Ils passaient pour apostats : le paganisme croyait les avoir regagnés, et l’Eglise les avoir perdus. […] Qui peut voir sans pitié traiter d’héroïsme digne des panégyriques de l’Eglise les remords de conscience qu’elle fait semblant d’avoir de son métier de Comédienne, et l’irréligion réelle avec laquelle elle brave les censures de l’Eglise ? L’Eglise canoniser la Clairon ! […] On ajoute que l’Eglise ne peut que combler d’éloges son courage mâle, vraiment et héroïquement chrétien. […] On fait la comparaison blasphématoire de la comédie, non seulement avec les panégyriques des Saints dans la chaire, mais encore avec les cérémonies de l’Eglise dans la semaine sainte, et à l’usage de certaines Eglises où la passion est chantée par trois personnes.
Les Temples des Idoles étaient fermés et les Eglises étaient ouvertes. […] On verra par là combien l’Eglise a toujours été éloignée d’autoriser les Spectacles. […] Les danses se faisaient quelquefois devant l’Eglise, et on ne s’élevait pas moins fortement dans ces temps contre cet usage, ainsi qu’on le voit dans un Sacerdotal de l’Eglise de Venise de l’an 1555. […] Le Parlement donna un Arrêt contre eux en 1652. et l’Eglise de Paris en 1654. […] Car comment un Chrétien peut-il aimer une profession qui le rend abominable dans l’Eglise.
Ils sont pires : ce sont les tableaux du Carache, substitués aux anciens vitraux des Eglises ; leur perfection fait leur poison. […] C’est bien là la véritable fête des fous, elle n’a mérité ce titre que parce qu’on a transporté le théâtre dans l’Eglise. […] La raison en est simple ; quelle Eglise aurait voulu de tels Confrères ? […] L’Eglise a toujours condamné ce mélange peu édifiant de la chaire et du théâtre, du caractère de Ministre et des œuvres d’un Comédien. […] Le Pape Jean XXII va plus loin, il défend même les motets à l’Eglise.
Je n’ai voulu prouver autre chose, sinon que les prêtres ne sont plus en droit d’anathématiser ni les comédiens, ni leur profession ; et que vis-à-vis de l’église, un acteur doit être considéré à l’égal des autres citoyens, puis qu’il est citoyen lui-même et qu’il jouit de tous les droits civils sous la protection des lois. Tous les citoyens, en effet, qu’ils soient comédiens ou non, lorsqu’ils professent la religion chrétienne, n’ont droit aux prières de l’église et aux honneurs sacrés, qu’autant qu’ils se soumettraient aux pratiques religieuses et aux commandements de la morale divine. Je ne m’étendrai donc pas sur les deux sujets indiqués dans le titre du présent chapitre ; mais je crois devoir faire sentir ici, que les dangers de la profession de comédien, ne peuvent justifier les rigueurs de certains prêtres fanatiques, qui par ignorance des lois ecclésiastiques, et au mépris des lois séculières, prétendraient avoir le droit d’anathématiser la profession théâtrale, et refuser aux acteurs, les prières de l’église, et la sépulture en terre sainte. […] Donc ce saint évêque, père de l’église, l’un des plus savants docteurs de son temps, allait à la comédie : mais Nicole disait aussi que le danger de la comédie, est qu’on y fait paraître bien souvent le vice aussi aimable que la vertu. […] Il n’est pas surprenant qu’il s’en trouve toujours quelques-uns, assez fanatiques pour se croire en droit d’anathématiser la profession de comédien, la raison en est simple ; la comédie a souvent contribuée à démasquer l’hypocrisie, et la tartuferie des gens d’église.
Sous ce titre : Discours sur la Comédie où l’on voit la réponse au Théologien qui la défend, avec l’Histoire du Théâtre, et les sentiments des Docteurs de l’Eglise depuis le premier siècle jusqu’à présent. […] La Préface des sentiments de l’Eglise et des Pères sur la Comédie, in-12, 1694. […] Pour bien juger du mérite de cet ouvrage, il faut saisir le but principal de l’Auteur, qui est de justifier la pratique de l’Eglise, en excommuniant les Comédiens et en tolérant ceux qui vont aux Spectacles. Pour cela il rassemble plusieurs faits d’où dépend la connaissance des Spectacles de différents siècles, et rapporte les Jugements des Docteurs de l’Eglise et des Théologiens. […] La Préface des sentiments de l’Eglise et des Pères sur la Comédie, in-12, 1694.
Il a été déjà démontré que les comédiens du troisième âge, sont entièrement affranchis de toute excommunication de la part de l’église. […] Le refus des prières de l’église et de la sépulture, fait par le clergé aux comédiens, est encore un autre délit manifeste et réel, car c’est infliger une action pénale et imprimer le mépris public, à une profession instituée et régularisée par la volonté et les ordonnances du prince, en vertu des lois du royaume et sous la protection des tribunaux. […] Puisque le clergé ne peut exiger l’abjuration des comédiens, sans se constituer en délit contre la volonté du prince et des lois, il s’ensuit que le refus d’admettre à l’église le corps des acteurs, et de leur accorder des prières, ne peut non plus avoir lieu. Ce refus de recevoir à l’église le cadavre des comédiens décédés sans confession, est une conséquence de la réprobation de la profession d’acteur. […] Ils en conviennent eux-mêmes, en avouant qu’en cela, ils partageaient l’opinion générale de l’église et des souverains pontifes.
Si vous étiez aussi versés dans l’histoire de l’Eglise et dans ses saintes pratiques, que vous témoignez l’être dans les fables des Poètes, vous auriez su peut-être ce qui se passait autrefois aux Elections et aux Ordinations des Evêques. […] Il est mort, poursuivent-ils, le N. de ce mois, et dans l’accablement de tristesse où nous met une telle perte, la seule chose qui nous reste, est d’élever nos yeux vers Jésus Christ, afin qu’ayant pitié de l’abandonnement où nous sommes, il daigne donner un véritable Pasteur à son Eglise qu’il a fondée lui-même, et contre laquelle, selon sa promesse les portes de l’Enfer ne prévaudront jamais. » Et afin que l’on ne dise pas que cette tristesse n’était que passagère, et que la joie du successeur en effaçait entièrement le souvenir,1 on n’a qu’à lire pour être convaincu du contraire, le Décret qui se faisait en suite de l’Election pour être mis et conservé dans les Archives de l’Eglise de Rome. […] « On remercie la divine providence d’avoir converti les gémissements et les pleurs de l’Eglise en des cris d’acclamation et de joie, et d’avoir fait succéder une abondance de consolation à un excès de douleur.… la mort de notre S.
Il est donc constant que l’on ne peut danser dans un lieu saint, c’est-à-dire dans les Eglises ou Chapelles, ni dans les Cimetières, sans péché mortel. […] « On14 fait (dit-il) quelquefois dans les Eglises des jeux de Théâtre, où non seulement paraissent des personnes masquées et travesties (ce qui est monstrueux) mais les Ecclésiastiques même prennent part à ces folies. Nous vous enjoignons (ajoute-t-il plus bas) de détruire et d’arracher cette mauvaise coutume, qui est un véritable abus, afin que la sainteté des Eglises ne soit point violée par ces jeux profanes et indécents. » Mais il n’y a point de preuve plus puissante pour établir cette vérité, qu’on pèche grièvement lorsqu’on danse dans quelque lieu Saint ; que ce qui est marqué dans un Canon de ceux qu’on nomme Pénitentiaux, qui condamne à trois ans de pénitence, celui qui aurait commis cette irrévérence, que de danser seulement devant l’Eglise.
Page 134 L’église ne peut s’exposer au reproche d’agir à l’égard des comédiens avec deux poids et deux mesures. Page 134 Un jeune acteur de la Gaîté qui se suicida, reçut néanmoins les prières de l’église par ordre de l’évêque de Versailles. […] Page 135 Plusieurs fameux acteurs sont enterrés dans les églises de Saint-Sauveur et des Grands-Augustins, à Paris. […] Martinet, curé de Saint-Laurent, de faire à l’église la présentation du corps de l’acteur Philippe. […] Page 174 Affranchissement des Comédiens du troisième âge, de toute excommunication de l’Eglise.
Or pour bien entendre cela, il est bon de noter que tous les anciens Chrétiens, tant de l’Eglise, que de la police, et même du peuple, ont eu en grande détestation tels jeux, comme il appert par des traités faits spécialement contre iceux par saint Cyprienf, Tertullieng, et plusieurs autres : mais signamment ce grand docteur Gerson, après avoir écrit prolixement contre Roman de la Rose h, ajoute cinq conclusions, contre les jeux des sots qui se font ès jours des fêtes à Paris, où entre autres choses il dit, « que ceux qui favorisent à tels jeux pèchent mortellement, se montrant être plus infidèles et Païens, que Chrétiensi ». […] [NDE] Epître aux Ephésiens, V, 22-27 : « Que les femmes le soient à leurs maris, comme au Seigneur ; / Car le mari est le chef de la femme comme le Christ est le chef de l’église, lui, le sauveur du corps. / Mais comme l’église est soumise au Christ, qu’ainsi es femmes le soient aussi en tout à leurs maris. / Maris, aimez vos femmes comme le Christ a aimé l’église et s’est livré pour elle, / pour la sanctifier en la purifiant par la lustration d’eau avec parole, / pour se présenter à lui-même cette église glorieuse, sans tache ni ride ni rien de tel, mais sainte et sans reproche. » c. […] [NDE] Jean de Gerson, théologien et chancelier de l’Eglise de Paris, publia en 1402 un Traité contre le Roman de la Rose (Tractatus contra Romantiam de Rosa, qui ad illicitam venerem et libidinosum amorem utriusque status homines quodam libello excitabat). […] [NDE] Celui qui, le jour des réjouissances, néglige le rassemblement de l’Eglise pour se rendre au spectacle, qu’il soit excommunié.
L’Eglise, dans plusieurs conciles, a défendu la fréquentation des spectacles et les spectacles eux-mêmes. J’ai rapporté la décision du concile d’Elvire, dont les canons sont reçus de toute l’Eglise : il se tint au commencement du quatrième siècle. […] Mais revenons sur nos pas pour chercher dans les fastes de l’Eglise, en un temps où elle commençait à prendre le dessus sur les idolâtres, les empereurs ayant embrassé la foi chrétienne. […] On ne pensait pas différemment dans l’Eglise de Carthage. […] Dans le premier, on veut que les histrions, ceux qui montent sur le théâtre, de même que les apostats, soient reçus dans l’Eglise, si l’on reconnaît que leur conversion est bien sincère.
Le démon peut agir sur les corps ; il l’a fait plusieurs fois lorsque Dieu le lui a permis : l’ancien & le nouveau Testament en rapportent beaucoup d’exemples ; l’Eglise en est persuadée, les prieres, les exorcismes, qui sont de la plus haute antiquité, ne permettent pas d’en douter : mais les circonstances ridicules, infâmes, extravagantes qu’on y ajoute, ne portent sur aucune autorité, l’Ecriture n’en rapporte aucune, l’Eglise les condamne. […] Un recueil d’Anecdotes Ecclésiastiques, que n’a pas dicté la soumission à l’Eglise & le respect pour les choses saintes, mais qui renferme plusieurs choses vraies, accuse le Théatre d’être l’auteur de toutes ces rapsodies, qui ne seroient que burlesques si elles n’intéressoient la vertu. […] On ne voit rien de tout cela dans les premiers siecles de l’Eglise, quoique le pouvoir des démons y fût si bien connu, que les Apôtres & les Martyrs chassoient fréquemment les démons, en vertu du pouvoir que Jesus-Christ en avoit donné en termes exprès, in nomine meo demonia ejicient ; que Saint Pierre ait combattu Simon le magicien, Saint Paul le magicien Elimas, & c. […] Ces mysteres étoient des actions saintes, la Vie & la Passion de Jesus-Christ, d’où les comédiens prirent le nom de Confreres de la Passion ; d’où sont venues tant de représentations dans l’Eglise, à Noël, aux Rois, à la Semaine-sainte, à Pâques, à la Fête-Dieu, comme à Aix, à Angers, à Avignon, &c. […] Les attraits, l’indécence, la facilité, l’invitation des actrices, la scandaleuse multitude des objets séduisans dont on est environné, des piéges qui y sont tendus, dont presque personne n’échappe, ce corps de péché en donnoit horreur, comme il en donne encore aux Chrétiens, excitoit le zele des ministres, & allumoit les foudres de l’Eglise, comme il fait encore.
., que s’ils y résistent il est en droit de les punir à titre de rebelles, et que s’ils font quelque entreprise contre l’intérêt de l’Eglise ou la gloire de J. […] Mais le clergé de France était d’autant plus coupable, d’autant plus criminel de propager des dogmes aussi affreux qu’ils étaient condamnés et fulminés par les propres canons des SS. conciles, et que d’après les lois de l’Eglise, les souverains, loin d’être soumis à la puissance ecclésiastique, et de pouvoir être tués, lors même qu’ils deviendraient tyrans, sont au contraire considérés comme sacrés dans leur personne et dans leur autorité : 1° « Principi populi tui non maledices ; vous ne maudirez point le prince de votre nation. […] De plus, le concile déclare hérétiques tous ceux qui soutiendront opiniâtrement cette doctrine, et veut que comme tels ils soient punis selon les canons et les lois de l’Eglise. […] Si donc, il est prouvé par les événements les plus déplorables que l’ambition du clergé, que l’oubli de la discipline qui lui est propre, que l’ignorance des lois qu’il doit le plus connaître, l’aient porté à s’écarter de ses devoirs d’une manière aussi coupable, l’autorité séculière doit sans cesse se mettre en garde contre les nouvelles entreprises qu’il prétendrait former ; elle doit lui reconnaître une administration toute spéciale dans l’Eglise ; mais hors de l’Eglise, il lui appartient de surveiller la conduite des prêtres, et de savoir s’ils se conforment eux-mêmes aux propres lois qui leur sont imposées par les canons des conciles, parce que le prince est le protecteur né de ces mêmes conciles. […] Il reste donc aux procureurs et avocats-généraux près nos cours royales, aux procureurs du roi, aux préfets, sous-préfets et maires des diverses communes de bien se pénétrer de la suprématie de la puissance séculière sur la puissance ecclésiastique, et de l’autorité que le prince, en sa qualité de protecteur des saints canons, doit exercer sur les ministres du culte, afin de faire rentrer dans la discipline de l’Eglise ceux qui pourraient s’en écarter.
Le Pape Célestin dit, qu’il ne doit pas prétendre d’être écouté dans l’Eglise, mais qu’il doit être docile pour y être instruit, et pour se soumettre parfaitement aux ordres de ceux qui le conduisent. […] Ils croient par un erreur étrange, et digne de larmes, qu’ils ne célèbreraient pas dignement ces Fêtes, s’ils ne les passaient dans les festins et dans la débauche, et s’ils renonçaient à ces divertissements si contraires à l’honneur de Dieu, et à la piété de son Eglise ; comme si la solennité des Fêtes que l’Eglise n’a instituées que pour honorer les Saints, suivant la doctrine du Concile de Trente, ne consistait que dans le luxe et dans les plaisirs sensuels. […] C’est donc une loi de l’Eglise, qui ordonne que celui qui se rend dans les places, ou dans les endroits où se font les spectacles, au lieu d’être dans l’assemblée des fidèles pour prier les jours des Fêtes, soit séparé de la participation des saints mystères, et excommunié. […] Dieu le lui a donné pour appuyer les règles de la discipline de l’Eglise, et afin que ce que les Prélats et les Prêtres ne pourront pas gagner sur les peuples par la force de la parole divine qu’ils annoncent, s’accomplisse par la terreur que les Lois et les Ordonnances Civiles peuvent imprimer dans leur esprit. […] Me jetant donc aux pieds de votre Béatitude, et les baisant avec toute sorte de respect et d’humilité : je supplie la bonté divine, de conserver dans une santé parfaite, pour l’utilité, et pour l’avantage de son Eglise, votre Sainteté, qui marche si droitement en toutes choses.