Page 217 M. de Sénancourt regarde comme une bassesse d’expression d’insinuer qu’un évêque, dînant avec des pauvres, serait tout aussi respecté qu’à la table d’un ministre.
Mais si nous considérons en quel point est aujourd’hui la Comédie, nous trouverons qu’elle n’a aucune marque de l’antiquité, et ceux qui la professent, témoignent par la probité de leur vie, et par la représentation de leurs actions, qu’elle est entièrement dépouillée de toutes les qualités, qui pouvaient la noter d’infamie, et son mérite, l’ayant montée au plus haut degré de sa perfection, s’est mise dans une telle considération, auprès des Rois et des Princes, qu’elle leur tient lieu d’une sérieuse occupation ; Aussi se fait-elle avec tant de modestie, par l’innocence de ses poèmes, qu’elle dépite l’envie d’en offenser la réputation ; Je dirai de plus qu’elle est tellement Civile en ses diversités, qu’elle contraint les plus Religieux de lui donner des louanges, et chacun confesse que la force de ses charmes est si grande, qu’il faut être privé de sens commun pour en choquer la bonne odeurk ; Si l’on regarde le nombre de ses qualités, on verra, que c’est le tableau des plus agréables passions, la parfaite image de la vie humaine, la vraie histoire parlante, la pure philosophie visible, l’entretien des bons esprits, le trône de la vertu, l’exemple de l’inconstance des choses, l’ennemie de l’ignorance, le modèle de l’Orateur, le raccourci de l’éloquence, le Cabinet des plus riches pensées, le trésor de la moralité, le miroir de la justice, le magasin de la fable ; bref j’en dis peu pour n’en pouvoir dire assez, et j’ai de trop faibles Eloges, pour la moindre de ses parties : Et quoique ce Pédant l’attaque par les plus rudes invectives de sa haine, elle est un puissant rocher, contre l’orage de ses malédictions, une tour, pour résister aux écueils de sa médisance, une muraille de bronze contre ses calomnies, un boulevard pour s’opposer à ses accusations, un bouclier contre ses impostures, un rempart capable de dissiper la foudre de passion, elle est enfin à l’épreuve de ses machines, et conservera sa renommée malgré l’effort de ses intentions.
Chez tous les peuples, même les plus civilisés, dans toutes les quatre parties du monde, les mines, les pantomimes, farceurs, baladins, ont été les plus courus & le sont encore, l’ennui noble & superbe qui bâille majestueusement, au milieu du succès & de la régularité dramatique, qui le quitte souvent pour s’amuser ailleurs, & ne regardent ces chef-d’œuvres que comme un cérémonial embarrassant.
Euripide a mis sur la Scene des femmes amoureuses, & a été regardé comme le Peintre de l’Amour.
Quand il commença de s’introduire, avec les précautions que la ferveur faisait prendre, on a pu le regarder comme peu dangereux : l’abus est aujourd’hui sensible.
Il est vrai que les Persans prisent les choses selon leur valeur ; quoiqu’ils aiment infiniment les Danseuses et les Musiciennes, ils regardent la danse comme un art infâme, surtout pour les femmes.
Il est vrai que la foule est grande à ses Pièces, et que la curiosité y attire du monde de toutes parts : mais les gens de bien les regardent comme des Prodiges, ils s’y arrêtent de même qu’aux Eclipses et aux Comètes : parce que c’est une chose inouïe en France de jouer la Religion sur un Théâtre, et Molière a très mauvaise raison de dire, qu’il n’a fait que traduire cette Pièce de l’Italien, et la mettre en Français : car je lui pourrais répartir que ce n’est point là notre coutume, ni celle de l’Église : l’Italien a des vices et des libertés que la France ignore, et ce Royaume très Chrétien a cet avantage sur tous les autres, qu’il s’est maintenu toujours dans la pureté de la Foi, et dans un respect inviolable de ses Mystères.
Il les regarda l’une après l’autre, & lui dit : Il n’y a rien là que je veuille . […] De l’autre côté, il y a au milieu une femme seule debout, les cheveux épars ; une de ces femmes tient d’une main une flêche, de l’autre un miroir où elle se regarde, l’autre femme tient d’un côté un cœur & de l’autre un peigne.
Aristophane, que les Commentateurs admirent parce qu’il étoit Grec, ne songeant pas que Socrate étoit Grec aussi, Aristophane fut le premier qui accoûtuma les Athéniens à regarder Socrate comme un athée.
Mais appeler le galant, l’attaquer, le flatter, exciter ses désirs, lui promettre toute sûreté, dire qu’on se rend, qu’on lui accorde tout, fermer les portes, regarder de tous côtés pour commettre l’adultère sans risque ; quelle leçon pour les femmes & les filles !
C’est la demande de l’eloquent Salvien, qui y ajoute : « Si Dieu daigne vous regarder quand vous vous trouvez à la Comedie, il doit par une suite necessaire se plaire aux choses qui s’y passent : mais puisqu’il en detourne les yeux, il les detournera aussi de vous. » Mais je veux qu’une personne soit de bronse ; & qu’au milieu du feu elle n’en sente aucune affection, aucun mouvement qui l’amollisse : cependant c’est cette prétenduë insensibilité qui est la plus vaine illusion, & en quoi consiste son mal : car la vanité, cette dangereuse passion, qui s’attache aux plaisirs du monde, fera du progrés, qu’elle n’appercevera pas d’abord, mais qui ne deviendra ensuite que trop sensible par l’insensibilité, qu’elle aura bientôt à tous les mouvemens d’une devotion chrétienne.
Les théâtres sont regardés par quelques politiques comme un établissement utile, parce que dans les temps d’oisiveté ils peuvent faire diversion aux crimes.
Mardonius, son Gouverneur, bien différent de nos Régents, regarda comme un des points les plus essentiels d'une bonne éducation, de leur inspirer du mépris et de l'éloignement pour le théâtre.
Cette loi ajoute une autre exception en faveur des spectacles où l’on fait combattre les animaux : ce qui regarde les juifs d’Espagne, où l’on donne des combats de taureaux. […] On ne doit pas même regarder ces objets, selon les principes de l’Evangile.