Pylade fut un des plus excellent ouvriers de ces représentations, et après qu'il eût quitté la scène par les infirmités de son âge, il se trouva présent au Théâtre, où son Disciple Hylas dansait un Episode d'Euripide, contenant quelque action du Roi Agamemnon, et comme Hylas voulut exprimer le nom de Grand, que le Poète lui donnait, il se guinda sur le bout des pieds, et leva les bras, dont Pylade se mit en colère, et l'accusa d'ignorance en son art. […] Ils admettaient encore à ces Jeux ceux qu'ils nommaient Planipèdes ou Pieds plats, parce qu'ils ne portaient ni escarpins ni brodequins, et jouaient nu-pieds et a plate terre de petites Fables ridicules de la populace, et je ne crois pas qu'il nous en reste aucun exemple.
A ces mots, tous les comédiens qui remplissent le théatre & les coulisses, s’empressent au tour de Moliere, c’est à-dire, de son buste, l’embrassent, c’est-à-dire, le pied d’estal, se jettent à genoux, le baisent, l’encensent, le parfument, le couronnent de lauriers ; les actrices ne font pas moins les empressées & les caressantes, quoique bien fachées de n’embrasser qu’un buste. Les suites de Melpomene & de Thalie se joignent à elles, dansent, sautent, forment des marches, des danses, des divertissemens imités des comédies de Moliere, du Bourgeois Gentilhomme, du Malade Imaginaire, de la Princesse d’Elide ; tout ce bruit est terminé par des couplets qu’on recite & qu’on chante à l’honneur du demi-Dieu, placé dans le Ciel, c’est à-dire, du buste sur son pied d’estal. […] Un buste, un pied d’estal pour un si grand Dieu, ont quelque chose de bien mesquin ; il faudroit une statue entiere, & même un colosse comme celui de Rhodes : aussi les comédiens qui se sont fait tant d’honneur, il y a quelques années, en rendant hommage à Corneille, non par une fête séculaire, mais en donnant à sa niéce le profit d’une représentation, & après avoir payé un tribut si noble & si légitime (à très peu de frais) au pere de la tragédie, viennent de faire éclater leur reconnoissance, (à aussi bon marché) envers leur pere, le créateur & le modèle de la bonne comédie, par un grand effort, ils ont réservé le profit de la premiere & de la derniere représentation des deux farces faites pour lui, l’Assemblée, & la Centenaire, les destinent à lui faire élever une statue ; mais il s’en faut de beaucoup que cette foible somme, (je la croyois grande, puisqu’on fait tant valoir la générosité des comédiens,) que cette foible somme soit suffisante, pour les frais du monument ; il y a lieu de croire qu’ils seront sécondés par une nation sensible & généreuse, qui ne permettra pas qu’un projet, qui l’honore, soit comme tant d’autres, vainement annoncé. […] C’est aux graces , dit-il, qu’elle est due , il l’ôte de dessus sa tête, & va la porter, non aux pieds respectueusement, mais familiérement sur la tête de la premiere actrice, qui se trouva tout-à coup auprès de lui pour la recevoir, & fit une profonde révérence pour l’en remercier ; c’étoit dans son rôle. […] Il arrive souvent, dit le Pere Hosta missionnaire Italien du Tonquin, qu’on joue les comédies pendant le repas, ce divertissement est mêlé de la plus affreuse musique, les instrumens sont des bassins d’airain, dont le son est aigu, un tambour fait de peau de bufle, qu’on bat, avec les pieds, ou avec des bâtons, comme les Trivelins d’Italie ; les voix des musiciens font à peu près la même harmonie, les acteurs sont des jeunes garçons depuis douze jusqu’à quinze ans (point de femme,) des conducteurs les menent de province en province ; leurs piéces sont ordinairement tragiques, à en juger par les pleurs des acteurs, & les meurtres feints qui s’y commettent.
On voit dans une place de Londres la statue équestre de Georges I, Roi d’Angleterre, qui foule un turc aux pieds de son cheval. […] Nous sommes comme un peintre de Pekin qui, à son retour d’Italie, voulant copier pour les Chinois la Vénus de Médicis, lui rétréciroit le front & écraseroit le nez, mutileroit les pieds de son portrait, pour se conformer aux idées chinoises. […] Dans le fond on voit sa statue en pied de grandeur naturelle de marbre de Carrare. […] Il voudroit qu’à l’imitation d’une pyramide d’Egypte, qui a une figure humaine de trente pieds, il y eût aussi une statue colossale d’une fameuse actrice, qui réunit toutes les modes, les brasselets, les manches aux bras, les colliers, les fichus au col, les boucles de cheveux, les grecques à la tête, & plusieurs colonnes autour qui en fussent chargées, comme des hiéroglyphes (ce seroit un bel arc de triomphe pour la Clairon. […] C’est un homme de six pieds huit pouces, bien dispos, d’une agilité surprenante.
Au milieu de ces figures extravagantes, où personne ne comprend rien, & où l’on faisoit croire de grands mysteres à Catherine, on voit d’un côté un Roi sur son trône, ayant une aigle à ses pieds. […] Vis-à-vis du Roi est une femme avec une tête d’Anubis, Divinité des Egiptiens, & des pieds d’une oie, à laquelle ce Roi semble adresser la parole, & montrer quelque chose. […] Ces deux femmes toutes nues sont dans l’état le plus indécent, & on lit sous leurs pieds le nom d’Asmodée, Démon de l’impureté. […] Toutefois tel qu’il est, je l’appends, avec toute humilité & dévotion à ses pieds. Appendre avec humilité & dévotion une offrande aux pieds de Cathérine de Medicis, comme d’une grande Sainte, ce n’est pas la scene la moins comique de la farce.
De bonne foi, est-il plus agréable d’être foulé aux pieds d’une femme perdue, que d’être respecté de tout le monde ? […] n’est-ce pas un plaisir supérieur à la jouissance que la liberté du cœur, n’être pas exposé aux reproches, aux insultes, au mépris, à la perfidie, à l’inconstance d’une femme perdue, n’être pas enchaîné dans ses fers, & accablé sous sa tyrannie, traité en esclave & foulé aux pieds comme le dernier des hommes ?
Un beau jour qu’elle représentoit le Martyre de Sainte Cécile (cette même piece à laquelle il avoit refuse d’aller) devant le Roi, la Reine, & toute la Cour d’Espagne, après avoir tout charmé, & fait couler des torrens de larmes, des que la piece fut finie, elle descend du théatre, & va se jeter aux pieds de la Reine lui expose avec mille sanglots son état & ses dispositions, sa résolution de se faire Religieuse, l’obstacle qu’y met sa famille, l’infamie de sa profession, le danger que lui fait courir la multitude des amans qui l’assiege ; demande à cette Princesse sa protection & ses graces ; que la profession religieuse étoit un mariage avec Dieu, l’Epoux des Vierges ; que ses libéralités ne pouvoient être mieux employées (c’étoit le temps où la Reine avoit accoutumé de distribuer des sommes considérables pour marier de pauvres filles). […] Le Prince descend du carrosse, & marche à pied ; les Princesses, qui étoient incommodées, furent tirées du carrosse, assises sur des carreaux de velours à crépines d’or, & portées sur les bras de plusieurs Pénitens vigoureux, ayant l’Aumônier de la Confrairie au milieu d’eux, qui terminoit la marche de la procession. […] La signature donnée, on chanta le Deum, on donna la bénédiction du Saint Sacrement, & on se retira dans le même ordre, le Prince à pied, les Dames sur leurs carreaux, & de là s’en allèrent à la comédie.
Vous le foulez aux pieds ? […] Cependant beaucoup de femmes ont foulé leur privilège à leurs pieds en notre faveur, et paraissent avoir voulu nous élever par leur mérite en nous asservissant par leur pouvoir. […] quand je t’envoyais dans cette maison, je ne pensais pas que ces pieds te menaient à la mort.
Ils ont fait jusqu’à présent comme ces jeunes Personnes dont le cœur est fragile ; après avoir fait un faux pas, elles jurent que le pied ne leur glissera plus ; mais cédant doucement à la tentation, elles oublient bientôt leurs sermens.
L’Empereur Adrian essuya cette fatigue, & marcha à la Teste de ses Troupes, armé de toutes pieces, à pied, & fit cette journée entiere en cét équipage.
J’avoue donc avec sincérité que je sens dans toute son étendue le grand bien que produirait la suppression entière du Théâtre ; et je conviens sans peine de tout ce que tant de personnes graves et d’un génie supérieur ont écrit sur cette matière : mais, comme il ne m’appartient pas de prendre le même ton, et que d’ailleurs les Spectacles sont permis et soutenus par l’autorité publique, qui sans doute les permet et les soutient par des raisons que je dois respecter, il serait indécent et inutile de les combattre dans l’idée de les détruire : j’ai donc tourné mes vues d’un autre côté ; j’ai cru que du moins il était de mon devoir de produire mes réflexions, et le plan de réformation que j’ai conçu pour mettre le Théâtre sur un autre pied, et pour le rendre, s’il est possible, tel que les bonnes mœurs et les égards de la société me paraissent l’exiger : c’est ce que je ne pouvais entreprendre dans le temps que j’étais Comédien, pour les raisons que l’on trouvera dans le corps de mon Ouvrage.
L’ardente vanité se disputoit ses vœux, C’étoit Agamemnon que l’on rendoit heureux : Il conservoit son rang aux pieds de ses maîtresses, Et se donnoit les airs de tromper les Duchesses. […] j’ai tout perdu, le monde a tout détruit… Le monde, affreux cahos d’intrigue & d’injustice, Où l’intérêt confond les vertus & les vices… Où le luxe au front d’or des cieux atteint la cime Et de ses pieds d’airain presse un immense abyme. […] Il fait descendre les Dieux de l’Olympe, les Rois de leur Thrône, les Héros de leur Char de triomphe, tous viennent rougir à ses pieds de leurs vices & de leurs foiblesses. […] Accoutumés à mépriser leur maîtresse, ils ne savent comment s’y prendre pour estimer leurs femmes, tout se reduit à payer cher des Courtisannes qui sont grace à nos merveilleux de l’honneteté, comme formant avec elles un contraste incommode, qui les debarasses lestement de leur santé, de leur argent, de leurs principes, ils sont leurs dupes, ils le savent, qu’importe, il faut être au courent, pensionner le vice, vegeter aux pieds de l’idole & la couvrir de diamant, pour être cité comme un homme essentiel dans les coulisses de l’Opera, &c.