Je le veux : mais il y paraît comme une belle, comme une noble faiblesse, comme la faiblesse des héros et des héroïnes ; enfin comme une faiblesse si artificieusement changée en vertu, qu’on l’admire, qu’on lui applaudit sur tous les théâtres, et qu’elle doit faire une partie si essentielle des plaisirs publics, qu’on ne peut souffrir de spectacle où non seulement elle ne soit, mais encore où elle ne règne et n’anime toute l’action.
On y voit une Veuve si sage et si réservée quitter ses modestes habits, ajouter à sa beauté naturelle tout ce que l’artifice et l’orgueil mondain peut inventer de pompeux et de charmant pour surprendre et pour séduire, aller au Camp des ennemis avec cet équipage, exposer sa vertu à la brutalité d’un vainqueur barbare, l’attendrir par le langage le plus engageant, et le plus flatteur.
dit qu'en y représentant des parricides, on y enseigne ce qu'on peut faire par l'exemple de ce qu'on a fait ; que les comédiens émeuvent les sens, qu'ils flattent les passions, et qu'ils abattent la plus forte vertu ; que quelque innocente que fût la ComédieChap. 12 des Spectaculis.
Cet acte de fanatisme a fait naître de nombreuses réflexions, et les qualités recommandables que Philippe unissait à la vertu de la bienfaisance qu’il pratiquait sans ostentation, repoussent les calomnies que des hypocrites, qui foulent à leurs pieds la charité chrétienne, se sont permis de débiter sur les circonstances de la mort de cet acteur.
Mes très chers Frères, Nous voyons avec douleur depuis quelque temps, l’affection et l’empressement que vous avez pour les Spectacles, que nous avons si souvent déclarés contraires à l’esprit du Christianisme, pernicieux aux bonnes mœurs, et féconds en mauvais exemples, où sous prétexte de représentations et de musiques innocentes par elles-mêmes, on excite les passions les plus dangereuses, et par des récits profanes et des manières indécentes, on offense la vertu des uns, et l’on corrompt celle des autres.
L’on ne saurait disconvenir, que dans l’Etat actuel de nos Acteurs & de nos Actrices, le Théâtre n’est pas à beaucoup près l’école de la vertu. […] … Non : une Actrice d’une conduite dérèglée, est, à la vérité, un scandale continuel ; sa vue seule réveille la lubricité : mais fût-elle la vertu même, elle est encore très-dangereuse n’excite-t-elle pas la passion, les desirs ? […] Dangeville fille ; excellente dans les Rôles de Soubrette : elle eut tous les talens de son état ; toutes les vertus de son sexe : Jeunes Actrices, qui nous charmez par vos attraits, prenez-la pour modèle, si vous voulez que le bonheur & l’estime publique couronnent votre brillante carriere : début 1730 ; quitté en 1763.
Elle fait l’éloge de sa religion, de ses mœurs, de sa vertu. […] Mais étant tous deux gens de théâtre, ils n’ont rien à se reprocher. » Guyot de Pitaval conclut qu’on devrait avoir plus d’indulgence pour les Comédiennes ; « car, dit-il, il est bien difficile, pour ne pas dire impossible, sans une espèce de miracle, qu’une Comédienne conserve sa vertu. […] Pour pouvoir se défendre, elle devrait être affermie dans des principes d’honneur et soutenue par l’estime, et déjà comme Comédienne elle est regardée comme la copie de ce qu’elle représente, sa vertu est ordinairement au-dessous du rien, etc. » Que disons nous de plus dans tout cet ouvrage ?
5 …………… …………… …………… …………… De tant de modes d’oppression anciens et nouveaux, de ce pouvoir effréné, toujours menaçant, de lui ôter sa place, c’est-à-dire, son pain et celui de ses enfants, il résulte incontestablement, ainsi que je viens de le dire, qu’un employé manque tout-à-fait de la sécurité la plus essentielle au bien-être ; il en résulte que, libre de droit, il est de fait l’esclave d’un homme, même sans vertu, devant lequel il doit trembler et se courber, d’un homme qui, placé fortuitement entre lui et les autorités légales de son pays, en arrête l’action à son égard, l’empêche d’en ressentir les bienfaisantes influences, et rend illusoire par conséquent la jouissance de ses droits.
Il en est arrivé de même des Poèmes Dramatiques : car depuis qu'ils ont été retirés des Théâtres anciens consacrés aux faux Dieux, ils n'ont plus été considérés comme une invention des Démons, et n'ayant plus rien de leur vieille et criminelle vénération, ils sont donnés au public, et portés jusques dans le Palais des Rois, sans aucun scrupule d'Idolâtrie ; On les regarde seulement comme les Chefs-d'œuvre d'un bel esprit ; et une parfaite imitation de la vertu des Héros, et tout ce que l'on y peut admirer sont les inventions du Poète, et le beau récit des Acteurs.
Les anciens législateurs qui ont inventé le spectacle ont moins songé à amuser ceux de leurs citoyens qui vivaient dans l’oisiveté qu’à instruire le peuple en le portant, par des exemples, à la haine du vice et à l’amour de la vertu : et effectivement, rien ne peut plus contribuer à guérir l’homme de ses défauts que de les exposer, comme on fait dans la comédie, à la risée et à la censure publique.
Ils ajoutent que ces mêmes Pères ne pouvaient imaginer, pour lors, que les Spectacles prendraient quelque jour une autre forme et deviendraient des Ecoles de la vertu, tels enfin que des Chrétiens pourraient les représenter ou y assister, sans blesser en rien ni leur conscience, ni leur religion : d’où ils concluent que les vives déclamations des Anciens Pères, contre le Théâtre de leur temps, ne prouvent rien contre les Spectacles d’aujourd’hui.
Dans des lieux destinés pour apprendre aux enfants leur religion et la vertu plus que la science, que l’on se garde bien de leur inspirer des sentiments qui y soient contraires.
Cette passion insensée qui fait des ravages incroyables dans le monde, ce feu d’enfer qui enflamme le cercle de la vie de la plupart des enfants d’Adam, l’impureté dont saint Paul ne veut pas que le nom même soit prononcé parmi des Chrétiens, parce que son image est contagieuse, ou si l’on est obligé d’en parler, ce ne doit être qu’avec horreur, qu’en la flétrissant, la traitant avec exécration comme une maladie honteuse qui ravale l’homme à la condition des bêtes, ce vice, dis-je, y est transformé en vertus, il est mis en honneur et en crédit, regardé comme une belle faiblesse dont les âmes les plus héroïques ne sont pas exemptes, et qui leur sert d’aiguillon pour entreprendre les choses les plus difficiles, on s’y remplit du plaisir qu’on se figure à aimer et à être aimé, on y ouvre son cœur aux cajoleries, on en apprend le langage, et dans les intrigues de la pièce les détestables adresses que l’auteur suggère pour réussir, or n’est-ce pas là une idolâtrie dont se souille le cœur humain ? […] Où l’on respire un air contagieux, où tous ceux qui y assistent sont ravis de se donner eux-mêmes en spectacle, où tous les sens sont assiégés et ouverts à ce qui les flatte, où les vertus Chrétiennes telles que l’humilité, la modestie, le recueillement passeraient pour ridicules.
On auroit pu supprimer encore les autres sans que la religion & la vertu eussent à verser des larmes. […] Il est ordinaire dans les Cours de tenter la vertu des Princes, & d’abuser de leur foiblesse par le poison de la volupté. […] Ainsi tout le monde est content ; il n’y a que des hommes misantropes qui se plaignent, & vont grossierement mêler le nom lugubre de la vertu à tous ces divertissemens ; mais on ne s’en embarrasse guere, ni d’eux ni de leur vertu, & leurs sombres reflexions ne seront jamais manquer la cadence à l’incomparable Guimar. […] Les ouvrages sont plus reguliers, on y met de l’ordre, on y repand de l’esprit, le style en est poli, les vers sont coulans ; harmonieux ; c’est art funeste est porté à une grande perfection, mais toujours fidele au libertinage qui lui donna l’être, & à fait sa fortune, quoique l’assaissonnant quelquefois d’une morale utile, & de quelques exemples de vertu, il n’a cessé de repandre le vice avec le plus déplorable succès.