Je lui demanderais encore volontiers si cette harmonie de l’âme est plus en sureté au travers de ces représentations pompeuses de notre cothurne le plus élevé et le plus sublime, où l’on introduit des héros et des héroïnes, dont on fait consister le mérite à pousser les passions les plus grandes aux plus grands excès ; où les jalousies, les désespoirs, les vengeances, les trahisons, les incestes, les parricides, et d’autres crimes horribles qui devraient être ensevelis dans des ténèbres éternelles, sont relevés et dépeints avec les couleurs les plus vives, et bien plus capables de les faire admirer que de les faire détester. […] saint François de Sales prétend que des Spectacles et des poupées de dévotion sont capables de dissiper l’esprit chrétien et de réveiller l’esprit du monde ; et on croira qu’il a permis comme choses innocentes les Spectacles d’aujourd’hui, tout profanes qu’ils sont ; et où des poupées non pas de dévotion, mais des Poupées de licence bien animées et bien vives, paraissent avec les ajustements et tous les airs les plus mondains ? […] Il en prend son Ami à témoin, il insulte à ceux qui ne sont pas de son avis ; et il traite de Réformateur un des plus grands hommes du siècle, parce qu’il soutient que dans les Comédies d’aujourd’hui il y reste toujours quelque chose de la première corruption des Spectacles ; et que d’y assister, c’est s’exposer à faire naître des passions que les Chrétiens sont obligés de réprimer avec toute l’application dont ils sont capables.
Croirons-nous qu’elles peuvent être Comédiennes sans cesser d’être aussi modestes que le veut Saint Paul, et pourra-t-on se persuader qu’il n’est point contre la modestie Chrétienne, qu’une femme se pare avec tout l’art dont elle est capable, et qu’elle monte sur un Théâtre pour joindre à la parole les gestes, le ton et les manières les plus capables d’inspirer les passions, contre lesquelles les hommes doivent être toujours en garde. […] Quelquefois il leur met devant les yeux combien on s’expose à avoir de méchantes pensées à la Comédie. « Quoi, dit-il (dans l’admirable Homélie de Saül et de David, dont Baronius a inséré une partie à la fin du IV. siècle) un regard jeté avec trop de curiosité sur une femme qu’on rencontre par hasard est quelquefois capable de blesser l’âme ; et vous ne craindrez pas de passer plusieurs heures à contempler fixement des femmes qui se parent avec tout le soin possible, qui se sont toute leur vie exercées à remuer les passions, et qui n’oublient rien pour plaire aux spectateurs ? […] Esprit les y conduise, ce qui est un blasphème dont personne ne peut être capable, quelque passion que l’on puisse avoir pour la Comédie et l’Opéra ? […] N’arrêtez point vos regards sur une fille, de peur que sa beauté ne vous devienne un sujet de chute. » « Détournez vos yeux d’une femme parée, et ne regardez point curieusement une beauté étrangère : plusieurs se sont perdus par de semblables regards et c’est ce qui allume le feu de la concupiscence « Averte faciem tuam à muliere compta, et ne circumspicias speciem alienam... propter speciem mulieris multi petierunt, et ex hoc concupiscentia quasi ignis exardescit. » . » Que la passion de l’amour produisant tous les jours des désordres dans les personnes libres, et dans celles qui sont mariées, on fait mal d’aller dans un lieu, où cette passion est louée, excitée, nourrie ; et où les pièces ne plaisent, que lorsque l’amour y est conduit d’une manière tendre et passionnée : Que l’âme s’y trouve exposée à des chutes presque inévitables, parce que enivrée du plaisir, elle n’est plus dans cet état de vigilance, qui est nécessaire pour résister aux tentations ; et que rien ne peut excuser des fautes, dont la cause a été volontairement recherchée : Que les passions criminelles, qu’on représente sur le Théâtre sont souvent d’autant plus dangereuses, qu’elles sont touchées avec plus d’honnêteté apparente, parce qu’on goûte ainsi sans répugnance et même avec plaisir, ce qui aurait fait quelque horreur, étant exposé trop à découvert : et qu’enfin rien n’est plus capable que la Comédie, d’étouffer insensiblement les sentiments de piété, l’esprit de prière, et d’exciter les trois concupiscences que saint Jean condamne. […] C’est une peinture si naturel, et si délicate des passions, qu’elle les anime et les fait naître dans notre cœur, et surtout celle de l’amour, principalement lorsqu’on se représente qu’il est chaste et fort honnête : Car plus il paraît innocent aux âmes innocentes, et plus elles sont capables d’en être touchées.
D’ailleurs ces dialogues en petit nombre ne sont que des conversations frivoles où il n’y a rien à gagner ; les Eglogues de Fontenelle son aussi des dialogues aussi ingénieux, & plus capable d’enivrer un enfant : des Bergeries lui conviennent mieux que la politique d’Auguste & de Charles-Quint ; les dialogues de Fenelon sont bien plus utiles, ceux de Lucien plus ingénieux, les enfans y gagneroient bien davantage.
Moliere en eût été capable ; mais je ne fais ni cet honneur ni ce tort à ses confrères.
Cette réfléxion, si un Poète licencieux était capable de le faire, doit engager à rompre, à briser ces crayons coupables, qui prêtent tant de charmes à la Volupté.
Les Villes de Province, assez considérables pour avoir un Théâtre où l’on jouerait toute l’année, ou seulement durant l’hiver, tireront leurs Acteurs du Collége Dramatique de la Capitale : on leur enverra les jeunes Elèves des deux sexes dont elles auront besoin, soit de ceux & celles dont il est parlé dans l’Articles précédent, qui n’auront pas encore été jugés capables d’être admis au Théâtre de la Capitale, soit des autres, qui auront néanmoins achevé leurs Exercices, & qu’on réputera les plus formés.
Enfin y a-t-il rien si capable d’attirer son indignation, que de scandaliser ainsi toute l’Eglise, et violer sa discipline toute pure et toute sainte par une effronterie sans pareille, et une licence si publique et si honteuse « Erubescat senatus, erubescant ordines omnes ; ipsæ illæ pudoris sui interemptrices semel erubescant », dit à ce sujet Tertullien.
Si je ne puis comprendre qu’il se trouve des Auteurs Chrétiens capables d’inventer de pareils rôles, de composer de tels vers, d’écrire, de faire réciter des blasphèmes, je comprends aussi peu qu’il se trouve des Acteurs Chrétiens qui puissent se résoudre à les débiter.
La Cour l’approuva, et voulut que ce fût pour eux une espèce d’apprentissage où ils s’instruiraient de la procédure et se rendraient capables de prendre dans la suite des offices.
Louis, dit du Tillet, chassa de son royaume les Farceurs et Comédiens, comme une peste publique, capable de corrompre les mœurs de tous ses sujets. » Dupleix et Mézeray, qui le copie, disent sur Philippe-Auguste : « Ce Prince signala sa piété par l’expulsion des Comédiens, qu’il chassa de sa Cour, comme gens qui ne servent qu’à efféminer les hommes, flatter les voluptés, et remplir les esprits oiseux de chimères qui les gâtent, et à causer dans les cœurs des mouvements déréglés, que la religion et la sagesse nous recommandent si fort d’étouffer.
Ils disaient qu’ils n’étaient ni Comédiens, mais simples farceurs ; ni Français, mais un ramassis de toutes les nations ; ni établis dans Paris, mais une Troupe errante, qui campait sous des tentes pendant la foire ; qu’ils ne jouaient point de pièces régulières, mais des fragments et des scènes détachées ; que la foire avait joui de temps immémorial de la liberté des spectacles, comme d’une branche de commerce ; et que les Comédiens n’ayant point de lettres patentes, mais un simple brevet non enregistré, ils n’étaient pas personnes capables d’ester à droit et de faire des poursuites légales (comme M. l’Avocat général en convenait).
Bien davantage, comme si ce n’eût pas été assez d’un théâtre dans son palais, il lui en fallut deux, un petit et un grand (et un troisième à Rueil, sa maison de campagne), l’un capable de contenir six cents personnes, et l’autre plus de trois mille ; le petit était pour son amusement ordinaire, le grand pour les comédies de pompe et de parade » (Sauval, Antiq. de Paris).
» Donnât-on des lois à la fougue des passions, ce qu'assurément ne permet pas de penser ce visage enflammé, ces regards étincelants, ces gestes convulsifs de tout ce monde efféminé qui joue et qui voit jouer la comédie, si capables de brûler tous les cœurs, il n'est pas permis de se livrer aux objets, au plaisir, à l'émotion, même en passant.
Secondement, elle le fait membre du corps mystique de l’Eglise, en l’unissant à son Chef par la foy, en le sanctifiant par la grace, & en l’animant de son esprit ; enfin elle rend le nouveau Chrétien capable de participer à tous les autres mysteres & Sacremens de l’Eglise. […] Enfin comme la grace du Baptême nous rend capables de participer à tous les autres mysteres & Sacremens de l’Eglise, il faut renoncer absolument aux pompes du monde & aux œuvres de Satan, parce que nous ne pouvons pas estre initiés tout ensemble aux mysteres de sainteté, & aux mysteres d’iniquité.