint aussi au naturel qu’un singe représenterait le Grand Seigneur dans une audience publique. […] Cette Pièce eut le malheur d’avoir de très mauvais Juges : on la siffla avant qu’elle eût été à demi représentée.
Qu’il serait à souhaiter que de pareilles sujets fussent quelquefois représentés sur la Scène Française pour édifier et divertir en même temps. […] Ce bruit est devenu un scandale public, et semble nous faire entendre qu’il faudrait proscrire la piété et la bannir du Théâtre, comme si nous étions encore dans ce siècle barbare et ignorant, où les spectacles publics représentaient nos plus sacrés mystères d’une manière qui rendait ridicule ce qui devait être le sujet de l’attention la plus sérieuse et de la plus profonde vénération.
Y a-t-il une Ecole d'athéisme plus ouverte que le Festin de Pierre, où après avoir fait dire toutes les impiétés les plus horribles à un athée, qui a beaucoup d'esprit, l'Auteur confie la cause de Dieu à un valet, à qui il fait dire, pour la soutenir, toutes les impertinences du monde ; Et il prétend justifier à la fin sa Comédie si pleine de blasphèmes, à la faveur d'une fusée, qu'il fait le ministre ridicule de la vengeance divine; même pour mieux accompagner la forte impression d'horreur qu'un foudroiement si fidèlement représenté doit faire dans les esprits des spectateurs, il fait dire en même temps au valet toutes les sottises imaginables sur cette aventure. […] Il reconnaît devant Dieu, comme un grand mal, le sentiment qui le portait, lorsqu'il voyait représenter des Amants qui étaient contraints de se séparer, à s'affliger avec eux.
LES Poèmes Dramatiques sont plus dangereux que tous les autres Ouvrages de Poésie ; parce qu’on les représente sur les Théâtres publics. […] » Et quoiqu’il n’ait pas coutume de parler à son désavantage, il avoue que les Spectacles faisaient de si grands changements dans son cœur, qu’il en retournait non seulement plus avare, plus ambitieux, plus amateur des plaisirs et du luxe : mais encore plus cruel et moins homme ; parce, dit-il, que j’ai été avec des hommes ; « Avarior redeo, ambitiosior, luxuriosior, imo vero crudelior et inhumanior, quia inter homines fui. » Que l’on prouve si on le veut, que les Comédies qui se jouent aujourd’hui ne peuvent causer que des passions innocentes, et des sentiments raisonnables, qu’on en conclue qu’il n’y a aucun danger, que ceux qui les représentent, nous communiquent les mouvements qu’ils expriment ; cela ne s’accorde point du tout avec l’expérience ; et s’il était ainsi, les gens du siècle pour qui elles sont faites, ne s’y divertiraient nullement.
Pour oser les composer, les imprimer, les représenter, il faut, comme le navigateur d’Horace, avoir un trible airain sur le cœur & sur le visage, & braver la mer la plus orageuse dans la barque la plus fragile : Illi robur & as triplex erat qui fragilem truci commisit pellage ratem. […] Quand l’Ambassadeur Turc, Saïd Effendi, vit représenter à Paris le Bourgeois Gentilhomme, & cette cérémonie ridicule dans laquelle on le fait Turc, quand il entendit prononcer le nom sacré de Dieu (Hou) avec dérision & des postures extravagantes, il regarda ce divertissement comme la profanation la plus abominable (Philosophie de l’Histoire, C. […] Je sais qu’il est quelques pieces où les passions sont traitées décemment, & justement condamnées ; mais leur nombre est si petit, elles sont si rarement représentées, si froidement accueillies, qu’on ne doit les compter pour rien ; encore même faut-il se consoler de la contrainte, par quelque farce dont la licence satisfasse le goût du spectateur & de l’Acteur. […] Elle en a fait un recueil qu’elle a dédié à des enfans Pensionnaires dans le Couvent de Religieuses à Gisors, pour y être représentées, & servir, dit-elle, à leur instruction. […] Entre autres il y a deux choses singulieres : un serpent représenté par un homme habillé en Arlequin : une simphonie, tantôt gaie, tantôt lugubre, dans un temps où il n’y avoit ni instrumens de musique, ni gens pour en jouer ; on donne des habits blancs à Adam & Eve, & à la scène 6 on dit qu’ils sont nuds, &c.
que représenteraient-ils ? […] Mais la justice, qui étale le châtiment, fait-elle représenter le crime ? […] Ceux qui les représentent crient comme des furieux. […] Un Auteur dramatique doit se mettre à la torture pour imaginer et rendre vivement tout ce qu'un malhonnête homme peut dire et faire, et un Comédien pour le représenter. […] Boursaut, dans sa lettre à l'Archevêque de Paris, fait un raisonnement de Poète comique, pour prouver les grands fruits de la comédie, c'est qu'elle représente « des sottises et des crimes.
» (Elle représentait le personnage de la Lune dans la pièce de Boissy, intitulée la Nuit d'été). […] Le théâtre représente les objets plus vivement encore, et dans des jours plus favorables, les anime, les fait agir. […] C'est sentir tout ce qu'exprime l'Acteur, c’est-à-dire tout ce que sentirait le personnage qu'il représente. […] Bernard (avril 1701) : « Expressions blasphématoires, discours athées, railleries profanes, la gravité méprisée, la vertu avilie, le vice applaudi, le Clergé injurié, déclamations contre le mariage, les infirmités humaines tournées en plaisanterie, la vieillesse tournée en ridicule, les plaisirs de la débauche représentés an naturel, etc. […] Il est vrai que par ordre du Roi toutes les pièces sont vues et corrigées avant d'être représentées ; mais l'Auteur ajoute que « les Acteurs s'émancipent à représenter ce qui a été effacé, et dans l'impression les Auteurs rétablissent ce qui a été retranché ».
La conspiration est mutuelle, elle est agréable à tous les musiciens ; l’acteur doit être le premier monté, sentir les passions qu’il représente, pour les inspirer. […] Cet homme d’un caractere noir & barbare, a coupé en actes, divisé en scènes, mis en vers durs & grossiers les évenemens les plus horribles, & les a fait représenter. […] La Scène angloise, bien plus atroce, exécute ce que la Tragédie françoise ne fait que représenter. […] 6.° Il est, dit l’auteur, plus difficile de bien représenter que de bleu composer. […] Erreur, la plupart des pieces en sont voir les douceurs & non les excès, & dans les excès même les graces de l’actrice qui les représente, les sentimens qu’elle éprouve, le langage qu’elle tient, ont déjà corrompu le cœur avant que l’excès arrive.
On peut le voir encore par les piéces qui furent composées & & représentées dans ce malheureux tems. […] & on représenta pour la première fois à cette fête, le Facheux de Moliere. […] Cir n’étoit rien moins que Jesuitesse, sa famille, sa communauté, ses éleves, ses amis ne le furent point ; elle pria Racine son ami, devenu dévot, qui avoit quitté le théatre pour le Jansenisme, & la Cour, & qui alors se rapprochoit de la morale relachée, que Port-Royal condamnoit, & l’approchoit par conséquent des Jésuites, qui ont commis tous les péchés du monde : elle pria Racine de faire une tragédie sur un sujet tiré de la Bible, qui pût être représentée par ses éleves ; il travailla, dit-on, malgré lui, il fit Esther, cette piéce d’abord jouée à St.
Rousseau veut avec raison que tous les morceaux qu’éxécute l’Orchestre d’un Spectacle lyrique pendant les entre-Actes, ayent un rapport intime à l’action représentée, à ce qui précède comme à ce qui va suivre, & aux sentiments qu’éprouvent les Spectateurs. […] Leur Orchestre ne se fesait point scrupule de jouer autrefois dans les entre-Actes d’une Tragédie des airs extrêmement gais, & dans ceux d’une Comédie, des Symphonies nobles & sérieuses ; mais depuis quelque tems, tout ce qu’il éxécute est lié au genre & même au sujet de la Pièce représentée, autant que la vraisemblance le permet. […] M. de Mailhol ; Ramire, Tragédie, mêlée de Scènes comiques, représentée aux Italiens en 1757.
Alors les Comédiens promirent de la représenter : mais, pour justifier leur refus, ils exigerent des changemens que l’auteur fit à leur gré malgré lui. […] Elles ont eut la sincérité de s’y reconnoître & d’en faire l’aveu : mais, de dépit de se voir si laides, elles ont cassé le miroir trop fidele qui les représente au naturel. […] Vous avez craint que le Public n’établît une sorte d’identité entre les personnages de ma Comédie & les acteurs & les actrices chargés de les représenter. […] Aucun personnage vertueux, tel que celui de Lysimon dans ma piece, n’y contraste avec les mœurs dépravées qu’il y représente. […] Mais je m’intéresse trop vivement aux proprès de votre art, pour ne pas vous représenter que ce n’est point à vous de vouloir en limiter les prérogatives.
On eut la hardiesse de le représenter buvant de l’or fondu, par une mauvaise imitation de ce Roi des Parthes, qui après avoir vaincu Crassus qu’on accusoit d’avarice, lui fit verser de l’or fondu dans la bouche. […] Un jour on y représenta la bataille de Pavie, on y faisoit paroître François I demandant la vie au Capitaine Espagnol, qui lui renoit le pied sous la gorge. […] Roi de Portugal qui fut déposé pour ses crimes & sa folie, & relegué dans les Isles Terceres, étoit trop libertin pour n’être pas fou du théâtre : entr’autres folies, il faisoit représenter des comédies jusques dans le chœur des Religieuses. […] La, furent représentés maints sujets de l’Ecriture. […] L’un a composé beaucoup de drames, l’autre en a beaucoup représenté ; sur le théatre de Sceaux, à la Cour de la Duchesse du Maine, c’étoit Racine & la Chammêlé, & je ne sai quel de deux vaut mieux dans son genre.
On assujettit aux sens les plus grandes ames, on y représente comme doux & invincible l’ascendant de la beauté, on ne songe qu’à s’en rendre la servitude aimable. […] On représente quelquefois un jeu d’échecs ; le pavé de la salle est partagé en cazes comme un échiquier. […] Quelquefois les mascarades représentent un combat, un tournois, une foire, un mariage ; d’autres fois un trait d’histoire, les Jeux Olimpiques, les Bacchanales, les Gladiateurs, un Triomphe. […] On avoit dressé dans une place une grosse tour environnée d’une terrasse en rampé, qui montoit en vis tout autour, comme on représente la tour de Babel dans les Planches de la Bible. […] Approuveroit-on un métier de représenter, de sentir ou faire éprouver les douleurs & les maladies, la paralysie, l’hydropisie, l’aveuglement, &c. ?
Les paroles sont les couleurs, ou si l’on veut, le pinceau du Poëte, c’est par elles qu’il imite, & qu’il peint dans notre ame tout ce qu’il entreprend de représenter ; mais 1°. […] Oubliez pour un moment, que les Acteurs ne sont pas ceux qu’ils représentent, l’imitation deviendra la nature même, vous sentirez la même émotion que si vous entendiez parler ceux qui ont eu part à l’action représentée, & les expressions qui paroissent sortir de leurs bouches mêmes, ne portent que trop réellement dans le cœur des Spectateurs leurs différentes passions. […] La Décoration est trop peu de chose par rapport à tout le reste pour mériter que je m’arrête à observer que par son rapport & sa convenance avec l’action représentée, elle rend la représentation plus vive & plus animée, qu’elle en lie & en unit toutes les parties, & qu’elle y ajoute un nouvel ornement. […] Qu’il me soit permis, pour en faire mieux sentir la différence, de comparer l’impression que fait sur moi un tableau de Tesnieres qui me représente un cabaret ou une noce de Village, avec celle dont je suis frappé à la vûe d’un tableau de Raphaël, tel que celui de la Sainte Famille ou du Saint Michel que l’on voit à Versailles. […] Mais le genre de l’impression est le même, si le degré en est différent, & cette impression est un effet absolu que la chose même produit, & non pas seulement un plaisir de comparaison, qui ne naisse que d’un rapport de conformité entre la représentation & l’objet représenté.
L’Action qu’ils représentent, est mêlée d’intermedes, & de chants qui contiennent des Sentences. […] M. de la Loubere parle aussi d’une Comédie Chinoise qu’il vit représenter à Siam, & il nous apprend que les Siamois ont encore un autre Spectacle, qu’on peut comparer à celui que les Rapsodes donnoient dans la Grece, avant la naissance de la Tragédie.
Est-elle utile à représenter ? […] Cette Piéce est non seulement faite pour les Personnes éclairées, mais si elle étoit représentée devant le Peuple, je suis persuadé, comme je l’ai dit, qu’on verroit le Peuple même, attentif à l’Action, s’attendrir, pleurer, & être dans la crainte jusqu’à la Catastrophe.
Examinons les Ouvrages de Monfleury, de Dancourt et de quelques autres que l’on représente tous les jours. […] A l’égard des Pièces qu’on devrait représenter, je voudrais que l’on soumît à une exacte censure tous les Ouvrages de Théâtre, tant anciens que modernes. On défendrait de représenter ceux dont le fond serait vicieux.
Dans les unes, les acteurs portaient la robe prétexte d comme représentant les actions de ce qu’il y avait de plus distingué dans la républiquee. » Dans d’autres, on représentait les actions des gens de la lie du peuple qui fréquentaient les cabarets. […] Les troupes qui y étaient dispersées y faisaient représenter les jeux qui étaient le plus en usage à Rome. […] Lorsque les confrères de la passion ne purent plus représenter les mystères, ils cédèrent leurs privilèges à une troupe de comédiens qu’on appelait enfants sans souci.
Aussi pour empêcher les fidèles de Paris, de se laisser entraîner par les compagnies aux Spectacles, on chante des Vêpres du saint Sacrement, pendant le temps que l’on représente ces Spectacles ; et c’est pour cette raison, qu’on appelle ces Vêpres, des Saluts. […] Tous les désordres que causent parmi le peuple ces hommes corrompus et ces femmes prostituées, retombent sur vous : car s’il n’y avait point de Spectateurs de Comédies, il n’y aurait ni Comédiens ni Acteurs ; ainsi ceux qui les représentent et ceux qui les voient, s’exposent au feu éternel. C’est pourquoi quand vous seriez assez chaste pour n’être point blessé par la contagion de ces Jeux, ce que je crois impossible, vous ne laisseriez pas d’être sévèrement puni de Dieu, comme étant coupable de la perte de ceux qui vont voir ces folies, et de ceux qui les représentent sur le Théâtre.
.), est remplie de tant de licence, que du style comique fait pour délecter & corriger les mauvaises mœurs par la moquerie, elle passe dans celui de la bouffonnerie, de l’impudicité & de l’impudence, & ces farces exécrables dont la France fait un dessert de cigue après la piece sérieuse, mériteroient une sévere punition des Magistrats, parce que les mauvais propos que l’on y tient corrompent les mœurs, apprennent au peuple des mots de gueule, des traits de gausserie, des quolibets sales, & le portent à l’imitation des sottises & des fripponneries qu’il voit représenter. […] Les pieces qu’on représente réveillent sans cesse à l’Actrice l’idée de son amant : comme elles roulent toutes sur l’amour, on en sent plus vivement l’impression ; on s’applique ce qu’on chante, on déclame, on substitue l’amant à l’Acteur ; on se voit en lui, on lui parle ; on entre dans le sentiment du rôle qu’on joue, on le réalise en soi-même, on en réussit mieux, & on le fait mieux passer dans l’ame des spectateurs. Jamais on ne représente plus au naturel que quand on est à même temps l’original & la copie ; tout coule du cœur, les larmes ne sont plus feintes, &c. […] Je ne répondrois pas que les jeunes Religieuses qui font représenter des pieces de Racine à leurs Pensionnaires, eussent toujours la même facilité de composition ; mais les Pénitens, qui sans doute sont Poëtes, fetont cette édifiante réforme. […] Plusieurs Chevaliers le veulent bien ; mais les anciens leur représentent qu’ils feroient tort à l’ordre d’admettre parmi eux un roturier, que S.
Je ne doute pas que le goût aujourd’hui dominant du théatre ne contribue à cette haine & à ce mépris, & je ne comprends pas comment les Communautés Religieuses ont pu s’aveugler sur leurs intérêts, jusqu’à le favoriser, à composer, à faire représenter des pieces dans leurs maisons, à donner des règles de l’art dramatique, dont une bonne politique devoit les rendre ennemis déclarés. […] Les aventures monastiques, petites, peu amusantes, n’ont ni sel ni variété ; l’habit sérieux, modeste, imposant, ne représentent point les attraits de l’immodestie & les graces de la parure. […] On représente pourtant les Religieuses prosternées devant l’Autel, où le saint Sacrement est en réserve, ce qui est très-indécent & contre les règles. […] Cela seul en trahiroit la fausseté, parce qu’il marque une basse familiarité, & suppose une intimité indécente que la piece n’exige pas, qu’elle exclud même, parce qu’elle représente les deux amans comme vertueux. […] Elle lui représente que si elle étoit mariée à un autre, il n’auroit aucun droit, à plus forte raison étant unie à Dieu.
Le métier de Comédien est une sorte de prostitution, & la prostitution une sorte de comédie, même avec ce désavantage, que le théatre offre, représente, enseigne, embellit avec le plus grand éclat le crime, que les autres ne font que commettre en secret avec ignominie : l’un est le vice hydeux & dans les ténèbres, l’autre le vice paré de graces & couvert de gloire. […] Thomas ajoute que si on y représente des choses indécentes ou capables de porter au péché, turpium vel ad peccatum provocantium, on pèche en les regardant avec plaisir ; ce plaisir & ce goût peuvent être si grands, que le péché sera mortel : Tanta potest exhiberi libido ut sit mortale. […] La vue des spectacles ne doit pas être une curiosité mauvaise : c’est un amusement agréable & naturel ; l’homme aime naturellement à voir peindre & représenter, comme le dit Aristote. […] Il parle de différens métiers, Peintres, Musiciens, Jongleurs, &c. il décide qu’un Peintre qui représente des nudités ou autres choses indécentes, pèche grievement. […] Thomas, contre les fausses interprétations que le relâchement lui a données, & après avoir démontré combien les spectacles sont contraires aux divines Ecritures, combien ils sont dangereux en effet, & dans le sujet des pieces, & dans la maniere de les représenter, dans les Actrices, les danses, les masques, vices communs à tous les théatres, qui rendent même la scène moderne plus obscène que les scènes Grecque & Romaine, malgré le voile de l’équivoque dont on la couvre, & le mariage qui est le dénouement de l’intrigue, il conclud que les Acteurs & les Actrices sont dans un état de péché mortel & de damnation.
Lorsque les Italiens et les Anglais apprennent que nous flétrissons de la plus grande infamie un art dans lequel nous excellons, qu’on excommunie des personnes gagées par le Roi, que l’on condamne comme impie un spectacle représenté dans des couvents, qu’on déshonore des pièces où Louis XIV et Louis XV ont été acteurs, qu’on déclare œuvre du démon des pièces reçues par des Magistrats et représentées devant une Reine vertueuse, quand des étrangers apprennent cette insolence et ce manque de respect à l’autorité royale, cette barbarie gothique, qu’on ose nommer sévérité chrétienne, peuvent-ils concevoir que nos lois autorisent un art déclaré infâme, ou qu’on ose couvrir d’infamie un art autorisé par les lois, récompensé par les Souverains, cultivé par les plus grands hommes, et qu’on trouve chez le même Libraire l’impertinent libelle du Père le Brun à côté des ouvrages immortels de Corneille, Racine, Molière ?
Ils se préparoient à les représenter : on fit sentir au poéte qu’il étoit indécent que les ouvrages d’un religieux fussent joués sur le théatre public. Il obtint une défense de les représenter : cette défense fut leur tombeau ; elles n’auroient pas réussi, & on n’en a plus parlé. […] Nombre de ses confreres ont fait des comédies, toute la Société en faisoit représenter ouvertement, Port-Royal a traduit Térence : mais la Rue étoit prédicateur ; il sentoit que le théatre contrastoit trop avec la chaire, qu’il lui faisoit tort, & détruisoit le bien que pouvoient produire ses sermons. […] Toute la vie n’est qu’une piece de théatre, dont Dieu distribue les rôles dans les états où il nous place : ne songeons qu’à bien représenter, pour obtenir la récompense éternelle. […] Il est surprenant qu’en observant ces regles pour les spectacles publics, on se permettre d’en représenter dans les couvens ; quoiqu’à la vérité moins licencieux, ils inspirent le même goût & produisent les mêmes effets.
Madame la Chanceliere Pontchartrain, à qui elle étoit attachée, lui représenta combien la comédie étoit opposée à la religion. […] On devoit représenter dans leur Couvent la Zaïre de Voltaire, les rôles étoient appris, les Actrices exercées, les habits préparés, la ville invitée, lorsque l’Evêque, Prélat rempli de religion, & de la plus grande régularité, en fut instruit, & défendit de la représenter. […] Toute la ville eut beau solliciter, il fut inflexible, Zaïre ne fut point représentée. […] Les Acteurs, qui étoient grands Seigneurs & petits maîtres, refuserent de la représenter. […] Porée a composé & fait représenter bien des pieces, il est vrai, sans amour).
Il est inutile de dire pour justifier les Comédies et les Romans, qu'on n'y représente que des passions légitimes ; car encore que le mariage fasse un bon usage de la concupiscence, elle est néanmoins en soi toujours mauvaise et déréglée ; et il n'est pas permis de l'exciter en soi ni dans les autres.
On ne le représente pas autrement, et si l'on compare les estampes du théâtre avec celles qui sont répandues dans le livre d'Erasme, on sera embarrassé de dire quel a été le plagiaire de l'autre. […] C'est une folie que des hommes et des femmes montent tous les jours sur des planches pour se donner en spectacle, c'est une folie que des êtres raisonnables passent leur vie à apprendre par cœur, à représenter des fables. […] C'est une folie de se fatiguer, se tourmenter, crier, pleurer, gémir, contrefaire sa voix, chercher des attitudes, faire des mouvements, pour représenter des contes, peindre des folies, des vices, une courtisane, un fripon, un misérable, un ivrogne, se casser la tête, mettre son esprit à la torture, pour trouver ce qu'a pu dire une Reine des Scythes, un Empereur dans la lune, un Grec amoureux à sa Laïs, un Pourceaugnac à son Apothicaire : « Turpe est difficiles habere nugas stultus labor est ineptiarum. […] De là des danses de toute espèce, légères, graves, majestueuses, badines, bouffonnes, etc. qui peignent les mouvements de l'âme, des danses de Guerriers, de Bergers, de Paysans, de Furies, de Dieux, de Démons, de Cyclopes, d'Indiens, de Sauvages, de Mores, de Turcs, qui caractérisent les professions et les peuples ; de là ces mouvements compassés de la tête, des pieds, des bras, des mains, etc. qui tous doivent se réunir de concert pour former les traits du tableau ; de là tous les divers habits et parures analogues à ce qu'on veut représenter, mais qui tous élégants, dégagés, propres, conservent et rendent saillante la taille et la forme du corps, qu'ils laissent admirer ; de là cette souplesse moelleuse, cette mobilité coulante, cette marche gracieuse, cette symmétrie des pas, ces figures entrelaçées, cette espèce de labyrinthe où à tout moment on se perd et on se retrouve ; de là ces innombrables combinaisons de plusieurs danseurs qui se cherchent, se fuient, s'embarrassent, se dégagent, se parlent par gestes, varient à tous les moments la scène, mais qui dans tous leurs mouvements les plus compliqués, toujours soumis au coup d'archet, semblent n'agir que par la même impulsion.
Il y a des Arts, me dira-t-on, qu’on met au rang des libéraux, dont les maîtres travaillent comme le Comédien, à représenter l’ouvrage des autres. […] Outre que nous avons des piéces de Théatre qui n’y on jamais paru & qui se font lire ; les Poëte du siécle dernier, & du nôtre, ne seroient pas moins en grande réputation, quand on n’auroit pas représenté leur poëmes. […] Enfin, insistera-t-on, si le comédien représente l’ouvrage du Poête, celui-ci ne retrace dans son Poëme qu’une action passée, qu’il tire de l’Histoire, ou même d’anciens auteurs qui l’ont traitée avant lui.
Il est certain que la République d'Athènes n'a jamais rien prononcé contre ceux qui représentaient sur la Scène les Comédies et les Tragédies, ni contre ceux-là même qui dansaient les Mimes les plus ridicules, qui jouaient les farces les moins honnêtes, et qui faisaient les bouffonneries les plus insolentes, qu'elle a toujours considérés comme les suppôts de Bacchus dévoués à son service, employés à la pompe de ses cérémonies, et qualifiés Technites, c'est-à-dire, Artisans, Ouvriers et Ministres de ce faux Dieu ; elle ne rendit jamais les uns ni les autres incapables d'aucunes charges de l'Etat, et ne voulut point les priver des droits les plus honorables de leur Bourgeoisie. […] Ainsi Tertullien appelle les Mimes des têtes infâmes et sans honneur, et ne dit rien de ceux qui représentaient les Poèmes Dramatiques. […] Nous avons établi trois sortes d'Acteurs qui n'avaient rien de commun avec les Mimes, Planipèdes, Histrions ou Farceurs ; et j'ajoute que les plus nobles de tous étaient les Tragédiens, tant pour la grandeur des matières qu'ils traitaient, que pour les personnes illustres qu'ils représentaient, et la manière sérieuse dont ils agissaient.
Parmi cette foule de méchantes raisons, je m’arrête aux principales, car il serait impossible de les rapporter toutes, on allègue que la comédie ou tragédie est une peinture, et une représentation fidèle d’une action, ou plutôt de quelque événement dans sa substance et dans ses circonstances, et qu’elle n’est différente de la lecture de l’histoire, que nul ne s’avisera de soutenir être défendue, qu’en ce qu’elle représente d’une manière vive animée, et pour ainsi dire personnelle, ce que l’autre ne raconte que comme passé, et d’une manière morte et sans action. […] Sinon un vain plaisir qui sera d’autant plus vif que la pièce tracera plus fidèlement le portrait de nos maladies secrètes, dont elle est l’attrait et la pâture, « plena, comme dit saint Augustin, fomitibus miseriarum mearum », j’avoue que l’histoire intéresse de même le lecteur dans les actions qu’elle représente, et qu’il est malaisé de lire la Romaine, sans détester les cruautés de Marius et de Sylla, la profonde dissimulation de Tibère, aimer la clémence d’Auguste, sans grossir le parti de Pompée contre César, mais quelle erreur de ne savoir pas distinguer entre l’art de décrire les méchantes actions pour en inspirer de l’horreur, et celui de peindre des passions tendres, agréables, délicates, d’une manière qui en fasse goûter le plaisir, ne doit-on pas avoir quelque honte de confondre deux choses si opposées ? […] Plusieurs excès qui excluent du Ciel y sont transformés en vertus, la passion de vengeance qui a si longtemps entretenu la fureur brutale des duels s’y voit non seulement justifiée, mais louée, la patience qui ferait souffrir une injure sans la repousser, serait traitée de lâcheté, de bassesse d’âme et d’infamie, des sentiments impies ou dénaturés qui ne seraient capables que d’inspirer de l’horreur s’ils étaient représentés tels qu’ils sont, produisent un effet tout contraire, et attirent l’affection plutôt que l’indignation par le tour ingénieux de l’auteur et par le moyen du fard dont il les peint.
S’ils disent que la leur n’est point mercenaire, à quelle occasion exigent-ils argent à bonne et grosse somme de ceux auxquels ils donnent leur tragédie à représenter, somme qui se monte le plus souvent à trois et quatre cents écus ? […] Mais, diront-ils, vos représentations, qui ne touchent que les Rois, les Princes et les monarques, élevant tantôt un et déprimant tantôt l’autre, [ne] sont-elles point de mauvaise odeur au nez de leurs semblables qui les voient et entendent représenter ? […] Car, puisque la terre en sa circonférence n’est qu’un théâtre, et les citoyens d’icelle que les acteursam, qui y représentent diversement leur personnagean, comme il a plu au Tout-Puissant les leur approprierao, vous ne pouvez faire que la comédie soit sans monde, ni le monde sans comédie.
Il est inutile de dire, pour justifier les Comédies et les Romans, qu'on n'y représente que des passions légitimes et qui ont pour fin le mariage; car encore que le mariage fasse un bon usage de la concupiscence, elle est néanmoins en soi toujours mauvaise et déréglée ; et il n'est pas permis de l'exciter, ni dans soi-même, ni dans les autres.
une des raisons de condamner le théâtre en général ; parce que, la coutume régulièrement ne permettant pas d’y produire les femmes, leurs personnages étaient représentés par des hommes, qui devaient par conséquent, non seulement prendre l’habit et la figure, mais encore exprimer les cris, les emportements, et les faiblesses de ce sexe : ce que ce philosophe trouvait si indigne, qu’il ne lui eût fallu que cette raison pour condamner la comédie.
A fin de terminer ce cinquième Livre par quelque chose d’utile, je vais hazarder des réfléxions sur les divers sentimens qu’éprouvent les Spectateurs d’un Poème dramatique ; je vais tâcher de découvrir les causes de l’intérêt qu’ils prennent aux aventures fabuleuses représentées sur la Scène, & au plaisir qu’ils ressentent à une Tragédie, quoiqu’elle les pénètre de la plus vive douleur, & qu’elle leur fasse souvent répandue des larmes. […] On suit d’un œil aussi curieux, & aussi inquiet le Personnage représenté au Théâtre, que si l’on contemplait dans le monde ses folies ou ses infortunes.
Parce qu'on n'y représente que les objets de la concupiscence, et que tout ce qu'on y entend, tout ce qu'on y voit, tend à détruire l'amour de Dieu, et à faire naître l'amour du monde dans le cœur des Spectateurs. […] « C'est le monde avec tous ses charmes, et toutes ses pompes qu'on y représente dans toutes les comédies.
Pour peu que vous réfléchissiez sur tout ce qu’on y représente, vous reconnaîtrez aisément que les plaisirs du théâtre sont entièrement opposés à la morale évangélique, incompatibles avec l’esprit de piété qui doit animer tous les chrétiens, et qu’ils présentent encore aujourd’hui tous les dangers qui les ont fait condamner par les saints Pères. […] Les comédiens ne pouvant être revêtus que d’une sainteté romanesque, sont incapables d’exprimer et de persuader les vertus héroïques des saints : il ne sied point à des comédiennes de prêcher la modestie et la décence et de représenter l’innocence des vierges.
[NDA] Si une position ne convient pas plus à l’essence d’une chose qu’une autre ; si une disposition de nos organes n’est pas plus convenable qu’une autre aux fonctions de notre âme ; si un mouvement quelconque des rayons solaires n’est pas plus propre qu’un autre à représenter dans nos yeux l’image des choses que nous voyons, comment pourrons-nous nous décider, lorsque les différentes positions d’un objet, les diverses dispositions de nos organes, et la variété des mouvements de ce fluide subtil, qui fait la lumière, nous feront voir, toucher et goûter différemment un même objet ? […] [NDE] Pièce de Delille de Drevetière, comédie en trois actes, représentée pour la première fois par les Comédiens italiens en 1722.
Ceux qui composent ou qui représentent des pièces de théâtre vraiment obscènes, sans aucun doute pèchent mortellement. […] Si les pièces ne sont pas notablement obscènes et qu’elles ne soient pas représentées d’une manière indécente, il n’y a point de péché mortel à y assister, suivant Sanchez, saint Liguori, Mgr Bouvier, Mgr Gousset, et plusieurs théologiens étrangers, sauf toujours tout danger particulier et tout scandale. […] « Le spectacle par lui-même n’est point mauvais, dit Mgr Gousset ; on ne peut donc le condamner d’une manière absolue, mais il est plus ou moins dangereux suivant les circonstances et l’objet des pièces qu’on y joue ; on ne peut donc approuver ceux qui ont l’habitude de le fréquenter : on doit même l’interdire à toutes les personnes pour lesquelles il devient une occasion prochaine de péché mortel. » Suivant les Instructions sur le Rituel de Toulon, fort connues et fort estimées d’ailleurs, « on doit regarder comme occasion prochaine de péché mortel, l’assistance à la comédie, à l’opéra et à tous les spectacles que représentent les comédiens et les bateleurs, et, sans aucune distinction, tous ceux de même espèce qui montent sur le théâtre pour le divertissement public ». […] Voici ce qu’il en dit : « Comme les fauteurs des comédiens soutiennent que saint Thomas leur est favorable, en ce qu’il semble dire que la profession des comédiens n’est pas mauvaise de sa nature, et que l’on peut même contribuer à leur subsistance pourvu que ce soit d’une manière modérée…, il est nécessaire que l’on sache que ce saint docteur n’entend pas parler des comédies telles que les dépeignent les conciles et les Pères, et telles qu’on les représente encore aujourd’hui, où on ne voit qu’intrigues de mariages, ou d’amourettes et que des paroles équivoques, qui ne tendent qu’à exciter ou à entretenir les passions les plus honteuses. […] Il est donc vrai de dire qu’il ne parle que des seuls jeux de théâtre, qui, comme il le dit, sont en quelque manière utiles ou nécessaires au soulagement des peines de la vie, entre lesquels il met les représentations de chasse… Cet ange de l’école n’a donc garde d’enseigner qu’on puisse assister aux comédies dont nous parlons, ni qu’on puisse rien donner à ceux qui les représentent, puisque tout au contraire il les condamne lui-même avec saint Augustin, peu après les paroles qu’objectent les fauteurs de la comédie.
Comme on n'y représente que des galanteries ou des aventures extraordinaires, et que les discours de ceux qui y parlent sont assez éloignés de ceux dont on use dans les affaires sérieuses; on y prend insensiblement une disposition d'esprit toute romanesque, on se remplit la tête de héros et d'héroïnes ; et les femmes principalement y voyant les adorations qu'on y rend à celles de leur sexe, dont elles voient l'image et la pratique dans les compagnies de divertissement, où de jeunes gens leur débitent ce qu'ils ont appris dans les Romans, et les traitent en Nymphes et Déesses, s'impriment tellement dans la fantaisie cette sorte de vie, que les petites affaires de leur ménage leur deviennent insupportables; et quand elles reviennent dans leurs maisons avec cet esprit évaporé et tout plein de ces folies, elles y trouvent tout désagréable, et surtout leurs maris qui, étant occupés de leurs affaires ne sont pas toujours en humeur de leur rendre ces complaisances ridicules, qu'on rend aux femmes dans les Comédies, dans les Romans et dans la vie romanesque.
Comme on n'y représente que des galanteries ou des aventures extraordinaires, et que les discours de ceux qui y parlent sont assez éloignés de ceux dont on use dans la vie commune;on y prend insensiblement une disposition d'esprit toute de Roman; on se remplit la tête de Héros et d'Héroïnes ; et les femmes principalement prenant plaisir aux adorations qu'on y rend à celles de leur sexe, dont elles voient l'image et la pratique dans les compagnies de divertissement, où de jeunes gens leur débitent ce qu'ils ont appris des Romans, et les traitent en Nymphes et Déesses, s'impriment tellement dans la fantaisie cette sorte de vie, que les petites affaires de leur ménage leur deviennent insupportables.
Enfin il conclut par une instruction morale, en remontrant aux chrétiens, qu’ils ne doivent chercher d’autre plaisir sur la terre, que celui d’une bonne conscience ; et en les exhortant à se représenter souvent à eux-mêmes le plus grand de tous les spectacles, qui est celui du Jugement dernier.
Desmares, du bon effet que devaient y produire les pièces qui ont un but moral ; vous soutenez que l’autorité en laisse représenter d’autres : c’est à l’autorité à répondre. […] J’avais invoqué les autorités religieuses, et vous ne contestez point que des cardinaux et des Jésuites aient composé des pièces de théâtre ; mais, quoique celles dont j’ai parlé, aient été représentées dans des maisons d’éducation et par conséquent devant des ecclésiastiques respectables et fort instruits, ce qu’on ne rencontre pas partout, vous répondez « le clergé ne s’abuse pas au point de croire que chacun de ses membres soit une divinité infaillible. » Je reconnais avec vous qu’il serait plus que. ridicule de croire à la divinité du clergé ; cependant un Pape est infaillible, du moins en bon catholique vous devez le penser : or, j’ai cité le Pape Léon X, qui faisait jouer des pièces de théâtre dans son palais, et vous avez glissé sur cette citation…. […] Ainsi vous vous trompez, et si vous voulez consulter là-dessus le dernier des secrétaires de l’évêché vous en serez convaincu, lorsque vous avancez que les conciles n’étaient composés que de vieillards : on s’y faisait représenter par procureur, plusieurs évêques (et tous les évêques n’ont pas 80 ans) étaient accompagnés par des théologiens qui disputaient pour eux, et, dans les premiers tems surtout, on y était si ingambe qu’on s’y battait, en pleine assemblée, comme à Cirthe, à Carthage et à Ephèse.
L’étalage que Satan ose mettre sous les yeux du Sauveur représente les illusions du théatre, dont l’Ange des ténèbres fascine l’esprit. […] C’est là où le Démon forge les traits de feu qui enflamment la convoitise, & où la mort entre par tous les sens ; où l’on apprend le crime en le voyant ; où l’image des choses qu’on représente, fait de malheureuses impressions qui ne s’effacent presque jamais ; où une intrigue d’amour, de vengeance, ou de quelque autre passion, représentée avec adresse, est une amorce pour le même vice ; où les plaisirs qu’on goûte en voyant les ressorts que le péché met en œuvre, devient un appât pour le commettre.
86,) avec beaucoup d’application & d’exactitude, qui ait trait à la Comédie, hors une interdiction vague aux Clercs de s’y produire, comme Acteurs, & de représenter dans les Eglises. […] Le sieur de la M** avoit d’autres principes dans la tête quand il a composé son Mémoire : Au milieu de votre troupe, Mademoiselle (que je crois copiée d’après celle dont Scarron raconte les Aventures dans le Roman Comique) je me représente le vénérable Jurisconsulte que vous introduisez, pour y faire trophée de son sçavoir contre les censures qui vous lient : il triomphe à peu de frais, aucun des Auditeurs n’est en état de le contredire ; il peut sans aucun risque avancer autant de contre-sens, d’Anachronismes1, de citations fausses, qu’il lui plaira : c’est assez qu’il débite force loix pour éblouir, qu’il vomisse du Latin à grands flots, & s’exprime en bons termes de Palais, avec un déluge de paroles : Dans ce cercle de Sénateurs de nouvelle fabrique, feu M. de Noailles, Auteur prétendu de leur Excommunication, est fort maltraité ; le Clergé de France, surtout les Auteurs de la réclamation, n’ont pas eu beau jeu ; enfin on a concédé à l’Apologiste, sans la moindre repugnance, le titre de Docteur de l’Eglise : on l’a proclamé l’Interpréte des Loix, l’appui de l’État, la lumiere du monde entier, tandis qu’il érigeoit la troupe en Académie Royale, la faisant marcher de pair avec les premiers Académiciens de l’europe. […] Prélat, de représenter devant le peuple la vénérable Passion de Jesus-Christ, les glorieux combats des Martyrs, les actions édifiantes des saints Personnages ; mais la malice des hommes ayant infecté ces Exercices, de maniere qu’ils sont devenus un sujet de risée & de mépris pour les uns, une pierre de scandale pour les autres ; c’est pourquoi nous avons statué que désormais aucuns des Mystéres de la religion, ni rien de tout ce qui concerne la gloire des Saints, ne soient représentés, soit que le Spectacle se produise en un Temple ou dans une maison profane : on se contentera de narrer les pieux événemens, & de porter les fidéles à imiter, à vénérer, à invoquer ceux dont ils apprendront les vertus & les miracles.
Il arrive aussi que le Spectateur est tout étonné de voir représenter avec ce qu’on lui a promis, des choses aux quelles il ne s’attendait pas ; ce mêlange de choses qui n’ont que peu de rapport les unes aux autres, est cause qu’il ne fait où fixer son attention. […] Je trouve encore d’autres défauts dans la Pièce dont il s’agit ; c’est que le titre me fait attendre un Fermier : j’ai lieu de croire qu’il sera peint tel que je me représente les gens de la campagne ; & point du tout. […] Je voudrais bien sçavoir ce qu’on penserait d’un Auteur, qui représenterait le Capitaine, ou l’Inspecteur des chasses de la forêt de Fontainebleau, logé dans une misérable chaumière. […] Mais je le répette, tant que les Acteurs ne sortent point du Théâtre, je m’obstine à voir en eux les personnages qu’ils représentaient.
C’étoient des pieces de société, représentées par les jeunes gens dans les maisons particulieres, extrêmement libres, elles plurent ; & pour plaire aussi, le théatre public les imita, comme il paroît par le théatre de Térence, sur-tout de Plaute. […] Les François, qui en ont peu, ont mis tout naturellement en jeu les valets & les soubrettes ; & pour mieux jouer leur rôle, les représentent toujours vicieux, avec un empire absolu sur leurs jeunes maîtres, ne sachant que conseiller le mal, & s’employer pour l’exécuter. […] Il est vrai que dans ce siecle le goût du spectacle est extrême ; non-seulement on y mène les jeunes gens, mais on les forme dès l’enfance à la déclamation théatrale, comme faisant partie de la bonne éducation, on joue des pieces dans les Collèges, les Séminaires, les Couvents, chez les Seigneurs, chez les Bourgeois, & par une inconséquence de conduite incroyable les mères les plus sévères, qui ne vont ni ne laissent aller leurs filles à la comédie, y assistent & leur laissent voir représenter sur les théatres de société les pieces de Moliere, & même des parades plus licentieuses que la comédie publique, comme si c’étoient les murs, les décorations, les habits, qui méritent leur censure, non les pieces où se trouve le plus grand danger, & qui ont le plus besoin de réforme, pour en faire un divertissement innocent & même instructif. […] S’il se dérange, & qu’on soit obligé de le congédier, il sortira sans récompense. 2.° L’amour fera exclus de toutes les pieces, à moins qu’il n’y soit puni & représenté avec horreur, comme les passions brutales de la haine & de la vengeance. 3.° On examinera les anciennes pieces, & on ne retiendra que celles qui ont ce caractère, ou qui du moins pourront être corrigées, & devenir propres à corriger les mœurs, faire aimer la vertu, & inspirer une bonne morale. 4.° Il n’y aura point de femme dans la troupe qui ne soit mariée & ne vive avec son mari. […] Sans doute le spectacle ne fait pas partie de notre religion, nous n’adorons pas les Décesses du Paganisme ; mais on représente leurs aventures, on en fait les mêmes éloges, on leur adresse les mêmes prieres, mêmes Prêtres, mêmes cérémonies.
Tous les rôles, les incidens, les discours, les saillies, le moindre trait, tout semble fait exprès pour représenter le caractère dominant. […] Ces grands mots, goûté des étrangers, bien appréciés, veulent dire que quelque amateur en a orné son cabinet, quelque plagiaire en a pillé des scènes, quelque savans l’a lu, comme il a lu Sophocle ; mais on ne représente ses tragédies sur aucun Théatre étranger. Le Cid, comme un phénomène qui frappa par sa nouveauté, & intéressa par sa persécution, fut traduit en plusieurs langues : Fontenelle ne dit pas qu’il fut représenté. […] Après avoir fait un pompeux éloge de la morale de Moliere, Fagan, dans son Apologie du Théatre, ajoute : Il y a des exceptions à faire, le Roi a dû établir des Censeurs pour examiner les pieces avant de les représenter, afin qu’elles soient plus châtiées que celles de Moliere. […] Les farces Italiennes plus nombreuses, plus fréquemment représentées, vallent la plûpart des siennes.
Il n’est pas nécessaire de dire que ceux qui le représentent, sont à plus forte raison enveloppés dans l’anathème : « Qui die solemni, omisso ecclesiastico conventu, ad spectacula vadit excommunicetur. » Ce canon est rapporté par Yves de Chartres (Pag. […] Des personnes dévotes, dans le goût du temps, tournèrent ces amusements du côté de la piété, et représentèrent les mystères de la religion, les actions des Saints, des moralités. […] Laurent, plus zélés pour les pauvres, offrirent de donner sans abonnement, sans déduction des frais, le sixième de leur entière recette, si l’on voulait leur permettre de jouer de petites pièces ; ce qui forma la matière d’un grand procès avec la Comédie Française, lequel dura plusieurs années, occasionna bien des arrêts, et ne fut enfin terminé que lorsque abandonnant (par charité) l’intérêt des pauvres, les Acteurs forains traitèrent avec la Comédie Française, et en obtinrent la permission de représenter de petites pièces, qu’ils achetèrent très chèrement. […] Les Comédiens représentaient que ce spectacle, quoique étranger, tronqué, passager, leur faisait tort, en diminuant le nombre des spectateurs, qu’ils n’avaient pas besoin de lettres patentes, que dans les plaisirs du Roi, bal, comédie, etc., il suffit que le Prince marque son goût, sans aucune formalité. […] Les Acteurs de la Foire ne pouvant pas représenter même des scènes détachées, se réduisirent aux monologues et aux scènes muettes.
Boisrobert écrivait régulièrement, Corneille répondait ; il représentait avec de grands compliments, qu’« un si petit objet n’était pas digne de l’Académie, qu’un libelle qui ne méritait pas de réponse ne méritait pas de jugement », qu’une si grande complaisance autoriserait la jalousie, qu’on importunerait tous les jours l’Académie, et que dès qu’il paraîtrait quelque chose sur le théâtre, le moindre Poète se croirait en droit de faire un procès à l’Auteur devant son tribunal. […] Les Académiciens, fort embarrassés, représentaient, « que la Compagnie, qui ne faisait que de naître, ne devait pas se rendre odieuse par un jugement qui peut-être déplairait aux deux parties, et ne pouvait manquer d’en désobliger au moins une, et une grande partie de la France ; qu’à peine pouvait-on souffrir sur la simple imagination qu’elle prît quelque empire sur la langue, que serait-ce si elle entreprenait de l’exercer sur un ouvrage qui avait l’approbation publique ? […] C’est aux dépens du Roi que furent bâtis la ville et le château de Richelieu, auxquels il a donné son nom ; aux dépens du Roi que fut bâti le Palais Royal, qu’il nomma Palais Cardinal, expression que Balzac soutenait n’être d’aucune langue, mais un vrai barbarisme en grammaire comme en modestie, et qui fait l’inscription du portail, dénomination que par son testament il ordonna que la maison porterait ; aux dépens du Roi qu’il bâtit la salle du Spectacle, pour représenter la chère Mirame ; aux dépens du Roi qu’il bâtit la Sorbonne, dont il se dit seul fondateur, et où l’on voit son mausolée. […] Ainsi de la même main le Poète Cardinal bâtit l’Eglise de Sorbonne et celle de Richelieu, et les théâtres dans ses maisons de ville et de campagne ; il fait paraître la Conduite à la perfection, et compose Mirame, l’Europe, les Tuileries ; fait des livres de controverse, et fait faire la critique du Cid ; il a à ses gages des troupes de Comédiens et des Missionnaires, nomme des Evêques et choisit des Actrices, prend la Rochelle pour abattre le Calvinisme en France, et fait ravager l’Allemagne par les Luthériens ; élève au plus haut point l’autorité royale, et soutient la République de Hollande ; fait décapiter, sous prétexte de révolte, Chalais, Marillac, Montmorency, Cinq-Mars, et révolter le Portugal contre l’Espagne ; fait condamner Richer pour avoir attaqué l’autorité du Pape, et fait menacer le Pape de se soustraire à son autorité par l’érection d’un Patriarche ; et pour terminer la pièce, il protestait à sa mort qu’il n’avait jamais agi que pour la gloire de Dieu, même allant à la comédie, composant des pièces, les faisant représenter, bâtissant dans sa maison un théâtre. […] Si telle fut l’intention, si telle est la gloire de Richelieu, n’est-ce pas avec raison que toutes les vertus qui sont représentées à son mausolée, versent des larmes, non sur sa mort, mais sur sa vie et son ministère ?
S’il leur faut des louanges dignes de leurs mérites, imitez ce Dieu dont vous avez la langue et l’esprit : faites-les vous-même, ainsi que d’une seule bague il ôte et envoie le sommeil, si des Grâces qui égalent celles qu’ils portent vous les devez figurer ; car c’est vous qui êtes peinte en ces beaux et rares vers, qui ont dépouillé le Parnasse de ses fleurs, et fait une Iris en terre pour recevoir l’image de votre Soleil, qui se tire lui-même ; parce qu’aucun peintre ne le peut représenter.
Devant & derriere la chaise, on voyoit des enseignes au bout d’une perche, où étoient représentés des rats, dansant sur la corde. […] C’étoit un de ces tableaux où par les regles de la perspective ces traits bizarres, regardés dans un certain point de vue, représentent un objet régulier. […] Le premier est un feu d’artifice, qui avec quelque personnage muet qu’on y mêle, représente une action. On peut ainsi représenter les tourmens de l’enfer, l’embrasement de Sodome, la fournaise de Babilone, & les trois enfans qui y furent jetés, la mort d’Hercule, la défaite des Titans, &c. […] C’est insulter ces deux époux, de représenter à la fête de leur mariage, pour les divertir, des désordres qui y seront à jamais inconnus.
De violens efforts qu’il avoit fait pour représenter les fureurs d’Oreste dans Andromaque, en furent la cause. […] Ce Poëte, je ne sais pourquoi, est représenté tout nud. […] On peut de mille manieres envisager & représenter le même ridicule, & faire de très-bonnes comédies sans imiter Moliere. […] La Mythologie est pleine de ces insensées métamorphoses, que l’on lit avec plaisir, pour lesquelles on a une sorte de respect, qu’on représente sur le théatre, qu’on chante dans nos poësies. […] Tel est l’état de la comédie aux Indes, à la Chine, au Japon ; les troupes se rendent dans les maisons, on les fait représenter comme on veut.
Une ame ferme & paisible, étant toujours égale & uniforme, est très-difficile à représenter. […] Un Spectateur quand il est en larmes n’examine point si les Vers qui le font pleurer sont harmonieux ou bien rimés, ni même si l’on parle en Vers, & la Poësie Dramatique n’est faite que pour être représentée. […] J’avoue que le Poëme Dramatique est fait pour être représenté, & je soutiens en même tems qu’il n’est jamais bon, quand il ne se fait pas lire. […] Combien de fois le lieu où nos Tragédies sont représentées, a-t-il été arrosé de larmes ! […] Evremond qui voyoit représenter les Chefs-d’œuvres de Quinaut & de Lully, déclare qu’à la Représentation d’un Opera il tombe toujours en langueur, & que le seul plaisir qui lui reste, est l’espérance de le voir bientôt finir.
L’expression est l’art de représenter par des signes reçus des idées ou des actions passées, de les rendre sensibles par le langage, comme les couleurs les font revivre dans un Tableau. […] Un Auteur qui a mis tous ses soins à faire un bon Poëme, peut jetter un coup d’œil sur celui qui doit en représenter le Héros.
On y voit, dit Saint Augustin3, les images de nos miseres & de nos désordres4 ; c’est une peinture de la vie humaine où l’on représente au naturel ses vices & ses foiblesses. […] « Tous ces grands divertissemens sont dangereux, dit M. de la Rochefoucault, on sort du Spectacle le cœur si rempli de toutes les douceurs de l’amour, & l’esprit si persuadé de son innocence, qu’on est tout préparé à recevoir ses premieres impressions, ou plutôt à chercher les occasions de les faire naître dans le cœur de quelqu’un, pour recevoir les mêmes plaisirs, & les mêmes sacrifices que l’on a vû si bien représentés sur le Théâtre.
« On prétend que l’utilité de cette piéce sera très-grande, parce qu’elle accoutumera le monde à se mieux précautionner contre les friponneries des Procureurs, & parce qu’elle corrigera de leurs mauvaises habitudes les Procureurs mal-honnêtes gens ; rien n’étant plus propre, dit-on, à guérir les maladies de l’ame, qu’une Comédie qui en représente finement le ridicule. […] Si la Tragédie représente des parricides, il faut convenir avec Lactance2 que la Comédie n’est qu’un tissu de galanteries scandaleuses ; on y voit des intrigues ingenieuses & séduisantes, un jeu de passions qui gagnent le cœur des Spectateurs, en charmant leur esprit par la pompe & les graces de leur langage.
« Le grand écueil de tous les hommes et surtout des jeunes gens est de vouloir éprouver si ce qu’on leur représente comme dangereux l’est autant qu’on le dit. […] « Si on haïssait sa propre injustice, on aurait horreur de tout ce qui la représente, et l’on regarderait comme ses ennemis tous ceux qui s’efforceraient de nous la faire paraître aimable : mais on ne veut point guérir, et l’on veut néanmoins sentir de la joie.
Il y a des Villes qui depuis le matin jusqu'au soir repaissent leurs yeux de divers Spectacles des Comédiens, et qui ne se lassent point d'employer un si longtemps à écouter des vers lascifs et licencieux, qui remplissent les esprits d'ordures, et il y a même des personnes qui appellent ces peuples heureux, en ce que quittant leurs affaires, et les occupations nécessaires pour l'entretien de la vie, ils passent les journées entières dans l'oisiveté et dans la volupté, ne considérant pas que le Théâtre où l'on représente ces Spectacles honteux, est l'Ecole commune et publique de l'impureté pour ceux qui s'assemblent ce lieu infâme.
Les troupes qui y étoient dispersées y faisoient représenter les jeux qui étoient le plus en usage à Rome, c’est-à-dire, ceux du Cirque, ceux des Pantomimes & les Mimes. […] Ces Pieces profanes parurent plus tard en Angleterre : la premiere qui y fut donnée, eut lieu le 7 Mai 1520 ; & c’étoit une Comédie de Plaute qui fut représentée. […] Des devoirs inviolables chez les Payens mêmes, n’y étoient point représentés comme autant d’assujettissemens tyranniques. […] Cet auguste Tribunal les défendit par ses Arrêts des 9 Décembre 1541 & 19 Novembre 1548, & on ne vit plus représenter que des sujets profanes. […] Lorsque les Confreres de la Passion ne purent plus représenter les Mysteres, ils céderent leur privilege à une troupe de Comédiens qu’on appelloit les Enfans sans souci.
Si l'on ne parlait jamais de ceux qui se battent en duel, que comme de gens insensés et ridicules comme ils le sont en effet ; si l'on ne représentait jamais ce fantôme d'honneur qui est leur idole, que comme une chimère et une folie ; si l'on avait soin de ne former jamais d'image de la vengeance que comme d'une action basse et pleine de lâcheté, les mouvements que sentirait une personne offensée seraient infiniment plus lents: mais ce qui les aigrit et les rend plus vifs, c'est l'impression fausse qu'il y a de la lâcheté à souffrir une injure.
Si l'on ne parlait jamais de ceux qui se battent en duel, que comme des gens insensés et ridicules, comme ils le sont en effet ; si l'on ne représentait jamais ce fantôme d'honneur qui est leur idole, que comme une chimère et une folie ; si l'on avait soin de ne former jamais d'image de la vengeance que comme d'une action basse et pleine de lâcheté; les mouvements que sentirait une personne offensée seraient infiniment plus lents.
IL faut ici remarquer qu’en la Règle n’est défendu au Tertiaires d’assister à toutes sortes de Spectacles ou Comédies, comme aussi à toutes sortes de Banquets : Mais seulement à ceux qui sont ordinairement accompagné de quelque déshonnêteté,c insolence, vanité ou désordre : d’ou vient que quand quelque Comédie se représente par les Etudiants aux Ecoles bien morigenéesd sur quelque Histoire ou vie de quelque Saint, il est bien permis aux Tertiaires d’y assister, comme aussi aux Banquets honorables, et au noces de leurs plus proches parents, et ce avec toute modestie et honnêteté, fuyant ce qui pourrait ressentir quelque vanité indécente.
Cette tirade d’éloquence, ou plutôt ce lieu commun de deux pages représente parfaitement un poète qui se fâche. […] Il me semble qu’eux-mêmes s’en expliquent assez, et qu’ils font consister tout leur art et toute leur industrie à toucher l’âme, à l’attendrir, à imprimer dans le cœur de leurs lecteurs toutes les passions qu’ils peignent dans les personnes qu’ils représentent : c’est-à-dire à rendre semblables à leurs héros, ceux qui doivent regarder Jésus-Christ comme leur modèle, et se rendre semblables à lui. […] Vous vous êtes souvenu qu’on avait dit quelque part, que « le soin qu’on prend de couvrir des passions d’un voile d’honnêteté ne sert qu’à les rendre plus dangereuses »j ; et sans savoir trop bien ce que cela signifie, vous avez cru que vous vous sauveriez par là, comme si, en retranchant les libertés des comédies de Térence, on avait rendu les passions qui y sont représentées plus dangereuses en les couvrant d’un voile d’honnêteté. […] Ces dernières nous émeuvent d’ordinaire tout autrement, parce qu’elles sont prises sur notre air et sur notre tour ; que les personnes qu’elles nous représentent sont faites comme celles avec qui nous vivons, et que presque tout ce que nous y voyons, ou nous prépare à recevoir les impressions de quelque chose de semblable que nous trouverons bientôt, ou renouvelle celles que nous avons déjà reçues.
En tout ce qu’il a dit pour reprendre les actes indignes et les abus qui se sont commis lors que le monde était en la plus obscure nuit de ses ténèbres, et l’idolâtrie au dernier degré de l’erreur, aucun Catholique n’y veut contredire, ayant la vérité pour guide, et la vertu pour fin, ils y ajouteront encore ; mais il apprendra s’il lui plaît que leur intention ne fut jamais de représenter aux fêtes des Saints les jeux des Païens pour faire revivre leurs abominations. […] Nous serions dignes d’un reproche éternel, si elles étaient telles qu’il les représente, et nos Pasteurs nous banniraient des Sacrements, comme indignes de porter le glorieux titre de Chrétiens, s’il y avait quelque reste de celles qui sont condamnées tant par les Papes que les Empereurs ; s’ils ont retenu le nom de Scène et de Théâtre, et autres mots, ils en ont rejetté le vice. […] La Comédie représente la diversité des mœurs vicieuses ou vertueuses, aussi a-t-elle été toujours recommandée ».
Que pour les inciter aux actions généreuses et hardies on leur fait apprendre des rôles de vers pour les représenter puis après aux yeux du monde ? […] Et qui oserait estimer les Clercs du Palais gens de peu d’honneur pour représenter la cause grasse, la veille du premier Mercredi de Carêmef ? […] Il y a non seulement des farces indifférentes, mais honnêtes ; et si on demande combien il y a de Comédies honnêtes, on peut répondre qu’il y en a autant que d’actions honnêtes parmi les hommes : que si ce qui suit la Comédie peut être plus proprement appelé le tableau des actions humaines, si par hasard on y représente quelque chose qui choque la modestie, combien les actions en effet sont-elles plus odieuses, dont les Comédies ne sont que le tableau ?
On trouvait qu’ils représentaient au naturel bien des gens : mais personne ne s’y reconnaissait, et ce qu’on apprenait avec eux, c’était à se moquer les uns des autres. […] On lui montrera que l’imagination est la mère de la Poésie, que ce qui fait que les Poètes sont Poètes, c’est que leur cerveau est disposé de manière que le cours des esprits dont ils ont abondance en plie facilement les fibres ; et en y gravant de nouvelles traces toujours larges et profondes, en réveille une in finité d’autres déjà faites ; que cela leur fait naître une infinité de fantômes dont ils se jouent, et fait en même temps qu’ils représentent toutes choses au-delà du naturel. […] Mais dîtes-moi, je vous prie, ce qu’il doit savoir afin de rendre la vérité aimable aux autres, s’il est quelquefois obligé de la leur représenter.
Ce cantique ne respire qu’un amour céleste, et cependant parce qu’il y est représenté sous la figure d’un amour humain, on défendait la lecture de ce divin poème à la jeunesse : aujourd’hui on ne craint point de l’inviter à voir soupirer des amants pour le plaisir seulement de les voir s’aimer, et pour goûter les douceurs d’une folle passion.
L'esprit y est tout occupé des objets extérieurs, et entièrement enivré des folies qu'il y voit représenter, et par conséquent hors de l'état de la vigilance chrétienne nécessaire pour éviter les tentations, et comme un roseau capable d'être emporté de toutes sortes de vents.
Le premier, qui était né en Cilicie, imagina de représenter, par le seul secours de la Danse, des actions fortes & pathétiques. […] La Danse, considérée comme l’art de porter le corps avec grâce, avec aisance, dégagement, & le moins de fatigue possible, est un Art libéral, & une science nécessaire dans une bonne éducation : la Danse considérée, comme l’Art représenter par des mouvemens & des attitudes, quoique moins utile & moins louable, a son degré de mérite, comme fesant partie du Comédisme : il est une troisième sorte de Danse, qui consiste à voltiger sur une corde, avec ou sans contrepoids ; cette Danse était connue des Grecs 1345 ans avant J.
Et saint Basile dit encore sur le même sujet : « C’est pour notre avantage, et pour notre utilité, que nous faisons avec solennité la mémoire des Martyrs ; car ils n’ont pas besoin de nos louanges, qui ne répondent jamais à leur mérite ; et ils ont une entière félicite, et une parfaite gloire en Dieu, dont ils jouissent ; mais c’est nous, qui avons besoin de nous représenter la conduite qu’ils ont tenue, pour parvenir à l’état bienheureux qu’ils possèdent ; afin de nous rendre dignes, par l’imitation fidèle de leur vie, de participer un jour à leur bonheur. » In serm. de Gordio mar. […] Que celui de vous, qui sera proche de quelque Eglise, s’y rende promptement ; et que pendant ces jours, il répande son âme devant Dieu par les prières, et par les larmes : que vos yeux et vos mains soient pendant tout ce jour étendues vers Dieu ; parce que c’est le jour qui représente le repos éternel, et de Dieu et des âmes saintes en Dieu, c’est ce jour qui dans la Loi et dans les Prophètes, a été figuré par le septième jour, qu’on appelait le Sabbat.
Et c’est ce qui prouve le grand tort qu’ont la plupart des Poètes, qui représentent l’amour sur la Scène, plutôt comme une vertu, que comme une passion. […] Les quatre sortes de sentiments que je viens d’indiquer sont tels que, s’ils étaient mis sur la Scène avec tout l’appareil propre à en faire valoir l’intérêt, ils ne pourraient manquer de remplir l’objet que l’on doit se proposer, qui est de corriger et d’instruire ; mais on ne saurait disconvenir que la passion de l’amour, ainsi qu’on a coutume de nous la représenter, ne produise des effets tout contraires.
Les jeux Mégaliens où l’on représentait des comédies, comme il paraît dans Térence, étaient consacrés à Cybèle, que les poètes nomment la grand-mère des dieux, et en grec Μεγάλη. […] Dans ces derniers, on représentait des comédies de la dernière indécence, comme je le dirai plus bas.
La manière de représenter les hommes, au Théâtre, n’est-elle pas bien capable de faire distinguer au Peuple les Titus, les Aurèle, les Antonin, les Henri IV des Néron, des Caligula, des Maximien, et des Borgia ? […] Les Comédiens font métier de se contrefaire fa , et s’il est parmi eux quelques honnêtes gens, ils auraient horreur de ressembler aux personnages qu’ils représentent quelquefois : donc il est honteux, pour eux, de se charger de ces rôles et l’obligation dans laquelle ils sont de se contrefaire, les avilit. […] Ce Répertoire général est divisé par colonnes, avec ces titres : l. noms des Personnages de la Pièce, 2. qualité des rôles, 3. noms des Acteurs qui doivent les représenter, 4. noms des Acteurs qui les doivent représenter en cas de nécessité. […] Les premiers spectacles qui parurent en France furent édifiants ; aussi leurs Acteurs furent-ils honorés de titres et de privilèges : ils ne représentaient que les Mystères ou le Martyre de quelque Saint : devenus moins dévots et plus avares, ils affermèrent leur Théâtre à des Farceurs infâmes ; on leur reproche quelque part à eux-mêmes d’avoir allié des spectacles impudiques et des scènes lascives aux objets les plus dignes de vénération. […] Vous voulez ici faire craindre au Public qu’ils ne soient ce qu’ils représentent.
L'esprit y est tout occupé des objets extérieurs, et entièrement enivré des folies que l'on y voit représenter, et par conséquent hors de l'état de la vigilance chrétienne, nécessaire pour résister aux tentations, et comme un roseau capable d'être emporté par toutes sortes de vents.
Je voudrois qu’on la lui représentât aujourd’hui. […] Ne peut-on représenter à Londres une Tragédie sans y mal parler des François ? […] Catilina est représenté comme un illustre scélérat, mais non pas comme un grand homme. […] J’y vais voir l’image des mœurs, il faut qu’on me la représente fidellement. […] Voyons comment vous nous les représentez.
Mais en faveur de Cyrus on représenta la délivrance d’Andromede. […] Je fis représenter les vices ennemis de la société ; on auroit été choqué des préceptes, on écoute, en s’amusant, une morale sublime qui éclaire & corrige. […] on fait représenter devant lui, pour le tromper, une prétendue Comédie en deux ou trois scenes, où la fille se marie, & ce mariage subsiste ; idée qui a été plusieurs fois imitée. […] Cependant ces deux pieces, qui sont misérables, ont eu des succès, & sont quelque temps restées au Théatre, mais enfin on en a eu honte, & elles ne sont plus représentées. […] D’abord représentées à Sceaux, elles y reçutent les plus grands applaudissement.
» Or il est prouvé que les pièces de Plaute et de Terence, ne sont pas plus licencieuses, que plusieurs des drames que l’on représente aujourd’hui. […] Il ne dit pas : Celui-là périra, qui est dans le péril ; mais celui qui l’aime et s’y expose. » « Qui que vous soyez donc, qui plaidez la cause des Théâtres, vous n’éviterez pas le Jugement de Dieu. » Fénélon, dans sa Lettre à l’Académie française, s’explique en ces termes : « Je ne souhaite pas qu’on perfectionne les Spectacles, où l’on ne représente les passions corrompues que pour les allumer. […] « Rien de plus indigne d’un Enfant de Dieu et d’un membre de Jésus-Christ, que le métier de Comédien, où des hommes et des femmes représentent des passions de haine, de colère, d’ambition, de vengeance, et principalement d’amour. […] Toute leur vie est occupée à apprendre, à répéter ou à représenter l’image de quelque vice. […] Comme la fréquentation des Spectacles et des lieux publics d’amusement, tend malheureusement à détourner les Peuples de l’attention qu’il leur est indispensable de donner aux moyens nécessaires pour la défense de leur pays et le maintien de leurs libertés : Arrêté que toutes personnes qui, exerçant un emploi quelconque sous les Etats-Unis, représenteront sur un Théâtre, y feront représenter, ou encourageront par leur présence ou autrement ces sortes de Spectacles seront jugées indignes de conserver leur emploi, et en conséquence destituée.
Une estampe qui représente le principal événement, & des vignettes ou des culs-de-lampe pour les scenes intéressantes, a quelque chose de mesquin. […] Il faloit que chaque scene intéressante eût son estampe, & représentât ce qu’on lit. […] On représenta l’Opéra de Phaëton, autre que celui de Lulli. […] La perspective y représente trois grands chemins d’une lieue, bordés de bâtimens. […] Une piece bien représentée gagnera une bataille, 60 jeunes éleves formerent un orchestre, & jouerent deux pieces avec toutes les graces, l’intelligence, la vérité, la précision imaginables (on ne fait pas mieux à Paris), sans compter les divertissemens, les ballets de toute espece.
Si la comédie est du genre héroïque, si elle représente des hommes d’une condition plus élevée, elle est soumise aux mêmes entraves que la tragédie9. […] Appeler ainsi la salle dans laquelle on les représente, c’est prendre le contenant pour le contenu21. […] Aussi quelle licence, quelle hardiesse, aux directeurs des petits spectacles, d’oser se permettre de représenter, comme au théâtre François, des pieces vraisemblables. […] d’Aranda, ambassadeur d’Espagne, a fait défendre dom Carlos, tragédie de M. le Febvre, jouée chez Madame de Montesson, et que les comédiens François alloient représenter sur leur théâtre. […] Si MM. les comédiens François ont imaginé, en se donnant eux-mêmes un titre exclusif, empêcher la liberté du théâtre, ils se sont trompés ; elle est nécessaire pour les progrès de l’art dramatique, et pour que les Pieces de la Nation soient dignement représentées.
Les Tragédies sont toutes pleines d’Idoles et Ombres des Ames des morts représentées sur le Théâtre.
Rien de plus naturel aux pièces de théâtre, que d’exciter les passions, qui y sont représentées ; car c’est là le dessein formel de ceux qui les composent, de ceux qui les récitent, de ceux qui les écoutent. […] » Nos spectacles nous ont appris à ne plus rougir des passions, dit l’illustre d’Aguesseau, les charmes des spectacles et les actions qui y sont représentées, étouffent peu à peu les remords de la conscience, en apaisent les scrupules et en effacent insensiblement cette pudeur importune. […] Dans sa lettre à l’Académie, l’illustre Fénélon dit en parlant des spectacles, qu’on n’y représente les passions que pour les allumer. » Et dans son traité sur l’éducation des filles, il parle ainsi : « Souvent on voit des parents, qui mènent eux-mêmes leurs enfants aux spectacles publics et à d’autres divertissements, qui ne peuvent manquer de les dégoûter de la vie sérieuse et occupée dans laquelle ces parents veulent les engager, ainsi mêlent-ils le poison avec l’aliment salutaire… ils leur donnent le goût des passions. […] Monseigneur de La Motte répondit au roi « qu’à la vérité il aimait les pauvres, mais pas cependant jusqu’à la folie. » Vers 1760, Monseigneur Caisotti, évêque d’Ostie en Italie, engagea tous les curés et les prédicateurs de son diocèse à le seconder à prémunir leurs paroissiens et leurs compatriotes contre les spectacles. « C’est là, dit l’évêque de Namur en 1815, c’est là que règne seul l’ennemi de Dieu, le prince des ténèbres ; ces lieux, la vive école des passions, où les auteurs, les acteurs, les spectateurs conspirent tous à les exciter, où l’on ne les représente dans tous leurs charmes ou dans toute leur force que pour les rendre moins odieuses ; que dis-je ! […] Le mal, le danger est dans la pensée intime, qui représente tous les crimes comme des faiblesses presque pardonnables, presque louables, et dont on a soin de doter généreusement le héros ou l’héroïne.
Sophocle vient à son tour, & pour peindre Venus Déesse de la volupté, il la représente se contemplant dans un miroir & s’inondant des parfums. Au contraire il représente Pallas, Déesse de la sagesse, qui n’a de miroir que son Egide, & des parfums que l’huile dont on oint les Athletes. […] Tous les romans emploient les mêmes traits dans le tableau de leurs héroïnes, & les Actrices sur le théatre pour les représenter. […] Le lac de misere, cette boue, cette ordure, ce cloaque où l’homme est plongé, représentent le pêcheur enfoncé dans le vice, il en est couvert, & s’y enfonce de plus en plus. Rien n’est plus sale que la corruption du péché ; il représente l’état du genre humain depuis le péché originel comme une fosse profonde où les hommes rouloient de vice en vice, d’erreur en erreur, mal extrême d’où le Sauveur l’a délivré par sa mort, & délivre chaque pécheur par la grace du Baptême & de la pénitence, espece de bain salutaire où tout est lavé.
Supposons qu’en Italie les Courtisannes s’avisassent d’élever un théatre & d’y représenter des comédies, qui pourroit, sans exposer son honneur & sa conscience, assister aux spectacles de ces Courtisannes Actrices ? […] On a plus d’une fois essayé de les représenter, de montrer le parterre à lui-même, en le copiant sur le théatre ; mais il est inutile d’en faire les frais, on n’a qu’à tourner la tête, on verra les deux comédies. […] On ajoûte avec charité : Ces scrupuleux réformateurs savent bien se dédommager en particulier ; ces loges grillées d’où ils voient sans être vûs, ces lectures de tous les Poëtes dramatiques ; ces pieces représentées dans les Couvens & les Collèges disent assez qu’ils ne croient pas le mal aussi grand qu’ils le disent. […] Les autres Théatristes morts subitement on sans sacremens, sans repentance, sont allés représenter dans l’autre vie une tragédie dont ils ne verront jamais le dénouement. […] Ils portèrent leurs plaintes aux premiers Gentilshommes de la chambre, & leur représentèrent qu’ils ne pouvoient conserver dans leur corps (si honorable) un homme déshonoré (un Comédien peut-il être déshonoré ?).
Sa vie, qu’on a donnée depuis peu en histoire & en lettres, rapporte qu’elle aimoit si fort le Grec & les antiquités, & avoit tant d’envie de paroître savante, qu’elle fit représenter en Grec les tragédies de Sophocle, auxquelles pour lui faire la Cour on applaudissoit sans les entendre, & auxquelles malgré leur beauté les Dames Suédoises s’ennuyoient fort ; que Meibomius ayant donné au public des recherches sur la musique des anciens, & Naudé ayant écrit sur la danse Grecque & Romaine, elle obligea ces deux Auteurs, qui étoient à sa Cour, de réaliser leurs opinions, & de joindre la pratique à la théorie. […] La chose étoit facile, Rosalie étoit belle, dansoit bien, n’étoit pas cruelle, & exercée par la Comtesse, qui pendant ces trois ans avoit en chez elle un théatre de société, où elle avoit représenté une infinité de pieces, en avoit fait une très-bonne Actrice. […] Plusieurs font des mascarades en charrette, & représentent mille choses différentes. […] Un cœur qui aime Dieu par-dessus toutes choses peut-il se réjouir de voir représenter l’offense de Dieu ? […] Pour exprimer ce double talent, un Peintre l’a représenté entre les deux Muses de la tragédie & de la comédie, ayant un air gai du côté de Thalie, & un air triste du côté de Melpomène, riant & pleurant à même temps ; & ce qu’il y a de singulier, ce n’est point un effort d’imagination, un trait de génie dans le Peintre, ce portrait ressemblant est fait d’après nature.
Cette promesse de Mercure nous représente encore fort bien le personnage que fait le P. de la Chaise, lorsqu’il donne de bonnes paroles à ces Loups béants, qui lui font la Cour pour obtenir des Bénéfices par son entremise.
Car sa raison est que Dieu ne veut pas que ceux qui sont dedans les Enfers retournent comptere ce qui se fait en ces lieux, afin d’obvier au malheur qui en pourrait sourdre : Les damnés qui retourneraient au monde, souffleraient ès entrailles des hommes la fureur et la rage des tourments qu’ils endurent : Ainsi les Poètes Tragiques feignent que l’Ame de Thyeste sortant des Enfers, brouille et renverse tout l’état de sa famille, met en trouble sa maison, acharnef Egiste à vengeance, incite à fureur Clytemnestre, lui souffle le venin de jalousie en l’Ame, et la fait meurtrière de son mari : et l’acte commis, pousse Oreste à venger sur Egiste et sa mère la mort de son père, et les tuer tous deux, afin qu’après leur mort, il fût tourmenté de l’horrible regard des Erinyes et Furies qui lui représentent devant les yeux l’énormité et gravité du délit perpétré.
On n’est pas instruit de même sur la Comédie, parce qu’elle ne fut pas d’abord recherchée comme la Tragédie, & que le Magistrat ne commença que fort tard à donner le Chœur aux Poëtes Comiques, c’est-à-dire, à accepter leurs Piéces pour être représentées : c’étoit ce qu’on appelloit donner le Chœur. […] Les premiers masques ayant été changez en une espece de globe qui enfermoit toute la tête, on y reconnut plusieurs utilités ; ils rendoient le son de la voix plus éclatant ; ils déguisoient les hommes qui jouoient les rôles de femmes, & ils servoient à cacher la basse physionomie d’un Acteur destiné a représenter un Dieu ou un Heros ; car tous ces masques si hideux qui nous sont restés, ne servoient qu’à la Comédie, & l’usage en commença, suivant le Scholiaste d’Aristophane, sous les successeurs d’Alexandre. […] La Tragédie étant devenue une Action grande mise en dialogue & représentée avec magnificence, enchanta les Athéniens. […] La Danse destinée à la Tragédie, avoit la dignité qui convenoit à l’Action représentée, aux prieres qu’on faisoit aux Dieux, & à la morale qu’on débitoit.
Mais en reconnaissant que la Comédie peut & doit être un correctif salutaire, j’ose dire que la manière de représenter en a jusqu’ici retardé, ou même anéanti les effets. […] Le jeune-homme qui vient d’être ému, troublé, transporté hors de lui-même, s’est mis à la place de l’Amant ; il a cru voir dans celle qui représentait l’Amante, l’objet qui doit faire sa félicité ; son âme abusée ; s’est élancée vers l’Actrice ; la personne a fait oublier le rôle : dès le lendemain, il court revoir son enchanteresse, & dans la bouche de cette femme, les maximes saines, salutaires ne font plus que parer des charmes de la vertu l’idole de la volupté. […] Il sourit aux duperies, à l’ingénuité, aux plaisanteries, il s’amuse presqu’innocemment ; car il n’est pas assez affecté pour que ses passions soient émues d’une manière dangereuse : mais qu’il voye représenter ces mêmes Pièces ; l’Alcmène séduisante, dont il se peint vivement la situation, qu’une gaze claire couvre à peine lorsqu’on la suppose entre les bras d’un Amant-dieu, remue furieusement son jeune cœur. […] La Grèce libre put voir avec satisfaction la fabuleuse histoire des familles de ses Rois qui s’étaient entredétruites, lorsqu’on représentait les Œdipe, les Agamemnon, les Atrée, les Eriphile : mais avec quels transports n’admira-t-elle pas, dans les Perses d’Eschyle, les Héros auxquels elle devait sa liberté ?
Qu’on ne me dise plus, que l’application de la Comedie du tems de ces Peres à celle qui se représente aujourd’hui, ne soit pas juste : car en outre que j’en ai montré la justesse, les personnes, qui ont eu le malheur de frequenter la Comedie moderne, l’appellent aussi bien « une école de libertinage & de vanité », que ces Saints l’appellerent de leur tems. Saint Charles Borromée, qui vivoit à la fin du seiziéme siécle, eût le même sentiment de celle qu’on représenta alors ; & nous dit : « Qu’entre les entretiens publics de corruption étoient les spectacles de la Comedie, & que tout ceci étoit contraire à la morale chrétienne. » Personne ne nous prouvera, que le Theatre du dixseptiéme, ou du dixhuitiéme siécle soit plus chaste que dans le siécle de ce Saint : je suis donc en droit de pouvoir suivre le commandement du même Saint, qui veut, que ceux qui ont quelque charge des ames, en inspirent de l’horreur à celles que Dieu leur a confiées ; qu’ils leur montrent, que ces spectacles sont les malheureuses sources des calamités publiques, qui accablent le peuple chrétien ; & qu’ils alleguent à cet effét l’autorité des Saints Chrysostome, & Cyprien, & du grand Salvien. Quoique les fauteurs de la Comedie prétendent, que l’Ange de l’Ecole permet de donner quelque chose aux Comediens, ils ne me montreront jamais, qu’il parle des Comedies qu’on représente aujourd’hui sur le theatre public & mercenaire. […] Quelle esperance pourra avoir cette personne, que le raison de la celeste lumiere éclairera son esprit dans l’oraison, & que la dureté de son cœur sera amollie par l’operation du Saint Esprit, tandis qu’elle ne remporte de la Comedie qu’une tête pleine de douces & charmantes idées, remplie de toutes les passions folles & imaginaires, que la declamation d’un Comedien folâtre lui a pû représenter ?
Il s’occupe, dit on, à représenter les actions héroïques, à multiplier les exemples du vice puni, & de la vertu recompensée. […] On sort du spectacle, le cœur si rempli des douceurs de l’amour ; & l’esprit si persuadé de son innocence ; qu’on est tout préparé à recevoir ses premieres impressions, ou plûtôt à chercher l’occasion de les faire naître dans le cœur de quelqu’un, pour recevoir les mêmes plaisirs, & les mêmes sacrifices que l’on a vûs si bien représentés sur le Théatre.
Dumesnil que nous avons obligation de l’avoir vu représenter. […] Soit que l’Acteur représente lui-même, soit qu’il suive l’action d’un autre ; l’usage du Théatre ne peut lui être d’aucune utilité, quand il s’agit de juger d’une piéce dramatique.
En louant à outrance la méthode qu’ils semblent avoir le plus généralement adoptée, j’ai cherché à montrer davantage le ridicule qu’il y a de représenter sur la scène des objets dégoûtans & trivials : Le bon goût a dû prescrire en tout tems de prêter une certaine noblesse à ces objets trop méprisables au Théâtre des honnête gens, lorsqu’ils sont dépeints dans toute leur bassesse ; c’est ce que doivent se proposer les Poètes du nouveau genre qui voudront faire agir des gens obscurs, pris dans le menu Peuple.
Ces doux et invincibles penchants de l’inclination, ainsi qu’on les représente, c’est ce qu’on veut faire sentir et ce qu’on veut rendre aimable ; c’est-à-dire, qu’on veut rendre aimable une servitude qui est l’effet du péché, qui porte au péché ; et on flatte une passion qu’on ne peut mettre sous le joug que par des combats, qui font gémir les fidèles, même au milieu des remèdes.
Quand il venait à considérer que ces personnages qu’on représentait sur les théâtres étaient la plupart ou bas ou même vicieux, il y trouvait encore plus de mal et plus de péril pour les comédiens, et il craignait que « l’imitation ne les amenât insensiblement à la chose même » Ibid.
Si on ne parlait des duellistes que comme des gens insensés, comme ils le sont en effet, si on représentait ce faux honneur comme une chimère et une folie, et la vengeance comme une action lâche, comme un crime énorme, les mouvements de colère que sentirait une personne offensée seraient infiniment plus lents ; mais ce qui les rend si vifs, c’est qu’on s’imagine qu’il y a de la lâcheté à souffrir une injure.
Les Auteurs de l’Opéra-Bouffon savent représenter les actions d’un manant : qu’un Homme de Lettres s’occupe à faire revivre Alexandre, Brutus & nos Rois les plus augustes ; eux se font gloire de nous montrer un rustaut, un simple pécheur, un Boulanger. […] Archelaus, fameux Comédien du tems de Lysimachus, Roi de Macédoine, représenta devant eux l’Andromède d’Euripide, avec tant de force & de pathétique, qu’ils furent atteints d’une frénésie qui leur fesait courir les rues en récitant les Vers de cette Pièce. […] Combien même est-il dans le monde de personnes sensées, qui disent que les titres mêmes des Opéras-Bouffons les révolte, & qu’elles ont peine à se résoudre d’aller voir représenter des Pièces qui portent sur l’affiche des noms tout à fait bas, tels que ceux de savetier, de bucheron &c. ?
Les apologistes du spectacle, qui ont voulu mettre quelques différences entre l’ancienne & la nouvelle comédie, à raison de l’ancienne grossiéreté du langage, n’en ont jamais mis, ni pu mettre sur la peinture, qui fut toujours semblable, puisqu’on n’y a jamais représenté que les mêmes choses. […] L’Opéra a son Pigmalion ; les Italiens représentent le Peintre amoureux de son modéle ; & la Comédie Françoise fait honneur au sieur de Sainte-Foix, de son Promethée ; son Deucalion & Pyrrha, où l’on voit des gens amoureux d’une statue, & des statues animées par le feu de Promethée, rendent les hommes foux d’amour, comme le sieur Anseaume dans le Peintre amoureux de son tableau. […] On s’y dit autorisé par l’action qu’on représente. […] Ce Seigneur ne vouloit pas qu’on jouât des comédies dans son hôtel ; elle appuyoit ses plaintes sur l’exemple du Cardinal Mazarin, qui en avoit fait représenter avec magnificence. […] Toutes ces scénes que des grands nous peuvent faire appeller des tragédies, & que la nature des faits rend des farces de la foire, la Duchesse en a instruit le public, dans ses mémoires, écrits par elle-même, on les trouve fort détaillés dans les œuvres de l’Epicurier Saint- Évremont son panégyriste & son amant, qui passa sa vie auprès d’elle, en Angleterre, occupé à faire en son honneur de la prose, des vers, des piéces de théatre, que la dévotion de son mari ne l’empêchoit pas de représenter.
La petite farce l’Assemblée, n’est rien moins qu’une nouveauté, ce n’est qu’une foible imitation de la critique de l’Ecole des Femmes, & de quelqu’autres divertissemens, où les comédiens se jouent eux-mêmes ; bien des poëtes en ont fait, c’est un dessein trivial ; le théatre représente la salle d’assemblée où les comédiens tiennent leurs assises, pour juger les piéces qu’on leur présente. […] Aucun nouveliste de ces pays n’en fait mention : la haute Asie, d’Hispahan à Pekin, & à Meaco fourmille de troupes de comédiens, & jamais, depuis deux mille ans, la Gazette de l’Inde, de la Chine & du Japon ne s’est avisée d’en parler ; ce n’est pas que leurs piéces ne vaillent la plupart des nôtres, & ne soient aussi bien représentées ; mais c’est qu’on ne croit pas que cet objet mérite d’occuper le public. […] Les Princes y dansoient, on composoit pour eux de mauvais vers, selon le goût courant ; c’étoit une espece de drame représenté, en masque ; Benserade & plusieurs autres s’y sont exercés, & ont été bien payés ; c’étoit toujours quelque galanterie, souvent très-licencieuse. […] Les inquiétudes, les allarmes, la dédicace, l’invitation solemnelle aux écoliers, du sieur du Rosoy, en faveur de Richard III & des trois Roses, représentées & sifflées à Toulouse, avoient sans doute leur principe dans la scéne bisarre qu’a donné depuis peu, à la comédie Françoise, un jeune auteur, homme d’esprit, mais metromane & scenomane singulier. […] L’auteur dont l’intention est bonne, n’a pas pensé qu’au tems des croisades, où il place cette aventure, il n’y avoit point de spectacle réglé où l’on pût ordonner des piéces à son gré ; que la Hongrie, dont le Roi allant à la Terre-Sainte, laissa régner le mari de cette femme ; que la Moravie, dont le Souverain fut le séducteur artificieux, étoient des pays barbares, où le théatre étoit inconnu, où il n’est guere connu encore ; ainsi le représente l’auteur de l’histoire de Jeanne de Naples, qui avoit épousé dans ce même tems, le frere du Roi d’Hongrie.
Les gens vertueux ne cesserent d’en représenter les dangers ; & ils furent enfin écoutés. […] Elles nous ont représenté qu’il en résulteroit un motif d’encouragement pour les défenseurs des mœurs. […] C’est d’y sentir son ame se livrer à l’illusion des passions qui y sont représentées. […] On vient de représenter Athalie. […] N’y représente-t-on pas toujours les passions les plus vives ?
MM. les procureurs du roi, les préfets, sous-préfets et maires, qui sont les délégués du prince, tant en ce qui concerne la justice que la police du royaume, doivent le représenter en sa qualité de protecteur des Saints Canons, et en surveiller la stricte exécution de la part des ecclésiastiques qui se rencontrent dans leur arrondissement.
Tout cela subsiste encore, & dans les tableaux qui représentent l’enfer poétique, & sur le théâtre de l’opéra, où on les fait sortir de terre, avec des torches, des cornes, de la fumée, du feu. […] Des gens graves, représentent le Seigneur, Marie, saint Pierre, Saint Jean. […] Une troupe de gens armés représentent les meurtriers ; & une grande statue creuse remuée par une personne qui y est enfermée représente le mort.
Zanetti, parmi les bustes & médailles qu’il avoit ramassées, s’étoit avisé de faire faire une suite de portraits burlesquement chargés pour les traits, la figure, le maintien de tous les Acteurs & Actrices qui avoient représenté depuis cinquante ans sur les cinq théatres publics de Venise. […] Les anciens mysteres que jouoient les Confrères de la Passion, dictés par une sincère piété, furent d’abord des actes publics de religion, ils étoient représentés sous l’autorité, & en présence des Magistrats dont la vertu ne peut être suspecte1. […] Les Comédiens avant de recevoir la piece, les spectateurs dans le temps de la représentation, les cotteries, les caffés, les soupers, les écrits après qu’elle a été représentée, tout le monde quand elle est imprimée, c’est l’histoire de tous les jours. […] Racine lui-même, qui les arrosoit de ses larmes, qui les arrachoit à ses enfans, dont la femme n’a jamais voulu, ni les voir représenter, ni les entendre lire, Racine étoit bien éloigné d’en faire un livre classique : absurdité qu’un homme sage ne sauroit avancer.
Pour rendre cette Tragédie parfaite, je voudrais retrancher jusqu’à la moindre idée d’amour dans le cœur d’Æmilie ; j’ai toujours pensé, en voyant représenter Cinna, qu’Æmilie n’aime point, et qu’elle ne respire que la vengeance ; et je suis persuadé qu’un Spectateur, qui entre dans cette pensée, regardera les plus vives expressions de l’amour d’Æmilie, comme autant de feintes auxquelles elle a recours pour engager Cinna à poignarder Auguste ; car on sait que ce sont là les armes ordinaires des femmes, lorsqu’elles veulent parvenir à leurs desseins. […] Ce n’est pas sans fondement, ou par caprice, que je conseille de faire usage de la Scène des deux petites filles dans Œdipe : j’ai représenté, il y a trente ans, une pure traduction de l’Œdipe de Sophocle ; et je sais, par expérience, le grand effet que cette Scène fit sur le Théâtre, et combien elle arracha de larmes. […] Les Modernes pourraient critiquer l’Auteur de la Tragédie de Géta ; parce que ce Prince, ainsi que Justine sa maîtresse, sont représentés trop vertueux, sans donner lieu à la compassion des Spectateurs de s’affaiblir par la vue de quelque défaut, suivant qu’ils soutiennent que les Anciens ont fait : je pense, pour moi, que les Anciens n’ont jamais songé à diminuer la compassion des Spectateurs ; car ce serait avoir entrepris de faire violence à la nature, chose qu’on ne peut leur reprocher. […] Je ne puis juger de la Tragédie de Médée, de M. de Longepierre, que par l’impression qu’elle m’a faite à la lecture, ne l’ayant jamais vue représentée : mais, si une longue expérience peut procurer cette sorte d’avantage ; j’ose dire que, par rapport à moi, la lecture ne diffère guère de la représentation.
Chaque Ville un peu considérable aurait-elle brigué la gloire d’avoir un Colisée, ou lieu propre pour représenter des Drames, si l’on avait régardé cet amusement utile comme un vain plaisir, défendu par la sagesse, & qu’on ne peut goûter sans remords ? […] Si vous proscrivez les Comédiens, méprisez donc, dèshonorez les Auteurs des Ouvrages qu’ils représentent.
Ce Gout nous a donc paru à tous, être le seul bon : ce qui est d’autant plus remarquable, que tout Poëme Dramatique ayant été fait pour plaire à une Nation, & non pas pour amuser les autres, pour être représenté dans cette Nation, & non pas pour y être lû, doit beaucoup perdre devant des Etrangers qui ne le peuvent connoître que par la lecture. […] N’étoit il pas dangereux de représenter devant le peuple, tant de crimes & d’actions cruelles.
Je remarque encore deux choses bien considérables, que le Prophète adresse aux Juges : la première est quand il les appelle « des Dieux et les fils du Souverain » : et la seconde, lors qu’il leur dit, « qu’ils mourront comme des hommes » : car par les premières paroles, il leur représente qu’ils sont revêtus de la puissance de Dieu ; que c’est de lui seul qu’ils tiennent leur autorité sur les autres, et qu’ils sont enfants de Dieu non seulement par adoption, comme le reste des hommes, en tant que unis à Dieu par la foi et par la grâce, mais encore par leur établissement dans leurs Charges, par celui qui est le seul et vrai Dieu, au pouvoir duquel ils participent. […] , qui dit que « tels spectacles d’adultères, d’homicides, de larcins, lubriquement et salement représentés, sont pernicieux et sacrilèges , et que souvent telle femme qui était allée pudique aux spectacles, en retourne impudique » : Tertullien ne doit rien sur ce sujet à saint Cyprien ; car si nous lui demandons qu’est-ce que le Théâtre ?
Aussi avertit-on que l'Acteur doit affecter une voix faible : avis singulier pour un Acteur qui représente une personne mourante. […] Si les Bérénice, les Chimène, les Cléophile, etc. et celles qui les représentent, faisaient leur confession aussi sincèrement qu'Adelaïde, elles tiendraient le même langage ; leur fierté, leur pruderie, leurs prétendus grands sentiments, ne sont que le rouge qui cache les rides et la pâleur de leur âme. […] » Il a porté la témérité jusqu'à y joindre des estampes indécentes, bien dignes du burin licencieux qui a gravé les infamies de Zélis au bain ; on y représente un amour se jouant avec l'Abbé de Rancé dans sa cellule, pour faire entendre que malgré toute sa réforme, son cœur se livre toujours au plaisir : « Serpentes avibus geminantur tigribus agni. » Autre héroïde aussi peu décente : Lettre du Comte de Comminge à sa mère, suivie d'une épître de Philomène à Progné. […] Toutes les tragédies, tous les romans sont pleins d'aventures et de décorations lugubres ; le tragique lui-même n'est qu'un sombre, il ne représente que des objets tristes et terribles, capables d'inspirer la terreur et la pitié (il n'y a que ceux là qui l'inspirent), de saisir, de déchirer, de faire verser des larmes. […] L'atelier d'un artiste qui ne représenterait que la Grèveh, serait peu fréquenté.
[I] Acteur, Comédien : personne qui fait profession de représenter des Pièces de Théâtre, composées pour l’instruction & l’amusement du Public.
C’était la coutume qu’on en annonçait la mort à l’Exarque de Ravenne qui gouvernait l’Italie sous l’Empereur qui tenait son Siège à Constantinople : Et voici comme ceux qui représentaient alors le S.
« Je vous écris, pères, et à vous, vieillards : je vous écris, jeunes gens : je vous écris, enfants ; chrétiens, tant que vous êtes, n’aimez point le monde ; car tout y est ou concupiscence de la chair, ou concupiscence des yeux, ou orgueil de la vie. » Dans ces paroles, et le monde et le théâtre qui en est l’image, sont également réprouvés : c’est le monde avec tous ses charmes et toutes ses pompes, qu’on représente dans les comédies.
Pour commencer à sentir l’utilité des spectacles, supposez Monsieur un Gouverneur homme d’esprit qui, persuadé de la bonté de ce genre d’instruction, conduit son élève à la Comédie Française, on y représente Le Joueur m. […] Il est facile de se persuader que l’affreux Damien, ni les abominables Jésuites, auteurs de l’attentat contre Sa Majesté Portugaise, ni la Marquise de Tavora, n’auraient jamais eu les idées funestes qui les ont conduits au supplice si justement mérité, s’ils avaient vu souvent représenter les Tragédies de Cinna, de Brutus, de Venise sauvée, de Catilina, et de La Mort de César z. […] Mais si vous me prouvez qu’un avare en devient plus avare pour avoir vu représenter celui de Molière, un Roi pacifique et bienfaisant, un Tyran détestable pour avoir vu représenter Atrée, un de nos Marquis plus ridicule qu’à son ordinaire pour avoir vu donner des nasardes à l’Epine dans le Joueur, et des coups de bâton à Mascarille et à Jodelet dans les Précieuses Ridicules, je conviendrai de bonne foi que le spectacle non seulement est mauvais pour les méchants, mais même je soutiendrai qu’il est dangereux pour les bons. […] On a déjà fait une pièce intitulée le Point d’honneur aq : cette pièce est de Lesage ; elle jette un si grand ridicule sur la fausse bravoure, que vous ne pourriez que souhaiter qu’on la représente plus souvent qu’on ne fait, si elle vous était plus connue. […] Cette pièce ne paraît pas avoir eu un succès bien complet, si l’on en juge par la négligence des Comédiens de Paris à la représenter, mais elle n’en est pas moins propre à prouver que les Auteurs Dramatiques d’aucune nation ne ménagent pas tant les mœurs de leur siècle et de leur pays que vous voulez vous le persuader.
Je me trouvai l’autre jour chez vôtre ami Monsieur *** Nous parlâmes sur le fatal present de la Comedie qu’on a fait à la ville : cependant, me dît-il, les fauteurs de la Comedie soûtiennent, que saint Thomas leur est favorable, en ce qu’il semble dire, que la profession des Comediens n’est pas mauvaise de sa nature, & que l’on peut même contribuer à leur subsistance, pourvû que ce soit d’une maniere moderée : j’aurois souhaité, que nôtre cher ami nous eût donné la solution à cette objection ; car quoique je sois convaincu, que cet Ange de l’Ecole n’a jamais approuvé les Comedies, telles qu’on les représente aujourd’hui ; cependant il faut le montrer à ces gens, qui se saisissent de toute couleur pour couvrir leur passion.
Si votre maxime est reçue, il ne faudra plus non seulement voir représenter ni Comédie ni Tragédie, mais il n’en faudra plus lire aucune ; il ne faudra plus lire ni Terence, ni Sophocle, ni Homère, ni Virgile, ni Théocrite : et voilà ce que demandait Julien l’Apostat, et qui lui attira cette épouvantable diffamation de la part des Pères de l’Eglise.
Ces paroles ne frappent pas moins le théâtre que le monde qui en est l’image : c’est le monde avec tous ses charmes et toutes ses pompes qu’on représente dans les comédies.
« Ut tamen hoc fatear, ludi quoque semina præbent Nequitiæ : tolli theatra jube. » Ovidius Ovide, devenu sage dans le cours de ses disgrâces, avait représenté à Auguste que le moyen le plus capable de réformer les mœurs de Rome était, non pas d’épurer les théâtres, mais de les détruire.
Car, avant l’âge, Alter ab undecimo tum me vix ceperat annus d, j’ai soutenu les premiers personnages ès tragédies latines de Buchanane, de Guérentef et de Muretg, qui se représentèrent en notre collège de Guyenne avec dignité.
Il falut se borner à de belles affiches, qui publierent à tous les carrefours, qu’on représenteroit la comédie de la statue de Voltaire, cette statue ; étoit gravée comme les masques, les actrices, les déesses le sont dans les affiches ordinaires ; on feroit bien de donner au public une farce qui représentât cette inauguration. […] Voltaire notre Dieu, s’écrioit on, le Dieu du goût, le Dieu de l’histoire le Dieu du théatre, le Dieu de la philosophie, voilà tous les Dieux ; c’est un vrai pantheon pour mieux représenter le Parnasse & l’Olympe ; on avoit habillé plusieurs personnes en prêtres & prétresses de différents Dieux, dont chacun célébroit son Dieu, & en portoit les attributs ; mais tous rendoient hommage au pere des Dieux, ce divin Arouet, qui leur avoit fait rendre un culte réligieux, & réunissoit en sa personne toutes leurs divines qualités. […] Il en reste des médailles, comme des Empereurs Romains, où il est représenté avec les attributs de la divinité : quels cantiques n’ont pas chanté en son honneur, les savants & les savantes, jusqu’à Madame d’Acier, dont le tendre amour pour Homere, a rempli tant de volumes, & soutenu une si rude guerre. […] Chaque estampe est accompagnée de quelques vers Latins, & d’un grand nombre de vers François, en mauvais langage, & en dialogue, entre la mort qui appelle, & la personne représentée, qui apporte les raisons pour différer ce moment fatal, & la mort inexorable qui l’entraîne.
Ma mere fit dresser chez elle un théatre, où tous les jours de congé nous la représentions. […] C’est l’éloge qu’il fait de l’infraction dans une comédie publiquement représentée & imprimée plusieurs fois. […] Cet air d’adoration est si deplacé, cette attitude, cette proximité est une occasion si prochaine de mauvais regards & de libertés criminelles que la vertu ne se les permet, ni ne les laisse représenter. […] Toute comédie de caractere doit représenter un caractere ridicule.
On représenta pour début & par préférence ; non une piece pieuse, une drame sérieux, une comédie de caractère, mais un opéra-bouffon italien, l’Amour artisan, qui fut suivi d’un ballet. […] Dans une séance où l’on devoit traiter de la religion, du gouvernement, de la police, du commerce des colonies, surpris de ne voir qu’une vingtaine sur plus de quatre cens qui devoient s’y trouver, & qui cependant, pour être plutôt libres, se hâtoient de décider promptement toutes les affaires, un des députés représenta que Milord Stanlei, dans sa maison de campagne, aux portes de Londres, donnoit une fête & une comédie champêtre qui l’emportoit sur tous les Comités & tous les Bals. […] Quatre cens cadets se sont cotisés, & avec la libéralité de la Czarine, ont fourni aux différentes représentions, qui ont duré jusqu’à la nuit : une superbe illumination & un grand bal ont terminé la fête. […] Ces deux spectacles de Scaurus & de la Czarine représentent les deux systêmes du mondes ancien & nouveau.
L’effrontée Isabelle a d’autant plus de tort, que son tuteur est représenté comme un parfaitement honnête homme, qui a eu les plus grands soins de sa pupille, y va de la meilleure foi, jusqu’à jouer le rôle d’un imbécille, & l’a toûjours passionnément aimée. […] Nous avons remarqué que George Dandin & l’Amphitrion, représentées à la Cour dans les jours brillans du règne de Madame de Montespan, étoient les apologies de l’adultère, & le faisoient passer pour un jeu dont il ne faut pas s’embarrasser, dont on doit même se faire honneur quand le Souverain des Dieux daigne être le rival. […] Il apprit par expérience, autant qu’homme du monde (c’est toûjours le grand Baile), à représenter les mauvais ménages, les maris dont le front étoit peu respecté ; les plaintes, les justifications, les brouilleries, les raccommodemens domestiques, lui fournirent la matiere de plusieurs scènes où sa femme & lui jouoient tout naturellement. […] On n’y trouvera le portrait ni des Actrices, ni des Héroïnes qu’elles représentent.
les Acteurs et les Actrices sont-ils bien propres à représenter des Saints ? […] Charles Borromée fit tous ses efforts pour abolir le théâtre à Milan ; mais n’ayant pu réussir, il obtint du moins qu’on n’y représenterait jamais des pièces tirées de l’Ecriture. […] 307.), appelle pieux et savant Jésuite, Mariana, qui a écrit aussi contre la comédie, croit que c’est un moindre mal de laisser représenter aux Comédiens des pièces profanes et galantes, que des pièces tirées des livres saints. […] Mais il a beau faire, l’opéra a rougi de la sainteté du sujet, et n’ose plus le représenter.
On voit aux Petits Pères le mausolée de Lully, sur lequel la mort est représentée tenant d’une main un flambeau renversé, et de l’autre un rideau au-dessus du buste de ce célèbre Musicien. […] Ce portrait, dicté par une juste indignation, ne représente pas moins les mœurs de l’Orateur que celles du théâtre. […] Pour pouvoir se défendre, elle devrait être affermie dans des principes d’honneur et soutenue par l’estime, et déjà comme Comédienne elle est regardée comme la copie de ce qu’elle représente, sa vertu est ordinairement au-dessous du rien, etc. » Que disons nous de plus dans tout cet ouvrage ? […] Après avoir représenté pendant plusieurs années, Izabelle abandonna son mari, et s’en retourna en Italie.
par la simple vue des choses qui se représentent sur le Théâtre D’où vient que saint Chrysostome, dit Hom. 6. sur saint Mathieu, ajoute-t-il, que les spectacles rendent ceux qui y vont effrontés et adultères. […] Car Premièrement il défendit de représenter dans les Eglises la Passion de Notre Seigneur Jésus-Christ, et le Martyre des Saints, comme l’on avait accoutumé de faire auparavant, à cause que cela donnait occasion au mépris et à la raillerie de nos mystères. […] qu’il appelle les appas des péchés, et de représenter aux peuples que ces divertissements tirent leur origine des mœurs corrompues des Païens ; combien ils sont opposés à la discipline Chrétienne : et qu’enfin ils sont la malheureuse source de toutes les calamités et misères publiques. […] Je voudrais bien savoir en vertu de quoi les jeunes gens qui font la même chose dans les Collèges, et qui représentent des personnages dans des Comédies, ne le sont pas ? […] Car outre les pièges qui ne se trouvent pas dans les Pièces que représentent des Ecoliers sous des Régents sages et pieux, c’est la nécessité qu’il y a de les accoutumer à paraître en public, qui les fait monter quelquefois sur le Théâtre, au lieu que c’est l’intérêt ou le plaisir, ou la vanité qui portent les comédiens à s’y produire.
Gresset peut-il dire que les maximes de l’Evangile sont inalliables avec l’art du Théâtre ; ne représente-t-on pas avec succès dans les Collèges des sujets tirés de l’Ecriture, n’en représente-t-on pas sur nos Théâtres publics ; l’Evangile n’a-t-il pas fourni le sujet de l’Enfant prodigue, y a-t-il donc dans la morale de cette pièce quelque chose de contraire à la morale du Christianisme, les Espagnols n’ont-ils pas leurs Auto Sacramentalesd ? […] J’ai vu à Munich représenter par les Ecoliers des Jésuites un Spectacle moitié Lyrique et moitié Dramatique, la partie Lyrique servait d’Intermède à ce dernier Poème, elle avait pour sujet le triomphe de David sur Goliath, le sujet Dramatique était la Parabole du mauvais Riche ; on peut, comme vous voyez, allier le Théâtre avec l’édification, et si les Saintes Ecritures n’offrent pas un assez grand nombre de sujets Théâtraux ce n’est pas sans doute exciter le scandale que d’en choisir dans l’histoire prophane pour les Tragédies et de puiser dans le commerce du monde des vérités morales pour en orner une Comédie. […] Je sais bien que dans quelques unes de nos pièces, on ne représente l’amour que du côté ridicule, mais on doit observer en même temps avec quelle adresse nos Auteurs ont soin de faire prévoir tous les inconvénients qui résulteront d’une union indiscrète, si l’amour naît dans l’âme de deux étourdis qui ne s’unissent que parce qu’ils sont épris de leur impertinence réciproque, on a grand soin de leur prédire une désunion prochaine, la froideur, le mépris mutuel, la coquetterie, les tracasseries, les infidélités qui de part et d’autre les autoriseront à se détester réciproquement. […] Quel plaisir pour le Public de pouvoir faire une allusion flatteuse de l’Héroïsme représenté à des Héros actuellement présents. […] Les Anciens avaient en général un très grand respect pour les femmes, mais ils marquaient ce respect en s’abstenant de les exposer au jugement du Public et croyaient honorer leur modestie, en se taisant sur leurs autres vertus etc : De là venait que dans leurs Comédies les rôles d’Amoureuses et des filles à marier ne représentaient jamais que des esclaves et des filles publiques, ils avaient une telle idée de la modestie du sexe qu’ils auraient cru manquer aux égards qu’ils lui devaient de mettre une honnête fille sur la scène, seulement en représentation.
le dessein que je me suis proposé ; venons maintenant aux lieux où l’on représente les spectacles. […] Parlons maintenant de la manière dont on représente les jeux dans le cirque. […] Autrefois s’il s’élevait quelque nouveau théâtre, qui ne fût point consacré par une dédicace solennelle, les censeurs le faisaient souvent abattre pour prévenir la corruption des mœurs, qu’ils prévoyaient devoir suivre infailliblement des actions lascives qu’on y représentait. […] mais c’est que les sacrifices qu’on offre aux idoles sont offerts aux démons qui habitent dans ces idoles ; soit qu’elles représentent les morts, ou ce qu’on appelle des Dieux. […] Ce sont ces infamies que représente, ou un Toscan par ses gestes impudiques, ou un comédien à l’aide des habits de femmes, ou un pantomime par les indécences abominables, à quoi il a accoutumé son corps dès son enfance, afin d’en donner aux autres des leçons.
Ainsi il ne me reste plus qu’à dire un mot de sa maniére d’écrire, & de représenter ses Piéces de Théâtre. […] Moliére avoit d’abord appellé Panulphe, & non pas Tartuffe, l’Imposteur représenté dans la Piéce.
Je ne le pense pas : je crois qu’on aura une idée bien plus juste de l’avare & bien plus capable de faire impression, quand on se le représentera comme un homme qui se laisse mourir de faim, & qui refuse la nourriture nécessaire à ses enfans & à ses domestiques ; comme un homme qui ne donneroit pas un écu pour racheter la vie à son voisin ; comme un homme enfin en qui l’amour de l’argent éteint toute humanité ; qui quoique très-riche refuse de marier & de donner des états à ses enfans ; qui fait tort à la société en accumulant des richesses qui devroient circuler. […] Elle peut représenter une action vertueuse, pour encourager les hommes à la pratique de la vertu, ou une action vicieuse, pour leur faire éviter le sentier du vice.
L’action Tragique qui représente de grandes révolutions & des Héros qui y prennent part, éleve merveilleusement le génie dans cette composition ; cependant il n’y a rien de si rare de nos jours, que des caractères bien soutenus. […] Celle-ci, semblables aux couleurs, donnent du relief, de la saillie à l’objet représenté.
Le Titre Second embrasse ce qui regarde les Pièces à représenter sur les nouveaux Théâtres. […] 202 Article neuf, Comment représenter les Tragédies.
Vous jugiez bien, Monsieur, que dans une cause aussi importante que celle-ci, je ne négligerais aucun de mes avantages : mais sur le ton dont je le prends, dites-vous, il ne faudra plus non seulement voir représenter ni Comédie ni Tragédie, il ne faudra pas même en lire aucune : il ne faudra plus lire ni Térence, ni Sophocle, ni Homère, ni Virgile, ni Théocrite. […] Vous avez trop de piété, Monsieur, pour vouloir en dédire Saint Augustin : mais s’il m’était permis de me citer, profane que je suis, après une autorité sacrée, j’oserais vous rappeler une tirade de ma Satire, où j’ai fait voir qu’on ne va point à la Comédie pour se rendre plus vertueux ; qu’on y va seulement dans la vue d’un délassement agréable ; qu’au contraire notre orgueil se rend quelquefois plus fier par le plaisir malin que nous sentons à détourner sur le prochain la peinture des vices qui sont représentés dans les Comédies ; qu’enfin tout le fruit qu’on en retire, c’est d’apprendre le secret d’être vicieux, sans passer pour ridicule.
Clerge, seconde l’institution des comédiens en France, pag. 88 ; fournit la chapelle de la Sainte Trinité, pour y faire jouer la comédie, pag. 91 ; paie les comédiens représentant les mystères, pag. 93 ; tolère que les farceurs représentent la Sainte Eglise, et le pape la tiare en tête, dans la comédie de Mère Sotte, pag. 99 ; remplit lui-même, dans les églises, des rôles d’acteurs et de comédiens, pag. 128 ; fait un abus de pouvoir, et commet un délit en blâmant et punissant l’exercice d’une profession instituée et protégée par les lois civiles et les diplômes de nos rois, pag. 131 ; les procureurs du roi doivent poursuivre ce délit, qui consiste dans la demande de l’abjuration, et dans le refus de sépulture, pag. 134 et suiv., et 282 ; le clergé emploie deux poids et deux mesures dans sa conduite envers les comédiens ; cette divergence tourne contre lui, par les preuves singulières qu’on en fournit, pag. 159 ; les cardinaux, princes de l’Eglise, sont les protecteurs de nos premiers comédiens, pag. 164 ; l’abbé Perrin est lui-même directeur de l’Opéra de Paris, pag. 167 ; les papes, chefs de l’Eglise, instituent des théâtres de leurs propres deniers, et les organisent, pag. 168 ; les cordeliers, les capucins, les augustins, tous prêtres de l’Eglise romaine, présentent des placets aux comédiens, pour en obtenir des aumônes, et ils promettent de prier Dieu pour le succès de leur troupe, qu’ils ont la politesse de nommer chère compagnie, pag. 175 ; les comédiens n’étant pas excommuniés dénoncés ne sont point soumis aux anathèmes de l’Eglise, et les prêtres qui les leur appliqueraient devraient être, selon les lois ecclésiastiques, suspendus de leurs fonctions, pag. 182 ; processions, messes et autres cérémonies religieuses, pratiquées par le clergé, qui sont remplies d’obscénités et de scandales, et bien plus nuisibles à la religion que les comédies, pag. 201 ; élection des archevêques et évêques des fous, dans les orgies des diacres et sous-diacres, pag. 280 ; le clergé en habits de mascarade et de théâtre, pag. […] , représentent les mystères et y joignent la farce au bout, ils sont l’origine des comédiens du troisième âge, pag. 85.
Jérémie ceux qui lui firent souffrir tant de maux ; et Zacharie les Scribes et les Pharisiens tels que la sainte Ecriture nous les représente.... […] » Que les Prédicateurs et les Théologiens, frappés de ces exemples, ne cessent point de crier contre les Spectacles, tandis que l’Eglise lance ses foudres contre les Comédiens ; qu’ils représentent le Théâtre, comme l’école de l’impureté, la nourriture des passions, l’assemblage des ruses du démon pour les réveiller, où les yeux sont environnés d’objets séducteurs, les oreilles ouvertes à des discours souvent obscènes et toujours profanes, qui infectent le cœur et l’esprit.
Enfin elle fait son message, et il le reçoit avec une joie qui le décontenance, et le jette un peu hors de son rôle : et c’est ici où l’on voit représentée mieux que nulle part ailleurs, la force de l’amour, et les grands et les beaux jeux que cette passion peut faire par les effets involontaires qu’il produit dans l’âme de toutes la plus concertée. […] Et sur cela, le Frère lui représente excellemment à son ordinaire, « qu’il sied mal à ces sortes de gens de se vanter des avantages du monde ». […] Trait inimitable, ce me semble, pour représenter l’effet de la pensée d’une chose sur un esprit convaincu de l’impossibilité de cette chose. […] Ce fut pour toutes ces raisons que nos pères, dont la simplicité avait autant de rapport avec l’Évangile, que notre raffinement en est éloigné, voulant profiter à l’édification du peuple de son inclination naturelle pour les spectacles, instituèrent premièrement la comédie pour représenter la Passion du Sauveur du monde, et semblables sujets pieux. […] Quelques-uns trouveront peut-être étrange ce que j’avance ici ; mais je les prie de n’en pas juger souverainement, qu’ils n’aient vu représenter la pièce, ou du moins de s’en remettre à ceux qui l’ont vue : car bien loin que ce que je viens d’en rapporter suffise pour cela, je doute même si sa lecture toute entière pourrait faire juger tout l’effet que produit sa représentation.
Vous ne doutez point que l'autorité des Pères de l'Eglise n'ait interdit la sacrée Communion aux Comédiens e aux Farceurs; d'où vous pouvez juger quelle peine méritent ceux qui les favorisent, Si vous vous représentez que les coupables des crimes, et leurs complices doivent être également punis.
Ces trois Acteurs convenoient que pour sauver leur art, il falloit, réformer & les Drames & ceux qui les représentent. […] Tel est dans la plus grande partie de l’Italie l’usage de faire représenter par des femmes les rôles d’hommes. […] On y représente des incestes, des parricides, des traîtres, des conjurateurs, qui devroient être ensevelis dans un éternel oubli. […] « Je ne souhaite pas, dit-il, qu’on perfectionne les Spectacles, où l’on ne représente les passions corrompues que pour les allumer. […] Puisqu’on tolere de telles licences, que ne devons-nous pas attendre à voir représenter ?
Cette jurande des comédiens en France s’appelle troupe Il sera donc libre en Autriche à tout le monde de jouer toutes sortes de pieces, en toutes les langues, de la maniere qu’on voudra ; on élevera des théatres. on assemblera des acteurs, on invitera, on représentera, on dansera, on chantera, on cabriolera : liberté entiere. […] Toutes les personnes distinguées de la cour & de la ville y étoient en habits de différens caracteres, analogues aux personnages qu’elles devoient représenter. […] J’y vis représenter une tragédie dont l’action dura trois jours ; la décoration & la déclamation, le jeu des acteurs étoient au-dessus de ce que j’attendois de ce peuple grossier. […] La capitale du Béarn fit représenter les deux pieces dont Henri IV. étoit le sujet. […] Il a pourtant retiré telle piece munie, dit-il, de l’approbation publique, & n’a plus osé la faire représenter.
Caffaro, Théatin, jusqu’à l’obliger de rétracter publiquement sa décision scandaleuse, qui permettoit de les voir représenter, & engagea le P. le Brun, de composer un grand & bel ouvrage, plein d’érudition & de piété, pour le combattre. […] C’est apparemment ce qu’a pensé le Parlement de Paris dans le réglemens peu philosophique & peu académiques qu’il a donnés aux nouveaux Colleges, en défendant d’y représenter aucune comédie. […] Le pantomime même n’oseroit le représenter il en entre autant de minutieux dans le jargon des valets, dans les nuances des sentimens, dans le ton de l’expression, dans la naïveté des pensées, dans le ton de la voix, que dans les gestes & les attitudes des pantomimes. Il ne faut pas moins de goût dans l’un que dans l’autre, pour bien choisir ce qui doit être représenté. Moliere a donc été un grand pantomime, que n’a-t-il eu le courage d’exclurre les portraits licencieux du vice, & ne représenter que les vertus pour les faire aimer & pratiquer !