Jamais il n’y a eu dans le monde plus de célibataires & de mauvais ménages que depuis le règne du théatre. […] Le seul projet de celle-ci fait changer de résolution, par une mauvaise honte, le mari infidele qui avoit envie de se convertir, & rend inutiles tous les efforts d’un ami sage qui avoit agi avec succès. […] Elle rend la vertu ridicule, & par une mauvaise honte, un malheureux respect humain, elle empêche de la pratiquer ceux mêmes qui l’aiment, malgré les sages exhortations des gens de bien, qui, comme dans cette piece, sont moins écoutés que les railleries des libertins. […] La passion aveugle choisit communément mal, & mérite d’être punie par son mauvais choix. […] Quels fruits vont naître d’une si mauvaise semence !
Il ne trouve pas moins mauvais qu’on flatte cette autre partie plus emportée de notre âme, où règnent l’indignation et la colère : car on la fait trop émue pour de légers sujets. La tragédie a donc tort, et donne au genre humain de mauvais exemples lorsqu’elle introduit les hommes et même les héros ou affligés ou en colère, pour des biens ou des maux aussi vains que sont ceux de cette vie ; n’y ayant rien, poursuit-il, qui doive véritablement toucher les âmes dont la nature est immortelle, que ce qui les regarde dans tous leurs états, c’est-à-dire, dans tous les siècles qu’elles ont à parcourir.
Ce qui fit tomber le Théâtre, avant que Mlle Favart le relevât, c’était le mauvais Jeu des Acteurs : & malgré la fureur du Public pour les Ariettes, le Théâtre Italien cessera bientôt d’avoir la foule, si (comme on a déja lieu de le présumer) on ne voit plus les Pièces favorites rendues que par de médiocres Chanteurs. Il ne m’a falu que très peu de temps pour m’apercevoir qu’à tous les Théâtres de la Capitale, l’épicurisme des bons Comédiens, & le Jeu des mauvais, effarouchent aujourd’hui les Spectateurs délicats : on s’abstient d’aller à telle Pièce, qui fait un plaisir infini, parce qu’on souffrirait trop à la voir estropiée par une Actrice grimacière, un Comédien hideux, ou froid, ou servile imitateur du Jeu d’un autre. […] Il se trouve dans les Hameaux, comme dans les Villes, des hommes méchans ; c’est le petit nombre : des hommes tièdes, qui ne semblent ni bons ni mauvais, & que les circonstances poussent tantôt vers le bien, & tantôt vers le mal ; c’est le grand nombre : des hommes droits, amis de l’ordre, & de toute chose honnête ; ils sont en plus grand nombre que les tout-à-fait méchans ; & ceux-ci, dans les campagnes, sont admirables ; ce sont les hommes par excellence. […] On peut dire que ce genre de mauvaise Comédie dont nous sommes surchargés, est très inutile : outre que le commun des Spectateurs perd les deux tiers de ce que l’on dit, ces Comédies-Italiennes ne sont que de basses-farces, assez ressemblantes à nos Parades ; l’on y trouve rarement un mot d’instruction, & presque jamais rien de délicat, qui puisse dédommager l’honnête Spectateur de la mauvaise compagnie qu’on lui donne.
« La charité n’est point ambitieuse, ne cherche point ses propres intérêts ; elle ne se pique point ; elle ne s’aigrit de rien ; elle n’a point de mauvais soupçons ; elle ne se réjouit point de l’injustice ; mais elle se réjouit de la vérité. […] Une maxime aussi blâmable, celle d’abrutir l’homme par l’ignorance, et tâcher de l’avilir, jusqu’à le rendre insensible au mépris et aux mauvais traitements, n’est-elle pas criminelle en politique comme en morale ? […] Je le répète donc, il est injuste de condamner le peuple à l’ignorance : cette injustice est une mauvaise action, qui, dans aucune hypothèse, ne peut faire le bonheur de la société, ni devenir un bienfait politique, et encore moins servir de moyen pour mieux gouverner. […] Je voudrais faire connaître l’origine de l’intolérance et du fanatisme qui dérive du système adopté par les prêtres sur l’origine du bon et du mauvais génie. […] La douceur paternelle, et la bonté, qui devraient toujours caractériser, non seulement les princes, mais même leurs agents, enchaînent les cœurs et commandent l’affection des sujets, tandis que les injustices, les mauvais traitements et les vengeances éternisent les haines.
Nous défendons aussi de mêler des paroles profanes et qui sentent le libertinage du siècle, dans la Symphonie si on en emploie, et dans les Programmes qui restant dans les mains du public peuvent faire un mauvais effet s’ils ne sont exacts. […] Ce sont ces lâches condescendances sous le vain prétexte de s’accommoder à de mauvais usages et de conserver une fausse paix, qui sont la source féconde et malheureuse du relâchement que nous avons vu de la Morale Chrétienne dans notre temps, et de la réforme de tant de Compagnies qui ne se sont perdues que par là. Ce n’est point ce qui se fait ici ou là, comme parlait autrefois un grand Saint, ni ce qu’une mauvaise coutume, ou pour parler le langage d’un Saint Pape, une malheureuse corruption a insensiblement établi, qui doit être la règle de notre conduite.
Dans cette idée générale, il n'est ni bon ni mauvais ; il est susceptible de toutes sortes de sujets et de toutes sortes de circonstances; et tant qu'il demeure dans cette indétermination, qui n'a d'être que dans l'esprit des hommes et dans les livres de Poétique, il n'est digne ni d'approbation, ni de blâme. […] Il y aura en cet endroit beaucoup de personnes qui assureront qu'ils n'ont jamais reçu aucune impression mauvaise par la Comédie; mais je soutiens, ou qu'ils sont en petit nombre, ou qu'ils ne sont pas de bonne foi, ou que la seule raison par laquelle la comédie n'a pas été cause de la corruption de leurs mœurs, c'est parce qu'elle les a trouvés corrompus, et qu'ils ne lui ont rien laissé à faire sur cette matière. […] Mais en vérité y a-t-il personne de tous ceux qui sont les plus zélés défenseurs d'une si mauvaise cause qui voulût que sa femme, ou sa fille, fût honnête comme Chimène, et comme toutes les plus vertueuses Princesses du théâtre. […] Mais que bien loin qu'il fasse de mauvais effets, il en a de tous contraires, puisque le vice y est repris, et que la vertu y est louée, et souvent même récompensée. […] Mais les Comédiens font céder toutes ces considérations à leur avarice, et les mauvais Chrétiens à leur plaisir.
LEs Motifs, qui portent les Personnes du Monde a aller au Bal, a la Comedie, & a se trouver a des semblables divertissemens sont ordinairement mauvais ; c’est pour satisfaire leur curiosité, leur vanité ; c’est pour y voir, & pour être vû, & nul bon Motif ne peut justifier la coûtume, que l’on prend d’y assister. […] Ce qu’on en rapporte est la perte de l’innocence, une mauvaise impression, que les passions, qu’on a naîvement representées, & les personnes, qu’on a vûës peuvent faire. […] Vous voyez donc clairement par vous-mêmes, pourvû que vous vouliez ouvrir les yeux, que ce n’est pas une chose indifferente d’aller au bal, puisqu’on ne se confesse pas d’une chose indifferente, & qui l’on ne craint pas de paroître au jugement de Dieu après une action, qui n’est pas mauvaise, & que nous jugeons absolument n’être point contre la loi de Dieu. […] Je scai avec saint Gregoire, qu’il y a des divertissemens permis, & que l’on peut prendre comme on prend une medicine pour purger le corps de ses mauvaises humeurs, & le rendre plus propre au travail.
Qui viderit mulierem ad concupiscendum eam, jam mœchatus est eam in corde suo. » Ajoutez d’autre part à cela ce que notre Seigneur dit encore lui-même, que celui-là est adultère dans son cœur, c’est-à-dire, est coupable devant Dieu du crime de l’adultère, qui jetant les yeux sur une femme conçoit des mauvais désirs contre sa pureté. […] et recommandable par sa doctrine et par sa piété, n’ose point exempter de la même faute, c’est-à-dire du péché mortel, ceux qui n’étant venus que comme forcés, ou par rencontre dans ces assemblées, s’y arrêtent avec danger d’y concevoir quelque mauvais désir, et d’être touchés de quelque affection dangereuse. […] Il est donc évident que ceux-là pèchent grièvement qui vont aujourd’hui au bal, et qui fréquentent la danse, à cause des dangers qui en sont inséparables, et auxquels ils s’exposent : car quand il pourrait se rencontrer quelque bal où l’on n’appellerait que les seuls parents, ou les seuls amis ; néanmoins il est vrai de dire absolument qu’il n’y peut avoir aujourd’hui aucune assemblée pour la danse où il n’y ait du danger, à cause de la corruption du siècle et des mauvaises coutumes qui s’y sont introduites, ne se tenant plus aucun bal où la jeunesse ne se rende, et où elle n’entre de gré ou de force ; et cet usage a si fort prévalu, que si on fait quelque assemblée pour la danse où on veuille faire ce choix des personnes honnêtes, parentes ou amies, et fermer la porte aux étrangères, on heurte insolemment, et on fait mille outrages et mille affronts au maître de la maison. […] Mais que dirons-nous de ceux qui ne vont au bal que pour contenter les passions déréglées de leur cœur, afin d’y voir les personnes pour lesquelles ils ont de l’attachement, et afin d’avoir la liberté de s’entretenir avec elles, de les cajoler, et de leur communiquer leurs mauvais sentiments ?
Quoique les Tragédies et les Tragi-comédies soient tenues pour fort honnêtes en comparaison des Comédies ; cela n'empêchait pas que l’impudicité et plusieurs autres habitudes très dangereuses n’y fussent décrites fort naïvement, puisque ces Pièces avaient été composées par des Poètes Païens qui faisaient gloire des mauvaises actions que les Chrétiens ont depuis condamnées. […] Il semble que c’est une chose assez inutile de disputer davantage là-dessus, et qu’on peut tout d’un coup retrancher la Question en remontrant, Qu’en ce qui est des Histrions et des Comédiens Romains, Tragiques ou Comiques, les uns ne valaient pas mieux que les autres, et que leurs Pièces les plus modestes avaient des emportements que nous ne saurions approuver ; C’est pourquoi la conséquence que l’on tire de tout ceci en faveur de nos Comédiens, n’est pas fort favorable, de dire, Que puisqu’ils représentent des Tragédies et des Tragi-comédies à l’imitation des Anciens, on les doit tenir dans l’estime comme eux, et assister à leurs Représentations comme à des Spectacles importants ; car si l’on montre que les anciens Comédiens ne faisaient aucune difficulté dans leur Religion de jouer des Pièces de mauvais exemple, on s’imaginera donc que ceux qui sont aujourd’hui de la même Profession prennent une licence pareille ; Que cela se voit dans leurs Pièces les plus régulières, et principalement dans d’autres composées exprès pour être plus libres. […] Leurs Poètes ont pensé avoir atteint au suprême degré de leur Art, d’avoir exprimé naïvement toutes les passions, et c’est où l’on trouve le plus de danger ; C’est comme les Peintres qui ayant employé tous leurs efforts à représenter des Nudités dans leurs Tableaux, sont condamnés par les personnes austères qui croient que de tels objets causent de mauvais désirs. […] C’est qu’on prenne garde à ne point marquer scandaleusement les mauvaises actions, à toucher les passions doucement, et à y donner une salutaire correction par des Remontrances faites à propos.
Sa médiocrité, sa mauvaise morale lui feront toujours perdre sa cause. […] Ce livre, dont le stile n’est pas mauvais, n’a pas fait fortune, il est oublié & mérite de l’être. […] Est-ce mauvaise logique, ou doctrine philosophique du temps ? […] Mauvaise piece, formée sur un tel dessein de rôles si scandaleux. […] Les passions peuvent faire de mauvais Religieux, presque jamais la violence.
Car il suppose que les Comédies d’aujourd’hui sont dans un état de pure nature, et dépouillées de toute mauvaise circonstance ; ce qui n’est point du tout vrai, et en quoi il se trompe beaucoup. […] Il n’y a rien eu de mauvais dans la danse de David, donc il n’y a rien de mauvais dans les Opéras et dans les Comédies qui se jouent aujourd’hui en France. […] Comme s’il n’y avait pas un milieu entre la danse de David et ces sortes de Spectacles qui pût être défendu, et que parmi les Pièces de Théâtre il n’y en eût de mauvaises que celles où on ferait paraître des femmes toutes nues, et où on offrirait des sacrifices aux faux Dieux. […] Suivons-le cependant dans sa bonne humeur, car il prend ici un ton goguenard ; et comme s’il avait poussé à bout ses adversaires, il les fait retrancher à dire qu’il faut bien que la Comédie soit mauvaise, puisqu’elle est défendue : là-dessus il se réjouit, et se donne la Comédie à lui-même, comme si c’était un mauvais argument en Morale de prouver qu’une chose est mauvaise, parce que Dieu et les Lois la défendent. […] Il ne s’ensuit donc pas que la Comédie soit mauvaise, quoique les Comédiens soient infâmes.»
On dira peut-être que les passions qu’on y représente sont légitimes, parce qu’elles ont le mariage pour but : mais, quoique le mariage fasse un bon usage de la concupiscence, la concupiscence est cependant toujours mauvaise par elle-même, elle conserve toujours quelque chose du dérèglement qui lui est propre. […] « Quiconque, dit Jésus-Christ4, regarde une femme avec un mauvais désir pour elle, a déjà commis l’adultère dans son cœur. » « Si une femme négligemment habillée, dit S. […] Pourront-ils le dire, lorsque tout dans ces assemblées contribue à faire naître de mauvais désirs en nous ; des tons de voix languissants et voluptueux, des chants lascifs, l’art de peindre le visage, d’animer les yeux et la figure par des couleurs étrangères, une parure fastueuse et immodeste, les gestes, les postures, tout l’extérieur de la personne et mille autres moyens propres à attirer et à séduire les assistants ? […] si dans le saint lieu où l’on n’entend que des psaumes, des prières, les oracles divins, où tout inspire la crainte de Dieu et la piété, les désirs illicites se glissent quelquefois comme un voleur subtil ; comment des hommes, au théâtre, où ils ne voient et n’entendent que des choses qui portent au crime, dans le centre de la turpitude et de la perversité, investis par le vice, et attaqués de tous côtés par les yeux et les oreilles, comment pourraient-ils triompher des mauvais désirs ? […] « Mais, direz-vous, je regarde sans former de mauvais désirs.