[NDE] Adrien Baillet (1649-1706) est un théologien auteur d'un ouvrage critique intitulé M. de Molière.
C’est pour cela, très Saint Père, que j'ai cru vous devoir écrire avec confiance ce peu de mots, et vous envoyer à même temps un excellent ouvrage, composé par saint Charles Borromée, qui porta Grégoire XIII. prédécesseur de votre Sainteté, à qui saint Charles même le fit voir, à terminer les contestations qui troublaient sur ce sujet la ville de Milan, par ses Lettres Apostoliques ; et à défendre même dans Rome, comme nous lisons dans la vie de saint Charles, et les masques, et toutes sortes de spectacles les jours des Fêtes, et les Vendredis.
Voyez ci-dessus, à la page 154 de cet ouvrage, les diverses espèces d’excommunications que les prêtres voudraient fulminer contre les fidèles ; et aux pages 189 et 191, les conséquences funestes de ces sentences exterminatoires.
J’irai sortant de table applaudir au Théâtre, A ces jeux défendus que Grandmont idolâtre, Juger à son début l’Ouvrage d’un Auteur Qui souvent attend tout du talent de l’Acteur.
Cet ouvrage fait augurer qu’il en éxistait beaucoup d’autres long-tems avant, mais que l’impression n’a pas fait parvenir jusqu’à nous.
Sophocle, heureusement né pour ce genre de Poésie, avec un grand fond de génie, un goût délicat, une facilité merveilleuse pour l’expression, réduisit la Muse Tragique aux règles de la décence & du vrai ; elle apprit à se contenter d’une démarche noble & assurée, sans orgueil, sans faste, sans cette fierté gigantesque qui est au-dela de ce qu’on appelle héroïque ; il fut intéresser le cœur dans toute l’action, travailla les vers avec soin ; en un mot, il s’éleva par son génie & par son travail, au point que ses Ouvrages sont devenus l’exemple du beau & le modèle des règles.
Il ne lui est échappé de ces vastes Ouvrages, que quelques restes assez considérables pour intéresser la curiosité, mais trop mutilés pour la satisfaire.
Et, de peur que ses maximes sévères ne fissent un progrès nuisible à son intérêt, l’actrice est toujours la première à parodier son rôle, et à détruire son propre ouvrage.
Pour moi je n’en avais pas une idée si haute, je croyais que ces sortes d’Ouvrages n’étaient bons que pour désennuyer l’esprit, pour l’accoutumer à la lecture, et pour le faire passer ensuite à des choses plus solides.
Ce sont des défauts de cette espèce qui font que les personnes sans prévention, en convenant que Molière est le père du vrai Comique de situation, de la véritable économie théâtrale, ne regardent pas ses Ouvrages comme de parfaits modèles, & qu’elles condannent les mœurs du plus grand nombre de ses Pièces. […] Heureusement on a commencé depuis long-tems à épurer la Scène : les Destouches & les Lachaussée ont proscrit de leurs Ouvrages tous les mots grossiers ; on n’entend plus, dans les nouvelles Pièces, ces incongruités trop familières aux Dancourt, aux Montfleury, &c. […] Mais, dira-t-on, quel pauvre genre ce fera que notre Lyrique, & qu’avec raison nos voisins écriront, que l’ouvrage de littérature le plus ridicule, est un Opéra Français ? […] La première, la seconde, ni même la troisième Représentation ne seront jamais intérompues ; ce n’est qu’à la quatrième qu’il sera permis au Public de juger la Pièce tombée, & d’empêcher de l’achever : en effet, il est injuste qu’une seule Chambrée décide du sort d’un Ouvrage d’esprit, & prive du même droit ceux que la Salle trop étroite n’a pu contenir. […] Les Ouvrages de Corneille, de Racine, de Crébillon, de Molière, paraissent être des productions mâles, sorties d’un cerveau mûr ; & ceux de quelques Auteurs modernes, des saillies brillantes, des éclairs de génie que laisse échapper une bouillante Jeunesse.
Véritablement, il n’est pas nouveau ; depuis que le théâtre est établi, on eut toujours grand soin de nous le dire ; & depuis qu’on le dit, on a répondu, je le réponds encore, que si le théâtre purge les passions, forme les mœurs, c’est dans la spéculation, non pas certainement dans la pratique ; c’est dans les écrits de ceux qui nous en ont donné les regles, non pas dans les ouvrages de ceux qui les ont prétendu suivre. […] Brûlez donc auparavant tous ces écrits licentieux, sur-tout ces poésies libertines, tous ces ouvrages qui ne respirent que l’irréligion & l’athéïsme : opprobre (hélas !)
Suivez depuis la naissance du Christianisme, les rapports de cet ouvrage divin avec le théâtre. […] Voyez dans un ouvrage intitulé : Réflexions sur les théâtres, Populence et la considération des comédiens 1777, les gains énormes des anciens baladins.
Oui ; si quelque chose est capable de nous avilir aux yeux des Sages, c’est l’importance que nous attachons à cet art frivole & dangereux ; c’est de voir que les comédies & les comédiens soient l’objet continuel de nos conversations comme de nos ouvrages périodiques, & qu’on soit en quelque sorte obligé de se bannir de la société, lorsqu’on n’est pas en état d’y rendre compte du bon ou du mauvais succès d’une pièce nouvelle, du jeu d’un acteur, de la figure ou de la voix d’une actrice. […] Ce fameux Comique, qui dans le dernier siècle a porté cet art dangereux à sa dernière perfection, mais dont la mort devroit donner plus de frayeur aux amateurs du Spectacle que ses ouvrages ne leur causent d’admiration & de plaisir, a, dit-on, corrigé les mœurs de son siècle ; c’est-à-dire, qu’il a détruit par la force du ridicule quelques restes de mauvais goût, d’affectation dans le langage & dans les manières : mais de quel vice réel nous a-t-il en effet corrigés ?