Pour faire un parallèle des mœurs des François avec celles des autres peuples, il-ramasse les usages bizarres de toute la terre, souvent fabuleux & de son invention, & croit y trouver quelque trait de ressemblance. […] L’amour seul auroit suffi pour établir l’immortalité de l’ame parmi le peuple le plus sauvage.
.° Quoique par un usage immémorial, devenu une espèce de loi, dont on ne se serait pas dispensé impunément, les grands Magistrats de l’Empire Romain, pour signaler leur entrée dans les charges, fussent obligés de donner des spectacles au peuple, l’Eglise ne le leur pardonnait pas, et si dans la suite, quittant le monde, ils voulaient entrer dans les ordres sacrés, ils étaient censés irréguliers, comme nous l’avons ci-dessus remarqué ; et si par la facilité des supérieurs, ils étaient admis aux saints ordres, fussent-ils élevés à l’Episcopat, eux et leurs consécrateurs étaient déposés, par l’ordre du Pape Innocent III, adressé au concile de Tolède : « Qui ordinati fuerint, cum suis ordinatoribus deponantur. » (Distinct. […] Ambroise, pour détourner le peuple de l’élire Archevêque de Milan, fit venir chez lui des femmes de mauvaise vie.
Le théâtre, enseveli sous les ruines de l’Empire Romain, fut fort négligé en Europe pendant plusieurs siècles : les peuples, occupés de croisades, de joutes, de tournois, de chevalerie, ne connaissaient que des vielleurs, jongleurs, tabarins, danseurs de corde, vendeurs d’orviétan, qui couraient les villes et les campagnes, et sur quelques tréteaux amusaient la populace. […] Thomas, etc., en parlent assez négligemment, comme d’un objet qui ne valait pas la peine de porter des censures, et se contentent de dire qu’on peut laisser ces vains amusements au peuple, dont les travaux et la santé ont besoin de divertissement, pourvu qu’on n’y souffre rien d’irréligieux et d’obscène.
Un homme vain et orgueilleux est charmé de la fierté Romaine dans Corneille, un cœur tendre et voluptueux des conversations amoureuses de Racine, il faut des machines aux enfants, des farces au peuple. […] qu'il y a d'enfants à cinquante ans, de peuple sous la pourpre !
Si la superstition, continue l’auteur, éleve sur ses autels un être vindicatif, colere, perfide, parjure, injuste, le peuple respectant ces imperfections prendra d’heureuses dispositions à la vengeance, à la haine, à la fourberie, à la partialité. […] Telles sont dans une ville les débauches des femmes de mauvaise vie, qu’on emploie & qu’on protége pour amuser le peuple, sous le nom d’acteurs & d’actrices, par politique, dit-on, pour empêcher de plus grands maux. […] Les Spectacles sont faits pour un peuple si sensible : ils y sont fréquens & magnifiques.
Gresset, cet art que les Prophètes ont rendu si respectable, cet art si justement appelé par les Païens le langage des Dieux : le mauvais usage qu’on en a pu faire ne doit pas le faire proscrire, ou bien il faudrait par la même raison, ne plus méditer sur les Saintes Ecritures ; puisque les hérétiques en ont abusé par les sens forcés qu’il leur a plu de donner à quelques passages : je sais bien que des spectateurs impies, au lieu de s’en tenir au sens naturel d’une pensée croient souvent voir une impiété enveloppée dans un vers très innocent en soi, ils veulent croire, par exemple, que nos Ministres Ecclesiastiques sont attaqués et la Religion outragée dans ces deux vers de la Tragédie d’Oedipe de Mr. de Voltaire, Nos Prêtres ne sont pas ce qu’un vain peuple pense : Notre crédulité fait toute leur Science. […] quel goût ne prendrait-on pas pour la vertu, en voyant ces Personnes vénérables l’applaudir dans la bouche de nos Acteurs et sacrifier un Cagotisme mal entendu à l’avantage de faire remarquer au peuple des vérités auxquelles il ne fait pas peut-être assez d’attention. […] Puissent les cruautés de ces barbares ne pas altérer dans le cœur des peuples les tendres sentiments que les vertus de ce grand Monarque y ont si justement imprimés.
Avant de répondre à cette objection, il est à propos que je m’explique sur ce que j’entends par l’exclusion du ridicule ; je ne prétends pas interdire à la Comédie la peinture du ridicule qui se trouve dans les vices qu’elle attaque, pourvu que ces vices ne soient tels que parce qu’ils sont ridicules ; mais lorsque les vices qu’elle attaque sont dangereux, elle ne doit point leur prêter pour amuser les Spectateurs, un ridicule qui ne serviroit qu’à affoiblir l’horreur qu’on en doit concevoir : de plus, si la Comédie veut se renfermer exactement dans les bornes qui lui sont prescrites, c’est-à-dire, si elle veut corriger les hommes, elle n’attaquera que des vices essentiels, c’est-à-dire, ceux dont les suites sont funestes à la société, & laissera aux Théâtres de la foire saint Germain, le soin d’amuser le peuple par la peinture des vices ridicules.
Le véritable esprit de notre Religion ne condanne pas le Spectacle en lui-même, puisqu’il l’admet dans le culte de la Divinité : « L’expérience nous apprend qu’il faut des Spectacles pour attacher le Peuple : une Religion dépouillée de tout appareil extérieur ne peut ni l’affecter ni l’instruire : les Protestans ne s’apperçoivent que trop aujourd’hui des inconvéniens d’un culte trop décharné. » Apol. de la Rel.
Voyez le bien que cela fait pour la conscience de ces Messieurs ; pour la consolation des Ecclésiastiques, et des Religieux qui se réjouissent, et toujours à la gloire de Dieu, de voir le beau monde à leurs Fêtes, pour l’édification du bon peuple qui s’en retourne admirablement content du beau Sermon, du beau Salut, de la belle Messe !
Ils se promenaient dans des tombereaux remplis d’ordures, et en jettaient au peuple, p.
Ils continuent, que c’est ce que les Poètes ont pratiqué, en introduisant des personnages passionnés dans la Tragédie et des personnages ridicules dans la Comédie (ils parlent du ridicule dans le sens d’Aristote, d’Horace, de Cicéron, de Quintilien et des autres maîtres, et non pas dans celui du peuple :) qu’ainsi faisant profession de faire voir de méchantes choses, si l’on n’entre dans leur intention ; rien n’est si aisé que de faire leur procès : qu’il faut donc considérer si ces défauts sont produits d’une manière à en rendre la considération utile aux Spectateurs : ce qui se réduit presque à savoir s’ils sont produits comme défauts, c’est-à-dire comme méchants et ridicules ; car dès là ils ne peuvent faire qu’un excellent effet. […] Habitude qui leur est très utile, en ce que le peuple, que ces gens-là ont en vue, et sur qui les paroles peuvent tout, se préviendra toujours d’une opinion de sainteté et de vertu, pour les gens qu’il verra parler ce langage, comme si accoutumés aux choses spirituelles, et si peu à celles du monde, que pour traiter celles-ci ils sont contraints d’emprunter les termes de celle-là. […] L’Antiquité, si sage en toutes choses, ne l’a pas été moins dans celle-ci que dans les autres ; et les Païens, qui n’avaient pas moins de respect pour leur Religion que nous en avons pour la nôtre, n’ont pas craint de la produire sur leurs théâtres : au contraire, connaissant de quelle importance il était de l’imprimer dans l’esprit du peuple, ils ont cru sagement ne pouvoir mieux lui en persuader la vérité, que par les spectacles qui lui sont si agréables. […] Ce fut pour toutes ces raisons que nos pères, dont la simplicité avait autant de rapport avec l’Évangile, que notre raffinement en est éloigné, voulant profiter à l’édification du peuple de son inclination naturelle pour les spectacles, instituèrent premièrement la comédie pour représenter la Passion du Sauveur du monde, et semblables sujets pieux.
C’est-à-dire, Le triomphe sacré de la conscience, la science divine de se récréer, le bonheur des Peuples, des Villes, & des Royaumes, marqué dans ces paroles célestes du Pseaume 88. v. 16.
Et des Dames Chrétiennes peuvent-elles y assister, aprés ce qu’ils en ont dit, sans montrer, ou que l’on fait peu d’estime de leur autorité, ou que l’on croit, que Dieu ne les a pas établis dans son Eglise, pour être les oracles des peuples ?
C’est-à-dire, Le triomphe sacré de la conscience, la science divine de se récréer, le bonheur des Peuples, des Villes, & des Royaumes, marqué dans ces paroles célestes du Pseaume 88.