Le caractere, les victoires, la défaite, la situation de ce Prince fugitif, en respirant la vengeance jusqu’à proposer d’aller attaquer les Romains dans Rome même, tout cela étoit conforme à son état & à ses sentimens. […] Quoique les sentimens des Princes sur la Religion ne doivent pas , dit Voltaire, influer sur les autres hommes, & que l’opinion d’un homme aussi peu instruit que Charles XII ne soit d’aucun poids dans cette matiere , il faut satisfaire la curiosité du public. […] Il vit alors à Leipsick de fameux Philosophe Leibnitz, homme d’un génie & d’un savoir étonnant, mais malheureusement sans religion, qui pensoit & parloit fort librement, & avoit inspiré ses sentimens à plusieurs Princes d’Allemagne Ce qui n’est que trop vrai pour la Cour & l’Académie de Berlin, dont il fut le Président & le Fondateur, & où ils regnent encore. […] Le Czar , ajoute Voltaire qui a aussi écrit la vie de ce Prince, avoit les mêmes sentimens sur la religion & sur la destinée ; mais il en parloit plus souvent & ouvertement, & avoit la supériorité de génie, l’étude de la philosophie & le don d’éloquence au-dessus de Charles, qui ne savoit que se battre (l’éloquence & l’étude du Czar étoient médiocres). […] Leibnitz n’influa point sur les sentimens du Roi de Suede : ce guerrier le vit à peine un instant à Leipsick, & ne s’embarrassa gueres de toute sa science ; il étoit trop occupé de la guerre de Pologne & de Saxe, pour s’amuser à des discussions philosophiques fort peu de son goût, & où il n’eût rien entendu.
Or cet esprit consiste dans l’estime que l’on fait de ses pompes & de ses vanitez, ensuite dans les sentimens que l’on y prend, & qui sont opposez à la Morale Chrétienne, & enfin dans un refroidissement de la pieté, & dans l’éloignement de tous les exercices qui l’entretiennent. […] Que si ces spectacles nous mettent ainsi en danger de prendre l’esprit du monde, il n’y a pas moins de sujet de craindre qu’il ne nous en imprime les sentimens, & les maximes, sur lesquelles ensuite l’on regle sa vie & sa conduite ; puisque ces spectacles sont comme une école, où l’on enseigne une Morale toute contraire à l’Evangile, & à la Religion. […] Que si l’on s’est quelquefois avisé de faire paroître sur la scene des Martyrs ; au lieu de leur donner des sentimens Chrétiens, on les a rendus profanes, en y mêlant tant d’intrigues d’amour, tant de sentiment d’ambition, tant de fierté & d’orgueil, qu’on pourroit dire que ce sont des Martyrs qui parlent en Payens. Ainsi comme l’on tient un livre pour dangereux, lorsqu’à la faveur de quelques sentimens Orthodoxes, qui y sont bien touchez & répandus çà & là, on en fait couler d’autres qui sont impies ou suspects ; parce qu’on juge avec raison, que c’est un serpent caché sous des fleurs, & que le venin, sans cet artifice, en seroit sans effet ; pourquoy n’en diroit on pas le même de ces Tragedies, où le profane est confondu avec le sacré, & où les maximes les plus opposées au Christianisme sont mises en la bouche de ces Chrétiens de Theâtre, qui soutiennent si mal le personnage qu’ils representent ? Or, s’il y a du danger de s’accoûtumer à entendre des sentimens & des maximes contraires à la Religion que nous professons, si l’Eglise même employe son authorité, pour défendre la lecture des livres suspects, si la compagnie des personnes qui ont toûjours ces maximes dans la bouche, ou qui reglent leur vie selon ces sentimens, est dangereuse, parce qu’ils les inspirent à ceux qui les frequentent ; y aura-t-il moins de danger à les voir exprimer, representer, approuver, écouter les applaudissemens que l’on donne à ceux qui les font le mieux sentir, & qui les font entrer dans l’esprit par la beauté des vers, & des pensées si noblement exprimées ?
Or cet esprit consiste dans l’estime que l’on fait de ses pompes & de ses vanitez, ensuite dans les sentimens que l’on y prend, & qui sont opposez a la Morale Chrétienne, & enfin dans un refroidissement de la pieté, & dans l’éloignement de tous les exercices qui l’entretiennent. […] Que si ces spectacles nous mettent ainsi en danger de prendre l’esprit du monde, il n’y a pas moins de sujet de craindre qu’il ne nous en imprime les sentimens, & les maximes, sur lesquelles ensuite l’on regle sa vie & sa conduite ; puisque ces spectacles sont comme une école, où l’on enseigne une Morale toute contraire à l’Evangile, & à la Religion. […] Que si l’on s’est quelquefois avisé de faire paroître sur la scene des Martyrs ; au lieu de leur donner des sentimens Chrétiens, on les a rendus profanes, en y mêlant tant d’intrigues d’amour, tant de sentiment d’ambition, tant de fierté & d’orgueil, qu’on pourroit dire que ce sont des Martyrs qui parlent en Payens. Ainsi comme l’on tient un livre pour dangereux, lorsqu’à la faveur de quelques sentimens Orthodoxes, qui y sont bien touchez & répandus çà & là, on en fait couler d’autres qui sont impies ou suspects ; parce qu’on juge avec raison, que c’est un serpent caché sous des fleurs, & que le venin, sans cet artifice, en seroit sans effet ; pourquoy n’en diroit on pas le même de ces Tragedies, où le profane est confondu avec le sacré, & où les maximes les plus opposées au Christianisme sont mises en la bouche de ces Chrétiens de Theâtre, qui soutiennent si mal le personnage qu’ils representent ? Or, s’il y a du danger de s’accoûtumer à entendre des sentimens & des maximes contraires à la Religion que nous professons, si l’Eglise même employe son authorité, pour défendre la lecture des livres suspects, si la compagnie des personnes qui ont toûjours ces maximes à la bouche, ou qui reglent leur vie selon ces sentimens ; est dangereuse, parce qu’ils les inspirent à ceux qui les frequentent ; y aura-t-il moins de danger à les voir exprimer, representer, approuver, écouter les applaudissemens que l’on donne à ceux qui les font le mieux sentir, & qui les font entendre dans l’esprit par la beauté des vers, & des pensées si noblement exprimées ?
Il en rapporte plusieurs morceaux, ne la cite jamais que pour adopter les sentimens de l’Auteur ; & lorsqu’il en vient aux différens parallèles qu’on a faits de Corneille & de Racine, il ajoute : bien des gens trouveront que personne n’a mieux touché au but dans cette question que M. le Franc. […] Ceux qui savent apprécier l’heureux accord des talens Littéraires & des sentimens de sagesse & de retenue que la Religion & la vraie philosophie inspirent, verront avec plaisir cet illustre Ecrivain, autrefois néanmoins si injustement outragé, traiter avec autant de goût & de lumière, que d’aisance & de précision, les Principes de l’art dramatique, & les resserrer dans les justes bornes de la décence & de l’utilité.
On ne s’habille plus comme les Romains ; mais l’élevation des sentimens ne dépend point de l’habillement : la noblesse de l’ame est de tous les tems, & n’est point sujette aux vicissitudes de la mode. […] Vous êtes heureux, si cette opposition de vos sentimens à vos écrits est par tout égale. […] Les spectacles ne disposent point à des sentimens trop tendres : le sentiment de l’amour est dans la nature de notre être : ils épurent ce sentiment ; ils le dirigent vers un but légitime. […] Ces loix si vantées auroient dû inspirer à leurs observateurs les sentimens les plus nobles & les plus relevés de la véritable générosité, sans laquelle on n’a que des idées imparfaites de la justice. […] Un Orateur qui dans un discours véhément fait parler les passions, n’est-il pas obligé d’adopter, de s’approprier intimement des sentimens qui sont absolument étrangers à sa personne, mais qui sont dépendans des propositions qu’il veut établir ?
« Peut-on, dit encore l’Auteur que nous venons de citer, avoir quelque élevation dans les sentimens, sans être choqué de voir la Tragédie dégradée par une tendresse vaine, qui n’a rien de sérieux, & dont tout l’art est d’arrêter à chaque pas l’impression que devroient faire la terreur, la pitié ou la passion principale de la piéce ? […] des sentimens connus de tous les spectateurs. […] C’est, ajoute-t-il, ce qui est arrivé à la tragédie sur la plûpart des Théatres ; au lieu des grandes actions, des sentimens généreux, qui excitent le courage, la vertu, l’émulation, la compassion, la crainte, l’estime, l’admiration ; on ne voit presque plus, par le mauvais goût du siécle, que des intrigues de galanterie où des héros effeminés, font les pitoyables personnages d’amans passionnés. » Il est rare que les hommes soient agités de deux grandes passions dans le même tems.
Mais si vous avez un son de voix plus agréable, un langage plus poli, des sentimens plus délicats, cette maniere de flatter les passions est nécessaire, relativement aux gens qui vous écoutent ; la populace n’entendroit rien aux maximes que vous débitez & les sottises des Histrions choqueroient les personnes qui fréquentent vos Spectacles ; il faut un aliment préparé selon le goût respectif des Convives que l’on veut regaler. […] Crebillon en son Idoménée a copié le sacrifice de Jephté, en prêtant néanmoins à son Héros des sentimens tout autres que ceux du Juge d’Israel. […] Ce sont des Héros que nos Auteurs produisent sur la Scéne, ou du moins ils les donnent pour tels, & les sentimens impies qu’ils leur attribuent doivent charmer les Spectateurs & mériter leurs applaudissemens.
On applaudit à la noblesse des sentimens de l’Actrice, qui la porte à rompre des fers que les seuls préjugés ont pris soin de forger . […] Le cri public qui s’est élevé contre ce Livre, à l’instant qu’il a paru, nous a porté à en faire un prompt examen, avec plusieurs de nos Confreres, & à rendre l’avis de l’ordre dans une Assemblée générale, qui, pour manifester la pureté de nos sentimens & la sévérité de notre discipline, a d’une voix unanime retranché du nombre des Avocats, l’Auteur, & m’a chargé de dénoncer son Ouvrage à la Cour, dont le zéle en matiere de Religion, de bonnes mœurs & de Police publique, se manifeste en toute occasion. […] Omer Joly de Fleury, Avocat dudit Seigneur Roi, portant la parole, ont dit : Que l’exposé qui vient d’être fait à la Cour, du Livre intitulé : Libertés de la France contre le pouvoir arbitraire de l’Excommunication, ne justifioit que trop la sensation que sa distribution avoit excitée dans le public ; qu’ils se seroient même empressés de le déferer il y a plusieurs jours, s’ils n’avoient été instruits des mesures que prenoient à ce sujet ceux qui se dévouent sous les yeux de la Cour, à la profession du Barreau ; que leur délicatesse, leur attachement à l’épreuve de tout aux maximes saintes de la Religion, & aux Loix de l’Etat, ne leur avoient pas permis de garder le silence ; & que dans les sentimens qu’ils venoient d’exprimer, on y reconnoissoit cette pureté, cette tradition d’honneur & de principes, qui distinguent singulierement ce premier Barreau du Royaume.
A fin de terminer ce cinquième Livre par quelque chose d’utile, je vais hazarder des réfléxions sur les divers sentimens qu’éprouvent les Spectateurs d’un Poème dramatique ; je vais tâcher de découvrir les causes de l’intérêt qu’ils prennent aux aventures fabuleuses représentées sur la Scène, & au plaisir qu’ils ressentent à une Tragédie, quoiqu’elle les pénètre de la plus vive douleur, & qu’elle leur fasse souvent répandue des larmes. […] Plusieurs Auteurs célèbres ont proposé leurs sentimens au sujet de la question sur laquelle j’ai dèssein de réfléchir. […] Il est se vrai que la tristesse & les angoisses que nous cause la Tragédie, nous paraissent délicieuses parce qu’elles satisfont le penchant qu’ont tous les hommes à plaindre les infortunés, que jamais au Théâtre on n’a éprouvé avec peine ces sentimens, tout douloureux, tout déchirant qu’ils sont dans d’autres circonstances.
un usurpateur, un tyran, un fanatique, un rebelle, un emporté, un furieux, un vindicatif, dont on présente les sentimens poussés à leur dernier période, comme des effets de la grandeur d’ame. […] On n’ose découvrir ses propres sentimens ; on n’ose montrer ses plaies, mais on affecte une indifférence extrême ; on cherche divers prétextes pour s’éloigner de ce qui est permis ; on prête une oreille attentive à la voix de la volupté qui semble encore se faire entendre ». […] Pour ce qui est de l’Italie, nous ne pouvons produire un monument ni plus récent, ni plus fort, ni plus certain, des sentimens des souverains Pontifes touchant les théâtres, que le traité latin des spectacles, imprimé à Rome en 1752, par le célebre Pere Concina, Dominicain. […] Bordelon, où il fait voir que l’aumône exigée pour l’Hôpital général, de ceux qui vont aux spectacles, ne les justifie point ; réfutation d’un écrit favorisant la comédie, in-12. à Paris, chez Edme Couterot 1694 ; lettre d’un Docteur de Sorbonne à une personne de qualité, au sujet de la comédie, in-12. à Paris, chez Claude Mazuel, 1694 ; sentimens de l’Eglise & des saints Peres sur la comédie & les comédiens ; le mandement donné par M. l’Evêque d’Arras, (Gui I. de Seve de Rochechouart) contre la comédie, par lequel il défend, sous peine d’excommunication, à tous les Fideles soumis à sa conduite, d’aller à la comédie, in-12. à Paris, chez Pierre Ballard, 1696 ; histoire & abrégé des ouvrages latins, italiens & françois pour & contre la comédie & l’opéra…. […] Que ces sentimens sont beaux, & qu’ils peignent admirablement la religion de la pieuse Princesse qui les exprime !
Je suis avec tous les sentimens d’un respectueux attachement, Monsieur, Votre très-humble, &c. […] J’ai l’honneur d’être, avec tous les sentimens d’une parfaite estime & d’un respectueux attachement, Monsieur, Votre très-humble, &c.
Il est la source, selon lui, du vrai courage ; c’est lui qui fait les vrais héros ; c’est à lui qu’ils doivent l’élévation de leurs sentimens. […] Quels ravages de tels sentimens, s’ils sont reçus dans le cœur déja trop porté à l’enflure, ne doivent-ils pas produire ?