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7. (1667) Traité de la comédie et des spectacles « Sentiments des Pères de l'Eglise sur la comédie et les spectacles — 12. SIECLE. » pp. 187-190

Certes ce n'est pas tant une folie, qu'une infidélité d'aimer des choses si basses, ou plutôt des choses de néant, et d'estimer si peu cette gloire que nul œil n'a vue, que nulle oreille n'a ouïe, que nul esprit humain n'a imaginée, ces biens et ces trésors que Dieu a préparés pour ceux qui l'aiment. […] Notre siècle s'attachant à des fables e à de vains amusements, ne prostitue pas seulement les oreilles et le cœur à la vanité ; mais il flatte aussi son oisiveté par les plaisirs des yeux et des oreilles ; et il allume le feu de l'impureté cherchant de toutes parts ce qui est propre à entretenir les vices. […] Un homme d'honneur ne doit point regarder les Spectacles, et particulièrement ceux qui sont déshonnêtes, de peur que l'incontinence de sa vue ne soit un témoignage de l'impureté de son âme ; C'est avec raison que Périclès étant Préteur reprit Sophocle son collègue, en ces termes: Il faut qu'un Magistrat n'ait pas seulement les mains pures, mais les yeux même ; C'est pourquoi un homme à qui la puissance Royale donnait une grande licence, faisait cette prière à Dieu: Détournez mes yeux afin qu'ils ne regardent point la vanité; car il savait bien qu'il est certain que la vue cause une infinité de maux ; ce que le Prophète Jérémie déplore dans ses Lamentations ; Mes yeux, dit-il, ont ravi mon âme comme une proie.

8. (1667) Traité de la comédie et des spectacles « Sentiments des Pères de l'Eglise sur la comédie et les spectacles — 4. SIÈCLE. » pp. 120-146

Celui qui s'applique à considérer que le Seigneur lui est toujours présent, et qui a toujours les yeux intérieurs de son âme arrêtés sur Jésus-Christ, n'a point égard aux vanités et aux tromperies du siècle. Ainsi ce saint Prophète se tournant vers lui, lui fait cette prière: Détournez mes yeux, afin qu'ils ne regardent point la vanité. […] C'est pourquoi détournons nos yeux des vanités, de peur que la vue de ces folies n'imprime de mauvais désirs dans notre âme ; Et sans parler du sens mystique de ce passage, Dieu veuille que cette interprétation ait la force de retirer des Spectacles du Cirque et du Théâtre, ceux qui y courent: Ces Jeux que vous regardez ne sont que vanité, élevez vos yeux vers Jésus-Christ, et détournez-les des Spectacles, et de toutes les pompes du siècle. […] N'avez-vous point horreur de regarder cette sainte Table, où l'on célèbre les redoutables mystères, des mêmes yeux dont vous regardez ce lit qui est dressé sur le Théâtre, où l'on représente les détestables fictions de l'adultère ? […] Qui pourrait dire combien ces fictions rendent de personnes adultères, et combien elles inspirent l'impudence et l'impureté dans tous ceux qui les regardent; car il n'y a rien de plus impudique que l'œil, qui peut souffrir de voir ces ordures.

9. (1640) Traité des Spectacles des Gentils « SAINCT CYPRIAN DES SPECTACLES. » pp. 155-193

Ainsi les impudicitez, le des-honneur & l’infamie augmentent à veuë d’œil. […] Qu’il porte donc ses yeux & son admiration vers le Ciel, & qu’en suitte d’vn tout si accõply il décẽde aux parties. […] Qu’il jette en après les yeux sur la terre, dont la masse est comme vn point enuironnée du Ciel, & suspenduë auec les montagnes qui luy sont attachées. […] Et tous ces beaux lambris, dont l’or & les richesses surprennent les yeux vn peu foibles, que sont ils aupres du vif esclat des Astres. […] Celuy qui n’a des yeux que pour admirer la creature sans le Createur, fait tort à sa generosité, & à la grãdeur de sa naissance.

10. (1632) Les Leçons exemplaires de M.I.P.C.E. « Livre III, Leçon X. LA COMEDIENNE CONVERTIE. » pp. 461-479

Et davantage le Magistrat a tellement l’œil à ces ébats que ceux qui disent ou font des actions qui offensent la pudeur ou les bonnes mœurs sont sévèrement châtiés encore que par joyeuseté il y ait toujours quelque personnage destiné à donner du plaisir et à faire rire la compagnie soit par les points et les rencontres de ses mots, soit par ses grimaces, soit par ses sottises et badineries, mais toujours sans préjudice de l’honnêteté et de la modestie. […] Aussitôt qu’ils paraissent sur le Théâtre il se fait un silence si profond qu’il ressemble à celui des morts qui reposent dans le sépulcre, ils ont des tons de voix si charmants, des yeux si parlants des actions si agréables qu’ils ravissent par la vue et l'ouïe tous ceux qui les considèrent. […] Certes quelque beauté que les yeux remarquent en une femme rien ne flatte si doucement l’imagination, et rien ne donne tant d’amour que l’honnêteté. […] Si jamais j’ai mérité quelque grâce devant les yeux et les oreilles de votre Majesté je vous supplie de ne me dénier pas cette faveur qui me sauvera des périls du monde et me mettra en un lieu d’assurance où délivrée des mains de mes ennemis je pourrai sans crainte servir Dieu en sainteté et en justice tous les jours de ma vie : là Madame je serai une lampe continuellement ardente devant l’autel de sa divine Majesté pour la prier pour la prospérité de la vôtre. […] Mais je veux mieux espérer de votre Royale clémence, vos yeux me disent que vos oreilles ont ouï ma juste prière, que votre cœur pitoyable l'a exaucée et que votre bouche sacrée va prononcer son entérinement.

11. (1603) La première atteinte contre ceux qui accusent les comédies « A Monseigneur de Nemours » pp. -

Un jour que dans l’humide plein Phœbus allait reprendre haleine, Et chasser de son œil riant La nuit de ceux qui n’ont lumière Que lors qu’il finit la carrière Qui leur commence l’Orient ; Je vis au séjour qui bannit les vices, Et au Paradis des esprits, Une lumière de merveille, Une Musique nonpareille, Qui environnait ce pourpris. […] Je dis que c’est la belle Astrée Qui visite notre contrée, Laissant le ciel veuf de ses yeux : Mais j’entends la voix d’un Oracle Qui dit, c’est un autre miracle Pour trouver en terre les Cieux. […] Princesse que l’honneur honore, Tu vois au lever de l’aurore De ton fils, renaître un Soleil, Luisant d’autant de gentillesses Qu’on a vu briller de sagesses Aux feux divins de ton bel œil. […] Je sais ainsi que ceux d’Egypte, Connaissant la force petite De mon œil contre les efforts Des rais de cette grand’ lumière, Il vont dessus une rivière, Adorer l’ombre pour le corps.

12. (1687) Avis aux RR. PP. jésuites « XII. » pp. 58-61

Argus les découvre par d’autres yeux que ceux qui regardent danser. […] Ces yeux doubles que vous lui donnez, et dont les uns servent à regarder danser et les autres à veiller sont peut-être le Symbole de cette direction d’intention si célèbre dans votre Morale qui fait qu’on peut, selon vous, prendre part extérieurement à une chose défendue, pourvu que par d’autres yeux on se porte intérieurement à un objet permis. […] Le Sommeil par la vertu de ses Pavots ne l’endort pas tout à fait, mais peu s’en faut qu’il ne lui ait assoupi tous les yeux.

13. (1668) Idée des spectacles anciens et nouveaux « Idée des spectacles anciens et nouveavx. — Idée des spectacles novveavx. Livre II. — Chapitre III. Du Bal. » pp. 178-183

Mais icy il ne s’agit que de soy-mesme : Vous paroissez tel que vous estes, & tous vos pas & toutes vos actions sont tributaires aux yeux des Spectateurs, & leur exposent & le bien & le mal, dont l’Art & la Nature ont favorisé ou disgracié vostre personne. […] Elle déplaist aussi aisément qu’elle peut plaire, & surtout quand elle devient immodeste, & si elle paroist s’attendre à quelque chose de plus qu’à la simple aprobation des yeux. […] Il faut les yeux, les beaux exemples & de bons Maistres ; & quelquefois mesme avec toutes ces aydes, on a bien de la peine à la bien concevoir, & encore plus à l’executer. […] Il faut que tout cela se face à la juste portée des yeux, & que l’on voye un homme de tous sens & de niveau, pour juger juste de ce qu’il est, & de ce qu’il sçait faire.

14. (1738) Sentimens de Monseigneur Jean Joseph Languet Evéque de Soissons, et de quelques autres Savans et Pieux Ecrivains de la Compagnie de Jesus, sur le faux bonheur et la vanité des plaisirs mondains. Premiere partie « Sentimens de quelques ecrivains De la Compagnie de Jesus, Touchant les Bals & Comedies. Premiere Partie. — Entretien troisieme. Le danger des Bals & Comedies découvert par l’Auteur des Sermons sur tous les sujets de la morale Chrétienne de la Compagnie de Jesus. » pp. 26-56

Or dites-moy, où est-ce que le monde brille davantage, & donne plus dans les yeux ? […] Ce qui fait que le saint Roy Prophete demandoit instamment à Dieu, qu’il luy fit la grace de détourner ses yeux, pour ne pas s’arrêter à considerer les vanitez du monde : Averte oculos meos ne videant vanitatem. […] Les images qu’elle en a si souvent devant les yeux, ne representent-elles pas à son esprit, à la moindre application qu’elle voudra faire aux choses de son salut ? […] Heureux celuy qui n’a point ouvert les yeux pour s’arrêter à voir les vanitez & les folies du monde ! […] Heureux donc encore une fois, celuy qui n’ouvre point les yeux à ces spectacles & à ces vanitez : Beatus qui non respexit in vanitates & insanias falsas !

15. (1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « XIII. Si l’on peut excuser les laïques qui assistent à la comédie, sous le prétexte des canons qui la défendent spécialement aux ecclésiastiques. » pp. 52-57

C’est-à-dire, Toutes les choses où se trouvent les attraits des yeux et des oreilles, par où l’on croit que la vigueur de l’âme puisse être amollie, comme on le peut ressentir dans certaines sortes de musique et autres choses semblables, doivent être évitées par les ministres de Dieu : parce que par tous ces attraits des oreilles et des yeux, une multitude de vices, turba vitiorum, a coutume d’entrer dans l’âme.  » Ce canon ne suppose pas dans les spectacles qu’il blâme, des discours ou des actions licencieuses, ni aucune incontinence marquée : il s’attache seulement à ce qui accompagne naturellement « ces attraits, ces plaisirs des yeux et des oreilles : oculorum et aurium illecebras » ; qui est une mollesse dans les chants, et je ne sais quoi pour les yeux qui affaiblit insensiblement la vigueur de l’âme.

16. (1824) Du danger des spectacles « INTRODUCTION. » pp. 1-3

De même qu’il est beau quelquefois d’attaquer avec une vertueuse liberté, des opinions et des préjugés qui ont pour eux l’autorité des temps et un vieux respect, fils de l’habitude ; de même que le résultat de ces attaques, inscrites dans les bornes de la modération et de la charité chrétienne, a souvent été la destruction de l’erreur et le triomphe de la vérité ; c’est ainsi qu’il est d’une importance égale, sinon plus grande encore, d’examiner avec les yeux de l’impartialité plusieurs des usages et des plaisirs de la société, que l’empire d’une longue indulgence semble avoir consacrés. […] On ne peut, d’ailleurs, mettre en doute que nos passions, notre corruption naturelle et l’amour du monde que nous portons dans le cœur, tout concourt à nous communiquer un invincible attachement pour tous ces amusements mondains que l’habitude et l’exemple rendent innocents à nos yeux. […] Sans doute, nous sommes loin d’avoir discuté le sujet dans toute son étendue ; nous nous sommes contenté d’en mettre un léger aperçu sous les yeux du lecteur : mais, quelque bornées que soient les limites que nous nous sommes imposées, nous ne doutons pas que ce petit nombre de pages n’appelle la plus sérieuse attention.

17. (1700) IV. Sermon des spectacles, comedies, bals, etc. [Sermons sur tous les sujets de la morale chrétienne. Cinquiéme partie] « IV. Sermon des spectacles, comedies, bals, &c. » pp. 95-126

Cette demande, Messieurs, étoit sans doute bien juste ; & si rien ne nous est plus cher dans la vie, que nos yeux, je ne vois pas ce que cet homme, dans l’état où il étoit reduit, pouvoit demander qui luy fût plus necessaire, Domine ut videam. […] Or dites-moy, où est-ce que le monde brille davantage, & donne plus dans les yeux ? […] Les images qu’elle en a si souvent devant les yeux, ne se representent-elles pas à son esprit, à la moindre application qu’elle voudra faire aux choses de son salut ? […] Heureux celuy qui n’a point ouvert les yeux pour s’arrêter à voir les vanitez & les folies du monde ! […] Heureux donc encore une fois, celuy qui n’ouvre point les yeux à ces spectacles & à ces vanitez : Beatus qui non respexit in vanitates & in insanias falsas  !

18. (1686) Sermon sur les spectacles pp. 42-84

N’est-ce pas là que tout l’art s’épuise à raffiner les plaisirs, à faire entrer le luxe et la volupté, par les oreilles et par les yeux, pour en remplir l’âme, et pour les faire triompher ? […] Comment, sous les lois d’un Evangile qui nous ordonne d’arracher notre œil, s’il nous scandalise, il nous sera libre de nous exposer au plus grand danger ? […]  » Que ne puis-je rassembler ici sous vos yeux tous ceux dont les Spectacles ont corrompu les mœurs ; tous ceux dont ils ont causé la ruine éternelle ! […] La mort est le moment qui dessille les yeux, et l’on peut s’en rapporter à ce que la conscience reproche alors. […] Je conçois bien, mes Frères, que Dieu vous ayant donné des désirs et des yeux, vous devez naturellement souhaiter des Spectacles.

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