D’un autre côté, il est des gens de bien dont la délicatesse outrée ne peut souffrir qu’on parle des vices publics, des gens d’Eglise, & nommément de leur liaison avec le théatre où ils deviennent scandaleux. […] Le Cardinal Passioneï a donné de nos jours des comédies d’une autre espece ; il avoit des talens & des lumieres, mais il étoit ennemi des Religieux, singulierement des Jésuites, avec un excès si bisarre, qu’il ne put souffrir un seul de leurs livres dans sa nombreuse Bibliotheque ; Petau, Bourdaloue, les Journaux de Trevoux, &c.
ils déchirent le sein de l’Eglise , sans doute pour se venger d’elle de ce qu’elle les a retranchés du nombre de ses enfans, & comme si l’Etat étoit coupable à leurs yeux parce qu’il est Chrétien , ou qu’il les souffre, ils conjurent la perte de l’une & de l’autre, & cherchent à les sapper par le fondement . […] Oui, dit-on, il est également du bien de la Religion & de l’Etat de souffrir de moindres maux pour en empêcher de plus grands. […] qu’il faut souffrir les vols pour empêcher les meurtres ?
Souffrez que je vous les expose. […] Les femmes, dit-il ailleurs, qui parent nos Spectacles, ne veulent point souffrir qu’on leur parle d’autre chose que d’amour ». […] C’est-là le motif qui engage même le Chef de l’Eglise à souffrir dans ses Etats l’usage des Spectacles. […] Où est l’homme, où est le sage qui sçait agir, souffrir & mourir sans foiblesse & sans ostentation ? […] Il faut souffrir sa rigueur : puisqu’elle a jugé cette distinction nécessaire, elle a ses vues ; & ce n’est pas après avoir été infractaires, que vous pouvez lui demander quelque compte ».
Les Lacédémoniens, plus sages, ne voulurent jamais souffrir le théatre dans leur ville, non plus que la République de Genève, & dûrent à cette utile police la conservation de la franchise, de la fermeté, de la pureté des mœurs qui les faisoient admirer, tandis que les Athéniens, comme Solon l’avoit prévû, devinrent si menteurs, que leur duplicité passa en proverbe.
Il semble que d’Aubignac ait prophétisé ce qui se passerait de nos jours lorsqu’il dit ; « La Comédie est demeurée parmi nous, non-seulement dans la bassesse, mais dans l’ignorance ; car elle s’est changée en cette farce, ou impertinente bouffonnerie, que nos Théâtres ont souffert ensuite du Poême Dramatique, sans art, sans partie, sans raison10. » Le nouveau Spectacle pourrait-il mieux être défini ?
Tels sont les trois genres de Comique, parmi lesquels nous ne comptons ni le Comique de mots, si fort en usage dans la Société, faible ressource des esprits sans talens, sans étude & sans goût ; ni ce Comique obscène qui n’est plus souffert sur notre Théâtre que par une forte de prescription, & auquel les honnêtes-gens ne peuvent rire sans rougir ; ni cette espèce de travestissement, où le Parodiste se traîne après l’original, pour avilir, par une imitation burlesque, l’action la plus noble, la plus touchante ; genre méprisable, dont Aristophane est l’auteur.
[NDE] En souffrent, en supportent les conséquences.
La secte ultramontaine considère que la religion, sous le point de vue qu’elle l’envisage, ne peut être maintenue et pratiquée que par la force, que par la terreur et par les supplices, tandis que la religion chrétienne, et je me fais un devoir de le répéter, est toute de paix, de douceur, et de charité : les gouvernements catholiques doivent donc être bien persuadés qu’ils n’obtiendront jamais la paix et la tranquillité, et ne feront jamais le bonheur des peuples, tant qu’ils souffriront dans leur sein, la secte ambitieuse et perturbatrice des jésuites.
Corneille de parler en ces termes : « Si mon âme à mes sens était abandonnée, Et se laissait conduire à ces impressions Que forment en naissant les belles passions. » Et l’humilité de Théâtre souffre aussi qu’elle réponde de cette sorte en un autre endroit : « Cette haute puissance à ses vertus rendue, Et si Rome et le temps m’en ont ôté le rang, Il m’en demeure encore le courage et le sang, Dans mon sort ravalé je sais vivre en Princesse Je fuis l’ambition, mais je hais la faiblesse. » Il fait voir ensuite que les passions qui ne pourraient causer que de l’horreur, si elles étaient représentées telles qu’elles sont, deviennent aimables par la manière dont elles sont exprimées.
Si le sentiment règle toujours le goût et soumet généralement l’esprit à ses affections, qui peut assurer que les obscénités que l’on souffre aujourd’hui au théâtre, en se gravant dans la mémoire, ne finissent pas par corrompre la société ?
Personne depuis les Grecs, dans aucun coin du monde, n’avoit pense de rendre des honneurs publics à des gens que les loix déclaroient infâmes, & bien loin de leur ériger des statues, les Empéreurs avoient défendu de souffrir leur portrait dans les lieux publics, (voyez livre à en entier. […] Ce n’est pas que les Hollandois n’aient des spectacles, il y a des théatres à Amsterdam, à la Haye, mais c’est plus pour les étrangers que pour eux ; leur caractère sérieux & modeste, simple & laborieux, les éloigne de ces folies ; les affaires du commerce les occupent trop pour leur en laisser le loisir ; mais ils esprésentent à la frivolité, à la pétulance des François qui sont chez eux en grand nombre, & à l’habitude qu’ils ont prise de la comédie ; ils ont porté leurs antiques mœurs dans leurs colonies, & n’ont pas voulu y introduire cette cause de libertinage, comme à Geneve, où malgré l’éloquence de M. d’Alembert, les mœurs un peu Suisses, n’ont jamais souffert le théatre, non plus que dans les Cantons.
Cette idée ridicule le conduisit à ne souffrir aucune innovation dans la musique. […] Tandis que la Grèce l’adorait comme la source du bonheur & de la sagesse, les Egyptiens ne la souffraient que parce qu’on la regardait comme une preuve de la grandeur & des richesses d’un état.
Il ne souffre point l’oisiveté, la molesse, le jeu, les parties du plaisir, en liant à des enfans qu’il faut élever, & des domestiques qu’il faut gouverner, au ménage qu’il faut régler, à un mari qu’il faut satisfaire, à une parenté qu’il faut ménager.
Susanne résiste à d’infames vieillards, Joseph se refuse aux poursuites d’une femme impudique, Jean-Baptiste souffre le martyre pour la pureté.