Le second, Projet pour le rétablissement du Théâtre français, contenant les causes de sa décadence, et les remèdes qu’on y pourrait apporter. […] Cet ouvrage a pour titre, Défense du Traité de M. le Prince de Conti touchant la Comédie, ou Réfutation de la Dissertation sur la condamnation des Théâtres. […] M. l’Abbé Fleury, dans les Mœurs des Chrétiens, condamne les Théâtres ; chez Aubouin, en 1682. […] Cependant après plus de vingt années de silence, un particulier entreprit de justifier la Comédie par une Lettre qu’on a voulu faire passer pour une réponse faite à Boursault, auteur d’un volume de Pièces de Théâtre. […] Daubignac, qui a composé la Pratique du Théâtre.
Ne croyons pas qu’à Londres, où il y a tant de Gens de Lettres, & où les Poëtes Grecs sont si connus, le Théâtre Anglois soit approuvé de tout le monde. […] Voilà donc la premiere cause du désordre qui regna sur tous les Théâtres, l’ignorance des Régles. […] L’exemple du Théâtre François fait cesser le grand désordre qui regnoit sur les autres. […] On a parlé de cette Tragédie parce qu’elle a paru sur le Théâtre. […] Il est aisé de juger par cette Lettre, que Riccoboni, qui possédoit le Théâtre François, n’a point pensé tout ce que dans son Histoire du Théâtre Italien il a écrit de favorable à la Poësie Dramatique de sa Nation, qu’il a voulu ménager.
Le Poète qui se contenterait de mettre sur le Théâtre des événemens vrais, sans autre préparation, se montrerait peu instruit ; le possible est même banni de la Scène. […] Le Possible est plutôt admis au Théâtre que le vrai. […] On me dira que l’Auteur n’a point inventé le sujet, qu’il n’a fait que copier la Fontaine ; je répliquerai que ce n’est point une éxcuse : la Fontaine en a fait une Fâble & non une Pièce de Théâtre. […] Sédaine, qui copie si bien la nature, n’ait pas senti le ridicule d’un tel sujet adapté au Théâtre. […] Je le répète, la Vraisemblance est d’une nécessité absolue ; sans elle les Poèmes Dramatiques ne sauraient se soutenir : le genre du Théâtre si applaudi de nos jours, l’oblige sur-tout à ne jamais marcher qu’avec elle.
Or toute représentation de Théâtre est sans doute un péché mortel. […] Elle les excommunie, et s’ils meurent sans avoir abjuré authentiquement le Théâtre, elle leur refuse la sépulture des Fidèles. […] L’an 400. après la Fondation de Rome, les Censeurs proposèrent au Sénat de faire construire un Théâtre de pierre. […] N’avons-nous pas le Théâtre d’Euripide, de Sophocle, de Ménandre, etc. celui de Sénèque, de Plaute et de Térence ? […] Enfin il sort plus épris que jamais de l’amour du Théâtre.
L’ancien Théâtre Italien est soupçonné, avec assez de vraisemblance, de nous en avoir donné l’idée. […] Les Farces qu’elles représentaient jadis, & celles de nos jours, ont une grande analogie avec les Drames de notre Théâtre. […] L’Opéra-Sérieux qui leur permit de monter sur son Théâtre, ne s’attendait pas qu’ils dussent lui jouer un si vilain tour. […] Transporté dans une sphère nouvelle, ce singulier Théâtre se trouva tout-à-coup en état d’obscurcir les autres Spectacles. […] Monet, obtint en 1752. le privilege de réinstaler l’Opéra-Comique sur le Théâtre de la Foire.
« Pénélope venit, abiit Helena. » C’était une Pénélope que le théâtre a changée en Hélène. […] Ces passions que le théâtre excite sont d’autant plus dangereuses, que le plaisir qu’elles causent n’est point mêlé de ces peines et de ces chagrins qui suivent les autres passions, et qui servent quelquefois à en corriger : car ce qu’on voit dans les autres touche assez pour faire plaisir, et ne touche pas assez pour tourmenter. C’est en cela que consistent l’artifice, l’illusion et le danger du théâtre : car on ne se défie pas de l’amour ni de l’ambition, quand on n’en fait que sentir les mouvements sans en éprouver les inquiétudes. […] Les femmes, flattées des adorations qu’on rend à leur sexe sur le théâtre, s’habituent à être traitées en nymphes et en déesses. […] Aussi leurs écarts d’amours ne sont-ils ordinairement que des imitations de ce qu’elles ont vu sur le théâtre, où elles voient à découvert ce qui, dans le monde, ne s’opère que mystérieusement.
à la condamnation et à la honte de tous ceux qui montent sur le théâtre pour gagner de l’argent. […] Car l’Eglise a condamné les jeux de théâtre dans tous les siècles, ainsi qu’il paraît par les Ecrits des Saints Pères, qui ont invectivé contre ces vains et pernicieux amusements. […] Octobre 1584. rendu contre ceux qui avaient établi un théâtre dans l’Hôtel de Cluny ; et celui du 10. […] Les Comédiens et les Comédiennes ne montant sur le théâtre que pour y parler d’intrigues de mariages, ou d’amourettes. […] qui défend aux Religieuses de faire représenter des pièces de théâtre dans leurs Monastères, bien que ce soit des sujets de piété.
En un mot, le nouveau mérite qu’on ajouterait aux Pièces de Théâtre, en suivant le conseil que je donne ici, se démontre sans peine. […] Le Spectateur aurait lieu de se persuader qu’il est réellement témoin de l’avanture qu’il ne voit qu’au Théâtre. […] Le nouveau Spectacle a la gloire d’imiter Eschyle, Sophocle & Euripide, qui dès la naissance du Théâtre pratiquaient cette règle, source de mille beautés. […] Les Poèmes de nos grands maîtres sont ils remplis des disparates que se permettent quelques uns des jeunes Poètes qui se distinguent dans la carrière du Théâtre ? […] Il me serait aisé de rapporter un plus grand nombre de Poèmes de notre Théâtre qui n’ont aucune unité de personne.
C’est une douce violence que le Théâtre fait au spectateur, pour l’intéresser à l’action, & lui cacher la source de ses plaisirs. […] L’Acteur en montant sur le Théâtre doit, en quelque sorte, déposer l’homme, pour ne montrer que le personnage qu’il va représenter. […] voilà pourquoi tant de gens sortent du Théâtre avec la tranquillité, la froideur qu’ils avoient en y entrant. […] Le Théâtre n’est-il pas un fond qui rapporte sans culture ? […] Je crois moi que pour nous conserver de la sensibilité pour le Théâtre, il faudroit fermer les yeux, & n’ouvrir que les oreilles.
MEs principes ont dû vous étonner, Mademoiselle, rien de plus noble, selon vous, de si touchant, de si généreux, que les sentimens d’un Héros de Théâtre ; il atteint, ce semble, au sommet de la perfection. […] Corneille a prétendu justifier le Théâtre par le discredit de sa Théodore qui frappoit l’esprit de l’affreuse idée d’une prostitution à quoi cette Sainte étoit condamnée. Il suit de-là que l’on approuve tout ce qu’on souffre sur le Théâtre ; on ne hait donc pas les galanteries qui s’y produisent, on aime des représentations qui inspirent la tendresse, qui apprennent le langage séduisant de l’amour ; cette passion infâme paroît avec honneur sur la scéne, on fait gloire d’en être touché. […] Ne la cherchez point ailleurs que sur le Théâtre ; c’est la fournaise de Babylone, l’orchestre de l’impureté. […] L’orgueil est pareillement canonisé sur le Théâtre, c’est la source du vrai courage, la passion qui fait les Héros ; ceux-ci lui doivent l’élevation de leurs sentimens, en elle seule ils puisent la vraie grandeur.
les distingue encore agréablement, quand il dit, « il faut prendre garde à ce que l'on voit dans le Théâtre ; Car si c'est un Mime on rira ; si c'est un Danseur de Corde on craindra pour lui ; si c'est un Comédien on applaudira. » Mais ce qui doit nous assurer de la distinction de ces Acteurs, est que l'Echafaud qui était dressé dans le Théâtre chez les Grecs, c'est-à-dire dans l'aire, la cave ou l'espace libre de ce grand lieu nommé Théâtre, était composé de deux principales parties ; La première que l'on nommait proprement la scène, et que nous appelons communément le Théâtre, était fort élevée, et c'était où les Acteurs des Poèmes Dramatiques paraissaient au-devant des toiles peintes, et des tapisseries qui en faisaient la décoration, selon la qualité de la pièce que l'on jouait dans l'espace libre nommé Proscenium ou avant-scène ; et l'autre était plus basse, nommée Orchestre, c'est-à-dire un lieu pour danser, où les Histrions faisaient leurs dansesαὕτη δὲ ἔστιν ὁ τόπος, ὁ ἐκ σανίδων τὸ ἔδαφος. […] Or c'est un fait indubitable que ceux que l'on nommait Technites parmi les Grecs ou artisans de la Scène parmi les Romains, c'est-à-dire, les Histrions, Mimes, Farceurs, et autres Bouffons, ne jouaient point sur l'avant-scène en Grèce ; mais seulement sur l'Orchestre, dont nous avons le témoignage de Vitruve dans la description qu'il fait de tout le Théâtre fort exactement en homme intelligent et qui n'ignorait pas la construction des Théâtres, qui de son temps étaient en leur plus grande splendeur, soit pour la beauté des Edifices, soit pour l'excellence des Drames que l'on y représentait. Car il écrit en termes exprès que le Théâtre des Grecs était beaucoup moins avancé dans l'aire ou parterre que celui des Romains, parce que chez les premiers les Artisans de la Scène, c'est-à-dire proprement les Histrions, Mimes et Bateleurs ne montaient point sur l'avant-scène pour faire leurs plaisanteries ; mais qu'ils jouaient tous sur l'Orchestre. […] D'où l'on peut conclure assurément que si on les a mises sur le Théâtre aux Jeux Scéniques, c'était pour en varier le divertissement, et les rendre plus pompeux ; Et comme elles ne leur étaient pas attachées de nécessité, le nom de Scéniques ne leur a jamais convenu que par analogie, et seulement parce qu'elles étaient représentées dans le lieu nommé Scène ou Théâtre, autrement il les faudrait aussi nommer Megaliennes, Romaines, et du nom de tous les Spectacles, dans lesquels elles étaient données au peuple. […] l'art de jouer ou bouffonner, ne signifie proprement, comme on le voit dans Valère Maxime, que ce mauvais et déshonnête batelaged qui se pratiquait au Théâtre Romain « In scena lusisse. » Greg. contra Mar.
A MADAME LA MARQUISE DE B… Sur l’Indigence du Théâtre. […] Rendez-moi ces trois hommes, inimitables chacun dans leur genre, et je vous garantis le Théâtre aussi florissant que jamais il ait été. […] A vous dire vrai la jeunesse de la Champmeslé, la grâce de Baron, et les fréquentes nouveautés que donnait Racine faisaient un parfaitement bel effet sur le Théâtre. […] Pour revenir au Théâtre, je conviens avec vous qu’il a un peu dégéneré de ce qu’il était, et que dans toutes les Pièces nouvelles qui ont été faites depuis dix ans, il y a eu peu de nouveauté. […] Et Pompée au Théâtre est-il moins respecté Que quand l’Aigle Romaine allait à son côté !
Pollux distingue trois sortes de masques de Théâtre, des Comiques, des Tragiques & des Satyriques : il leur donne à tous, dans la description qu’il en fait, la difformité dont leur genre est susceptible, c’est-à-dire, des traits outrés & chargés à plaisir, un air hideux ou ridicule, & une grande bouche béante, toujours prête, pour ainsi dire, à dévorer les Spectateurs. […] Hippolyte, Hercule & Nestor, ne paraissaient sur le Théâtre qu’avec une tête reconnaissable, à l’aide de sa convenance avec leur caractère connu. […] C’est ainsi qu’agissait le Comédien, quand il jouait des Scènes où il devait changer d’affection, sans qu’il pût changer de masque derrière le Théâtre. […] Concluons que les Anciens avaient les Masques qui convenaient le mieux à leurs Théâtres, & qu’ils ne pouvaient pas se dispenser d’en faire porter à leurs Acteurs, quoique nous ayions raison à notre tour de faire jouer nos Acteurs à visage découvert. […] Voudriez-vous des Masques sur nos Théâtres, mon amie ?