Ce Saint était accoutumé à de pareilles scènes : toutes les nuits il les renouvelait et se mettait tout en sang. » J’avoue que quelque mauvaise humeur qu’on puisse avoir contre la comédie, je ne voudrais pas interdire cette espèce de pièce, et je ne crains pas que les Comédiens abusent de cette permission. […] Il rapporte, en finissant, le décret 17 d’un Concile de Cologne en 1549, qui défend absolument aux Religieuses, et par conséquent, ajoute-t-il, aux Religieux, de voir représenter des comédies ni d’en faire représenter dans leurs monastères, parce qu’il n’y a rien à gagner, et beaucoup à perdre, bien du mal à craindre, et nul bien à espérer, quand même ces pièces seraient sur des sujets de piété : Quæ spectacula, etiam de rebus sacris, parum boni, mali plurimum, relinquere in sanctimonialium mentibus possunt. […] Leurs crimes, qui étaient regardés comme des malheurs publics, faisaient tout craindre de la colère des Dieux.
A l’égard des hommes, la corruption est parvenue à un tel degré sur ce point, qu’il me paraît inutile d’en parler ; je me contenterai seulement de citer et d’adopter la maxime d’un Auteur recommandable qui ne craint pas de dire, qu’il n’y a plus d’honnêtes gens dans le monde, parce que la façon avec laquelle on traite aujourd’hui la passion d’amour déshonnore également tous les hommes. […] En effet, une fille qui consent que son Amant l’enlève, dans l’instant qu’elle est à l’Autel pour en épouser un autre que son père lui a destiné, et qui à la fin se trouve réduite par la mort de son mari à se tuer elle-même, ne peut, je pense, que présenter une leçon bien utile aux jeunes personnes ; puisque malheureusement il s’en trouve qui ne craignent pas de s’exposer au sort de Servilius et de Valérie. […] Racine savait très bien ce qui convenait à la Tragédie ; et, je le répète encore, s’il n’eût pas craint de révolter le Public, en critiquant le goût général de son siècle, il aurait dit ; « que les tendresses et les jalousies des Amants ne sauraient trouver que fort peu de place parmi le majestueux, l’intéressant et le lugubre d’une action tragique. » Racine savait et sentait à merveille cette vérité ; mais, par malheur pour le Théâtre moderne, non seulement il n’eut pas la force de la déclarer dans la Préface de sa Thébaïde ; il n’osa pas même la pratiquer, si ce n’est dans Esther et dans Athalie : il se livra, malgré ses lumières, à la corruption générale de ses prédécesseurs et de ses contemporains : il ne se contenta pas même de mettre de l’amour dans toutes ses autres Tragédies ; il fit aussi, de cette malheureuse passion, la base de tous les sujets tragiques qu’il a traités.
L’Impiété qui craint le feu, et qui est condamnée par toutes les Lois, n’a garde d’abord de se rebeller contre Dieu, ni de lui déclarer la guerre ; elle a sa prudence et sa politique, ses tours et ses détours, ses commencements et ses progrès. […] Il y a quatre sortes d’impies qui combattent la Divinité : les uns déclarés qui attaquent hautement la Majesté de Dieu, avec le blasphème dans la bouche : les autres cachés qui l’adorent en apparence, et qui le nient dans le fond du cœur : Il y en a qui croient un Dieu par manière d’acquit, et qui le faisant ou aveugle ou impuissant, ne le craignent pas : les derniers enfin plus dangereux que tous les autres, ne défendent la Religion que pour la détruire, ou en affaiblissant malicieusement ses preuves, ou en ravalant adroitement la dignité de ses Mystères. […] , « qu’il lui est très fâcheux d’être exposé aux reproches des gens de bien, que cela est capable de lui faire tort dans le monde, et qu’il a intérêt de conserver sa réputation » : Puisque la vraie gloire consiste dans la vertu, et qu’il n’y a point d’honnête homme que celui qui craint Dieu, et qui édifie le prochain.
Au reste, quelle excuse frivole, on craint le ridicule de la piété & de ses dehors, & pour l’éviter on tombe dans les apparences & dans l’excès de l’irréligion & du vice. […] Aristote a craint de choquer un peuple superstitieux, qui avoit fait mourir Socrate, pour n’avoir pas assez respecté ses Dieux. […] Heu fuge, sed nulla est jam fuga ; l’amour caché dans ce tableau, lance des traits, allume son flambeau ; ce n’est qu’une fille en peinture, mais n’en crains pas moins les blessures ; Properce regrette l’heureux tems où on ne connoissoit point ces peintures. […] Soit que la mort le prévint, soit que se défiant de lui-même, il ait craint de ne pouvoir l’achever, avec la même perfection ; soit que par vanité il ait voulu prouver à la postérité qu’on ne pouvoit l’égaler, comme en effet aucun Peintre n’a osé entreprendre de le finir. […] Les Romains, ces hommes si décens & si graves, avoient dans tous leurs jardins des Priapes, pour faire peur aux oiseaux, sans craindre d’offenser leurs Lucréces & leurs Virginies.
La Péripétie est la mort de Phocas : les deux Princes ne sont reconnus qu’après cette mort, & comme alors ils n’ont plus à le craindre, qu’importe au Spectateur, qui des deux soit Héraclius ? […] Elle est pleine de piété & de timidité : elle craint même de voir Joas, de peur que son trouble ne revéle le secret. […] ne craignez-vous pas d’attirer sa colere Sur vous, & sur ce Roi si cher à votre Amour ? […] Sans doute : mais Joad ne craint rien. […] Et qu’en diroit Socrate, qui dans le Passage que j’ai rapporté page 75, interdit la Poësie Dramatique à tout homme qui craint de voir troubler l’œconomie de son ame ?
« Un Bourgeois, dites-vous, craindrait de fréquenter ces Comédiens qu’on voit tous les jours à la table des Grands »fe : oui, un Bourgeois Janséniste, ignorant et cagot. […] Les sifflets étaient la seule cause de son ignominie, les sifflets aujourd’hui ne sont plus à craindre : voilà donc notre état devenu tout aussi respectable qu’un autre, puisque le Parterre a perdu le droit de nous siffler. « Un Clerc pour quinze sous, sans craindre le holà,/ Peut aller au Parterre, attaquer Attila. […] Vous voulez ici faire craindre au Public qu’ils ne soient ce qu’ils représentent. Quand un honnête homme avertit un autre honnête homme des moyens qu’un fripon doit employer pour le tromper, doit-on craindre que cet honnête Conseiller ne devienne un fripon lui-même, parce qu’instruit de tous les tons, de tous les détours, de toutes les grimaces que le fourbe qu’il accuse a coutume d’employer pour tromper quelqu’un, il en fait un tableau frappant à son ami ?
Qu’on ne craigne point de s’égarer en adoptant mes principes ; les Grands-Hommes qui ont traité des règles du Théâtre, seront presque toujours mes guides ; c’est à la lueur de leurs écrits que je ferai marcher les Poètes qui voudront me lire.
Il nous assure que les Jésuites n’ont pas seulement songé à répondre ; il devait suivre leur exemple et craindre le bon mot d’un Sicilien,3 " Quæso, inquit Prætor, Adversario meo da istum patronum, deinde mihi neminem.
Et un peu plus bas : Il est nécessaire que celui qui se fait craindre de plusieurs personnes, en craigne aussi lui-même plusieurs.
Or vous savez s’il ne l’est pas encore plus aujourd’hui, d’autant plus à craindre qu’elle y est plus rafinée & plus déguisée. […] vous craindriez ce que la justice de Dieu vous prépare.
On se sert d’un autre moyen qui facilite beaucoup les Poètes, mais qu’il faut craindre de répéter : celui qu’on introduit sur la Scène, souvent sans aucune raison, rend son entrée éxcusable, en disant à l’Acteur qui occupe le Théâtre, je vous cherchais, ou bien, si la Scène est vuide, je cherche un tel. […] Si l’on présume qu’on est en droit de faire leurs procès, il faut condamner les plus célèbres Auteurs, qui n’ont pas craint de commettre les mêmes fautes : ces grands Hommes sont les seuls coupables, puisqu’ils ont donné le prémier éxemple de l’oubli des règles.
Quelques injures que l’on puisse dire à un innocent, on craint de le défendre lorsque la religion y est mêlée : l’imposteur est toujours à couvert sous ce voile, l’innocent toujours opprimé et la vérité toujours cachée. […] Il craignait encore d’autoriser l’hypocrisie et de blesser par là sa gloire et son devoir, et n’ignorait pas que si Molière n’eût point fait Tartuffe, on eût moins fait de plaintes contre lui.
Le triomphe ayant été ordonné en faveur de Marcus Fulvius Proconsul, il en vint remercier le Sénat, et déclara que le jour qu'il prit AmbrasieLiv. l. 39 Ville capitale des Etoliens, il avait pour sa victoire voué les grands Jeux à Jupiter, et reçu de la Province pour cet effet jusqu'à cent livres d'or, qu'il demandait être tirées des grandes sommes qu'il apportait dans le Trésor public ; sur quoi le Sénat manda les Pontifes, pour savoir s'ils pouvaient en conscience faire une dépense si extraordinaire, tant ils craignaient d'offenser la sainteté des Jeux. […] par des amendes pécuniaires tout ce que l'on y faisait contre les Lois, tant ils craignaient que leurs Dieux en fussent irrités, et cet argent était employé au service de la Religion, comme les six Statues de Jupiter surnommées Zanes que Pausanias met au pied du Mont Cronius, et les huit autres qu'il compte encore auprès de celles-là, avaient été faites des amendes auxquelles les combattants de la Lutte, de l'escrime et d'autres Jeux qui avaient corrompu les Juges, et les Juges mêmes avaient été condamnés, et les inscriptions portaient qu'elles avaient été élevées pour honorer Jupiter, et pour témoigner la piété, des Æliens contre l'injustice et la fraude des Combattants qui devaient mettre toute leur espérance en leur mérite.
Il n’est pas à craindre aujourd’hui ; les images de dévotion sont proscrites, & on n’en souffriroit pas chez les Actrices, il faudroit trop souvent les voiler. […] Le danger de l’irréligion est très-grand pour elles : on leur insinue le déisme pour les mieux séduire (ce qui n’est pas nécessaire) ; il ne faut aucun effort pour les séduire, on ne doit craindre que d’en être séduit. […] doit-on craindre de lui offrir les propres bienfaits dont on le remercie ?
Les Poëtes chercherent les exemples des Passions réservées à la Tragédie parmi les Rois & les Héros, non seulement parce que leurs Passions ayant des suites que n’ont pas celles des Particuliers, causent le bonheur ou le malheur des Peuples, & les révolutions des Etats ; mais parce que les exemples frappent bien davantage, quand ils sont pris parmi ceux dont on craint le pouvoir, dont on respecte la dignité, ou dont on admire les grandes qualités. […] Les Comédiens prirent des masques très-difformes, afin que les personnes puissantes qu’ils avoient à craindre, ne s’imaginassent pas y trouver leur ressemblance. […] On les arrêta en leur faisant faire réflexion que tant que les Athéniens seroient si amoureux des Livres, leurs Armes ne seroient point à craindre.
ce n’est plus elle que je crains.
Si un pareil Ouvrage avait pour Auteur un homme grave et respectable par son état ou par sa dignité, il n’en serait pas pour cela plus à couvert de la critique ; elle serait seulement plus ménagée, et se ressentirait des égards que mériterait l’Auteur : mais qu’il vienne de moi qui, pendant plus de quarante ans, ai exercé la profession de Comédien, qui ne suis ni savant ni homme de Lettres, et qui par conséquent ne mérite ni égard ni ménagement ; c’en est assez pour me faire craindre que mon Livre soit mal reçu, ou qu’il fasse peu d’impression sur mes Lecteurs.
Pour établir de nouvelles Loix, ou pour remettre en vigueur les anciennes, il faut toute la fermeté et toute la puissance du Gouvernement ; mais la réformation du Théâtre ne demande pas le moindre effort : une simple Ordonnance suffirait, non seulement pour le réformer, mais même pour le détruire ; et cela sans qu’il y eût à craindre le moindre scandale, ni la moindre opposition.
En qualité de Général, je reglois la marche, je traçois le camp, je passois la revue, je mettois en bataille, j’ordonnois les évolutions ; je n’avois pas à craindre la fierté qui en impose aux amans. […] Les grands & les vrais principes de religion, qu’elle avoit reçus, & dont elle étoit sincerement pénétrée, lui faisoient craindre, tout ce qu’elle voyoit & entendoit. […] Il recommande à son successeur d’être obéissant au Saint Siege Apostolique, de craindre Dieu, d’observer ses commandemens, d’honorer les gens d’Eglise, de procurer sur toutes choses l’exaltation de la foi, de sacrifier toutes choses pour la défense & l’avancement de la Religion Catholique ; & si quelqu’un se trouvoit infecté des bérésies & doctrines condamnées, Sa Majesté le déclare incapable de regner, & le prive de tout droit à la Couronne, &c. […] Bien loin de craindre les Actéons, elle seroit au désespoir de n’en pas trouver.
Craignez de travestir, Baladins subalternes, Les libertins titrés en buveurs de tavernes ; Faites-en des Chaulieux & des Anacréons, A qui tous les Amours ont fournit des chansons, Que toujours au travers des brouillards de l’ivresse, Malgré tous vos écarts, le courtisan paroisse, Et ne confondez pas, dans vos pesans croquis, Le délire d’un rustre & celui d’un Marquis. […] Hors d’haleine, elle s’echappe de mes bras Tous prêts à la saisir…… Et Dieu que l’on nous peint de ses foudres armé, Ne craint pas ses fureurs vengeresse. (Aussi ne le craint-il gueres.) […] Que ne servent-ils d’exemple aux hommes timides qui rampent dans le cercle étroit des bienséances serviles, & qui osent écrire quand ils craignent de penser !
Car ils ne doivent pas apporter moins de vigilance, d’application, et de soins à faire respecter et craindre la majesté du Dieu qu’ils adorent, laquelle est blessée par la corruption des bonnes mœurs ; qu’ils en apportent à faire révérer le Souverain qu’ils servent, en faisant observer ses ordonnances. […] Je réponds à cela, que la prudence et les maximes de la politique obligent souvent les Magistrats à tolérer malgré eux des choses, qu’ils n’approuvent pas, pour empêcher de plus grands maux et de plus fâcheux désordres qu’ils craignent. […] Qu’il se mette au moins un peu en peine pour son prochain ; qu’il craigne d’être à ses yeux un sujet de chûte et de scandale ; et qu’il soit épouvanté par ces paroles de Jésus-Christ ? […] et en vous exposant témérairement comme vous faites, au danger de l’offenser : n’avez-vous pas sujet de craindre qu’il ne vous abandonne à votre faiblesse ; comme les Histoires nous apprennent qu’il en a abandonné tant d’autres. […] Ces sentiments sont dignes des Athées, et non pas des Chrétiens qui craignent Dieu.
Je ne suis point jaloux des applaudissements qu’on donne à ces Messieurs, j’admire leurs grands talents ; mais je les plains de les employer si malheureusement, qu’il faut renoncer à la Religion que nous professons, et à l’Evangile de Jésus-Christ, pour ne pas croire qu’il est fort à craindre que ce qui leur a attiré l’applaudissement des hommes, n’attire sur eux l’indignation de Dieu.
N’est-il pas à craindre que la nation où l’usage des spectacles s’est établi ait le même sort que les Grecs et les Romains, qui ne furent détruits que pour s’être livrés à la mollesse ?
N’ai-je pas trop appris à craindre ces imputations téméraires ? […] Craignez le premier pas qu’on ne fait jamais seul, et songez qu’il est plus aisé de garder de bonnes mœurs que de mettre un terme aux mauvaises. […] Les enfants rustiquement élevés n’avaient point de teint à conserver, et ne craignaient point les injures de l’air auxquelles ils s’étaient aguerris de bonne heure. […] Ils ne seront point, comme ailleurs, tenus en respect par les grands dont ils recherchent la bienveillance et dont ils craignent la disgrâce. […] Lecteurs, je puis me tromper moi-même, mais non pas vous tromper volontairement ; craignez mes erreurs et non ma mauvaise foi.
Il était à craindre que les fidèles, mal instruits ou trop faciles, ne se laissassent entraîner dans une occasion si séduisante. […] L'idolâtrie était sans doute un grand désordre, on ne le craint plus, le culte des Idoles est aboli ; mais indépendamment de la superstition, la vertu les a toujours réprouvés, et quoique aujourd’hui peut-être les vices y soient étalés moins grossièrement, la vertu n'en redoute pas moins les attaques, les exhortations des Pères n'y trouvent pas moins leur application. […] Plût à Dieu ne vît-il pas nos forfaits, nous n'aurions pas à craindre son jugement ; mais il ne les voit que trop, aussib ien que nos spectacles.
Que les Poètes Tragiques ne craignent donc point de puiser dans nos annales, qu’ils ayent même la hardiesse de nous retracer des faits presque nouveaux, n’est-ce donc que la seule l’Antiquité qui rend les sujets vraiment tragiques ? […] Le nouveau Théâtre ne craint point encore de manquer de Sujets.
Car si en ce lieu où l'on chante les Psaumes, où l'on explique la parole de Dieu, et où l'on craint et respecte sa divine Majesté ; la concupiscence ne laisse pas de se glisser secrètement dans les cœurs, comme un subtil larron; Ceux qui sont toujours à la Comédie, où ils ne voient et n'entendent rien de bon, où tout est plein d'infamie et d'iniquités dont leurs oreilles et leurs yeux sont investis de toutes parts; comment pourront-ils surmonter la concupiscence ? […] Ne craignez-vous point, ô homme ?
Il ne lui eût rien coûté de se rétracter & de s’avouer calomniateur, quand il avoit quelque vengeance à craindre de ceux qu’il avoit infulté, & de leur faire lâchement sa cour. […] On loue, on caresse, on récompense les hommes qu’on craint & les femmes dont on abuse. […] Le goût de ce fameux libertin est une paresse voluptueuse : il craint le travail, la peine, l’étude ; il ne veut pas chercher, mais goûter ; acquérir, mais jouir. […] Le Sieur Bernard est plus vif, craint moins l’étude & le travail ; il paroît même aimer ce travail & cette étude. […] Ceux, dit-il, à qui une conscience délicate fait craindre l’ombre du danger, ceux qu’un sentiment trop vif rend plus suseptibles des plus légères impressions, feront encore mieux de ne pas le lire ; je leur conseille d’éviter avec soin tous ce qui pourroit non-seulement blesser, mais même allarmer la vertu .
Ces diverses réfléxions m’ont engagé à traiter séparément de quelques genres de Poèmes, qu’il était à craindre qu’on ne remarquât pas assez, si je les avais confondus avec les principaux Drames joués au Théâtre.
J’ai pensé moi-même comme les autres, pendant un temps ; et, dans la crainte qu’on ne m’accusât de présomption en combattant l’opinion générale, j’ai soutenu les règles tant que j’ai pu ; comme on en peut juger, surtout par mon examen sur Œdipe : mais, en pénétrant plus avant, je me suis senti forcé de les abandonner ; et je me suis dit à moi-même que si mon sentiment était fondé sur la vérité, je ne devais point craindre de parler.
Cet ouvrage a eu le plus grand succès, & une foule d’imitateurs ; il eût dû s’en contenter, tout au plus y ajouter son théatre historique, qui peut en être regardé comme la suite ; ce n’est qu’une autre maniere d’écrire l’histoire de France : qui se seroit attendu qu’à l’âge de 80 ans, ce grave Magistrat se donnât pour comédien, & voulut, pour terminer plus glorieusement sa carriere, joindre à sa couronne les lauriers de Melpomene & de Thalie, qu’il auroit dû craindre de flétrir en les y mettant. […] Que penser d’un livre qui ne les craint pas même pour la jeunesse. […] Je crains bien, dit le Roi, qu’il n’aime beaucoup le bal, & que ma fille ne danse trop. […] Est-ce là purger les passions par la terreur & la pitié ; & que fait-on craindre puisqu’on fait absoudre du parricide ?
Entre tous les plaisirs dangéreux pour la vertu, dit ce Prince, entre tous ceux, qu’on a inventés, il n’y en a pas qui soient plus à craindre, que ceux des Théatres. […] Quoiqu’on veuille dire, que le Théatre ne souffre plus rien que de chaste, & que les passions y soient traitées d’une maniere plus honnête, dit Mr. le Prince de Conti, en parlant du Théatre François… Je soutiens, qu’il n’en est pas moins contraire à la vertu, & j’ose même dire, que le retranchement de ces choses immodestes, le rend beaucoup plus à craindre. […] En parlant de ces gens de probité, qui communient souvent, & qui cependant vont aux spectacles … « Que je crains, dit-il, que leur probité ne soit celle des sages du monde, qui ne savent s’ils sont Chrétiens ou non, & qui s’imaginent avoir rempli tous les devoirs de la vertu, lorsqu’ils vivent en gens d’honneur, sans tromper personne, pendant qu’ils se trompent eux-mêmes, en donnant tout à leurs plaisirs ! […] Paul : que celui qui croit être ferme, craigne de tomber : ils ignorent que, quand ils seroient tellement à tout épreuve, qu’ils n’auroient rien à craindre pour eux-mêmes, ils auroient encore à craindre le scandale, qu’ils donnent aux autres, selon ce que dit ce même Apôtre : pourquoi scandalisez vous votre frere infirme ? […] Sont-elles donc leur mere pour aider à les séduire »6 « Quel jugement terrible n’auront pas à craindre dans leurs derniers momens, les peres & meres, qui, par leur exemple, auront inspiré à leurs enfans le goût & l’amour du Théatre !
Ne craignons pas cependant l’effusion de sang : ce sont des héros de théatre qui se donnent des deffis sur la scène & s’embrassent dans les coulisses. […] Le théatre ne forme pas des vaillans preux : celui-ci peu fait à des pareils gestes, voulut se retirer : mais un autre prince se déclare son chevalier, accepte le défi, prend son bouclier & son casque, & se montre dans le champ de bataille, pour soutenir l’honneur de son favori, le fait monter sur le théatre danser une passecaille, & jette à ses pieds une boutse de cent cinquante ducats, qu’il avoit ramassés dans une collecte faite charitablement pour lui dans toute la ville, l’assurant qu’il n’avoit rien à craindre, qu’il le défendroit jusqu’au dernier soupir, & feroit plus pour lui qu’on n’avoit fait pour la République. […] L’Amérique au contraire pense en barbare : les colonies angloises, qui ne veulent point se soumettre aux Bils du Parlement, & ne craignent pas la guerre civile, dans le congrès général tenu à Philadelphie, où se sont réunies les provinces, parmi plusieurs règlemens qu’on a cru nécessaires pour entretenir les vertus guerrieres, & se bien défendre contre les entreprises de la metropole, on a expressément défendu de souffrir dans tout le pays aucune sorte de théatre, opéra, comédie, farce, &c. comme uniquement propre à énerver les corps & les esprits, & à rendre les habitans incapables de soutenir les fatigues de la guerre.
Ne craignez rien, dit-il, votre vertueuse fille est dûe à un homme qui craint Dieu : Timenti Deum debetur filia tua. […] Veillez sur vous, gardez-vous de toute impureté, évitez le commerce des femmes, & hors la vôtre, craignez jusqu’à l’idée du crime (quelle puérile délicatesse !).
Sont-ils moins à craindre, parce qu’on y est poli, léger, élégant ? […] Dans les principes de la religion & de la vertu on appelle licencieux, on craint comme dangereux, tout discours qui fait naître des idées impures, quoique voilé de termes équivoques, à moins que la nécessité n’oblige à les tenir, comme les Médecins, les Confesseurs, &c. […] Quelle tournure à donner à l’esprit des filles, que de leur inspirer le goût du théatre, qu’on devroit leur faire craindre comme l’écueil le plus dangereux de la vertu !
Je crains bien que les sévères censeurs du Théâtre n’en prennent occasion de crier de nouveau contre ceux qui composent des Drames, qui les jouent, & qui assistent à leur représentation. […] » Sa main revient si souvent, qu’on s’apperçoit que l’Auteur craint de trouver des Spectateurs trop crédules. […] Pourquoi Thérèse craindrait-elle tant d’être surprise avec Mazet, si elle ne voulait que se jouer innocemment de ce pauvre garçon !
Vous ne craignez point de mourir comme eux, après avoir vécu comme eux, et vous ne pensez pas au misérable état de ces malheureux génies que vous regardez avec tant d’envie et d’admiration. […] Ne craignez-vous point qu’on dise que vous êtes un soldat de son Armée, et qu’on mette dans le rang de ses visions la comparaison que vous faites de Monsieur Le Maistre avec lui. […] Il paraît assez par la profession que vous faites, et par la manière dont vous écrivez que vous craignez moins d’offenser Dieu que de ne plaire pas aux hommes ; puisque pour flatter la passion de quelques-uns, vous vous moquez de l’Ecriture, des Conciles, des Saints Pères, et des personnes qui tâchent d’imiter leurs vertus.
Mais l’impureté est-elle seule à craindre ? […] Ne craignent-ils pas que la foudre les écrase ? […] L’exemple du blasphème, même dans les fausses religions, laisse une impression d’impiété ; on apprend insensiblement à ne plus craindre ce que l’on voit si aisément braver.
L’application est toute simple, on n’a pas à craindre de s’y méprendre, le mari d’une Comédienne ne peut douter de son sort. […] « Cette Actrice est continuellement agitée des remords de conscience sur la validité de son mariage ; elle craint d’habiter avec un homme qui n’est pas son mari, et demande qu’un sacrement dont elle use depuis cinq ans, soit déclaré nul, pour pouvoir se marier ailleurs. » La conscience d’une Comédienne ! […] Tandis que ces mêmes remords ne l’empêchent pas de monter sur le théâtre, d’avoir des intrigues, de vouloir la cassation de ce même sacrement qu’elle respecte si fort, et de se présenter sans rougir à l’audience, comme coupable d’une profanation envers l’Eglise, d’une supposition de domicile envers la justice, d’une mauvaise foi envers un mineur, d’un concubinage de cinq ans, si par la fraude, et de sa connaissance, il n’y a pas eu de vrai mariage : une femme de soixante-cinq ans, nourrie dans les intrigues, vouée à l’inconstance, après une habitation de cinq ans, entreprendre de détruire son mariage, et ne pas craindre de s’exposer à la dérision du public qu’elle scandalise !
« Il lui donna hautement son approbation, et ne craignit point de faire tort à son jugement, en lui donnant la préférence. » Les beaux esprits du temps le répétèrent partout. […] Enfin il lui offre un duel, qu’il ne craignait pas qu’on acceptât : « Que M. […] C’était une vraie farce, et si la nation des Comédiens n’eût craint la vengeance que venait d’éprouver à Loudun Urbain Grandier, pour avoir fait une satire contre l’Evêque de Luçonj, je ne doute pas qu’on n’eût composé quelque comédie sur le Cardinal rival du Cid.
C’est ici la maison à deux portes : de l’une ils sortent en furieux, & vont aux tribunaux ordinaires faire valoir leurs priviléges ; ils se réfugient dans l’autre, quand on les attaque, & qu’ils craignent les évenemens. […] Palissot, homme courageux & ferme, qui ne craint ni les actrices, ni les philosophes, a tenu parole ; il a composé un mémoire justificatif, fait imprimer sa piece avec approbation & permission, malgré les indécences que le censeur a jugé très-décentes. […] Ne craint-il pas quelque excommunication ? […] Vous avez craint que le Public n’établît une sorte d’identité entre les personnages de ma Comédie & les acteurs & les actrices chargés de les représenter. […] Le nom de Dévot a été plus long-temps respecté parmi nous que celui de Philosophe : Moliere cependant n’a pas craint de faire dire au Tartuffe : Ah !
Il n'y a plus lieu d'y craindre l'apostasie des Fidèles ; on ne saurait plus les accuser d'entrer dans la société des Idoles, que l'on ne voit plus au Théâtre qu'avec des sentiments dignes des Chrétiens, je veux dire qu'avec horreur ou avec mépris ; et ce qui fut autrefois un sacrilège, n'est plus maintenant qu'un divertissement public, agréable et sans crime à cet égard.
Je ne crains point de trop hazarder en entreprenant ce Chapitre. […] Doit-on craindre que la mode de la Musique enjouée, dure aussi peu que celle de la parure, & que la réputation de bien des Auteurs ?
La malignité des Poètes, ni celle des Spectateurs ne perdit rien à cette défense ; la ressemblance des masques, des vêtemens, de l’action, designèrent si bien les Personages, qu’on les nommait en les voyant : telle fut la Comédie moyenne ; où le Poète n’ayant plus à craindre le reproche de la personalité, n’en était que plus hardi dans ses insultes ; d’autant plus sûr d’ailleurs d’être applaudi, qu’en repaissant la malice des Spectateurs, par la noirceur des portraits, il ménageait encore à leur vanité le plaisir de deviner les modèles. […] Quant aux suffrages des Athéniens, un Peuple ennemi de toute domination, devait craindre sur-tout la supériorité du mérite.
Disons donc, avec La Rochefoucauld, que tous les grands divertissements sont dangereux pour la vertu ; mais qu’entre tous ceux qui sont inventés, il n’y en a pas qui soient plus à craindre que ceux du théâtre. […] si les chutes sont à craindre dans les lieux où le démon lutte en esclave qui redoute la présence de son maître, qui peut se promettre de demeurer ferme dans un lieu où le démon tente en maître qui sent le pouvoir qu’il a sur ses esclaves ?
Les mères pouvaient y conduire leurs filles, sans craindre que leur pudeur fût offensée par de hideux tableaux, par des scènes dégoûtantes d’obscénité. […] J’appelle influence expansive ce qui développe le germe d’une passion ou d’un goût ; et il est incontestable que les sujets dramatiques actuels, par eux-mêmes et les formes qu’on leur donne, substituent l’horreur à la terreur qui suffisait autrefois pour émouvoir profondément : la conséquence de cette innovation s’aperçoit par la préférence que le public accorde aux nouvelles compositions sur nos premiers chefs-d’œuvre : si quelquefois encore on représente au Théâtre Français une tragédie de Corneille ou de Racine, la salle est toujours vide, ce qui pourrait faire craindre que la licence de la scène ne se glissât un jour dans les mœurs et qu’on ne sifflât pas toujours sur la place publique ce qu’on tolère aujourd’hui au théâtre.
Et c’est ainsi, ma Sœur, que si je ne craignais de m’étendre trop (n’ayant point entrepris d’écrire contre les comédies, mais seulement de vous montrer l’obligation que vous avez d’en détourner vos enfants) je vous ferais voir que tout ce que S. […] encore présente dans son sein : qu’on ne doit pas moins craindre aujourd’hui d’apprendre à pratiquer ce qu’on s’accoutume à voir représenter : et que quand les comédies d’aujourd’hui n’auraient rien de criminel, elles ne laisseraient pas néanmoins d’emporter avec elles une vanité et une inutilité qui est aussi incompatible avec les devoirs des Chrétiens de notre temps, qu’avec ceux des premiers Chrétiens.
Elles en avoient d’autres qui font moins du bruit que le canon, & que les Héros craignent encore moins, quoique plus dangéreuses. […] Le Prince de Condé & l’Amiral de Coligni comploterent d’enlever le Roi, la Reine & la galante Cour, & vinrent avec deux mille chevaux, couverts du casque de Mars & de l’égide de Minerve, sans craindre le carquois de l’Amour, bien resolus de repousser tous les traits que tant de beaux yeux pourroient lancer. […] Ces Troupes suivent dans les voyages, sans craindre que les ennemis de l’Etat les enlevent, & vont dans les armées sans avoir à combattre que les cœurs dont elles font une grande deconfiteure. […] 1° Nous ne lui avons donné qu’une centaine de femmes figurantes ; ce nombre est peu vraisemblable, semblable, & nous craignons d’en dire trop. […] Mais il n’y avoit rien à craindre, c’étoit des Religieuses très-obéissantes.
Je crains bien que M. […] « Je crains bien, ajoute M. […] Qui n’aime aucune femme en a mille à craindre. […] Ne nous flattons point d’avoir tant à nous craindre. […] Voilà dirait-il, ce que vous devez craindre ; et le théâtre l’a dit mille fois.
Il s’est peut-être autant flatté de l’exception que je la crains. […] Si les spectatrices ont les mêmes embarras, les mêmes inconvénients, les mêmes peines à craindre, elles ont du moins les mêmes précautions à prendre, et surtout le même bonheur à espérer. […] Que l’on ne craigne pas que les sujets tarissent : tout préjugé à part, la scène est susceptible de toutes sortes de vices ; il n’en est point qui n’y puisse paraître, si on l’habille avec décence et avec une certaine délicatesse. […] Le Brun à qui M.F. reproche d’avoir outré la matière : mais puisque l’occasion s’en présente, on croit devoir le justifier un peu aux yeux de ceux qui ne connaîtraient pas son ouvrage ; on ne craint rien de ceux qui le connaissent. […] Il leur devrait être cependant plus aisé qu’aux autres femmes de ne rien craindre à cet égard, puisque leurs aventures n’étant jamais ignorées, leur sagesse ne le serait pas.
Quand je lis dans Homere les fureurs d’Achile, comme je lis tranquillement, j’ai le tems de réflechir, & de le condamner ; mais un Spectateur n’a pas le tems de réfléchir, & un habile Comédien le pénetre malgré lui, de tout ce qu’il prononce, Le jeu des Passions saisit le Spectateur, Il aime, il hait, il craint, & lui-même est Acteur.
Ce grand exemple autorise la pompe des Rois, et les oblige à ne se montrer jamais en public qu’ils n’imitent la magnificence de Dieu : Mais au milieu de cette cérémonie, ils doivent se ressouvenir que les habits sont les peines du péché, que dans l'état d’innocence, l’homme n’était revêtu que de la Justice originelle, que cette robe précieuse était à l’épreuve de toutes les saisons, et que comme il n’avait point encore offensé Dieu, il ne craignait point aussi la honte ni la douleur dans sa nudité, Cette pensée retiendra les Princes dans la modestie au milieu de leur Triomphe, et leur persuadera que les plus riches habits sont les reproches et les supplices de notre ancienne désobéissance.
Et l’illustre Montesquieu, dont la France se glorifiera toujours, n’a pas craint, dans un endroit de l’Esprit des Loix, de parler de la musique avec enthousiasme, & de l’élever au-dessus de toutes les sciences. […] Cet Empereur les ayant entendus, craignit qu’ils n’amolissent son courage, & ne causassent de grands désordres dans ses Etats ; il fit briser tous leurs instrumens, les renvoya sans délai, & défendit qu’aucun Musicien pût s’établir jamais dans son Empire. […] La musique n’est pas tout-à-fait incompatible avec la sagesse ; mais les dangers auxquels elle èxpose une jolie femme, doivent la lui faire craindre. […] Il est vrai que j’ai peut-être à craindre qu’on ne dise encore ; puisque la musique est si peu de chose, qu’est-ce donc que notre Théâtre favori ?
Mais, si les vérités de l’Evangile n’étonnent point certains esprits, comme j’ai bien lieu de le croire, ne craignent-ils pas du moins la loi qui proscrit en termes formels les jurements sur le Théâtre ? […] Mais que quiconque parle de chercher où sont ses membres au jugement dernier, craigne de ne les trouver que trop tôt. […] D’une autre part ; comme Amphiaraus a beaucoup de religion, l’on craint fort que le succès ne tourne de son côté : P. 101. […] N’avons-nous pas une lumière plus pure pour nous diriger et de plus terribles châtiments à craindre si nous ne la suivons pas ?
Mais Louis se fait craindre & se fait obéir. […] Que les simples Fideles doivent encore plus craindre pour eux-mêmes : Lapsus majorum, tremor minorum. […] Il ne craint point d’avancer que ces Abbés qui suivent les Spectacles, n’ont pas les vertus que leur état exige. 2°. […] Nous ne craignons pas d’être désavoués par M. […] Les Apôtres de l’impiété craindront les effets de cette justice, dont M.
La Tragédie est l’Histoire du malheur des Rois, des amours & de la faiblesse des Heros ; elle apprend à craindre l’effet des grandes passions, & à redouter la foudre, même à l’ombre du dais.
Jamais ils n’oseraient le regarder en face ; ils craindraient de porter leurs regards trop bas, ou de laisser apercevoir cette fourbe noblesse plus propre à inspirer l’indignation et le mépris, que le respect et la vénération.
Ajout de 1712 : et craindre pour sa Patrie k.
Pompée fut le premier qui en bâtit un de pierre, à demeure ; mais comme il craignait la sévérité des Censeurs, il prit la précaution d’y élever un temple à Vénus, et de ne proposer son théâtre que comme un accompagnement de cet édifice sacré.
Elisabeth qui pendant le règne de sa sœur avoit résisté à tous les efforts qu’on avoit fait pour l’en rendre, devoit tout craindre de la persécution d’un mari dont elle connoissoit le zèle impérieux ; d’ailleurs elle ne pouvoit s’en faire sans reconnoître l’autorité du Pape qui l’avoit condamnée déshonorer son père & sa mère, réprouver leur mariage, & avouer sa bâtardise ; & quel mépris n’auroit-on pas eu pour elle, il lui falloit même une dispense de Rome pour épouser son beau-frère. […] Les révoltés des Pays-Bas qui n’avoient pas moins à craindre l’armée navale de Philippe, si elle eut débarqué sur leur côte, n’eurent pas moins de joie de sa défaite ; mais ils n’eurent pas la fatuité d’en triompher, quoiqu’ils y eussent autant de part que les Anglois ; ils firent également frapper une médaille aussi ingénieuse, mais plus modeste ; d’un côté on lisoit ces paroles : Soli Deo honor & gloria , & au revers celles-ci : Classis Hispanita venit, abiit, fugit , ce qui étoit vrai. […] Elisabeth, témoin des horreurs de la maison paternelle, née elle-même d’un de ses mariages infortunés, & d’une mère décapitée pour cause d’adultêre, fut effrayée avec raison, & craignit pour elle-même une pareille destinée : du moins est-il certain que jalouse de l’autorité souveraine, elle redouta celle d’un mari qui auroit pu la gêner dans sa liberté & ses intrigues. […] Marie fit des fautes, & des mariages peu convenables ; on lui impute des crimes qu’on n’a jamais prouvé, & qu’elle a toujours nié, Elisabeth en fut la cause ayant empêché tous les mariages convenables qu’on lui proposoit pour ne pas avoir un voisin à craindre dans un mari entreprenant ; elle empêcha le mariage avec l’Archiduc d’Autriche, parce qu’étant Gouverneur des Pays-Bas & d’une maison si puissante, elle le craignoit ; avec le Comte de Lenox & le Duc de Norfolk ses parens, parce qu’ils auroient pû faire valoir ses droits ; elle fit même décapiter le Duc, parce que le bruit courut qu’il avoit épousé secretement la Reine d’Ecosse, elle lui offrit pourtant le Duc de Leicester dont elle comptoit être toujours la maîtresse. […] ô qu’il est doux de plaindre le sort d’un ennemi lorsqu’il n’est plus à craindre !
Sans savoir de quoi il s’agit, il commence par condamner le père avec dureté : Qu’un intérêt cruel au cloître a condamnée, Que l’on ensevelit pour ne pas la doter, Qui pousse des soupirs que l’on craint d’écouter, Et donne, en détestant sa retraite profonde, Au ciel des vœux forcés, & des regrets au monde. […] Pesez ces mots, dit-il d’un air menaçant, craignez le jugement de Dieu. […] L’Eglise a défendu la profession religieuse & les mariages forcés, la violence y est un empêchement dirimant qui en emporte la nullité ; mais il n’est pas moins vrai qu’il est scandaleux contre la religion, les mœurs & le bien de la société de déclamer contre l’autorité paternelle, de la mépriser, la braver, la tourner en ridicule, la mettre en probleme ; qu’il est mille fois plus à craindre que les enfans s’oublient & fassent des mariages qui les rendent malheureux toute leur vie, qu’il ne l’est que des parens abusent de leur autorité. […] On n’a fait pour elle que ce que l’on fait pour les Pensionnaires que l’on élève avec amitié & avec piété, à qui l’on fait craindre le monde & ses dangers, & estimer l’état religieux, très-estimable en effet, & très-heureux pour ceux qui y sont appelés par de bons discours & de bons exemples. […] Un Conseiller au Parlement, qu’on dit avoir plusieurs fois reçu des réclamations, l’ignore-t-il, ne doit-il pas le craindre pour lui-même & pour ce fils chéri qu’il veut enrichir des dépouilles de sa sœur ?
Mais en fait de crime il n’y a rien à craindre : le supplice est une leçon puissante ; l’échaffaut nous arrête. […] Chacun suit par conséquent des yeux son modéle & voit avec plaisir, son caractére se développer : la vertu n’a plus de voile, le vice n’a plus de trame ; l’œil n’a point à craindre d’échouer contre la modestie de l’une, ni de se perdre dans le détours artificieux de l’autre. […] Une vaine & stérile distraction, qui n’est en soi qu’un tems exactement perdu ; dont l’avantage le plus flateur est de ne pas laisser de regrets, & l’effet au contraire le plus à craindre est de laisser des désirs. […] Par-tout où il y a des hommes, ce doit toujours être un attrait pour lui : rien n’est capable de nous amuser d’une maniere aussi analogue à notre goût, à notre caractère, notre nature que la société : outre qu’on ne peut trouver son compte a s’en éloigner ; c’est qu’il est toujours à craindre que nos mœurs n’en souffrent. […] Les Spectacles considérés dans la représentation, ne sont pas plus à craindre pour nos mœurs.
Si la comédie est innocente, si l’on peut y assister sans craindre de s’y corrompre & l’esprit & le cœur, pourquoi des condamnations si rigoureuses contre des hommes qui donnent au public un divertissement si agréable ? […] je ne crains point de le dire : si l’Eglise Gallicane est plus sévère sur ce point que quelques autres, c’est que, par un effet de la miséricorde de Dieu, dont nous ne méritons que trop d’être privés, la religion a été jusqu’ici mieux connue, & la morale de Jésus-Christ enseignée avec plus de pureté parmi nous que par-tout ailleurs. […] Mais ne laissez pas pour cela de blâmer la témérité qui vous a fait braver le danger ; craignez de tenter davantage le Seigneur, & d’abuser plus long-temps de sa patience.
Collet comédie), c’est ici la même chose, les trois théatres sont trois lieux publics, qui entretiennent près de trois cents courtisannes, & en ont sous leurs aîles plus de mille ; ils sont plus dangereux que ceux d’Italie, les courtisannes actrices, sont plus séduisantes, plus exercées, mieux choisies ; elles s’étalent impunément, & dans les plus beaux jours, & se répandent par tout : on va au théatre & chez elles, on les appelle chez soi, sans craindre la police ; ces trois lieux fourmillent aussi des hommes courtisans pour les Dames, acteurs, danseurs, musiciens, ce qui n’est pas toléré en Italie. […] Les acteurs & actrices qui ne veulent de directeur que Venus & Plutus, s’étoient réunis pour demander l’administration de leur tripot, comme les comédiens François ont celle de leurs affaires, & pour cela ils avoient déposé six cent mille livres pour cautionnement ; (qui le croiroit, une troupe de gueux qui n’auroient pas du pain chez eux,) mais malgré les charmes des actrices, & ceux de leur argent, un reste d’amour du bon ordre l’a emporté : l’expérience des acteurs de l’Hôtel de la comédie Françoise & Italienne, livrés à leur propre direction, a fait tout craindre pour l’opéra. […] Le Marquis d’Argens a été Avocat-général au Parlement d’Aix, y a traité les plus importantes affaires, entr’autres la grande affaire du Pere Girard & de la Cadiere, il avoue de bonne foi que le Pere Girard étoit un homme de bien, un homme de mérite, un homme à talent, très-innocent, & incapable des crimes qu’on lui imputoit ; mais que la vanité qui lui inspira le succès de la direction, & l’éclat du ministère, le rendit d’abord crédule comme un enfant, & enfin la dupe d’une pénitente plus vaine, plus fine, plus méchante que lui ; qui, d’abord par jalousie, ensuite par la suggestion des ennemis des Jésuites, joua la comédie pour le perdre, & ne craignit pas de se décrier elle-même, par de faux crimes qu’elle eût du cacher pour son propre honneur, quand ils auroient été véritables ; pour satisfaire sa haine en décriant un Directeur, qui ayant connu, mais trop tard, la fourberie, lui retira son estime & sa confiance : la Cadiere étoit une sorte d’actrice par son libertinage, sa feinte piété, son talent à jouer toute sorte de rôle ; & le Pere Girard trop facile, qui d’abord la crut une sainte, fut le jouer de sa malice, & l’ayant démasquée à contre-tems & sans précaution, devint la victime de son ressentiment.
Bourdoise, les courtisans qui hantent le beau monde craignent de passer pour mal propres & peu ajustés, & ne veulent imiter que les femmes & les Marquis, non les vrais Ecclésiastiques, qui ne doivent hanter que des gens sortables à leur état, & ne faire paroître que simplicité aux habits, modestie aux gestes, retenue aux paroles. […] Leur danger doit les faire craindre à tout le monde ; elles sont, dit S. […] Il est pourtant certain que cet ébranlement, agréable dans les organes, excite des émotions dangereuses qui entretiennent le vice, & que les personnes zélées pour la conservation de la chasteté doivent les craindre & s’en abstenir.
Il y a fort à craindre pour ceux qui y assistent, qu’ils n’en rapportent de mauvaises idées, dont ils soient contraints de gémir, comme S. […] mes freres , s’écria-t-il, que je crains que cette femme qui a pris tant de soin pour plaire aux hommes, ne soit un jour notre condamnation, pour avoir eu si peu de soin de plaire à Dieu ! […] Nonnus fort étonné craignit quelque piége, & répondit qu’elle pouvoit venir ; mais qu’il ne lui parleroit qu’en présence de tous les évêques.
On voit qu’il ne s’explique qu’à demi ; qu’il craint d’ajouter à la fermentation qu’il a déjà causée ; & que, dans le fond de l’ame, il ne voudroit de théâtre nulle part. […] « Ils sont assez avancés, ou, si l’on aime mieux, assez pervertis, pour pouvoir entendre Brutus & Rome sauvée, sans avoir à craindre d’en devenir pires. » Lequel croire de M. d’Alembert ou d’un citoyen qui veut sauver sa patrie de la corruption ; qui ne lui présage qu’abomination & que malheurs, si l’on ne l’écoute ; qui eût pu s’appuyer de la raison que donne Cornelius Nepos pour marquer la différence des mœurs des Grecs & des Romains : C’est que les comédiens étoient estimés des premiers, & qu’ils étoient déshonorés chez les autres.
Voici quelques anecdotes qui embélissent la fête de Saint-Pons : le Secretaire de l’Evêque, saint Prêtre, & homme intelligent, fut choisi pour souffleur, il s’assit dans une coulisse, & delà souffloit aux acteurs dans le besoin, ce qui arrivoit souvent ; malheureusement il eut une distraction, & dans ce même tems, par le coup fatal du destin, l’acteur qui parloit en eut une autre, & perdit le fil de son rôle, n’étant pas aidé à propos, il demeura court ; c’étoit le Grand-Prêtre Joad, qui venoit de prononcer ce beau vers : Je crains Dieu, cher Abner, & n’ai point d’autre crainte , au désespoir de se voir arrêté, il y suppléa par un autre vers, car la colere suffis & vaut un Apollon ; il dit haut, avec un zèle édifiant, quel ignorant souffleur ! […] Les comédiens ont applaudi, les poëtes sont enchantés, on pourra impunément faire de mauvais vers & de mauvais gestes, sans craindre le jugement du parterre, & les sifflets importuns.
Mais ne vous découragez pas, ne craignez pas de découvrir la profondeur de votre plaie, & d’y appliquer le baume nécessaire de la pénitence. […] Vous avez honte, vous vous repentez de votre union avec elle, vous craignez de partager le ridicule.
En effet, que ne devoit-on pas craindre de ce genre de Spectacle ! […] Craindre tout & ne rien hazarder me paroît le plus sûr. […] Le péril le plus à craindre Est celui qu’on ne craint pas. […] L’insensé, qui ne craint pas Dieu, est le jouet éternel de tout ce qui l’environne ; au lieu que le sage, qui le craint, exerce une espece d’empire sur toute la nature & sur soi-même. […] Ne craignez rien, calomniez toujours.
On ne doit point craindre d’être démenti, en avançant que le siècle de Louis XIV, ne céde en rien à celui d’Alexandre.
Le bas peuple les imita dans la campagne (ces déguisemens hideux sont faciles à imiter), & firent des fêtes, d’abord religieuses pour faire craindre l’enfer, mais qui dégénérerent en licence & toutes sortes de débauches.
Il est inutile d’en dire davantage ; en continuant d’éxaminer cette Pièce si bisare, je craindrais à la fin de perdre le sang froid, la gravité nécessaire à l’Auteur d’un Ouvrage, tel que celui que j’offre au public.
Le soin, peut-être minutieux, qu’ils ont de marquer la pantomime de leurs Drames, prouve combien ils craindraient de perdre, si l’on y manquait.
Craindrait-elle votre vue ?
que ce Comédien est un des plus dangereux ennemis que le siècle ait suscités à Jésus-Christ, et qu'on le doit d'autant plus craindre qu'il fait encore après sa mort dans le cœur de ses Lecteurs le même ravage qu'il faisait dans celui de ses Spectateurs.
Ils doivent donc craindre que Dieu ne leur dise en son jugement ; « quia non pavisti occidisti ».
Mais il n’en est pas de même de ceux qui n’y assistent que par curiosité ou par récréation ; ils ne pèchent que véniellement, pourvu qu’ils se proposent de résister à tout mouvement charnel qui peut survenir, ou qu’ils n’aient pas lieu de craindre de se laisser aller à quelques fautes graves4.
., il peut les priver de leur royaume, donner leurs états à un autre prince, et dégager leurs sujets de l’obéissance qu’ils lui doivent, et du serment qu’ils lui ont fait11. » Et après la mort de ce monarque, Busenbaum, célèbre jésuite, ne craignit pas de publier dans un de ses ouvrages : « Que l’action de Jacques Clément, dominicain, est une action mémorable, par laquelle il avait procuré à sa patrie et à sa nation le recouvrement de sa liberté ; que le massacre du roi lui fit grande réputation, et qu’étant d’une complexion faible, une vertu plus grande soutenait son courage. » De tels préceptes et de tels récits excitent l’indignation de tous les hommes de bien, en même temps qu’ils méritent toute la répression de l’autorité séculière.
Si le premier pape saint Pierre revenait sur terre avec les dehors de la pauvreté et de la simplicité, je craindrais bien qu’il ne fût méconnu de M. de Sénancourt, car il ne veut que des prélats riches, traînés dans de brillants équipages, jouissant de grands biens et logés dans de somptueux hôtels.
Vous, qui ne fréquentez les théâtres que pour vous décharger du poids de l’oisiveté, et qui n’y éprouvez que de l’ennui, cessez donc de rechercher un divertissement dont vous sentez bien le vice et le faux : craignez que votre assiduité à y aller ne vous en fasse naître le goût, et ne le rallume en vous, s’il était éteint ; souvenez-vous que l’on apprend facilement à faire ce que l’on a coutume de voir.
Le sentiment qu’il nous dépeint ainsi, nous est aussi propre que notre existence, et ne nous étant pas possible de le haïr, n’est-il pas à craindre que nous ne nous accoutumions enfin aux vices sous lesquels on s’efforce de nous le montrer ?
Des plus fermes Etats ce fantasque soutien Va, va, Terentius, qui les craint, ne craint rien. […] L’Abeille, petit animal, Fait de grandes blessures ; Craignez son aiguillon fatal, Evitez ses piqures. […] (les Evêques) Jadis Pasteurs ou soi-disans, Pour le monde brûlans de zelle De la Cour rarement absens, Alloient de ruelle en ruelle L’amour au beau sexe prêchant Et la charité fraternelle, Tandis que leur troupeau fidelle En liberté couroit les champs, Et se paissoit d’herbe nouvelle, Sans craindre des loups ravissans.
On méprise une femme aimable, pour courir après le rebut de la Cour & de la Ville, on achette aux dépens de toute sa fortune, les restes de la plus vile canaille, & l’on ne craint pas de ruiner cinq ou six cens respectables personnes, pour enrichir la plus méprisable de toutes les femmes. […] Les Acteurs & Actrices ne sont pas les seuls objets séduisans que l’on doive craindre en courant aux Spectacles, les hommes & les femmes qui s’y rassemblent en foule, sont aussi, selon Saint Clement d’Alexandrie1 des piéges les uns pour les autres.
Il ne faut pas craindre qu’en jettant d’abord un trop grand feu, l’on ne refroidisse le reste du Drame. […] Il faudrait alors que ce qu’on marquerait devoir arriver à tel Personnage lui convint de telle sorte que le Spectateur craignit à chaque instant de l’en voir déchu.
Et j'ose même dire que cette apparence d'honnêteté, et le retranchement des choses immodestes le rend beaucoup plus à craindre. […] C'est pour cela que l'Ecriture nous apprend que la vie de l'homme sur la terre est un combat continuel, parce qu'il n'a pas plus tôt terrassé un ennemi, que cette défaite en fait naître un autre dans lui-même, et qu'ainsi la victoire n'est pas moins à craindre pour lui que ses pertes ; c'est avec ces armes que la chair fait cette cruelle guerre à l'esprit qui ne peut vivre qu'en mortifiant les passions de la chair : elles appartiennent à cette loi de mort qui s'oppose continuellement à la loi de l'esprit, et c'est pour cela qu'on ne peut être parfait Chrétien, que ce corps de péché ne soit détruit, que l'Homme céleste ne règne, et que le vieil homme ne soit crucifié.
Il n’est certainement pas possible qu’on ne trouve étrange, qu’un Prêtre obligé par son état à inspirer aux fidèles la fuite des divertissements dangereux, les y porte par un Ouvrage exprès, et qu’il détermine à faire des Comédies un Auteur qui craint de blesser sa conscience dans un semblable travail. […] » Qui l’aurait jamais cru qu’un Religieux, pour faire mettre au jour des Comédies, s’appliquerait à vaincre l’obstination d’un Laïque ; et que pour dissiper une crainte qu’il appelle scrupuleuse, il ne craindrait pas de renverser la Tradition, persuadé qu’il ne peut écrire en faveur de la Comédie, sans paraître s’opposer ouvertement à tous les Pères et à tous les Conciles ?
Les orages de la haute mer sont moins à craindre que la tranquillité d’un pareil port, & de tous les écueils la volupté est celui où l’on peut le moins éviter le naufrage. […] La plupart des mouvemens du corps, des gestes, des attitudes, sont sans doute des signes des mouvemens de notre ame, & comme des traits du tableau, signes très-naturels qui échappent souvent sans qu’on y pense, & n’en sont que plus expressifs, signes moins arbitraires que les mots, qui sont différens dans toutes les langues ; au lieu que les gestes, par-tout les mêmes, sont entendus de tous les hommes, & même des animaux, qui fuient, viennent, craignent, caressent, selon qu’on les appelle ou les menace, qui ont eux-mêmes leurs gestes très-significatifs pour se faire entendre, & entr’eux, & des hommes. […] On s’aigrit, on couroit aux armes ; Auguste craignit & sit revenir le danseur, & tout se calma.
Madame de Tagliazucchi donc peint en miniature de façon à ne craindre ni rivaux ni rivales en cet art. […] Constant à m’obéir, qu’aura-t-il plus à craindre ? […] « Le Sexe faible, hors d’état de prendre notre manière de vivre, trop pénible pour lui, nous force de prendre la sienne trop molle pour nous, et ne voulant plus souffrir de séparation, faute de pouvoir se rendre hommes, les femmes nous rendent femmes. »em Voilà donc ces hommes qu’il faut craindre d’avilir : ils n’ont pas la force d’être hommes, et vous voulez qu’on les ménage ; vous trouvez mauvais qu’on leur fasse parler raison par des femmes parce que selon vous les femmes n’ont pas de raison ; mais suivant l’idée que vous nous donnez des hommes, ils ne sont pas plus raisonnables que les femmes ; et pour s’assujettir à la vraisemblance rigoureuse que vous exigez, on ne se permettra plus de mettre en scène que des fous pour ne pas donner mal à propos de la raison aux hommes, puisqu’ils n’ont pas la force de résister au sexe le plus faible, et de s’empêcher de devenir femmes.
Il est vrai qu’en nous faisant une imputation si gratuite, vous ne prétendez pas nous faire une injure : &, si je compare l’éloge que vous faites ailleurs de notre Philosophie6 avec l’assurance que vous donnez à vos lecteurs7 que, quand même nous ne serions pas Sociniens, il faudroit que nous le devinssions pour l’honneur de notre philosophie ; je suis prêt à concevoir des soupçons à votre égard, que je crains qu’un examen réfléchi ne fasse naître chez tout lecteur.
Et quelle action honteuse craint aujourd’hui de paroître sur le Théâtre ?
Il est vrai que les Pantomimes furent chassés de Rome sous Tibère, sous Néron, & sous quelques autres Empereurs ; mais leur exil ne durait pas long-temps : la politique qui les avait chassés, les rapelait bientôt pour plaire au Peuple, ou pour faire diversion à des factions plus à craindre pour l’Empereur, Domitien, par exemple, les ayant chassés, Nerva les fit revenir, & Trajan les chassa encore.
Si je ne craignais d’être comptable des moments que je vous ferais perdre, je vous supplierais très humblement, Monseigneur, d’avoir la bonté de voir vous-même la Comédie d’Esope que je vous envoie, et de me dire s’il y a la moindre chose qui puisse blesser la plus scrupuleuse Vertu.
C’est ce que leur reproche l’ingénieux Auteur qui vient de donner au public un Recueil de ses Poésies, et dont le mérite est trop connu par ses Poèmes, de l’Art de Prêcher et de l’Amitié, pour que je ne craigne pas de le rabaisser par tout ce que j’en dirais de plus avantageux.
On accoutume son cœur à tout ; on lui apprend en secret à ne rougir de rien : on le dispose à ne pas condamner, à son égard, des sentiments qu’il a excusés et peut-être loués dans les autres ; enfin on ne voit plus rien de honteux dans les passions, dont on craignait autrefois jusqu’au nom, parce qu’elles ont toujours été déguisées sur le théâtre, embellies par l’art, justifiées par l’esprit du poète, et mêlées à dessein avec les vertus dans des personnes que la scène nous présente comme des héros.
Enfin on ne voit plus rien de honteux, dans les passions dont on craignait autrefois jusqu’au nom, parce qu’elles ont toujours été déguisées sur le Théâtre, embellies par l’art, justifiées par l’esprit du Poète, et qu’elles ont été unies à dessein avec les vertus et le mérite dans des personnes que la Scène nous représente comme des Héros.
J’ai indiqué ailleurs14 les sources où Molière a puisé pour construire sa Pièce, et je n’ai pas craint d’avancer dans l’examen de la Comédie des Femmes Savantes, que ces sources étant infectées, il n’était pas étonnant que l’ouvrage de Molière s’en ressentit : l’entreprise de corriger la Comédie de l’Avare en est devenue bien plus difficile pour moi.
Tel craint de le fâcher qui ne craint pas la mort.
Que ces personnes se persuadent donc bien qu’elles sont hautement coupables aux yeux de Dieu, pour avoir fait si peu de cas de sa grâce, qu’au lieu d’en nourrir la flamme sacrée, elles n’ont pas craint de la laisser mourir par des distractions criminelles. […] » *** Rollin, recteur de l’université de Paris, zélé défenseur de l’éducation morale et religieuse de la jeunesse, cite avec éloge le passage suivant, extrait des Pensées et maximes de La Rochefoucauld : « Tous les grands divertissements sont dangereux pour la vie chrétienne, mais, entre tous ceux que le monde a inventés, il n’y en a point qui soit plus à craindre que la comédie.
Si je ne craignois d’avancer une hérésie Théâtrale, je dirois que c’est aussi une des causes du dégoût, qu’on sent à un certain âge, ou quand on a beaucoup fréquenté les Spectacles, des représentations qui s’y donnent.
Ce sage célebre, le plus sage des Grecs, dont la vie & la morale étoient si pures, que quelques auteurs ont voulu en faire un saint ; ce sage si différent des sages modernes, que par sa sagesse il s’attira l’indignation du théatre, dont les autres obtiennent les éloges, & se sont ses défenseur, qui y fut si indignement joué par Aristophane : disgrace que la philosophie de nos jours n’a pas à craindre.
les distingue encore agréablement, quand il dit, « il faut prendre garde à ce que l'on voit dans le Théâtre ; Car si c'est un Mime on rira ; si c'est un Danseur de Corde on craindra pour lui ; si c'est un Comédien on applaudira. » Mais ce qui doit nous assurer de la distinction de ces Acteurs, est que l'Echafaud qui était dressé dans le Théâtre chez les Grecs, c'est-à-dire dans l'aire, la cave ou l'espace libre de ce grand lieu nommé Théâtre, était composé de deux principales parties ; La première que l'on nommait proprement la scène, et que nous appelons communément le Théâtre, était fort élevée, et c'était où les Acteurs des Poèmes Dramatiques paraissaient au-devant des toiles peintes, et des tapisseries qui en faisaient la décoration, selon la qualité de la pièce que l'on jouait dans l'espace libre nommé Proscenium ou avant-scène ; et l'autre était plus basse, nommée Orchestre, c'est-à-dire un lieu pour danser, où les Histrions faisaient leurs dansesαὕτη δὲ ἔστιν ὁ τόπος, ὁ ἐκ σανίδων τὸ ἔδαφος.
Je ne craindrai toutefois de dire et affirmer que de mon temps et demeure à Paris, ville beaucoup libertine et toutefois couverte d’une grande apparence et montre de la religion Catholique en cérémonies externes, je n’y en remarque chose plus professant le paganisme et blasphématrice contre Jésus Christ et sa très mémorable passion que les jeux, lesquels je désirerais que ceux de notre université eussent plus raisonnablement et louablement condamnés et fuis que imités ou tolérés les jours des saints Dimanches et autres fêtes solennelles principalement.
Le commerce de la vie nous lie si fort avec les habitants de ce pays enchanté, et on répand si abondamment ses productions, qu’on peut en juger sans craindre de s’y méprendre.
par vous, l’homme qui devait être respecté vieillard, savait être respectable dès la bouillante jeunesse : il craignait de rien faire dans le cours de sa vie, qui souillât un jour la blancheur honorable de sa tête. […] La charge ne rend pas les objets haïssables, elle ne les rend que ridicules : de-là résulte un très-grand inconvénient ; à force de craindre les ridicules, les vices n’effrayent plus. […] C’est par une politique sage : ils craignent d’encourager le Mendicisme. […] Vous craigniez, dirais je à mon tour à M. […] Toute Religion, dont les dogmes sont contraires à la raison, craint les lumières de la Philosophie & la liberté.
Tous ceux que l’âge, l’état, la façon de penser ou de vivre, éloignent du spectacle, pourroient satisfaire leur goût, & se consoler de cette privation sans craindre le reproche ou le scandale. […] La troupe des Comédiens qui applaudit au projet ne doit-elle pas craindre que son succès ne nuise à la recette ? […] Qu’on ne craigne rien, les charges seroient bientôt remplies, & la finance payée.
chacun d’eux doit craindre ses propres régards, & fût-il seul dans le monde, il devroit pour lui-même respecter, la délicatesse de la modestie. […] La premiere leçon qu’on donne à un débutant c’est de ne rien craindre, de ne rougir de rien, de se rendre maître du théatre, & d’y agir avec une entiere liberté. […] Le P. le Moine, dans l’ouvrage que nous avons cité, demande si la pudeur, qui est une vertu défiante & timide, qui rougit & tremble à la vue du moindre danger, qui craint le bruit & le grand jour, qui fuit le monde & le spectacle, ne se bat qu’en retraite, ne se conserve qu’en fuyant, ne remporte la victoire que par la plus prompte retraite, si cette vertu est capable d’un bel entousiasme, d’une sainte audace, d’un noble transport, d’une action de vigueur, d’un véritable héroisme ?
.° La promesse du secret & sa conservation dans le crime : Votre honneur avec moi ne court point de hasard, On n’a nulle disgrace à craindre de ma part, Mais les gens comme nous brûlent d’un feu discret. […] Voilà de quoi rassurer une jeunesse timide qui craint pour son honneur, & de quoi faire bien des célibataires qui sans être dévots goûtant des plaisirs sans peur, rendront la débauche inutile, & ne feront aucun aucun mal, puisqu’il n’y a de péché que dans le scandale.
A-t-on craint de distinguer ces Peres des autres Poètes ou Acteurs ? Non : on n'a pas craint de séparer leurs Casuistes de la foule des autres Ecrivains de tous les Ordres qui ont enseigné la même doctrine.
Et j’ose même dire que cette apparence d’honnêteté, et le retranchement des choses immodestes le rend beaucoup plus à craindre. […] C’est pour cela que l’Ecriture nous apprend que la vie de l’homme sur la terre est un combat continuel, parce qu’il n’a pas plutôt terrassé un ennemi, que cette défaite en fait naître un autre dans lui-même, et qu’ainsi sa victoire n’est pas moins à craindre pour lui, que ses pertes : c’est avec ces armes que la chair fait cette cruelle guerre à l’esprit qui ne peut vivre qu’en mortifiant les passions de la chair : elles appartiennent à cette loi de mort qui s’oppose continuellement à la loi de l’esprit.
Or, il est tout visible, qu’il n’est point de tems, où vous pensiez moins à mourir que lors-que vous oubliez méme de vivre en Chrétiens, & par consequent si Jesus-Christ ne nous a point donné un faux avis, s’il ne nous a point trompé lui-méme, il n’est point de tems, où vous aïez plus de sujet de craindre la mort ; Quâ horâ non putatis, filius hominis veniet.
Mais ce n’est pas le seul danger auquel on s’expose en allant au bal, il y en a encore un autre qui n’est pas moins à craindre, ni moins ordinaire, qui est celui des querelles ; desquelles naissent, comme l’on ne voit que trop tous les jours, des inimitiés irréconciliables, des duels, des meurtres, et plusieurs autres désordres horribles et scandaleux.
Néanmoins il est encore véritable, qu’on ne doit pas condamner absolument quelques danses qui se feraient modestement et honnêtement en quelques occasions extraordinaires, comme ès noces, et autres assemblées rares de parenté et d’amitié, pourvu qu’on en bannisse les mauvaises circonstances, qui ont été marquées ; étant à observer que toutes personnes qui auraient l’expérience que la danse les fait tomber ordinairement en quelqu’unm des péchés susdits, s’en doivent abstenir comme d’une chose mauvaise, et que ceux même qui sortent de la danse fort innocents de ces péchés, doivent craindre de se rendre coupables des péchés des autres, qui ont été engagés par leur exemple à danser : ce qui fait conclure que toutes sortes de personnes doivent s’abstenir autant qu’il leur sera possible de toutes danses.
Le sujet semble, en effet, au premier aperçu, beaucoup mieux convenir à un docteur de Sorbonne qu’a un maréchal de camp ; rarement on a vu le même homme mener de front les matières cléricales et les théories stratégiques ; il est fort permis à un général de n’avoir pas lu Baronius, et ce n’est certainement pas dans les actes des conciles qu’on apprend à placer des batteries ou à ranger une division en ligne de bataille ; enfin, si l’on me permet cette forme triviale, canons et canons il y a, et l’on pouvait raisonnablement craindre qu’un homme habitué à vivre au milieu de ceux de Mars, ne traitât un peu cavalièrement ceux de l’Eglise.
On ajoute une proposition assez judicieuse qui est, que comme l’on examine toute sorte de Livres avant que de permettre de les imprimer, et de les communiquer au public, il faudrait qu’il y eût un Magistrat qui examinât, ou qui fît examiner par Gens experts, les Pièces que l’on voudrait faire jouer devant le peuple, afin que leur représentation ne pût nuire à personne : Mais des Censeurs inexorables diront que d’ériger une Académie pour les Comédiens, ce serait autoriser leur Profession, comme si elle était fort nécessaire au public ; Et pour ce qui est du reste, qu’au lieu de donner la peine à un Magistrat d’examiner les Comédies dignes d’être représentées, il vaudrait mieux les condamner entièrement ; Que par ce moyen on ne craindrait ni brigue, ni surprise, et l’on ne se mettrait point au hasard d’en recevoir du dommage.
Vous, qui embrassez avec tant de transport les tiges de vos arbres généalogiques, craignez que leurs branches touffues ne jettent trop d’ombre sur vous. […] La religion gênoit, par la sévérité de ses maximes & le détail de ses pratiques, on l’abandonna, on désira, on embrassa hautement les religions commodes, ou plutôt cette irréligion qui, loin de condamner la volupté, la met au rang des devoirs ; & comme un abyme conduit toujours à un autre abyme, on alla jusqu’à douter si l’œil de la Providence veille sur les actions des hommes, & s’il y a une justice dont on ait à espérer des récompenses ou à craindre des châtimens. […] Ici c’étoit une assemblée sérieuse des conseillers de la Tournelle, & toute la suite de la procédure criminelle : il ne manquoit que le questionnaire, dont il craignit que l’atrocité ne révoltât ; mais qui bientôt sera introduit comme tout le reste, & l’exécution en place de Greve. […] Le Duc connoissoit l’humeur de cette dame, qui avoit été sa maitresse ; il craignit un dénouement comique qui n’auroit pas été de son goût, il se hâta de le prévenir, & faisant le généreux, il le renvoya sans rançon, mais il fit bien payer celles des autres.
L’auteur n’a pas osé faire imprimer sa piéce ; le public craint fort d’en être privé à jamais, il en est inconsolable, & le poëte aussi ; elle ne vaut pas mieux, mais elle est moins licencieuse que le poëme des sens dont l’obscénité a fait sa fortune. […] Il avoit craint cet événement, & en homme avisé, il avoit pris des mesures pour s’assurer des suffrages ; il en vouloit de bruyans qui pussent couvrir le bruit des sifflets, par un plus grand bruit. […] Quoiqu’il en soit des ces faits, la morale est très bonne, ce qu’il dit du théatre est arrivé cent fois, on ne peut trop en craindre le danger.
Il est d’autant plus à craindre dans les monarchies, que les autres passions forcément endormies, laissent un plus libre cours à celle-ci. […] Rome, qui du même œil les donne et les dédaigne, Qui ne voit rien aux rois qu’elle aime ou qu’elle craigne, Et qui verse en nos cœurs avec l’âme et le sang, Et la haine du nom et le mépris du rang. […] Un clerc pour quinze sols, sans craindre le holà, Peut aller au parterre attaquer Attila.
Ce n’est pas qu’il faille que le Héros soit parfait en toutes choses, car cela est impossible ; il faut qu’il se sente des faiblesses de l’humanité, afin que le spectateur craigne qu’il ne lui arrive quelque malheur ; car si c’était un homme accompli en toutes choses, et d’une vertu parfaite, on serait affranchi de cette crainte, qui tient l’auditeur en suspens, et qui lui cause une certaine inquiétude, qui l’intéresse dans toutes les aventures du Héros. […] Le spectateur fait bon gré au Poète, de lui épargner la vue des corps sanglants de ces Héros blessés à mort, et expirants sur le Théâtre ; mais un Auteur qui se défie de la faiblesse de son génie, et qui craint de ne se pas assez soutenir dans sa narration, pour produire de grands sentiments dans l’esprit de ses auditeurs, leur met sous les yeux, des corps percés de coups, et mourant, pour les émouvoir par la vue de ces horribles spectacles : Il imite en cela certains Avocats, qui manquant d’art et de génie pour exciter la compassion dans l’esprit de leurs Juges, faisaient peindre les malheurs de leurs Clients, pour obtenir par ces représentations muettes, ce qu’ils ne croyaient pas pouvoir obtenir par la force de leurs raisons, et de leur éloquence. […] S’il y a eu des temps, où les Docteurs, et même les Saints ont toléré, ou approuvé la Comédie, c’est qu’elle était alors si simple, si informe et si grossière, qu’il fallait plutôt craindre de s’ennuyer, que d’y trouver trop de plaisir.
Les Dames de qualité, qui ne sont plus en état de faire les dépenses des habits convenables, craignent de se déshonorer en se montrant à ces spectacles. […] Il devint amoureux d’une fille de la Reine ; le mariage n’étoit pas sortable, on craignit qu’il ne devînt nécessaire.
Ne craint-elle pas la contagion* ! […] Ce n’est pas la corruption des mœurs que craignent ces hypocrites rusés ; au contraire, ils la desirent & la procurent : mais ils la veulent sombre, crapuleuse, couverte des apparences de la vileté dont ils ne peuvent s’écarter sans se perdre aux yeux des peuples : l’éclat les effraye ; ils se cachent dans la fange, & veulent y retenir leur proie : c’est-là qu’ils croient qu’elle sera moins enviée, moins propre à exciter l’attention des autres hommes, qui la leur arracheraient… O peuple infortuné, quand secoueras-tu le joug !
Ainsi font illusion les noms & les mots à ceux qui, sensibles au rithme & à l’harmonie, se laissent charmer à l’art enchanteur du Poëte, & se livrent à la séduction par l’attrait du plaisir ; en sorte qu’ils prennent les images d’objets qui ne sont connus, ni d’eux, ni des auteurs, pour les objets mêmes, & craignent d’être détrompés d’une erreur qui les flatte, soit en donnant le change à leur ignorance, soit par les sensations agréables dont cette erreur est accompagnée. […] Autrement, mon cher Glaucus, comme un homme sage, épris des charmes d’une maitresse, voyant sa vertu prête à l’abandonner, rompt ; quoiqu’à regret, une si douce chaîne, & sacrifie l’amour au devoir & à la raison ; ainsi, livrés dès notre enfance aux attraits séducteurs de la Poësie, & trop sensibles peut-être à ses beautés, nous nous munirons pourtant de force & de raison contre ses prestiges : si nous osons donner quelque chose au goût qui nous attire, nous craindrons au moins de nous livrer à nos premieres amours : nous nous dirons toujours qu’il n’y a rien de sérieux ni d’utile dans tout cet appareil dramatique : en prêtant quelquefois nos oreilles à la Poësie, nous garantirons nos cœurs d’être abusés par elle, & nous ne souffrirons point qu’elle trouble l’ordre & la liberté, ni dans la République intérieure de l’ame, ni dans celle de la société humaine.
Cet exemple terrible est tout récent, & je ne crains pas d’affirmer qu’il faut être pervers, & l’ennemi de son Prince & de sa Patrie, pour oser nier les funestes conséquences de ce Spectacle, & prétendre qu’il produit quelque bien. […] Aussi, je ne crains pas de trop le répéter, ne voit-on représenter ordinairement aux Trétaux, que de ces ouvrages abominables, dignes fruits du loisir d’un tas d’Ecrivains affamés, qui, ne pouvant, dit M. […] Ce n’est que depuis la multiplicité de ces Jeux Forains, que nous voyons pulluler, à Paris, l’engeance impure des Artisans du luxe, des Marchandes de modes & autres Ouvrieres, qui souvent sont plus à craindre encore que ces femmes & ces filles qu’elles perdent par leur art infernal. […] , craint la lumiere, & ne marche que dans l’ombre. […] J’apprens dans l’instant, avec la plus vive satisfaction, qu’un Ministre aussi distingué par ses qualités personnelles, que par ses talens supérieurs, & une modestie que je craindrais de blesser en le nommant, s’occupe serieusement de cette réforme, & qu’il va faire rendre aux Auteurs toute la justice qu’il avaient lieu d’attendre de lui.
Nous en revenons donc là, que nonobstant cette belle réformation tant vantée de la Comédie, elle a tout le même péril que devant, et même qu’elle est plus à craindre qu’elle n’était avant ce déguisement. […] « Elle ne donne (dit-il) nulle entrée aux Bateleurs, pour monter sur le Théâtre, vu que les sujets qu’ils y louent, sont pour la plus grande part, des adultères et lascivetés, et qu’ils craignent que la coutume de voir ces choses n’introduise la licence de les commettre »ax. […] Rendons honneur à César comme à César, mais premièrement il faut craindre Dieu ». […] En premier lieu, il est fort à craindre, que parlant si avantageusement d’eux-mêmes, il n’y ait de la présomption mêlée, et un préjugé trompeur de leur amour propre qui les aveugle. […] Ayant donc les mêmes passions que les autres, ils peuvent être tentés tout de même qu’eux, et ne dussent pas se tant confier ès endroits où ils reconnaissent que les autres ont sujet de craindre.
Craignez lorsque le dangereux Auteur de Phedre, d’Andromaque, de Titus, vous montre l’amour comme sous des berceaux de fleurs, sortant du fond des cœurs avec des soupirs attendrissants, des larmes & toutes les marques de sa victoire.