Malheur à ceux qui l’autorisent, qui en inspirent lenvie, qui en font lire les livres, qui y conduisent les jeunes gens, leur fournissent les moyens. […] Elles n’aboutissent qu’à dissiper les jeunes-gens, leur faire perdre leur temps & le goût de l’étude, & leur inspirer le goût & la curiosité du théatre. […] Il faut du courage pour inspirer des sentimens si peu conformes au goût de ceux avec qui un jeune Seigneur doit vivre. […] A Salenci, dans le Soissonnois, on fait tous les ans, depuis plusieurs siecles, une fête singuliere à l’honneur de la vertu, pour l’inspirer à la jeunesse. […] Il y a pourtant quelques années que le théatre s’en est emparé, non pour inspirer la vertu, mais pour en faire un amusement.
Ainsi nous estimons que la lecture en sera utile aux Fidèles, qu’elle leur inspirera de l’horreur pour ces Assemblées dangereuses, si contraires à la piété, et dont l’effet ordinaire est d’amollir, et souvent même de corrompre tout a fait le cœur.
C’est que la gloire des beaux siécles a inspiré à ceux qui les suivent, le désir de se faire aussi une espèce de fortune, en ramassant & en publiant les moyens que les grands hommes ont mis en usage pour plaire. […] Puisque ne mettre que des sentimens dans une Tragédie, c’est n’exciter, comme on l’a éprouvé, que de l’admiration, & que c’est par leur seul mélange avec les passions que les grands Poétes sont parvenus à nous inspirer la pitié & la terreur.
Le Christianisme qui avoit inspiré une juste horreur des combats des gladiateurs, & des bêtes féroces, a en vain proscrit les Spectacles modernes, comme une école d’indécence, & un aliment trop dangereux des passions. […] En vain la critique, presque toujours injuste, s’est élevée contre cette terreur sombre & vraiment tragique, que l’un inspire ; contre la pompe & la magnificence Théâtrales, que l’autre veut faire revivre.
Les anciennes diableries donnoient horreur du vice, en le montrant puni par les démons ; les nouvelles au contraire favorisent, inspirent, embellissent le vice, par les graces des actrices, les agrémens de la poësie, les charmes de la musique, la lubricité de la danse, l’obcénité des décoration, le scandale de l’intrigue & du succès. […] On choisissoit des forêts, des lieux déserts ; on prenoit le temps de la nuit, pour inspirer plus d’horreur, par la solitude, le silence & les ténebres, pour être plus libre, & mieux cacher les infamies qui s’y introduisirent ; on y venoit en foule, on y dansoit, chantoit, s’enivroit ; il s’y trouvoit des libertins, des mendians, des voleurs, quelques personnes de bonne-foi dont on avoit surpris la crédulité : voilà le Sabbat.
Rien au contraire n'est plus propre à l'inspirer que ses comédies, parce qu'on y tourne éternellement en ridicule les soins que les pères, et les mères prennent de s'opposer aux intrigues amoureuses de leurs enfants. […] Ces Pièces sont aussi très nuisibles, parce qu'elles inspirent d'autres vices dont nous ne sommes pas moins susceptibles.
Ils m’apprendrons des vérités capables de m’inspirer pour ces sortes de divertissemens une sorte d’horreur, ils m’apprendront que les Payens même ont condamné les spectacles, à la honte des Chrétiens qui voudroient les maintenir ; que de les abandonner, c’est une marque de religion, mais une marque authentique ; qu’ils ne blâmoient pas le théatre seulement parce qu’il servoit à l’idolâtrie, mais parce qu’il étoit une école d’impureté. […] Il y rassemble tout ce que le monde a de plus éblouissant & de plus propre à inspirer le goût de la volupté. […] Les cirques, les amphithéatres, étoient des écoles, des exercices de futeur ; l’enchantement des Syrènes introduit la volupté dans les cœurs, la fait régner dans l’univers ; elle inspire les Poëtes dramatiques, & rend le métier de Comédien infame.
Partout où vous trouverez des hommes célestes ; partout où il y a des hommes sages, des pères et mères vertueux, c’est là, Monsieur, qu’on trouve des filles à marier sages et vertueuses, modestes et capables par leur exemple, leurs conseils et l’amour qu’elles inspirent, de porter au bien un jeune homme dont le penchant l’entraînait au désordre. […] Des bagatelles et des sottises ; elles brodent, mais c’est vous qui dessinez ; elles aiment les étoffes d’un goût capricieux, mais c’est vous qui louez ce goût et qui le leur inspirez : ce sont vos dessinateurs de fabriques qui se cassent la tête à imaginer des goûts baroques. […] Le Tyran est obligé de dissimuler le dépit que ce fidèle sujet lui inspire par ses reproches : le sujet de la Pièce est la fable de Philomène, et Mme de Tagliazucchi y traite la terreur à la Crébillon. […] Fous eux-mêmes, comment pourraient-ils inspirer le goût de la sagesse au beau sexe ? […] Aimer une femme vertueuse comme Zaïre à l’excès, c’est aimer la Vertu comme on doit l’aimer : inspirer cet amour par ses ouvrages, c’est établir dans tous les cœurs l’amour de la Vertu.
» Voilà en peu de mots un panégyrique bien glorieux au Théâtre Anglais, et capable d’inspirer de la jalousie à toutes les autres Muses Dramatiques ; s’il est fondé sur le vrai. […] « Heureux, si le Théâtre au bon sens ramené, N’avait point, de l’amour aux intrigues borné Cru devoir inspirer d’une aveugle tendresse Aux plus sages Héros la honte et la paresse : Peindre aux bords de l’Hydaspe Alexandre amoureux, Négligeant le combat pour parler de ses feux, Et du jaloux dessein de surprendre une ingrate Au fort de sa défaite occuper Mithridate : Faire d’un Musulman un Amant délicat Et du sage Titus un imbécile, un fat, Qui coiffé d’une femme et ne pouvant la suivre Pleure, se désespère, et veut cesser de vivre … … … … … … … … … … … … Mais on suppose en vain cet amour vertueux : Il ne sert qu’à nourrir de plus coupables feux L’amour dans ces Héros plus prompt à nous séduire, Que toute leur vertu n’est propre à nous instruire. » Au regard des Anglais, que la paix multiplie chaque jour dans le Royaume, ils seront bien aises d’avoir un excellent Auteur de leur nation traduit dans une langue qu’il leur est nécessaire de savoir pour vivre en un pays étranger avec quelque plaisir et quelque satisfaction.
« En effet, ou le spectacle attache et plaît, ou il inspire du dégoût et déplaît : dans le dernier cas, on fait connaître ce qu’on désirait, et ce qu’on était allé chercher. […] Comment peut-on concevoir que des chrétiens à qui on a fait connaître la nécessité de combattre leurs passions, croient qu’il leur soit permis de les nourrir, de les exciter, et d’appeler à leur secours des maîtres encore plus entendus à les faire naître et à les inspirer ?
Mais c’est le comble de la misère de ne pouvoir trouver de plaisir que dans ses propres maux ; de récompenser ceux qui les savent entretenir et les rendre incurables, au lieu de penser à les guérir ; et il est incompréhensible, que les Chrétiens qui doivent avoir appris qu’ils n’ont à combattre que leurs passions, croient qu’il leur soit permis de les nourrir, de les exciter, et d’appeler à leur secours des maîtres encore plus entendus à les faire naître et à les inspirer. […] L’âme était déjà si languissante et si faible lors même que les objets étaient éloignés, et elle était si touchée de leur seule idée lorsqu’ils n’étaient présents qu’à sa mémoire ; que sera-ce donc quand sa faiblesse sera livrée aux passions des autres, et qu’elle sera assez imprudente pour admettre dans son cœur tant de mouvements étrangers, et assez aveugle pour savoir gré à tous ceux qui les lui ont inspirés ?