» Marmontel, dans son Apologie du Théâtre, convient que « à l’égard des tentations auxquelles une Actrice est exposée, il en est qui dans la situation actuelle des choses, semblent comme inévitablesc ; on ne doit pas s’attendre, ajoute-t-il, de voir des mœurs pures au Théâtre, tant que le fruit du travail & du talent ne pourra suffire aux dépenses attachées à cette Profession ».
Mais surtout qu’on n’expose pas au mépris des efféminés, l’homme… l’homme qui peut-être mérite seul encore ce nom glorieux.
Ajoutons à tant de témoignages si exprès, et si formels, les sentiments de beaucoup de personnages illustres en piété, qui ont fait des Sermons entiers contre la danse, et qui considèrent de près, et dans la lumière de la vérité, les péchés qui s’y commettent ordinairement, et qui naissent des regards, des attouchements et des entretiens, les condamnent encore, et les détestent comme un divertissement diabolique ; et ne croient point que personne se puisse innocemment exposer au péril qui s’y trouve, quelque chaste et quelque établi qu’il soit dans la mortification des sens.
Je ne décide pas ici s’il y a péché mortel d’aller à la comédie, cela dépend de quantité de circonstances qu’il faudrait examiner, et qui nous mèneraient trop loin, ce qui est certain, c’est qu’il y a très grand péril, et que c’est une insigne imprudence de s’y exposer.
La troisiéme, enfin, exposera ce qui se fait ordinairement le soir. […] Le sçavoir de la Reine de Suede à combien de mauvaises railleries a-il esté exposé ? […] & comment la distinguera-il de celle de Perse, de la Libiene, de la Phrygienne & de toutes les autres, s’il ne les expose aux Spectateurs, revétuës des habits de leur Nation ? […] Nos Princes nous doivent estre plus chers que nos plaisirs ; & ce ne sera jamais de mon conseil qu’ils s’exposeront à de pareils dangers, quoy que sur la foy de toute la Philosophie.
Pouvoit-on porter de plus sensibles coups à celui-ci, que d’exposer aux yeux de tout le monde, les objets de ses désirs ?
La troupe des Acteurs, & des Actrices avant d’être exposés sur la scéne ; deux autres jugemens souvent contraires.
n’est-ce pas un plaisir supérieur à la jouissance que la liberté du cœur, n’être pas exposé aux reproches, aux insultes, au mépris, à la perfidie, à l’inconstance d’une femme perdue, n’être pas enchaîné dans ses fers, & accablé sous sa tyrannie, traité en esclave & foulé aux pieds comme le dernier des hommes ?
Car en supposant que quelques jeunes spectateurs en abusent comme ils abuseraient des meilleures choses, et qu’au lieu d’écouter Zaïre ils ne fassent qu’une attention luxurieuse à ses charmes, ils ne pécheront au moins que par pensées ; mais dans vos Cercles on est exposé à pécher par pensées, par paroles, par actions et par omission.
L’Auteur du scandale se donne du scandale à lui-même, & se blesse le premier de ses propres traits, non-seulement parce que ses propres regards trouvent en lui comme les autres un aliment de péché, mais parce que le luxe produit d’abord sur lui les plus mauvais effets en flattant sa chair, il entretient sa sensualité en étalant les grâces, il entretient sa vanité en excitant l’impureté dans les autres, il se repaît de leur passion, s’expose à leur invitation, à leur poursuite, & multiplie les occasions & les facilités : vestis libidinem nutrit ; vestis fomitem peccati succendit . […] Tertulien en fait une autre application : la première leçon que Dieu donna à l’homme & à la femme n’eut que cet objet ; à peine ont-ils commis le péché, qu’il leur fait sentir la honte de la nudité du corps, ils en rougirent, & se couvrirent de feuilles, & la coquetterie au contraire expose des nudités, les relève par des couleurs assorties, afin de la rendre plus saillante & plus séduisante ; si l’on veut s’en dissimuler l’indécence en ignore-t-on le danger ?
C’est une foire où l’on étale toute sorte de marchandises ; chacun achete celle dont il a besoin ; c’est le fallon du Louvre où l’on expose des tableaux. […] Ni la politesse, ni les plus sages leçons, ni les plus grands intérêts, ni les plus nobles sentimens, ni les plus vives lumieres ne sont de sûrs garans contre un si grand désordre, quand on a la témérité de s’y exposer & le malheur de le goûter.