Il aurait mieux valu aussi leur rappeler que de bons parents, avant de se révolter et d’en venir à des extrémités fâcheuses contre leurs enfants ingrats et dénaturés, souffrent long-temps, meurent quelquefois de chagrin ; que de bons enfants, qui ont moins droit d’exiger, ne sont pas obligés à moins de combats et d’égards pour leurs parents indifférents et injustes, dont, au reste, l’insensibilité ne résiste pas toujours aux efforts constants de la tendresse, ou du respect filial ; et que probablement leur père se souviendra enfin qu’ils sont ses enfants, s’ils n’oublient pas qu’il est leur père ; et puis ajouter que si, en attendant que l’amour paternel se réveille dans son cœur, ils se trouvent dans le besoin, alors ils doivent penser qu’appartenant à un père disgracié de la nature, il est raisonnable qu’ils s’assimilent aux enfants d’un père disgracié de la fortune, et suivent les exemples qu’ils en reçoivent de se servir soi-même, de se contenter de peu, de ne pas désirer de superflu, de travailler s’il le faut, se rendre utile aux autres, tirer parti de ses talents et de son industrie ; ou de se jeter dans les bras de sa famille, de ses amis, invoquer leur appui. […] Et puis, qui ne voit que la différence des fortunes, après que le frein a été rompu et le pas franchi, a dû produire les mêmes effets que la différence des rangs, et que la fille d’un riche négociant, par exemple, qui épouse un petit commis sans fortune, peut se croire aussi bien fondée que la pauvre de Sotenville à mépriser son mari et à fouler aux pieds les engagements qu’elle a pris avec lui, lorsqu’il vient à lui plaire moins qu’un amant ? […] Je trouve que ce fut avec bien de la raison que d’autres ont encore dit avant moi que les comédies dirigées contre les vieux maris sont également pernicieuses aux mœurs, parce que les femmes qui ont vu applaudir toutes les ruses, les tours perfides et scandaleux, les infidélités qu’une épouse fait à son mari, à cause qu’il est trop vieux, ne doivent plus avoir de peine à se persuader qu’on peut en faire autant à un mari trop jeune, léger, volage, et toutes les fois, bien qu’il soit d’un âge convenable, qu’on ne jouit pas d’un plus grand bonheur, ou qu’on est plus malheureuse avec lui que s’il était vieux, ce qui arrive assez souvent ; comme quand il est ou qu’on le trouve froid, indifférent, d’un mauvais caractère, grondeur, bourru, méchant, contrariant ; quand il n’est ni beau, ni bien fait, ou qu’une maladie l’a changé, affaibli et vieilli ; quand il refuse de fournir toutes les choses nécessaires à la coquetterie ; en un mot, lorsque, par tant d’autres raisons, par sa propre inconstance à elle-même, l’épouse vient à se croire mal assortie, cesse d’aimer son mari jeune, et se trouve aussi malheureuse et dans la même position que celle qui n’a jamais aimé son mari vieux. […] C’est pourquoi on ne les voit jamais porter l’inquisition dans le cœur de celui dont ils ont à récompenser une belle action : ils le considèrent tant qu’il est possible de l’en croire digne, comme ils le méprisent ou le punissent avec sévérité, selon les circonstances, lorsque le masque de son hypocrisie vient à lui être arraché d’une main sûre.
Martin de Tours dont il étoit Chanoine ; le fond de l’intrigue étoit un mandement du Chapitre pour la réception de la constitution que ses ennemis firent brûler dans le cloître ; ses confreres paroissoient tour à tour sur la Scène, peints, nommés & tournés en ridicule ; il y fait venir les Musiciens, les enfans de-Chœur, le Carrillonneur & le Bedeau. […] Quelle leçon pour ce Prélat Distributeur des Prélatures, qu’un jeune Poëte ne voye dans ces honneurs que l’étendue des devoirs qu’ils imposent, qui vinrent le chercher, que la résistance par probité aux offres les plus avantageuses, & dont cet Académicien étoit bien éloigné de se croire digne , tandis que lui, Prince de l’Eglise, y voit la récompense de quelques comédies, & deux Princes de l’Eglise en font l’éloge ! […] Nectar qu’on avale à longs traits, Beaume que répand la nature Sur les maux qu’elle nous a fait, Maîtresse aimable d’Epicure, Volupté viens à mon secour. […] Viens donc, non celle qu’autre fois, Parmi la débauche égarée, Tu m’a suivis en mille endroits, De mirthe & de pampre parée, Mais sage & sans emportemens, Fais aux fureurs de la jeunesse Succéder la délicatesse, D’un voluptueux sentiment.
D’où vient donc ses regards expressifs, ses intentions que je crois deviner, ne m’ont-ils pas mise en colère ? […] Par ce moyen, l’on aurait une idée confuse de ce qui le passe dans le moment ; & le Récit qui vient ensuite, satisferait pleinement la curiosité, déja vivement excitée. […] Venons aux Drames qu’elles exécutent. […] Les Directeurs ne pourront jamais, sous aucun prétexte, faire venir chez eux quelqu’une des Actrices-Citoyennes, leur parler en particulier au Théâtre, &c. […] Le plaisir qu’elles donnent ne vient que des grâces naturelles des Exécutans : une jolie femme qui danse plaît aux hommes, moins par son art, que par les charmes qu’elle découvre.
Elle vient d’une Confrérie de la Passion qui fut fondée avant l’année 1402. en l’Eglise de la Trinité à Paris, rue Saint Denis. […] Et parce que c’étaient les Confrères qui en ce temps-là jouaient eux-mêmes, il leur fut encore permis par des Lettres Patentes de 1402. d’aller et de venir par la Ville, habillés suivant le sujet et la qualité des Mystères qu’ils devaient représenter. […] Ces Messieurs crurent qu’on ne pouvait les résoudre sans en venir au fond, et sans examiner la question principale, qui est celle de la Comédie même ; ce qu’ils firent dans le cas suivant, en appuyant leur résolution par les raisons les plus solides. […] que fera en lui cette nature qui d’elle-même n’est capable que de tomber, si elle vient à être poussée ? […] » La Comédie peut produire d’une manière insensible, et même sans qu’on s’en aperçoive, une disposition dans l’âme, qui étant venue à un certain point, peut être la cause de la chute d’une personne.
Mais il est singulier que pour l’engager à venir à Berlin, ce grand Roi lui promette de lui fournir des pucelles à son usage, & qu’elles seront plus traitables qu’une certaine Grisette qui dans son dernier voyage se refusa à ses embrassemens . […] Sors des cendres, Rome Payenne, Viens te reproduire à nos yeux, Viens confondre Rome Chrétienne, Et ses Prêtres ambitieux, Du sein de la vertu féconde, Oppose ces vainqueurs du monde A tous ces Prêtres imposteurs, A tous ces frauduleux Pontifes, Qui sur des livres opocrifes Fondent leur culte & leurs erreurs.
On trouve dans la vie de Charles Quint que Maleasse, Roi de Tunis vint à Naples lui demander du secours contre Barberousse qui lui faisoit la guerre. […] Suetone rapporte que Vespasien avoit donné le gouvernement d’une province à un jeune homme de qualité : le jeune homme vint l’en remercier, mais il y vint en petit maître, poudré, frisé, parfumé ; l’Empereur en fut indigné : j’aimerois mieux , lui dit-il, que vous sentissiez l’ail, je ne donne point mes provinces à gouverner à des femmes .
Elles furent attaquées du côté des mœurs ; mais le Poëte, qui ne s’en embarrassoit guère, se contente de dire dans la préface, que les rieurs ont été de son côté, qu’il y est venu beaucoup de monde, qu’il est assez vengé ; qu’il souhaite le même succès à toutes ses pieces ; & dans la critique, qu’on se rend ridicule par une délicatesse d’honneur qui s’offense de l’ombre des choses ; que celles qui font tant de façons ne sont pas estimées plus femmes de bien, qu’on est ravi de les censurer, que les détournemens de tête, les cachemens de visage (mots singuliers), font dire cent sottises de leur conduite. […] Voici l’ordre de l’Ange (sans fouiller dans le cœur des Actrices, j’ose bien assurer qu’un Ange ne viendra pas leur faire une pareille exhortation). […] Mais il est écrit pour les amateurs du théatre, comme pour les autres : Tenez-vous toûjours prêts, je viendrai, comme un voleur, le moins que vous y penserez, vous ne savez ni le jour ni l’heure.
Que présumer de là, sinon que si ces libertins et ces fils dénaturés venaient souvent aux spectacles, s’ils prenaient plaisir pendant deux heures par jour à entendre le langage de la Vertu, si l’on pouvait les habituer à venir souvent se convaincre de ses avantages dans nos Tragédies, l’amour naturel que vous leur supposez pour la Vertu deviendrait plus efficace. […] On vomit des imprécations contre l’exécuteur et l’on a plus d’un exemple que, sans autre intérêt, des étourdis, quoique bien instruits des crimes du patient, ont eu la témérité de détourner de dessus sa tête le glaive de la Justice : d’où vient ce sentiment ?
le bel objet pour les fidèles qui viendront à la sainte messe ou au sermon, le bel objet pour le Prédicateur qui, selon son devoir, prêchera contre les spectacles, que des Muses à demi nues, des Génies portant le masque et le cothurne, autour d’un Auteur dramatique, qui lui donne le démenti par les honneurs religieux qu’il reçoit ! Si les Comédiens ne veulent point avoir de la piété, qu’ils laissent du moins la piété en repos dans son temple, et ne viennent point l’insulter par un excès de profanation qui fait mépriser et le lieu saint qu’il déshonore, et les lois de l’Evangile qu’il brave, et les foudres de l’Eglise dont il se joue. […] Ambroise, pour détourner le peuple de l’élire Archevêque de Milan, fit venir chez lui des femmes de mauvaise vie.
Il ne monte pas sur un théâtre étaler son crime, il n’invite pas tout le monde à venir en être le témoin ; ses voisins, ses amis en sont instruits, ordinairement le reste du public l’ignore. […] Telles sont les courtisanes d’Italie ; en se faisant inscrire sur le registre du Magistrat, se mettant dans le corps des courtisanes, s’établissant dans les maisons publiques, se livrant au premier venu, elles se dénoncent de fait et de droit notoirement pécheresses publiques, et dès lors doivent être refusées à tous les sacrements, quoiqu’elles ne soient pas excommuniées. […] On ne peut donc rien conclure en leur faveur de la liberté qu’on leur laisse d’entrer dans l’Eglise, d’entendre la messe, de commercer avec les fidèles, etc., non plus que contre le refus des sacrements, qui vient d’un autre principe, savoir, la notoriété du péché, qui n’étend pas ses effets plus loin, parce qu’elle ne doit empêcher que la profanation des sacrements, « nolite dare sanctum canibus » ; au lieu que l’excommunication retranchant de l’Eglise, traitant comme un païen et un publicain, livrant à Satan, etc., prive de tous les biens communs à tous les fidèles.
Car ils ajoutent aussitôt : La nature & l’hymen, voilà les loix premieres, Les devoirs, les liens des Nations entieres, Ces loix viennent des Dieux : le reste est des humains. […] Beau Sexe, à qui nous avons assigné cette pudeur pour appanage, que venez-vous faire dans ces lieux où des fronts d’airain foulent aux pieds cette vertu ? Sexe charmant, à qui la nature a donné sur nous un si grand empire, venez-vous gémir de le voir s’étendre encore à la faveur de cette manœuvre diabolique ? […] Venez-vous prendre de l’éloignement pour les bals & la danse à l’école de nos Terpsychores, de nos Sultanes & de nos Nymphes ? […] qui viennent à vous couverts de la peau de brebis, & qui au dedans sont des loups ravissans.