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4. (1667) Traité de la comédie et des spectacles « Sentiments des Pères de l'Eglise sur la comédie et les spectacles — 3. SIECLE. » pp. 107-119

Peut-il prendre plaisir à des choses criminelles, lui qui est déjà sanctifié ? […] Un véritable Chrétien a bien d'autres divertissements plus relevés que ceux-là, s'il a de la passion pour les véritables et utiles plaisirs. […] Ne prenez point de plaisir à regarder d'autres actions que celles qui sont justes et pieuses. […] Si vous vous plaisez donc aux chants et aux vers ; prenez plaisir à chanter, et à entendre chanter les louanges de Dieu : Le véritable plaisir est celui qui est accompagné de la vertu, c'est un plaisir qui n'est point périssable, et passager comme les autres que recherchent ceux qui suivent les passions de leur corps, ainsi que les animaux ; mais il est continuel, et toujours agréable. Celui qui en passe les bornes et ne recherche dans le plaisir que le seul plaisir, se procure la mort.

5. (1634) Apologie de Guillot-Gorju. Adressée à tous les beaux Esprits « Chapitre » pp. 3-16

Que si on veut fonder ce déshonneur sur le plaisir que la Comédie engendre naturellement, c’est ne connaître pas l’essence du plaisir et très mal raisonner : car GUILLOT-GORJU au contraire soutient que c’est le plaisir qui rend la Comédie agréable et louable, sans lequel elle n’aurait rien pour la distinguer des actions pénibles et sérieuses. […] De même encore que quelques-uns accusent la volupté, ils laissent volontiers charmer leurs esprits aux plaisirs et aux voluptés. […] Pour les actions honnêtes et de la vertu, qui les pratiquerait jamais sans le plaisir qui se trouve dans la vertu. […] En un mot il faut détruire la Nature dans tous les ouvrages de laquelle il se rencontre quelque image de plaisir et de volupté. […] Tout travail mérite récompense ; et qui ne voit qu’il faudrait détruire le commerce, si les choses se donnaient pour rien : au contraire, il faudrait avouer que les Comédiens seraient infâmes, s’ils prenaient votre argent sans vous donner du plaisir, ou s’ils vous donnaient du plaisir pour rien, qui ne les estimerait gens pleins de grand loisir ?

6. (1824) Du danger des spectacles « DU DANGER DES SPECTACLES. » pp. 4-28

« Lorsque l’âme s’abandonne à de faux plaisirs, elle perd bientôt le goût des jouissances spirituelles, et ne trouve bientôt plus que dégoût et qu’ennui dans la parole de Dieu. […] « Ne nous livrons point trop aux plaisirs. […] Ces plaisirs dangereux amollissent notre vertu, la détruisent insensiblement, et ouvrent notre âme à tout le cortège du vice et du dérèglement. […] C’est dans ces sublimes occupations que nous pouvons trouver les plus nobles plaisirs. Elles suffiront pour remplir nos cœurs, pour occuper notre temps, et ne laisseront, au-dedans de nous, aucun besoin de ces plaisirs frivoles et funestes.

7. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — [Première partie.] — Septième Lettre. De la même. » pp. 73-99

Je me rappelle d’avoir avancé, « que le Théâtre pouvait être utile, par ses Drames, par la Musique, par les Danses, par le plaisir qu’il procure ». […] Or l’Etre raisonable si vivement entraîné vers ces trois genres de plaisir, les trouve réunis dans le Spectacle dramatique. […] Ce n’est pas assez pour nous, dira-t-on, dont les mœurs sérieusées par une Religion auguste, ne peuvent admettre le plaisir comme plaisir. […] Quel ennemi du genre humain entreprendrait de bannir de nos plaisirs l’amour & les femmes ? […] si les plaisirs qu’il nous procurera, dérivent de notre nature ; si le père y voit briller les talens de son fils ; si le fils goûte l’inexprimable plaisir d’ennivrer de joie le cœur d’une tendre mère ?

8. (1667) Traité de la comédie « Traité de la comédie — XII.  » p. 467

Le plaisir de la Comédie est un mauvais plaisir, parce qu'il ne vient ordinairement que d'un fond de corruption, qui est excité en nous par ce qu'on y voit. Et pour en être convaincu il ne faut que considérer que lorsque nous avons une extrême horreur pour une action on ne prend point de plaisir à la voir représenter : et c'est ce qui oblige les Poètes de dérober à la vue des spectateurs tout ce qui leur peut causer cette horreur désagréable. Quand on ne sent donc pas la même aversion pour les folles amours et les autres dérèglements que l'on représente dans les Comédies, et qu'on prend plaisir à les envisager, c'est une marque qu'on ne les haït pas, et qu'il s'excite en nous je ne sais quelle inclination pour ces vices, qui naît de la corruption de notre cœur. […] Car on peut apprendre de cet exemple que l'on approuve en quelque sorte tout ce que l'on souffre et ce que l'on voit avec plaisir sur le Théâtre, puisque l'on ne peut souffrir ce que l'on a en horreur. Et par conséquent y ayant encore tant de corruptions et de passions vicieuses dans les Comédies qui paraissent les plus innocentes, c'est une marque qu'on ne haït pas ces dérèglements, puisqu'on prend plaisir à les voir représenter.

9. (1675) Traité de la comédie « XII.  » pp. 291-292

Le plaisir de la Comédie est un mauvais plaisir, parce qu'il ne vient ordinairement que d'un fond de corruption, qui est excité en nous par les choses que l'on y voit. Et pour en être convaincu, il ne faut que considérer, que lorsque nous avons une extrême horreur pour une action, on ne prend point de plaisir à la voir représenter : et c'est ce qui oblige les Poètes de dérober à la vue des spectateurs tout ce qui leur peut causer cette horreur. Quand on ne sent donc pas la même aversion pour les folles amours, et les autres dérèglements qu'on représente dans les Comédies, et qu'on prend plaisir à les regarder, c'est une marque qu'on ne les hait pas, et qu'il s'excite en nous je ne sais quelle inclination pour ces vices, qui naît de la corruption de notre cœur. […] Car on peut apprendre de cet exemple que l'on approuve en quelque sorte tout ce que l'on souffre et que l'on voit avec plaisir sur le Théâtre; puisqu'on ne peut souffrir ce que l'on a en horreur. Et par conséquent y ayant encore tant de corruptions, et de passions vicieuses dans les Comédies les plus innocentes, c'est une marque qu'on ne hait pas ces dérèglements, puisqu'on prend plaisir à les voir représenter.

10. (1710) Instructions sur divers sujets de morale « INSTRUCTION II. Sur les Spectacles. — CHAPITRE I. Que les Spectacles sont des plaisirs défendus. Preuves de cette défense tirées de l'Ecriture sainte, des Pères de l'Eglise, des Conciles, des Rituels, et des Lois civiles. » pp. 43-53

La vie d'un Chrétien peut-elle être une vie de plaisir ? […] Tous les plaisirs sont-ils défendus à un Chrétien ? […] Quels sont les plaisirs qui sont permis à un Chrétien. […] Quels sont les plaisirs défendus à un Chrétien ? […] Les spectacles peuvent-ils être comptés parmi les plaisirs permis ?

11. (1752) Traité sur la poésie dramatique « Traité sur la poésie dramatique — CHAPITRE III. En quoi consiste le Plaisir de la Tragédie, & de la grande émotion que causoient les Tragédies Grecques. » pp. 49-62

En quoi consiste le Plaisir de la Tragédie, & de la grande émotion que causoient les Tragédies Grecques. […] Quel autre plaisir cherchons-nous dans la Tragédie ? […] Le Plaisir de voir nos pareils dans la peine nous saisit malgré nous ; ce que prouve S. […] Il but, dit ce Pere, la fureur à longs traits, & sans s’en appercevoir se laissa enivrer de ce plaisir barbare. […] C’est donc, suivant un ordre établi par la Nature, que nous sentons du plaisir, comme le dit Lucrece, à voir nos pareils dans un malheur dont nous sommes exemts ; & nous trouvons un autre plaisir dans la compassion que nous avons pour eux.

12. (1733) Traité contre les spectacles « TRAITÉ CONTRE LES SPECTACLES. » pp. 145-246

Or entre les autres espèces de plaisir, on peut compter les spectacles. Les convoitises, dont nous venons de parler, prises en général, renferment en soi les plaisirs ; de même les plaisirs entendus dans une signification générale, s’étendent aux spectacles. […] Ayez moins d’égard au plaisir de la bouche, qu’au danger, qui est infailliblement attaché à ce plaisir. […] Oserez-vous dire que nous ne pouvons vivre sans quelque plaisir, nous dont le plus grand plaisir doit être de cesser de vivre ? […] Or notre plaisir est là où est notre désir.

13. (1698) Théologie du cœur et de l’esprit « Théologie du cœur et de l’esprit » pp. 252-267

On la déguise sur le Théâtre ; on l’embellit par l’art ; on la justifie par le tour que lui donne le Poëte ; on n’y trouve plus rien de honteux, & on la voit avec plaisir : mais peut-on sans danger, voir avec plaisir une passion qu’on ne doit point avoir ? […] Notre pente aux plaisirs des sens, est une de nos plus dangereuses maladies. […] Nous exerçons cette cruauté envers nous-mêmes, en prenant les plaisirs de la Comedie. […] Il n’allume pas seulement en nous un amour déreglé des plaisirs des sens, il jette aussi dans nos cœurs la semence de tous les autres vices. […] Bien loin de détester cette impression, on met son plaisir à la sentir, & son honneur à suivre les mouvemens qu’elle inspire : & pourquoi s’y abandonne-t-on ?

14. (1823) Instruction sur les spectacles « Conclusion. » pp. 195-203

Votre âme, bientôt éprise des plaisirs trop vifs du théâtre, trouverait les plaisirs innocents trop froids et trop insipides, et ne sentirait plus que du dégoût pour la piété. […] Vous dites que vous en revenez triste et mécontent, vous faites voir par là que vous êtes fâché d’en rapporter un peu d’innocence, et que vous n’y cherchiez que des plaisirs illégitimes. […] C’est pour satisfaire votre goût déréglé pour les plaisirs, qu’ils renoncent en quelque sorte à leur salut. […] Ne croyez point que la protection que l’autorité civile accorde aux théâtres en rende les plaisirs plus décents et moins dangereux. […] Ne vous étayez point de l’autorité de certains casuistes qui ne condamnent pas absolument les plaisirs du théâtre ; n’oubliez pas qu’ils sont forcés de convenir que ces plaisirs sont du moins frivoles et suspects, et que l’on ferait mieux de s’en passer.

15. (1685) Dixiéme sermon. Troisiéme obstacle du salut. Les spectacles publiques [Pharaon reprouvé] « La volonté patiente de Dieu envers Pharaon rebelle. Dixiéme sermon. » pp. 286-325

M. s’il vous reste encore dans le cœur quelques sentimens de pieté & de Christianisme, ne laissés point corrompre vôtre jugement par le mauvais goût du siecle, & que le plaisir de la comedie (que j’appelle un plaisir enchanté, parce qu’il vous trompe & entraîne par des prestiges secrets, & par une fascination dangereuse, fascinatio nugacitatis , l’appelle le Sage) que ce plaisir dis-je ne suborne point vôtre raison, cõtre vôtre conscience ; mais que tout le monde connoisse que vous ne cachés point les restes du paganisme, sous la profession apparente de Chrétien. […] Quoy, faut-il pour un petit plaisir, violer les vœux du Baptême, & renoncer à la foy. […] Outre qu’il est incontestable dans les principes de la pure morale Chrétienne, que tout plaisir que nous ne pouvons rapporter à la gloire de Dieu, & qui au contraire nous détourne de luy & de son service, est un plaisir criminel & defendu. […] je me laissois entraîner au plaisir des spectacles publiques, parce que je voyois le theatre toûjours rempli des images de mes secrettes miseres, & toûjours embrasé des feux de mon amour lascif. […] Enfin, qua major voluptas quam fastidium ipsius voluptatis quam vera libertas, quam conscientia integra  ; quel plus grand plaisir que le mépris du plaisir, que la veritable liberté, & que la pureté de la conscience.

16. (1824) Du danger des spectacles « INTRODUCTION. » pp. 1-3

Dans ce siècle où le plaisir est une affaire si importante, que tous les raffinements de la civilisation semblent n’avoir que ce seul but, on ne manquera pas, peut-être, de taxer d’insensée et de présomptueuse une entreprise qui a pour objet d’appeler l’attention du public sur les écrits de certains personnages qui se sont prononcés contre les représentations théâtrales, lesquelles attirent de nos jours une si prodigieuse affluence et sont l’objet d’un si étrange empressement. […] Nous osons donc espérer qu’on voudra bien parcourir avec attention ces pages où nous avons présenté l’opinion de plusieurs écrivains illustres et moraux, touchant les plaisirs de la scène. De même qu’il est beau quelquefois d’attaquer avec une vertueuse liberté, des opinions et des préjugés qui ont pour eux l’autorité des temps et un vieux respect, fils de l’habitude ; de même que le résultat de ces attaques, inscrites dans les bornes de la modération et de la charité chrétienne, a souvent été la destruction de l’erreur et le triomphe de la vérité ; c’est ainsi qu’il est d’une importance égale, sinon plus grande encore, d’examiner avec les yeux de l’impartialité plusieurs des usages et des plaisirs de la société, que l’empire d’une longue indulgence semble avoir consacrés. […] Encouragé par ces considérations, nous avons publié cet essai, dans lequel nous avons réuni ce qu’ont pensé quelques écrivains vertueux au sujet de ces plaisirs que semble aujourd’hui sanctionner une approbation presque universelle. […] Nous soumettons cet essai au public, dans l’espérance que si nos lecteurs demeurent convaincus de la vérité de nos arguments, aucune considération, aucune habitude antérieure ne pourra prévaloir sur la voix de la conscience, et sur cette paix de l’âme, ce trésor le plus précieux de tous, et qui est bien au-dessus de tous les vains plaisirs du monde et de tous ses frivoles amusements.

17. (1726) Projet pour rendre les spectacles plus utiles à l’Etat « Projet pour rendre les spectacles plus utiles à l’Etat » pp. 176-194

Au reste c’est à l’Etat à payer par des pensions une partie des frais des spectacles lorsqu’ils sont utiles à la société, et c’est aux spectateurs à payer l’autre partie de ces frais, parce qu’ils en retirent du plaisir. […] Il y a longtemps que j’ai observé que nos anciennes pièces de théâtre qui ont le plus réussi il y a 80 ans mériteraient d’être perfectionnées quelque temps après la mort des Auteurs, du moins par rapport aux mœurs, d’un côté la langue change et de l’autre la raison croît et le goût se raffine ; il nous paraît aujourd’hui dans ces pièces des défauts, qui ne paraissaient point à nos pères, gens d’esprit, il y a cinquante ans : or ces pièces ainsi perfectionnées vaudraient ordinairement beaucoup mieux, soit pour le plaisir, soit pour l’utilité de l’auditeur, que les pièces nouvelles, c’est qu’il est bien plus facile au même Auteur de perfectionner un ouvrage qui a déjà plusieurs beautés et d’en faire un excellent que d’en faire un tout neuf qui soit exempt de défauts, et rempli de plus grandes beautés et en plus grand nombre que l’ancien qui était déjà fort bon. […] Ainsi avec un des grands mobiles des hommes qui est le désir de la distinction, le Poète pourra en divertissant les spectateurs augmenter considérablement l’empire de la vertu et de la gloire aux dépens de l’empire de la mollesse et de la vanité, la perte de l’un sera l’augmentation de l’autre, et à dire la vérité, les hommes n’ont rien de solide et de durable à opposer au furieux désir des plaisirs des sens si nuisibles dans leur excès à la société, que le ressort ou le désir des plaisirs de la distinction la plus précieuse qui tend toujours au plus grand bonheur de cette même société. […] Mais par la même raison, il me paraît contre le bon sens et contre la bonne police de permettre de parodier et de tourner en ridicule d’excellentes pièces sérieuses, où la vertu est honorée et le vice puni ; cet excès dans les parodies est la suite de la corruption de nos mœurs ; le Poète pour procurer du plaisir au spectateur et pour gagner plus d’argent ne s’embarrasse pas de confondre le bon avec le mauvais, l’estimable avec le ridicule, le grand avec le méprisable, l’odieux avec l’aimable, comme si toutes ces choses étaient égales pour le bonheur et pour le malheur de la société, et comme si le but de la raison n’était pas d’unir toujours dans les spectacles l’utilité de la société au plaisir du spectateur. […] Si dès à présent on établit dans un grand Etat un Bureau pour diriger les spectacles vers les mœurs désirables de la société, si par les prix qu’elle distribuera aux Poètes qui plairont le plus et qui dirigeront le mieux leurs ouvrages vers la bonne morale, il arrivera avant trente ans que les pères et les mères les plus sages mèneront leurs enfants à la Comédie comme au meilleur Sermon, pour leur inspirer des sentiments raisonnables et vertueux, il arrivera que dans toutes les villes, de trente mille habitants il y aura aux dépens du public des théâtres et des Comédiens, afin qu’avec peu de dépense les habitants médiocrement riches puissent assister au spectacle, et l’on verra ainsi le plaisir contribuer au bon gouvernement, ce qui est le sublime de la politique ; car qu’y a-t-il de plus estimable que de mener les hommes par le chemin des plaisirs innocents et actuels, à une diminution de peines, et même à d’autres plaisirs futurs, la nation se polirait de plus en plus jusques parmi le peuple, les sentiments de vertu entreraient avec le plaisir dans les cœurs des Citoyens, et par le perfectionnement de nos mœurs, la société deviendrait tous les jours plus douce, plus tranquille et plus heureuse, et c’est le but que je m’étais proposé dans ce Mémoire.

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