.° Il est de la derniere importance pour le bonheur de la vie, comme pour le salut, de n’entrer dans le mariage que par des vûes pures & saintes, & on ne peut être heureux, si on ne met Dieu dans ses intérêts : & comment obtenir ses bénédictions, si on ne se conforme à ses volontés ? […] c’est le poison de tous les plaisirs, & on ne consulte pas même les intérêts de famille, les arrangemens utiles qui assortissent les établissemens, les volontés des parens, qui plus éclairés, moins prévenus, peuvent plus sagement balancer les inconvéniens & les avantages. […] Pour le consentement des parens, dont la nature, la loi, la conscience, le bien public, l’intérêt du particulier, font un devoir essentiel, non seulement il n’est jamais ni attendu ni demandé, mais l’engagement est toûjours contracté & entretenu à leur insçû, ou contre leurs ordres & leur opposition, contre laquelle on se roidit opiniâtrément, révolte dont on fait un acte héroïque qui forme le nœud de la piece ; & pour tout dénouement bien édifiant & bien instructif pour la jeunesse, on se passe de ce consentement, on l’arrache par force, on le surprend par des mensonges, on trompe par des déguisemens absurdes & sans aucune vrai-semblance, comme sont tous ceux du Théatre Italien, par de faux actes d’un Notaire affidé, par un changement de nom, un parent supposé, &c. que sais-je ! par mille folies qui font aussi peu d’honneur à l’esprit qu’à la vertu de l’inventeur : & comme si un père qui reconnoît la fourberie, pouvoit être ou obligé d’y souscrire, ou assez fou pour y consentir, & vouloir au prix de ses plus chers intérêts en être volontairement la duppe.
Je n’ai rapporté tous ces traits que pour faire sentir l’étroite liaison entre le masque, le théatre & le vice, dans les personnes même dont l’esprit, l’état, l’honneur, l’intérêt, devroient élever les plus fortes barrieres, & qui ne peuvent en arrêter le cours. […] Les déguisemens portés si loin sont rares ; mais on en voit beaucoup qui en approchent dans les commerces de débauche qu’on a intérêt de cacher. […] L’indécence de ces confusions, de ces déguisemens de sexe, affecte peu les Comédiens ; les intérêts de la vertu leur sont trop indifférens pour s’en faire un scrupule ; & pourvu qu’ils réussissent à plaire, qu’importe à quel prix ? […] Il vit noblement de son bien, sans bassesse, sans jalousie, ne jouant ni par besoin ni par intérêt ; il a de la politesse & de la décence, & des sentimens : il est vrai qu’on en trouve dans son livre.
Comme les troupes de Comédiens ne sont composées que de gens de la lie du peuple, que la misère ou le vice y ont fait entrer, personne n’a intérêt ni de refuser ni de poursuivre de pareils héritages. […] ) Par la même raison une Actrice séduite (si quelqu’une pouvait l’être) n’aurait pas droit de se plaindre de son séducteur, de l’obliger à l’épouser, de demander des dommages et intérêts, pas plus qu’une femme trouvée dans un lieu public, pour laquelle la plainte d’adultère ou de séduction n’est pas reçue. […] Que l’intérêt est un grand peintre ! […] Reste donc que tous les Comédiens sont sans mœurs, ils n’ont ni intérêt à la vertu, ni contrepoids au penchant, ni frein au vice ; ils goûtent tous les plaisirs, ils savent tout séduire.
Nous appellons donc ici Machines Théatrales, ces artifices dont on se sert pour former le nœud, pour amener les incidens, pour accroître l’intérêt, & produire de grandes surprises. […] Cet incident ouvre une seconde source d’intérêt pour la situation.
Si l’on peut, sans s’écarter de la nature, leur faire ressentir quelques infortunes, on aura un sûr moyen de répandre de l’intérêt dans le Drame. […] Comme ses Personnages n’inspirent point un grand intérêt, elle éxcite peu de passions dans l’ame du Spectateur ; or il se refroidit lorsqu’on le contraint de considérer trop long-tems ce qui ne saurait l’affecter.
Nos intérêts nous sont toujours plus chers que ceux d’autrui, et je suis si fort persuadé qu’il est fort peu de gens, dans le siècle où nous sommes, qui n’aidassent au débrisc de leurs plus proches voisins, s’il leur devenait utile ou profitable, que les coups les plus injustes et les plus inhumains ne me surprennent plus. […] En cela je suis pour vous ; je ne me mets jamais si fort dans les intérêts de mes amis que je ne me laisse plutôt guider par la justice que par la passion de les servir.
Et ce qui conserva des personnes dignes d'un si grand mépris dans les avantages publics, où les gens d'honneur seulement devaient prétendre, fut à mon avis que la souveraine puissance était entre les mains du peuple, et que ces Farceurs ou Technites de Bacchus ayant tous leurs intérêts, toutes leurs liaisons, et toutes leurs cabales parmi la plus vile populace où ils étaient nés, eurent aisément les suffrages et la protection de leurs semblables, sous prétexte même de Religion, pour jouir avec eux de tous les privilèges de leur République. […] Et Macrobe soutient que les Histrions n'étaient point infâmes, et le prouve par l'estime que Cicéron faisait du fameux Roscius Comédien, et d'Esope excellent Tragédien, avec lesquels il avait une étroite familiarité ; et par les soins qu'il prit de défendre les intérêts du premier devant les Juges ; où le mot d'Histrions ne signifie que les Joueurs de Comédie et de Tragédie, comme il résulte assez clairement de l'exemple qu'il en tire de Roscius et d'Esope seulement, et de ce que auparavant il avait montré que les Danses malhonnêtes et désordonnées, qui étaient propres aux Bouffons et vrais Histrions, étaient condamnés par tous les sages au siècle de ces deux célèbres Acteurs.
Il est de son intérêt qu’on le regarde dans le monde comme un divertissement permis et honnête. […] Ces Directeurs si peu dignes de l’être, qui de peur d’aigrir ceux qu’ils croient avoir intérêt de ménager, les laissent marcher par la voie de la perdition, sans leur dire mot, et les voient tranquillement venir des spectacles au sacré Tribunal, et passer de la table de la Communion aux spectacles.
Voilà donc les bons Poètes hors d’intérêt. […] Que vous reste-t-il donc qui puisse servir de fondement au reproche que vous faites à ceux de Port-Royal, de ne juger des choses que selon leur intérêt ? […] Desmarets, ni sur l’exemple de M. le Maître, que ceux de Port-Royal ne jugent que selon leurs passions et leurs intérêts.
Le Principal en convint ; mais il dit que c’était de l’intérêt de son corps d’en user de la sorte. » Le Marquis de Caraccioli, loué avec raison dans tous les Journaux, et par tout le monde, dit très sensément sur les pièces de collège : « Tant d’hommes consacrés à Dieu, qui osent exercer la jeunesse à ces amusements ridicules, devraient bien se convaincre que leurs spectacles sont entièrement déplacés. […] Tant de plaisirs réunis gagnent à coup sûr le cœur d’une jeunesse trop peu éclairée pour aimer la vertu pour elle-même, sans instinct et sans intérêt. » On voit ensuite danser la Religion avec les vertus, les jeunes gens, les grands Prêtres, Comus, divinité de la table, dont l’unique fonction était de présider aux fêtes, aux toilettes des femmes et des jeunes gens qui aiment la parure. […] elles seraient l’effet naturel du plaisir des sens, de l’instinct et de l’intérêt ?
Mais, sans abandonner les intérêts de l’éternité qui ne doivent pas être moins précieux à l’académicien qu’au fidèle, je me borne ici à effrayer votre esprit par le détails des plaies que la comédie fait au bon goût et aux belles-lettres. […] ) Un écrivain parle au public, il doit le respecter ; il se peint dans son ouvrage, il a intérêt de se respecter lui-même. […] Un intérêt commun assure une entière liberté. […] Religion, politique, droit public et intérêt des princes, histoire, morale, philosophie, tout est de son ressort. […] Cette liberté de répandre sur tout le vernis du ridicule, s’allie-t-elle avec les sentiments que l’intérêt de la société demande que nous conservions les uns pour les autres ?
Vous vous plaignez par exemple, de ce qu’on ménage trop au Théâtre Français le préjugé du point d’honneur ; mais quand vous voudrez réfléchir sur l’intérêt que le Gouvernement de France doit prendre au maintien de ce préjugé, vous ne vous élèverez plus avec tant d’aigreur contre la prudence des Dramatiques qui le respectent et se contentent d’en critiquer les abus. […] Un Auteur zélé Patriote peut employer son art à instruire ses Concitoyens de leur intérêt, et faire au Théâtre ce qu’un autre ferait sur la Tribune. […] « Un homme sans passions ne saurait intéresser personne au théâtre, et l’on a déjà remarqué qu’un Stoïcien dans la Tragédie ferait un personnage insupportable dans la Comédie, et ferait rire tout au plus. »j On a très mal remarqué ; Glaucias dans Pyrrhus, Brutus, Alphonse dans Inès, Cicéron dans le Triumvirat, Zopire dans Mahomet k, et tant d’autres à citer sont des Stoïciens ou jamais il n’en fut, et l’histoire nous trompe ; dans les Comédies tous nos Aristes, un Théodon dans Mélanide, le Héros de La Gouvernante l, ces gens-là ressemblent assurément au portrait qu’on nous fait des Stoïciens toujours amis de l’humanité et préférant l’intérêt de la vérité, de la raison, de la justice et de l’amitié, à leur intérêt propre. […] C’est un homme qui sait aimer et estimer tout ce qui mérite de l’être, c’est un homme qui méprise et déteste la débauche et l’impureté, mais qui se permettra d’aimer tendrement une épouse vertueuse, qui fuira les ivrognes, mais qui se permettra pour la réparation de ses forces et le bien de sa santé, un usage modéré de sa bouteille ; qui fuira la fureur du jeu, mais qui n’en fera pas moins sa partie avec des amis de sa trempe, sans désirer le gain et regretter la perte, qui sera attentif à ses intérêts, vigilant dans son commerce, économe dans sa dépense, mais qui loin d’être avare emploiera le superflu de sa fortune à soulager les malheureux, à gagner le cœur de ses mercenaires et de ses domestiques par des libéralités encourageantes et bien placées : c’est un homme enfin pieux et charitable, sans hypocrisie, qui se contente de donner à Dieu les moments qu’il exige, et le reste du temps à ses affaires. […] « Naturam expelles furca, tamen usque recurret. »x Je suis persuadé que les hommes admirent la vertu de bonne foi dès qu’ils la voient, qu’ils la chérissent, qu’ils détestent le crime et le Vice, et que si leurs passions et leurs intérêts les aveuglent souvent, ils n’en sont pas moins les amis de la Vertu, ils n’en désirent pas moins de ressembler aux modèles qu’on leur propose sur la scène.
Souvent sans invention, & toujours sans intérêt, ces espèces de Parades ne renferment qu’une fausse métaphysique, un jargon précieux, des caricatures ou de petites esquisses mal dessinées des mœurs & de ridicules ; quelquefois même on y voit règner une licence grossière ; les jeux de Thalie n’y sont plus animés par une critique fine & judicieuse ; ils sont deshonorés par les traits les plus odieux de la Satyre.
Cette contestation finit paisiblement comme se terminent les disputes où l’ambition et l’intérêt n’ont point de part.
Auguste, qui avoit éprouvé le pouvoir de ses charmes, se persuada que Charles ne résisteroit pas à l’épreuve de tant d’esprit & d’agrémens : il l’envoya au camp du Suédois négocier un traité secret, & sacrifiant la jalousie à l’intérêt, il s’expose à avoir un rival heureux ; &, pour obtenir des conditions favorables, il permet à son Ambassadrice de n’être pas trop difficile : c’étoit mal connoître son ennemi. […] On emprunta de tous côté aux plus gros intérêts, 3000 liv. à un Juif, 2000 liv. à un Anglois, 100 liv. à un Turc ; enfin l’Ambassadeur extraordinaire part avec une suite de quatre-vingts personnes toutes superbement vêtues.
L’un a besoin, & se sert utilement de l’autre, leurs intérêts sont communs, & leurs goûts les mêmes. […] Quelle est la vertu qui n’y ait le plus grand intérêt ?
Ce sera à un petit nombre de Personnes qui, quoique jouissant des délassemens de la Société, respectent la Religion ; A des Personnes qui sçavent que beaucoup de préjugés, dont on croyoit ne jamais revenir, ont néanmoins été détruits par la suite ; A des Personnes, enfin, assez généreuses pour faire valoir, auprès des Puissances, ce qu’elles auront trouvé de juste dans la Cause des Comédiens, & qui détachées d’intérêts personnels, chérissent tout ce qui peut constater la gloire de l’Etat. […] Au sujet du Festin de Pierre, il fut imprimé une Critique faite par un Ecclésiastique, où l’on se récrie beaucoup sur ce que, dans cette Piéce, les intérêts du Ciel sont remis entre les mains d’un Valet, & sur ce que Dom Juan est puni par une ridicule fusée. […] On sçait bien que le ridicule tombe sur un homme qui emploie, & qui outre les expressions de la Religion, pour un intérêt charnel, ainsi que dans le Tartuffe ; mais ces peintures, quoique naïves, sont trop sujettes à être mal interprétées.
Qu'un particulier se livre à son penchant, et qu'aux dépens de la décence, de ses devoirs, de son intérêt, il s'amuse de ce qui le flatte, c'est la nature, c'est la passion. […] Richelieu n'en a jamais fait confidence aux Jésuites, pour les mettre du complot ; ils n'y ont pas intérêt, et il est incroyable qu'ils aient porté l'envie de faire leur cour, jusqu'à favoriser cet odieux projet. […] « Nous sommes bien éloignés, dit-il (Juin 1765. pag. 1045.), de penser que le théâtre soit aussi épuré qu'il devrait l'être pour l'intérêt des mœurs et le bien réel de la société.
La créature y chasse Dieu du cœur de l’homme, pour y dominer à sa place, y recevoir des sacrifices et des adorations, y régler ses mouvements, ses conduites et ses intérêts, et y faire toutes les fonctions de Souverain qui n’appartiennent qu’à Dieu, qui veut y régner par la charité qui est la fin et l’accomplissement de toute la Loi Chrétienne. […] « Maintenant qu’il s’agit de mon seul intérêt, Vous demandez ma mort, j’en accepte l’arrêt, Votre ressentiment choisit la main d’un autre, Je ne méritais pas de mourir de la vôtre, On ne me verra point en repousser les coups, Je dois trop de respect à qui combat pour vous, Et ravi de penser que c’est de vous qu’ils viennent, Puisque c’est votre honneur que ses armes soutiennent, Je vais lui présenter mon estomac ouvert, Adorant en sa main la vôtre qui me perd. » « En vérité peut-on pousser la profanation plus avant, et le faire en même temps d’une manière qui plaise davantage et qui soit plus dangereuse ? […] Je pense qu’il souffrirait assez impatiemment dans les unes, ce qu’il respecte tant dans les autres, et que dès qu’il verrait cette sévérité tant vantée dans un sujet auquel il prendrait quelque intérêt, il reconnaîtrait bientôt ces fausses vertus pour ce qu’elles sont, c’est-à-dire, pour des vices véritables.
Ces Messieurs aiment trop leur intérêt pour suivre de sitôt un tel projet.
On vient de donner une Pièce célèbre, dans laquelle l’Acteur qui fait le rôle de Saint-Albin a mis un intérêt, une chaleur, une intelligence qui lui ont concilié tous les suffrages.
J’en conclus que le Gouvernement seul peut ordonner et faire exécuter la réformation, malgré les oppositions d’un très grand nombre de personnes mal instruites de leurs véritables intérêts.
Entraîné vers la Tragédie, non-seulement par un penchant irrésistible, mais par un choix médité, par une persuasion intime que nulle espèce d’ouvrage ne peut avoir autant d’influence sur l’esprit public ; j’avois conçu le projet d’introduire, sur la Scène Françoise, les époques célèbres de l’Histoire Moderne, & particulièrement de l’Histoire Nationale ; d’attacher à des passions, à des événemens tragiques, un grand intérêt politique, un grand but moral. […] J’aime à voir des importans de Versailles, des Valets grands Seigneurs, bardés d’un cordon rouge ou bleu, s’imaginant avoir réfuté les raisons les plus évidentes, quand ils ont répondu d’un air froid, qu’il n’est question, sur ce point, que des intérêts des Gens de Lettres. […] Si les intérêts particuliers s’anéantissent devant l’intérêt public, si l’on fait aux préjugés cette guerre ardente & vigoureuse, digne du Peuple qui s’assemble, & du siècle qui voit s’opérer une aussi grande révolution, alors le nom de François deviendra le plus beau nom qu’un Citoyen puisse porter ; alors nous verrons s’élever des vertus véritables ; alors le génie, sans cesse avili par le despotisme, reprendra sa fierté naturelle.
Vous convient-il, Messieurs, d’oser faire des Tragédies, vous qui n’êtes ni Ministres, ni employés dans les affaires d’Etat, vous qui par conséquent ne pouvez imaginer des situations analogues à des intérêts d’Etat ? […] Trois grandes Puissances l’environnent ; ce n’est pas, comme on se l’est imaginé jusqu’à présent, à la jalousie réciproque de ces trois Puissances ; ce n’est point à l’attention et à l’intérêt que chacune d’elles a d’empêcher une de ses rivales de s’en emparer, que Genève doit sa tranquillité ; c’est à la crainte qu’elle inspire : et comment ne tremblerait-on pas à son aspect ? […] J’ai trop bien démontré, je crois, que l’amour vertueux que vous attaquez encore ici était un sentiment louable, et très digne d’occuper la scène pour qu’il soit besoin de plaider de nouveau la cause du Parterre à ce sujet et justifier l’intérêt qu’il prend à Bérénice et à Zaïre : je rougirais pour lui s’il n’aimait pas ces deux femmes adorables autant que vous lui reprochez de le faire. […] Je me reprocherais comme un vice honteux de mon cœur d’être sorti d’une représentation de Zaïre sans avoir pris pour elle le plus tendre intérêt : c’est le tribut que tout cœur vertueux doit payer à la Vertu malheureuse.
Au contraire, on vit dans le même temps Madame de Montespan, enthousiasmée du théatre, s’y rendre assidument & y faire aller Louis XIV, faire composer & jouer à Molière, qui par goût & par intérêt étoit à ses gages, l’Amphitrion & George Dandin, justes pendans du Misanthrope & du Tartuffe ; les unes pour autoriser le vice, les autres pour décrier la vertu. Toutes les femmes qui ont été à la même place, ont eu le même goût & le même intérêt pour faire ou pour conserver leurs conquêtes, & satisfaire les mêmes penchans, non-seulement elles ont ouvertement protégé le théatre, applaudit aux Acteurs, mais plusieurs ont fait dresser des théatres chez elles, y ont fait jouer & joué elles-mêmes, n’étoient-elles pas en effet des Actrices, & leur vie une comédie. […] Prince le plus despotique, qu’elle dirigeoit à son gré pendant bien des années, elle le tira du théatre par religion & l’y replongea par intérêt. […] Tous les grands mots de l’intérêt public, du bien du Royaume, du salut des peuples, ne sont qu’un vain son ; tous ces prétendus politiques ne sont que des libertins mis en mouvement par les passions, c’est un théatre où l’amour fait mouvoir les cordes, les poids, toute la machine ; ce n’est point le Machiniste, le Décorateur, c’est Cupidon qui donne le spectacle, c’est Cupidon qui bat la mesure à l’orchestre. […] Rien de plus comique que la Reine régente & le premier Ministre faire la Cour à cette créature, & le Gouverneur traîné en lesse adorer ses charmes ; la Clairon n’en a pas tant fait, elle jouoit assez bien son rôle, sur-tout pour ses intérêts ; car avec toutes ses ridicules scènes elle fit une fortune de deux millions, tout s’évanouit à la mort de son amant ; les héritiers du Duc ne se firent aucun scrupule de la dépouiller de tout, prétendant qu’ils ne faisoient que reprendre leur bien, elle rentra dans la poussière d’où le vice l’avoit tirée.
Il n’y a ni unité de temps, de lieu, d’action ni d’intérêt, ni même de ton, ni de couleur. […] A travers tant de folies, on trouve pourtant des morceaux qui décelent le plus rare talent, des situations, des plus grands intérêts, des descriptions de la plus grande vérité. […] Milton, le Tasse, le Camoëns se sont écartés de la route battue ; ils ont su mêler habillement l’intérêt de la religion dominante à l’intérêt nationnal, ou à un intérêt plus universel ; presque tous les dramatiques anglois ont puisé leurs sujets dans l’histoire de leur pays ; la plupart de leurs pieces sont appropriées aux mœurs angloises ; elles ne présentent que le zele pour la liberté, l’amour de l’indépendance.
Libres dans leur victoire, et maîtres de leur foi, L’intérêt de l’Etat fut leur suprême loi. […] Il faudrait en effet un habile négociateur pour ménager des intérêts si opposés. […] l’Etat peut-il avoir intérêt à rendre les hommes féroces ? […] Mais est-ce bien de l’intérêt public, de l’intérêt de l’Etat, de les faire sentir à des sujets, et leur laisser apprendre à les goûter, et affaiblir, en s’y familiarisant, le juste éloignement qu’ils doivent avoir des forfaits atroces. […] Et pour ses intérêts au bout de l’univers J’irais chercher la main qui briserait ses fers.
Mais c’était assez pour moi, qui ne voulais que prémunir mes Lecteurs contre le danger de n’attacher d’importance et de prix qu’aux choses de pur agrément, et de flétrir souvent d’une sorte de mépris ce qui vraiment est le plus utile à la société ; c’était, dis-je, assez pour moi d’examiner l’influence de cet art si beau, si puissant de la parole dans l’état civil, afin de montrer le grand intérêt que nous avons tous au succès comme au rétablissement de l’éloquence de la Chaire et du Barreau.
Autres exemples d’impiété dans l’Amour Triomphant, 122 Dans la femme Provoquée, 131 Dans l’Amour sans intérêt, 141 Dans le Relaps, 133 L’horreur de cette seconde sorte d’impiété, 136 Les Poètes Anglais évidemment blasphémateurs et convaincus de l’être par la plupart des pièces rapportées ci-dessus, 138 Les Dramatiques Latins et Grecs, religieux au prix des nôtres.
Je finis, en assurant que je ne mets d’autre intérêt à soutenir ce Livre, que celui que les Gens de Lettres prennent aux bons Ouvrages. […] Et quelques autres Prélats l’ont honoré de Lettres, qui expriment l’intérêt qu’ils prennent à cet Ouvrage. […] Chacun en a parlé, suivant l’intérêt qu’il avoit à adopter une opinion plutôt qu’une autre. […] Je vous rappelle des réflexions que vous avez lues avec le plus grand intérêt dans leurs sources. […] N’a-t-il pas pour lui l’intérêt ; & le Public n’applaudit-il pas à tous les tours qu’il fait à l’autre ?
Il a fait quartier aux Comédiens François & à l’opéra, moyennant un subside qu’on exige sur chaque place en faveur des pauvres, qui par là ont intérêt qu’il y aille bien du monde. […] Quel intérêt si grand peut on me faire prendre au salut de Rome sauvée, piece de Voltaire ? […] Rien n’affecte dans une piece par l’intérêt de l’état, mais par quelque personnage qu’on a rendu ou cher ou odieux.
Ce témoignage dit tout : un Prince du sang, qui connaissait si bien le monde et ses dangers, l’Etat et ses intérêts, la politique et ses maximes, la religion et ses lois, dont on ne peut ni suspecter les vues, ni soupçonner la vertu, ni méconnaître les lumières, ni révoquer en doute la prudence, à quel titre serait-il récusable ? N’y eût-il d’autre inconvénient dans la comédie que son inutilité, le gouvernement n’a aucun intérêt à la conserver, il en a à la détruire. […] Le véritable intérêt public serait qu’on corrigeât les vices, l’orgueil, l’ambition, l’envie, la vengeance, la médisance, le mensonge, l’impureté, le luxe, etc. ce qu’il n’a jamais fait et ne fera jamais.
C'est une distinction qu'affectent de ne point faire quelques-uns de nos apologistes : ils rejettent sur l'idolâtrie tout ce que le zèle des Pères a prononcé contre les spectacles, comme si l'intérêt des bonnes mœurs ne devait être compté pour rien, ou était fort en sûreté sur la scène. […] Circé sa fille a inventé ces jeux en l'honneur de son père, et a donné son nom au cirque, elle a ouvert un beau champ aux démons, et bien ménagé leurs intérêts. […] Il faut punir les criminels sans doute, les coupables ont seuls intérêt de le nier ; mais l'innocent même doit s'affliger que son semblable soit devenu criminel, plutôt que de se réjouir de son supplice.
Mais qui pénétrera plus avant dans l’intention de la loi, on verra que c’est par un intérêt public, et une raison d’État qu’on a été contraint de coucher en tels et tels termes cette loi. […] Mais on commence à découvrir que cette calomnie, dont on tâche de noircir la Comédie n’est fondée que sur un intérêt et non sur aucune vérité : Car je m’assure qu’il n’y aurait pas un qui ne louât les Comédiens, et la Comédie s’ils n’étaient point obligés de mettre la main à la bourse à l’entrée de l’Hôtel de Bourgogne ; sans aucune exaction pourtant de la part des portiers : car où est le premier Sergent qu’on ait envoyé à aucune personne pour se faire payer ?
Celle qui à Munster balançoit les intérêts de l’Europe pouvoit bien à Paris balancer ceux du Parnasse. […] Les reconciliations & les brouilleries, les hauteurs & les petitesses, les insultes & les caresses se touchent ; l’intérêt du moment fait la décoration, l’intrigue le dénouement : on joue toutes sortes de rôle. […] Tandis que cette belle souveraine regne sur la ville de Paris, ce tendre amant regne sur la souveraine, dirige, suspend, avance, frappe les coups, selon ses intérêts secrets ; car il entretenoit des liaisons avec la Cour, & selon le vent favorable ou contraire qui y souffloit, il faisoit marcher son vaisseau ou le mettoit en panne, prenoit le vent au plus près ou bravoit l’orage. […] La Fronde n’avoit aucun objet ; aucun Frondeur ne savoit ce qu’il vouloit, ni pour qui il se battoit : ce n’étoit que des intérêts particuliers, la plupart cachés, qui ne formoit aucun lien, aucun but. […] Il y avoit depuis long-temps entre elle & la Princesse une jalousie de beauté & de conquête, un intérêt d’ambition & de vanité, qui entretenoient dans leurs cœurs une aigreur extrême.
quel intérêt puis je prendre à une action qui donne à mon ame tant de mouvemens divers ?
De plus grands intérêts, de plus beaux sentiments N’excitent dans l’esprit que d’heureux mouvements.
Où peut-on trouver une plus violente opposition d’intérêts et de devoirs, et un plus grand contraste de sentiments et de passions ?
Le Souverain doit avoir plus de soin d’accorder ses intérêts avec son devoir, et ses passions avec sa raison, que sa voix avec son Luth.
Que doit-il résulter de ce scandale inouï pour les jeunes spectateurs, ou pour les enfants qui, d’instinct, d’après le mouvement de leur cœur, et d’après leur éducation, doivent regarder comme de droit naturel le devoir d’aimer leurs parents, et le précepte de les respecter comme indispensable, absolu et tel que leur propre intérêt et la honte d’y manquer devraient du moins empêcher des enfants d’aller jusqu’à outrager ainsi l’auteur de leurs jours ? […] La révolution qui a ruiné tant d’honnêtes gens fournit nombre d’exemples d’une pareille conduite qui est naturelle, qui a été celle de beaucoup d’émigrés élevés dans l’aisance, et qui doit être imitée par tous les malheureux faits pour exciter l’intérêt des particuliers et mériter des applaudissements et l’estime publique. […] Et, dans d’autres circonstances, combien de faux bienfaisants, ou d’hommes poussés uniquement par des vues secrètes d’intérêts particuliers, ont servi l’humanité autant que leurs concurrents généreux, de différentes manières ; soit par de grandes entreprises, ou la communication de projets utiles ; soit par des voyages ou des travaux pénibles, par leurs veilles et des études opiniâtres, par leurs découvertes, par leurs écrits ou discours ; soit aussi en veillant sur leurs concitoyens, en écartant les dangers qui les manaçaient, soit en défendant l’honneur et la fortune des opprimés ; soit en visitant et soignant leurs semblables, même dans les maladies les plus contagieuses ! […] C’est ce que pratiquent habituellement les gouvernements, dont les sages ministres savent que les hommes sont faits ainsi ; que c’est l’intérêt personnel qui les régit plus ou moins impérieusement et les fait agir sous le masque de quelque vertu que peu possèdent en perfection, que beaucoup n’ont qu’à demi, dont le plus grand nombre n’a encore que l’apparence ; que pour les obliger à l’acquérir ou à la cultiver, il est plus expédient de la leur supposer, en y attachant un grand prix, que de faire des tours de force et beaucoup de bruit pour montrer à tout le monde qu’ils ne l’ont point.
On lui pardonneroit le galimathias & la mauvaise prose ; mais les loix de la vertu ne lui pardonneront pas d’avoir oublié la décence de son état, & l’intérêt des bonnes mœurs. […] Ce rôle est ce qu’il doit être, vif & ardent ; sont intérêt est celui de son amour, il n’a point de nuance particuliere, tous les amans de Térence & de Moliere sont les mêmes, (il est vrai que ces deux grands maîtres sont très-monotones, il n’y a que l’aveuglement de l’entousiasme qui leur trouve du génie.) […] Ce n’est donc ni le besoin de la fable, ni l’instruction des spectateurs, encore moins l’intérêt de la vertu, qui fait mettre de la galanterie ; c’est le besoin du vice (affreuse verité) on ne met l’amour que pour l’amour, le vice seul le rend nécessaire au spectateur libertin : Trahit sua quemque voluptas. […] La Chaussée, est sur-tout le poëte, ou plutôt l’adulateur, l’idolâtre des femmes ; ses sujets, ses plans, ses scénes, son langage, tout chez lui leur est subordonné, tout leur rend hommage ; elles plaisent, regnent, instruisent, réunissent tout l’intérêt, toutes sont vertueuses, tendres, pleines de graces & de beauté, toutes spirituelles, courageuses, élevées, enfin des modeles de perfections.
La verité d’une part est sacrifiée à l’intérêt & à la reconnoissance, & de l’autre au ressentiment. […] Cette passion violente, qui renferme toutes les autres passions, l’emporta sur le bien de l’Etat, sur l’intérêt de sa famille, sur sa propre fortune. […] Voilà encore un homme que le théatre aveugla sur les intérêts de son ame.
Je vous dirai donc sans aucun intérêt particulier, que le monde rit de vous entendre parler si négligemment d’un Ouvrage qui a été généralement approuvé, et qui ne pouvait pas manquer de l’être, sous le nom de tant de Saints Pères qui le remplissent de leurs plus beaux sentiments. […] Ne voit-on pas que leurs ouvrages sont composés d’un mélange agréable d’intrigues, d’intérêts, de passions et de personnes, où ils ne considèrent point ce qui est véritable, mais seulement ce qui est propre pour toucher les spectateurs, et pour faire couler dans leurs cœurs des passions qui les empoisonnent de telle sorte, qu’ils s’oublient eux-mêmes, et qu’ils prennent un intérêt sensible dans des aventures imaginaires ?
Ces questions ne seront jamais pleinement décidées, parce que la variété infinie des circonstances, des objets, des intérêts, et la multiplicité des degrés que peuvent avoir à l’infini les connaissances de l’Eglise et du public, y répandront toujours quelque nuage. […] Laurent, plus zélés pour les pauvres, offrirent de donner sans abonnement, sans déduction des frais, le sixième de leur entière recette, si l’on voulait leur permettre de jouer de petites pièces ; ce qui forma la matière d’un grand procès avec la Comédie Française, lequel dura plusieurs années, occasionna bien des arrêts, et ne fut enfin terminé que lorsque abandonnant (par charité) l’intérêt des pauvres, les Acteurs forains traitèrent avec la Comédie Française, et en obtinrent la permission de représenter de petites pièces, qu’ils achetèrent très chèrement. […] Les Acteurs Français, qui n’ont en vue que le bien public, sans aucun intérêt, les examinèrent de près, et trouvèrent que dans leurs prétendus monologues un Acteur parlait tout haut, et l’autre répondait tout bas ou par gestes, ou s’enfuyait dans les coulisses, d’où il faisait la réponse ; ce qui formait de vraies conversations.
Que nous importe, en effet, que nous sert ce plus précieux don de la liberté, le droit de vote et de suffrage, le droit de contribuer à l’élection de nos législateurs, de nos magistrats communs dont les rapports avec nos personnes, avec nos intérêts présents et sensibles, sont indirects ou éloignés, lorsque, d’un autre côté, on nous en donne de particuliers, sans forme protectrice, qu’il nous faut accepter bon gré mal gré, avec lesquels nous sommes continuellement en contact, qui sont si directement et à un tel point les maîtres de notre état, qui peuvent nous faire tant de mal impunément !
., a adopté pour principe invariable que l’autorité des rois est sur terre, inférieure à l’autorité sacerdotale, et que cette autorité ecclésiastique peut, dans l’intérêt de la religion, et pour la gloire de Dieu, disposer ici-bas des trônes et de la vie des souverains.
Les intérêts de la vérité ne sont pas moins blessés que ceux de la société, par le déguisement qui trompe, que par la crédulité qui se laisse tromper. […] Tout mensonge est un péché : il offense les perfections de Dieu, sa sagesse qui voit la vérité, sa justice qui hait la tromperie, sa providence qui établit la bonne foi : il combat les intérêts du prochain, trouble son repos, se joue de sa crédulité, abuse de sa confiance.
Des malheurs, des périls, des sentimens extraordinaires caractérisent la Tragédie ; des intérêts & des caractères communs constituent la Comédie. […] Il est des vices contre lesquels les Loix n’ont point sévi ; l’ingratitude, l’infidélité au secret & à sa parole, l’usurpation tacite & artificieuse du mérite d’autrui, l’intérêt personnel dans les affaires publiques, échappent a la sévérité des Loix : la Comédie satyrique y attachait une peine d’autant plus terrible, qu’il falait la subir en plein Théâtre : le coupable y était traduit, & le Public se fesait justice.
Dès qu’un spectacle ne touche pas les personnes qui y assistent, que celles-ci demeurent froides et tranquilles, on regarde la pièce comme un corps sans âme : car, selon Horace, ce grand maître de l’art, « la fin est d’intéresser : si vous n’employez la clef de mon cœur pour le faire entrer dans les intérêts de votre passion, l’ennui m’endormira, ou bien j’éclaterai de rire en me moquant de vous. […] La force de l’intérêt, la chaleur du sentiment, le feu de l’action, les ornements de la poésie, tout l’ensemble du spectacle émeut et transporte.
Une Tragédie qui est l’imitation d’une Action grande, est exécutée les jours de Fêtes, par des Acteurs d’une condition estimable, qu’un vil intérêt n’engage point à divertir le Peuple.
Si le père, des intérêts dont il s’agit dans la Comédie, doit être quelquefois content, & quelquefois fâché, il a un des sourcils de son masque froncé, & l’autre rabatu ; & il a une grande attention à montrer aux Spectateurs, celui des côtés de son masque qui convient à sa situation présente.
Il est certain néanmoins que depuis quelques années notre Théâtre se laisse retomber peu à peu dans sa vieille corruption, et que les Farces impudentes, et les Comédies libertines, où l'on mêle bien des choses contraires au sentiment de la piété, et aux bonnes mœurs, ranimeront bientôt la justice de nos Rois, et y rappelleront la honte et les châtiments ; et j'estime que tous les honnêtes gens ont intérêt de s'opposer à ce désordre renaissant, qui met en péril, et qui sans doute ruinera le plus ordinaire et le plus beau des divertissements publics ; Car l'opinion des doctes Chrétiens, est que la représentation des Poèmes Dramatiques ne peut être condamnée quand elle est innocente, quand elle est honnête.
La plaidoirie en étoit une très-comique, aussi bien que celle des Plaideurs de Racine ; il est de l’intérêt & de l’honneur des comédiens de ne pas laisser introduire ces degrés de jurisdiction, où un tribunal supérieur casse leur sentence ; & il est bien de l’intérêt des auteurs de forcer les comédiens à jouer ? […] Un mari ne cassera pas plus la voix que ne l’ont fait vingt amans, & le mari qui n’en a voulu qu’à la fortune, ne sera pas assez bizarre pour fermer son bureau ; ce n’est pas son intérêt, il y perdroit autant qu’elle. […] Bergier ; il y entre sans doute de l’exagération & de l’intérêt personnel, c’est une sorte de réprésaille ; mais dans le fond il y a du tort dans les deux approbations, les deux ouvrages sont répréhensibles, & dans les deux censures au contraire.
Ce Prélat, homme habile, homme à talens, de la plus haute naissance & de la plus grande réputation, qui soutint avec éclat au Concile de Trente les intérêts de la France dont il étoit chargé, devoit-il être si grossierement calomnié d’après un misérable libelle que Dufresnoi a jugé à propos d’insérer dans son recueil sur la Ligue ? […] Aucun Pape n’a été plus que lui dans les intérêts de la France. […] Que vos enfans, dit-il, lisent & relisent tous les jours Corneille ; interrogez-les, instruisez les sur le détail & les intérêts de chaque scène : Je doute que vous puissiez leur donner une meilleure éducation. Il n’est point d’enfans capables de saisir & de suivre les raisonnemens, les vues, les intérêts de toutes les scènes de Corneille ; cette étude est pour eux une chimère.
Le tragique fait penser profondément, s’occupe d’objets sérieux, fait parler des personnes graves, décentes, élevées, raisonne dans le conseil des Princes d’affaires importantes, & traite de grands intérêts. […] Quel spectacle auguste pour un être qui pense, d’un côté l’assemblée des Plénipotentiaires, des Puissances de l’Europe, & de l’autre le sanctuaire de la politique ouvert, le conseil des Rois, le cabinet des Ministres, les mysteres d’Etat exposés aux yeux du public, les intérêts des nations pesés, discutés, balancés, la morale des Cours, le caractère des grands, le langage des dépositaires de la fortune mis dans un beau jour ; pourquoi ne goûteroit-on pas un plaisir solide & instructif ? […] Un ballet qui tient à l’action est une espece de scene moins fatiguante, qui entretient l’attention & l’intérêt. […] Piece médiocre, quoique l’intérêt que l’on prend au fonds, la donne pour un chef-d’œuvre.
Le Parlement l’a bien fait sentir à votre Avocat dans la peine infamante qu’il vient d’ordonner contre son Livre & même contre sa personne ; il a jugé qu’une plume aussi mensongere étoit indigne d’écrire pour les intérêts de la Vérité & de la Justice*, craignant qu’encouragé par cet essai scandaleux, il ne prenne le goût de défendre les causes les plus décriées.
L’ordre et le bonheur de la société humaine roulent sur deux pivots que la bonne politique a toujours cru de son devoir et de son intérêt de maintenir et de protéger : la religion et les lois.
Il y a apparence que cette comédie a été faite en France & envoyée à Rome, Le Sacré Collége, qui, tout occupé de la grande affaire de l’élection d’un Pape, auroit dû la mépriser, comme il avoit méprisé les Gangagnellines, a paru y prendre le plus vif intérêt ; &, à la sollicitation de l’Eminence françoise, a agi avec la plus grande rigueur. […] De si grands intérêts doivent exciter de violentes tempêtes sur la mer des foiblesses humaines, à Rome sur-tout où tous les princes catholiques semblent se réunir pour les exciter. […] Mais, malgré ces intérêts secrets & cet esprit de mitigation, le théatre est si contraire à la morale & aux loix de la Religion, qu’on croiroit se deshonorer en le permettant ou même en ne le proscrivant pas.
L’envie de combattre l’Eglise romaine a fait faire aux protestans des difficultés sur l’indissolubilité du mariage, contraires au bien public & à leurs propres intérêts Ils disent qu’en défendant le divorce, l’Evangile a excepté le cas de l’adultere, exceptâ fornicationis causâ : auquel cas il doit être permis de rompre & de se marier ailleurs. […] Il ne tint qu’à lui d’épouser la Duchesse, & tout le monde s’y attendoit : ce qui l’auroit rendu paisible possesseur de la Courlande, & l’auroit dans la suite approché du trône de la Russie : le vice est trop aveugle pour connoître ses intérêts même temporels Au lieu de lui marquer son amour & sa reconnaissance, il viola les loix sacrées de l’hospitalité, & l’offensa mortellement en débauchant sous ses yeux quatre de ses filles d’honneur, des premieres maisons du pays. […] Prince le plus chaste, le plus frugal, le plus austere, qui menoit la vie la plus dure, & ne vouloit voir aucune femme : il faut avoir toute l’ivresse de la passion pour croire qu’il remettra ses intérêts entre les mains d’une femme ; eh !
Imaginez-vous de prétendues comédies sans unités, sans intérêt ; pour tout sel des obscénités claires, ou ce qu’on appelloit autrefois des quolibets et qui se nomme aujourd’hui des calembourgs ; figurez-vous des danses dénuées de caractère, et exécutées par de foibles enfans qui s’excédent, des pantomimes monstrueuses, mélanges de bouffonnerie et d’héroïque, dans lesquelles il y a toujours des duels, des coups de canon, des supplices, et souvent des hommes métamorphosés en chats, en chiens, en ours, en singes. […] Mais il s’agit bien d’un autre intérêt ; il s’agit d’un nouveau degré de futilité ajouté au caractère national, d’un esprit de bouffonnerie, devenu l’esprit de tout le monde, et qui consiste moins encore à découvrir le ridicule où il est, qu’à le supposer où il n’est pas ; travers funeste, dont l’influence combinée avec tant d’autres causes, telles, par exemple, que la fureur de philosopher tend à détruire tous les principes sur lesquels sont fondés la pudeur, l’amour conjugal, l’attachement des pères pour leurs enfans, et celui des enfans pour leur père, le respect dû à l’âge avancé, &c. […] Elles sont si utiles, que plusieurs d’entr’elles sont reçues gratis ; leur présence est le véritable assaisonnement de ce spectacle, elle tient lieu de l’esprit, de la finesse, de l’intérêt, qui manquent aux productions qui sont représentées.
Sbogar 10 et le Duc de Bourgogne11 ne rachètent point à mes yeux le mal qu’ils ont fait, par le bien qu’ils font ; et le personnage obligé de plusieurs ouvrages de l’Ambigu-Comique n’en est pas moins condamnable ; de l’intérêt à l’épouvante, la distance est grande ! […] Je m’étonne que sous un gouvernement paternel, il existe une préférence aussi préjudiciable aux intérêts d’un spectacle, qu’il fallait ne pas laisser ouvrir, ou le laisser jouir des prérogatives accordées à ses aînés. […] Que de petits intérêts se trouveraient lésés dans cette bienfaisante organisation !
Le danger de séduction est aussi grand pour de jeunes veufs ; l’intérêt des familles est le même ; pour l’honneur, les biens, la paix de la société, il est bien plus grand. […] Il a souvent dit que la Religion Protestante s’est établie en Angleterre par l’amour, en France par les chansons, en Allemagne par l’intérêt.
Voyez dans la religion une multitude de malades guéris par miracle ; & si vous écoûtez la raison & l’intérêt de votre salut, jugez de ce qui doit vous donner plus de joie, un cheval qui court, ou un malade guéri. […] Mais il faux pour les goûter que le vice n’ait pas intérêt à écarter les leçons & les exemples de vertu qui le condamnent : Mirabilis Deus in Sanctis suis.
Ses regrets à cet égard sont une preuve de l’intérêt qu’il prend aux bonnes mœurs. […] L’intérêt & le plaisir ont tout ravagé. Rien n’émane de la vertu ; tout part de l’intérêt, & des passions qu’il allume…. […] L’intérêt & l’instruction s’y trouvent réunis. […] Ils sont fondés sur la raison, sur l’intérêt des bonnes mœurs, & sur la Religion, trois sources d’argumens invincibles.
Ce que nous disons du Théatre, des Auteurs & des Comédiens, ne peut être attribué qu’à l’intérêt que nous prenons à l’Art Dramatique.
Ici ce n’étoit qu’un établissement particulier, que l’intérêt de quelques-uns soutenoit, mais que la Religion & la Police tour à tour menaçoient de ruiner.
L’observation éxacte de la Nature a donné naissance à toutes les règles, mais celle ci sur-tout est tirée de ce que nous enseigne la Nature, & de ce qui se passe chaque jour sous nos yeux : en voilà la preuve ; si l’on nous racontait une histoire remplie d’événemens incroyables, serions nous affectés, éprouverions nous cet attendrissement, cet intérêt qui font que les âmes bien nées plaignent les malheureux ?
Mais la plupart des Comédiens croyent qu’ils n’ont autre chose à faire qu’à débiter leur role avec feu ; ils mettent du sentiment dans ce qu’ils doivent dire, & n’en mettent pas dans ce qu’ils écoutent ; comme s’il était naturel qu’on ne prit nul intérêt aux discours que l’on nous tient, sur-tout lorsqu’ils contiennent des choses qui nous touchent vivement.
Ils m’ont conduit naturellement à parler de ceux des anciens, qui répandaient même un nouvel intérêt dans le Drame.
Exemple qui fait voir, et dans sa Sainteté qui a choisi un si digne Sujet, un parfait discernement, et un amour pour l’Eglise éloigné de tout intérêt et de toute considération humaine ; Et dans sa Majesté qui a applaudi à ce choix, auquel il paraît qu’elle n’a point eu de part, une des marques les plus solides, selon S.
., que s’ils y résistent il est en droit de les punir à titre de rebelles, et que s’ils font quelque entreprise contre l’intérêt de l’Eglise ou la gloire de J.
C’est de là que provient la source de ce mélange du spirituel et du temporel, qui, alors comme aujourd’hui, fut si pernicieux aux intérêts des princes.
Je joins à cette Critique les endroits de son Livre même, dans lesquels, oubliant l’intérêt de son système, il parle dans la vérité, et fait comme une espèce d’amende honorable à l’humanité.
Le saint Evêque d’Apamée Thomas étant auprès de Cosroès, Roi de Perse, vainqueur et persécuteur, pour le solliciter en faveur des Chrétiens, voulut bien se trouver avec lui à une course de chevaux : exercice sans doute bien moins dangereux que le théâtre, et dans une occasion unique, où l’Eglise avait intérêt de ménager un Prince impérieux et cruel. […] Le Clergé ne connaît pas ses intérêts quand il écoute le monde.
N’osant toucher à la loi qui établissait l’infamie, ce qui aurait révolté tout l’Empire, il déclara qu’il fallait distinguer ceux qui jouent quelque rôle pour leur plaisir, et ceux qui font le métier de Comédien par intérêt ; que ceux-ci sont couverts d’infamie, et les autres en sont exempts : loi fort inutile, et au public à qui cette distinction ne fut jamais inconnue, et à lui-même que toutes les lois du monde ne pouvaient jamais garantir du souverain mépris que sa conduite inspirait pour lui à tous les honnêtes gens, dont même il réveillait l’attention et aiguisait la censure par des précautions si frivoles. […] Dans la Satire 8. contre la Noblesse, que Boileau a imitée, et où il établit si bien cette grande vérité si peu connue, et qu’on a en effet si grand intérêt de ne pas connaître, que « la vertu est la seule noblesse », le caustique Juvenal, après avoir parcouru les vices, les bassesses, les folies, les ridicules des Nobles, après les avoir suivis à la guinguette, chez les Courtisanes, sur leurs cabriolets, etc.
Cependant, sous le règne de Napoléon, leur orgueil a fléchi devant le grand intérêt de leur réinstallation. […] Mes frères, l’arrêt qui condamne l’homme au travail n’est pas aussi terrible que, dans son intérêt personnel, le prêtre veut nous le représenter. […] « Peut-on imaginer un moyen plus honnête de ne point tromper autrui, du moins quant à la figure, et de se montrer avec les agréments et les défauts que l’on peut avoir, aux gens qui ont intérêt de nous bien connaître avant de s’obliger à nous aimer ?
Ces changemens affoiblissent l’intérêt, ralentissent l’action, & énervent le corps de l’ouvrage ?
Car, selon Horace2, ce grand maître de l’Art, sa fin est d’intéresser ; si vous n’employez la clef de mon cœur, pour le faire entrer dans les intérêts de votre passion, l’ennui m’endormira, ou bien j’éclaterai de rire, en me mocquant de vous.
Le ministère public est trop éclairé sur les intérêts de l’Etat et de la religion, et il est trop pénétré de ses devoirs envers le souverain, dont il est l’organe, pour se laisser dominer et avilir par l’influence du fanatisme qui sans cesse fait des efforts pour maîtriser le gouvernement.
Fourberies, mensonges, faux témoignages, et tout ce qui peut lui servir pour venir à ses fins est mis en œuvre par Laurette : et son rôle est d’autant plus indécent, qu’elle agit toujours, non seulement par le motif d’un bas intérêt, mais encore par une forte inclination pour le mal.
Mais Hémon ne dit rien de l’intérêt personnel qui l’attache à la Princesse ; si ce n’est dans un vers tellement obscur que Créon ne le comprit pas. […] Pisthetœrus s’échauffe sur le nouvel intérêt qu’il prend à la cause des oiseaux, et jure par Jupiter que c’est à eux et non à lui qu’on doit désormais sacrifier. […] Dans son Eiréné, Trigée menace Jupiter s’il n’en reçoit pas satisfaction, d’informer contre lui comme étant mal affectionné à la Grèce, et un traître qui en abandonne les intérêts. […] J’avoue néanmoins que l’intérêt de la vertu n’a pas toujours été l’objet de leur plume : mais au regard de Fletcher en particulier, il me suffit que ses derniers Ouvrages soient les plus honnêtes ; c’est une preuve ou que ce Poète s’est corrigé, ou que les endroits répréhensibles dans ses Comédies étaient de la façon de Beaumont, lequel mourut avant Fletcher.
Mais dès-là qu’il est épidémique, combien plus par intérêt pour nous-mêmes nous le faut-il exterminer ! […] Arrachez, coupez, devons-nous nous écrier, puisqu’il y va de l’intérêt de la Religion, de l’Etat, de la Société, de l’humanité ! […] Dans ce cas ils ne seront pas, j’en suis sûr, le plus grand nombre ; & dès-lors quand (p. 8) nous n’aurions encore que la morale de l’enfance du monde , si on avoit à la perfectionner , on n’auroit point à consulter leur intérêt . […] Quel homme versé dans la connoissance de l’intérêt public , pour savoir ainsi fixer l’instant où chaque action cesse d’être vertueuse & devient vicieuse ! […] donner à la vertu des fondemens sur lesquels , tous Chrétiens, nous bâtissions également en l’édifiant sur la base de l’intérêt personnel pour le temps & pour l’Éternité.
Cette supposition est non seulement contre le vrai, mais elle est dangereuse, en ce qu’elle peut induire quelques maîtres faibles, à se conduire ainsi, ce qui les exposerait à donner dans tous les travers que l’esprit servile peut suggérer, par intérêt, par malignité, ou par défaut d’apercevance, &c. […] Dans l’Avocat-Patelin, tous les Spectateurs prennent intérêt pour un fripon ; l’on desire que maître Guillaume donne son drap ; on applaudit aux extravagances qui lui font méconnaître son filou une femme presque honnête se prête par nécessité à seconder son mari… Oh ! […] Il serait inutile de s’arrêter à l’idée, que nous pourrions, à l’imitation des Anciens, faire des Tragédies où la déclamation fût modulée : un Drame historique & sérieux, dans notre Musique, qui diffère beaucoup plus de la prononciation commune que celle des Anciens, seroit un monstre, qui pourrait donner de la curiosité, mais qui ne saurait jamais faire naître le plus léger intérêt, parce que jamais il n’en pourrait résulter d’illusion. […] Lorsque l’Auteur a dessiné, imaginé, créé, c’est à l’Acteur à constituer un corps à des beautés muettes ; c’est de lui que la Représentation doit recevoir l’importance, l’intérêt, & l’agrément. […] Les premiers viendraient de son état, & nuiraient à l’importance ; les seconds, de sa personne, & seraient contraires à l’intérêt & à l’agrément.
L’intérêt des bonnes mœurs n’a pas dicté cette loi, ni même une bonne politique : des pieces regulieres & décentes auroient embarrassé les acteurs, ennuyé les spectateurs, introduit les regles, parlé des vertus ; c’étoit précipiter la chûte. […] Ne seroit-il pas de l’intérêt de l’état, du public & des mœurs, qu’a la place des pieces des boulevards, a plupart obscenes & mauvaises ; on y jouât des drames decens & instructifs ?
Je connais deux Tragédies, dont les Vers sont durs & raboteux, qui n’ont pas laissé d’avoir beaucoup de succès, sans parler du jeu des Acteurs ; la raison en est sans doute, qu’elles ont un grand intérêt, qu’elles renferment le terrible & le pathétique, & qu’une action qui intéresse fortement, fait éxcuser une versification lâche & traînante, ou qui blesse les oreilles par sa dureté. […] Je m’étonne que l’Opéra-Bouffon soit applaudi avec tant d’enthousiasme, lui qui n’a presque pas d’intérêt, & dont le stile est toujours bas, rampant & trivial.
Une si basse vengeance et une si puérile sensibilité sont indignes d’un grand cœur ; combien sont-elles au-dessous d’un grand Prince, qui tout occupé des grands intérêts de l’Etat, doit ignorer les bas artifices de l’amour propre ? Mazarin avait le même intérêt que Richelieu à endormir la Cour dans les plaisirs, pour dissiper les innombrables factions qui l’agitaient.
Aucun intérêt ne m’est plus cher que celui de la vérité. […] Mais quand il serait vrai que la raison seule pût tenir lieu de vertu, la tragédie dont je parle n’enseigne-t-elle pas aux Rois, que leur intérêt personnel, celui de leur gloire et de leurs plaisirs ne peut jamais se séparer de l’intérêt général des peuples soumis à leur empire ?
Il en est de même des défauts qu’une nation tolere, & qui sont devenus si communs, que peu de personnes en sont exemptes ; celui qui entreprendroit de les fronder par le secours de la scène, ne seroit peut-être pas accueilli favorablement des Spectateurs : par exemple, chacun sait que l’intérêt est aujourd’hui l’unique base des mariages ; quand on se propose un établissement, on ne songe gueres à s’informer si la personne qu’on recherche a des mœurs, de la vertu, de la conduite, ou si elle est d’une naissance distinguée : est-elle riche, demande-t-on d’abord avec empressement ?
Si la prétention de ce caractère, si répandue auiourd’hui, si maussade comme l’est toute prétention, & si gauche dans ceux qui l’ont malgré la nature & sans succès, n’étoit qu’un de ces ridicules qui ne sont que de la fatuité sans danger, ou de la sottise sans conséquence, je ne m’y serois plus arrêté ; l’objet du portrait ne vaudroit pas les frais des crayons : mais outre sa comique absurdité, cette prétention est de plus si contraire aux régles établies, à l’honnêteté publique, & au respect dû à la Raison, que je me suis cru obligé d’en conserver les traits & la censure, par l’intérêt que tout Citoyen qui pense doit prendre aux droits de la Vertu & de la Vérité.
Ils apprenoient à respecter le lien conjugal, à ne pas faire un badinage, un mérite, un affaisonnement de volupté de l’infidélité du mari & des femmes, dare jura maritis, à ne point profaner les choses saintes, à ne pas se jouer de la Religion & de ses Ministres, à préferer le bien public à l’intérêt particulier, publica privatis scernere sacra prophanis .
Cette intention ne garantit pas des mauvais effets des passions qui triomphent sur le théâtre ; c’est toujours le cœur qui prend le plus de part aux spectacles ; il en est même pour cette raison le premier juge, puisque ce n’est que relativement à l’émotion qu’on y éprouve, qu’on applaudit plus ou moins à la représentation, si on se sent plus fortement ému par le vif intérêt que l’on prend à l’action ; si on se sent transporté sur le lieu de la scène, et comme dans la situation du personnage qui nous attache le plus ; si on l’entend parler, et si on le voit agir comme on parlerait et comme on agirait soi-même, étant animé de la même passion : alors le cœur prononce que le poète et les acteurs ont bien réussi à intéresser les spectateurs.
Tous les ouvrages solides qu’on a donné contre la comédie, ont quelque chose de trop sérieux, qui rebute le lecteur, et décréditea l’auteur par un air de sévérité, qu’on impute à misanthropie, ou à un intérêt de robe et de parti qui fait tenir ce sombre langage.
La sotte vanité d’Armande qui, parce qu’elle est savante regarde avec horreur les liens du mariage, n’en est pas mieux traitée voyant son Amant devenir le mari de sa sœur : et dans le personnage de Trissotin, on trouve de même une belle instruction pour ceux qui ne cherchent que leur intérêt en se mariant.
Quel jugement porterons-nous d’une tragédie, où, quoique les criminels soient punis, ils nous sont présentés sous un aspect si favorable, que tout l’intérêt est pour eux ? […] » « Suivez la plupart des pièces du Théâtre français, vous trouverez, presque dans toutes, des monstres abominables et des actions atroces, utiles, si l’on veut, à donner de l’intérêt aux pièces, mais dangereuses certainement, en ce qu’elles accoutument les yeux du peuple à des horreurs qu’il ne devrait pas même connaître, et à des forfaits qu’il ne devrait pas supposer possibles. […] Son plus grand soin est de tourner la bonté et la simplicité en ridicule, et de mettre la ruse et le mensonge du parti pour lequel on prend intérêt.
La compassion intéresse jusqu’à se faire honneur de la ressemblance, ce qui est non seulement contraire aux bonnes mœurs, mais au but de la tragédie, qui est de corriger les passions par la terreur & la pitié : il ne faut donc pas traiter des sujets où le principal intérêt & le premier rôle tombe sur un scélérat qui ne doit paroître qu’odieux & méprisable pour faire haïr les vices. […] La noblesse du sujet, la dignité de la poésie, font regarder les héros comme des êtres d’une espece supérieure, & l’intérêt de l’Etat, mis en opposition avec celui de l’amour, donne à l’amour un air d’importance, qui, d’une foiblesse & d’un vice, en fait quelque chose de grand, qui n’est qu’un contre-tems malheureux. […] L’amour régne dans les plus sévéres ; dans Polieucte même, (il n’a pas osé dire pieuses) il se mêle aux affaites d’état, aux conspirations, aux intérêts les plus terribles, ce qui donne à la tragédie moderne un air de galanterie, une allure efféminée qu’on n’a point à reprocher aux tragiques Grecs : les mœurs de nos tragédies sont efféminées, donnant à Melpomene la ceinture de Vénus.
Cependant ces histoires même n’épargnent pas plus la scene que ses autres œuvres ; il doit en être bien persuadé, pour s’être permis de décréditer son idôle, & d’affoiblir le culte qu’il lui rend depuis si long tems ; la force de la vérité a pu seule les lui arracher contre son inclination & son intérêt, voilà les traits que je veux recueillir, je n’en garantis pas l’exactitude, il peut y avoir bien des choses altérées, sur tout dans ce qui intéresse la Réligion & le Clergé. […] Il n’a aucun intérêt de dépriser Aristophane & Homere, en faveur de Machiavel, de l’Arioste & du Tasse, tous également morts, & étrangers,) & dans la vérité que sont les comédiens d’Aristophane, si vantés ? […] Qui avoit intérêt de la contredire ?
Ménage-t-on bien les intérêts des Princes chez la postérité que de confier leur gloire à des plumes de théatre ? […] Les Officiers de l’Ambassadeur de France à la Porte, & le Commis de la Compagnie des Indes à la Chine, que ses talents avoient mis dans ses intérêts, lui firent cette galanserie. […] Le même intérêt fait pancher la balance en faveur de l’Octogenaire, qui ne mérite pas plus que Rousseau la grandesse littéraire, & tant d’autres noms qu’on accumule sur sa tête, comme les noms & les qualités des Princes d’Allemagne.
Quoique les paroles de cet homme vain, libertin, caustique, ambitieux, désespéré d’un exil de dix-sept ans, ne soient pas d’un grand poids, l’intérêt des bonnes mœurs dans un auteur qui a un nom, demande quelques réflexions. […] Gardel, donnerent à leur art des regles pour l’intérêt, la marche & la pompe du spectacle. […] Tout ce qui peut prendre quelque intérêt aux vers n’est déja que trop frivole, grace au goût dominant du théatre.
une histoire, disons mieux, une fable proposée sous la forme d’histoire, où l’amour est traité par art et par regles ; où la passion dominante et le ressort de toutes les autres passions, c’est l’amour ; où l’on affecte d’exprimer toutes les foiblesses, tous les transports, toutes les extravagances de l’amour ; où l’on ne voit que maximes d’amour, que protestations d’amour, qu’artifices et ruses d’amour ; où il n’y a point d’intérêt qui ne soit immolé à l’amour, fût-ce l’intérêt le plus cher selon les vues humaines, qui est celui de la gloire ; où la gloire même, la belle gloire, est de sacrifier tout à l’amour ; où un homme infatué ne se gouverne plus que par l’amour, tellement que l’amour est toute son occupation, toute sa vie, tout son objet, sa fin, sa béatitude, son Dieu. […] Tout cela veut dire qu’on sacrifie à son jeu les droits les plus inviolables et les intérêts les plus sacrés ; que l’on fait du jeu sa premiere loi ; que pour ne pas se détacher du jeu, on se détache de toute autre chose, et que dans la concurrence de toute autre chose avec le jeu, quelque essentielle qu’elle soit par elle-même, on retient le jeu et l’on renonce à tout le reste.
Un libertin qui sent par là son Athéisme se confirmer et sa conscience se rassurer, ne saurait être ingrat envers les auteurs de ces bons offices : son propre intérêt même l’engage à prôner de tels ouvrages, et à briguer pour eux des éloges. […] Ces caractères du second ordre font un corps à part ; leur intérêt est détaché de tout le reste ; ils ne sont par rapport à l’Intrigue ni pour ni contre : Le jeune La Mode ne les voit seulement pas jusqu’à la fin du cinquième Acte, où ils reparaissent uniquement pour remplir le Théâtre. […] Vous en demandez trop, et vous entendez mal vos intérêts d’être si empressé pour le plaisir. […] C’était des hommes d’une sainteté et d’un courage à toute épreuve ; des hommes qui foulaient aux pieds tout intérêt et tout respect humain, qui agissaient avec fermeté, qui écrivaient avec liberté pour la gloire de Dieu et pour la pureté du culte qui lui est dû. […] Je mets ici à part les intérêts de la conscience et les vues de l’Eternité : quoique ce soient là les objets essentiels, il en est d’autres capables de faire impression sur les femmes.
N’est-il pas un peu ignoble que le Prince Russe, & le Baron son interprête, s’occupent de ces minuties d’intérêt, & en entretiennent le public ? […] Il étoit d’ailleurs en procès contre son Chapitre, pour des intérêts temporels, & le Théologal le plus habile & le plus ferme de son Corps, en soutenoit vivement les droits.
Je ne doute pas que le goût aujourd’hui dominant du théatre ne contribue à cette haine & à ce mépris, & je ne comprends pas comment les Communautés Religieuses ont pu s’aveugler sur leurs intérêts, jusqu’à le favoriser, à composer, à faire représenter des pieces dans leurs maisons, à donner des règles de l’art dramatique, dont une bonne politique devoit les rendre ennemis déclarés. […] Quoique le ridicule tombe sur l’hypocrite qui emploie les termes de la religion pour son intérêt, & que (dans l’Œdipe) les Prêtres de Jocaste soient reconnus pour des imposteurs, ces peintures, quoique naïves, sont trop sujettes à être mal interprêtées, & dans l’esprit des jeunes gens ces vices occasionnent une trop mauvaise application.
Personne sans doute n’aurait plus d’intérêt que nous à desirer, comme le voulait cet Auteur, que les Comédiennes fussent pour jamais bannies du Théâtre réformé : mais cette proposition me paraît également odieuse à faire, injuste & inadmissible. […] Nulle puissance humaine ne peut obliger les hommes à observer une loi, qui aura plus d’inconvéniens que d’utilité ; ou, si l’on veut, qui serait en sa majeure partie, contraire aux intérêts de ceux qu’elle doit régir.
La crainte, l’intérêt, tout porte à imiter l’homme d’un rang élevé.
Outre qu’ils refroidissent l’intérêt, ils sont à rejetter parce qu’ils n’ont aucune liaison au sujet, & que les Personnages d’un Drame ne sont ni Orateurs ni Moralistes.
Et idcirco constituit hæc sancta synodus, ut nullus presbyter ullam feminam secum in domo propria permittat, quatenus occasio malæ suspicionis, vel facti iniqui, penitus auferatur ; « 14° Plusieurs ecclésiastiques s’adonnant à l’avarice et à l’intérêt sordide, oublient l’Ecriture divine, qui dit : "Il n’a point donné son argent à usure, et prêtent à douze pour cent" ; le saint et grand concile a ordonné que si, après ce règlement, il se trouve quelqu’un qui prenne des usures d’un prêt, qui fasse quelque trafic semblable, qui exige une moitié au-delà du principal, ou qui use de quelque autre invention pour faire un gain sordide, il sera déposé et mis hors du clergé.
On ne s’entretient de ceci que par occasion, et sans autre intérêt que celui de la vérité.
L’une représente une intrigue conduite à sa fin par toutes les nuances, les finesses & l’art du dialogue : l’autre, en s’exprimant dans un degré d’éloignement qui suppose dans le spectateur l’impossibilité d’entendre les interlocuteurs, ne lui devient intelligible que par les situations & par des intérêts assez grands & assez vifs, pour que les gestes puissent suppléer au défaut des paroles. […] Il ne sallut pas moins à Moliere que tout l’intérêt que Louis XIV prenoit à lui, pour qu’il parvint à mériter la gloire qu’il s’est acquise. […] L’extrême inégalité des fortunes entre les citoyens d’une même classe, fondée non sur la mérite & les talens, mais sur les fonds d’avance, les crédits, & les intérêts des retards toujours cumulés avec les bénéfices ordinaires du commerce, fait que d’un côté le mariage aujourd’hui confond plus souvent les rangs par les mésalliances, loin de servir à les distinguer ; tandis que d’un autre côté des obstacles sans nombre éloignent de cet engagement, & entraînent avec eux le relâchement & la corruption des mœurs, suites nécessaires du luxe & de la misere.
Nous avons de ces exemples dans le Vieux Bachelier, dans le Fourbe, dans L’Amour sans intérêt y. […] Celui qui aime ses frères comme soi-même, qui porte la générosité au-delà de tout ce qu’apprend la plus sublime Philosophie, qui n’éprouve point de passion dont il soit tyrannisé, qui est au-dessus de la jalousie, de l’ambition, de la vanité, de l’intérêt, de l’avarice, sources de toutes les divisions ; l’homme, dis-je, qui possède ces qualités doit être sans doute un ami parfait. […] Employer la Providence pour présider aux intérêts du Théâtre !
Jean de Luz, lieu de la conférence des Ministres des deux Couronnes, pour y ménager ses intérêts. […] Ces événemens y jettent de l’intérêt.
ou bien, si vous l’aimez mieux, pourquoi ne pas placer l’intérêt de vos Théâtres dans l’amour de la vertu, de la patrie & de nos Rois.
ces défenseurs perfides, qui sèment adroitement le trouble et la discorde, n’ont ils pas trafiqué de vos intérêts, ne vous ont ils pas ruinés ou cruellement rançonnés et fait maudire leur médiation1 ?
Alors les opinions de ce parti prévalent sur les opinions et la conscience d’un chacun ; c’est de là qu’est née la corruption, l’hypocrisie et l’infâme morale des intérêts, dont les jésuites de tout temps et aujourd’hui les pères de la foi, profitèrent avec un si grand avantage.
D’abord, il m’a semblé qu’un Comédien était moins en état qu’un autre de juger des effets de l’Actricisme sur le Spectateur : ensuite, j’ai considéré cet Auteur, comme un homme inconséquent, qui a soutenu le Théâtre, tant qu’il y a paru, & qui ne l’attaque que lorsqu’il l’a quitté ; ce sont de nouvelles lumières , dit-il ; je crains que ce ne soient de nouveaux intérêts : puis cet acharnement qu’il marque contre l’amour révolta ma raison. […] Ma sœur, n’avez-vous pas remarqué, qu’il est très-agréable pour l’amour-propre, de se disculper par l’instigation de l’Esprit-rebelle, des fautes que l’intérêt ou la fragilité nous ont fait commettre ? […] Les hommes du premier âge voyaient Dieu dans ses ouvrages ; sa voix, pour eux, n’était autre que celle de la nature, & leur sens intime : mais le Théocrate avait intérêt d’étouffer cette voix commune, & claire pour tout le monde. […] Le peuple, longtemps abruti sous la Théocratie, n’était que trop disposé à croire, que ceux qui l’avaient soumis, étaient d’une nature plus excellente : la vanité, l’orgueil trouvèrent leur compte à se le persuader : les Prêtres, auxquels on laissait l’administration des Temples élevés en l’honneur de ces Mortels déifiés, virent qu’il était de leur intérêt de confirmer l’imposture de leurs Maîtres. […] Le Prêtre est d’un Corps qui a des intérêts particuliers !
On n’est que trop persuadé que la plupart ne sont engagés dans leur profession que par la vue d’un intérêt sordide ou par le libertinage. […] Oui, je l’avoue, l’intérêt qui les fait jouer ne serait pas seul capable de leur attirer cette infamie, il était inutile de vous faire cette objection. L’exclusion de cet intérêt n’est pas aussi la seule cause qui en purge les écoliers qui jouent dans les Collèges. […] Il était outre cela de votre intérêt, de faire dire à Saint Chrysostome que les Chrétiens y passaient les jours entiers. […] Un Théologien ne doit mettre la main à la plume que pour défendre les intérêts de l’Eglise, et vous avez employé la vôtre pour les combattre.
Un sage est un homme grave & sérieux, occupé de la sagesse, s’intéressant avec zele pour le bien public, plein de bienfaisance, travaillant pour l’humanité ; un homme Sans Souci est un libertin qui ne songe qu’à son plaisir, un esprit frivole qui glisse sur tout & ne prend intérêt à rien. […] Mais nous qui renonçons à toute recompense, Nous qui ne croyons point vos éternels tourmens, L’intérêt n’a jamais souillé nos sentimens, Nous finissons sans trouble & sans regret.
Cependant, comme le vice, toûjours semblable à lui-même, viole les mêmes loix, trouve les mêmes obstacles, a les mêmes intérêts à ménager, il régne sur le théatre une sorte d’accord & un systême de dépravation, tout tend au même but ; on sent que le démon dirige sa marche, combine les principes, fait agir les ressorts. […] Elle est contraire à leurs intérêts : l’infidélité d’une femme fait honneur, si Jupiter est le rival ; elle est très-lucrative, si c’est Plutus.
L’urbanité, la modestie, le sérieux, la gravité, ne sont pas tout-à-fait bannies de dessus la terre, & les Comédiens, accoûtumés à jouer toute sorte de rôles, ont intérêt de se conformer au goût dominant. […] S’il y avoit un simple artisan qui ne rougît pas de voir sa fille parmi les femmes de théatre, s’il aidoit au contraire à l’y placer, si sa conduite étoit vûe avec indifférence par ses égaux, cette révolution seroit digne de l’attention d’un État qui veilleroit à ses véritables intérêts.
On pourroit même traiter l’amour conjugal, filial, paternel, de la patrie, qui feroient très-bien, & pourroient beaucoup fournir ; mais on ne voit que la passion, on la met par-tout, & on lui sacrifie tout, loix, devoir, nature, gloire, intérêt, famille, & souvent les Princes leur royaume. […] Cette comparaison est prise du Discours 32 de Dion Chrysostome aux Athéniens, où cet éloquent Orateur les exhorte non-seulement à bien recevoir les avis qu’on leur donne pour la réformation des mœurs, & des personnes qui ont assez de zèle & de courage pour les leur donner, mais à bien distinguer les charitables moniteurs qui agissent par de bonnes vues, de ceux qui sont conduits par l’intérêt, la vanité, & qui détruisent par leurs exemples le bien qu’ils pourroient faire par leurs remontrances, comme sont les Comédiens.
Leur propre intérêt les obligeait donc à être circonspects,p. 44. […] Cependant, parce que le gain et l’intérêt était le seul but où tendaient les Comédiens, et la fin unique qu’ils se proposaient, nos ancêtres les ont toujours détestés ; ce qui paraît par quantité d’Arrêts que le Parlement a donnés contre eux, et qu’on a déja rapportés en d’autres écrits sur ce même sujet.
Le public n’est pas courtisan : la pièce parut froide, la texture commune, la versification prosaïque, les personnages sans intérêt ; elle tomba pour ne jamais se relever. […] Par le scandale qu’il donne, un Comédien qui s’avise de parler religion et vertu, est un nouveau Balaam, qui malgré lui prophétise, et bénit le peuple d’Israël, tandis qu’avare et faux Prophète il n’était venu que par intérêt pour le maudire.
Mais en cela il ne parle que comme les gens de bien, et ce n’est pas seulement sur le Tartuffe, c’est sur la comédie en général, où il n’avait pas le même intérêt, que ce dénicheur des Saints, qui n’était pas superstitieux, a tenu le langage de la piété. […] [NDE] Ici, le mot signifie que les intérêts de Dieu et ceux du monde ne peuvent pas se mélanger.
La loi, la raison, l'intérêt de la conscience, ne font pas plus de grâce au plaisir qu'à l'action. […] Vous le croyez, c'est votre religion ; vous le craignez, c'est votre intérêt.