où Cicéron, le sauveur de la République, […] nous est montré comme un vil Rhéteur, un lâche ; tandis que l’infâme Catilina, couvert de crimes qu’on n’oserait nommer, prêt d’égorger tous ses Magistrats, et de réduire sa patrie en cendres, fait le rôle d’un grand homme et réunit, par ses talents, sa fermeté, son courage, toute l’estime des Spectateurs ?
Après quelque temps d’habitation, Gervais dégoûté de sa femme, et la Duclos de son mari, et traitant leur mariage comme ceux de la comédie, ont l’impudence de demander à le rompre, et d’en appeler comme d’abus, sur ce qu’ils n’ont pas été mariés par le Curé de leur vrai domicile : comme s’il était permis à quelqu’un de ne pas savoir sa propre demeure, de tromper un Curé par un faux domicile, de se jouer d’un sacrement, de le faire servir à couvrir un concubinage ; et ensuite dévoilant sa propre turpitude et sa mauvaise foi, vouloir la faire servir à rompre les engagements les plus solennels.
La vanité ne peut souffrir ce qui l’humilie, elle écrase tous ses rivaux ; et comme rien n’est humiliant qu’elle-même, et à même temps qu’elle sacrifie tout pour écarter ces nuages, elle se couvre du voile de la modestie, et s’affuble du manteau de la générosité.
Qu'on en mette à l'alambic les pièces et les apologies, on n'en tirera qu'une espèce de Tartuffe qui couvre sa corruption de quelques paroles honnêtes.
Admirez les Saints, il n'en est point dont la gravité et la modestie ne présentent quelque chose de divin qui caractérise la sainteté, et couvre les défauts de l'humanité.
Et après une longue déduction des adresses des Directeurs modernes, il conclut que « quand on ne se peut sauver par l’action, on se met à couvert par son intention ». […] Ce que son Beau-frère relève excellemment, en lui remontrant « sa mauvaise disposition d’esprit, qui lui fait juger de tout avec excès, et l’empêche de s’arrêter jamais dans le juste milieu, dans lequel seul se trouve la justice, la raison et la vérité : que de même que l’estime et la considération qu’on doit avoir pour les véritables gens de bien, ne doit point passer jusqu’aux méchants qui savent se couvrir de quelque apparence de vertu ; ainsi l’horreur qu’on doit avoir pour les méchants et pour les hypocrites, ne doit point faire de tort aux véritables gens de bien, mais au contraire doit augmenter la vénération qui leur est due, quand on les connaît parfaitement ».
Si elle a quelque défaut naturel, on supplée à tout ; les poudres changent la couleur des cheveux ; le fard unit le visage ; l’habillement est plein d’artifices pour corriger les défauts, & pour couvrir les difformités de sa taille : on charge ensuite le corps de rubans dont la diversité des couleurs répond à la diversité des passions ; on met enfin mille autres agrémens, où l’on croit qu’ils auront de l’éclat. […] & appellerez-vous honnêtes, ces intrigues odieuses dont certaines pieces sont remplies, & même celles de cet Ecrivain si célébre parmi vous, à qui vous faites un mérite singulier d’avoir saisi & sçu peindre les mœurs de son siécle ; cet Ecrivain que vous osez nommer le Réformateur de vos théâtres, cet Ecrivain d’autant plus dangereux, qu’il couvre quelquefois de fleurs les piéges qu’il tend à la vertu, & qui souvent attaque l’innocence, sans allarmer la pudeur ? […] Ignorez-vous que c’est toujours beaucoup nuire à son ame, que de ruiner le rempart qui la mettoit à couvert de l’impression d’objets dangereux par eux-mêmes ?
Si dans la comédie ce ridicule n’étoit jeté que sur les vices, elle n’en deviendroit pas pour cela tout-à fait excusable ; parce qu’elle a en elle-même des défauts que rien ne peut couvrir aux yeux de la religion.
Surprise avec lui dans sa chambre, & ensuite pendant la nuit dans un bois, au lieu d’en être couverte de confusion, elle se moque de son mari & l’insulte, & se tire si bien d’affaires par ses fourberies, qu’elle en est récompensée & passe pour une Lucrèce, & le mari est forcé de lui demander pardon à genoux, ainsi qu’à son amant, sous le bâton du beaupère, vieux gentilhomme ridicule, qui avec sa femme porte l’entêtement de sa noblesse à un excès sans vrai-semblance.
Les théatres de société multipliés à l’infini, les passions des Acteurs & des Actrices (c’est-à-dire des enfans de famille qui jouent) ; très-applaudies, satisfaites décemment, parce qu’elles sont couvertes du voile du rôle (jolie décence !)
Personne sans doute ne voudrait imiter les cruautés et les débauches de ce Prince ; mais on n’imite que trop son goût et ses profusions pour les Comédiens : magnificence honteuse, qui prostitue son bien à des gens indignes : « Cœca et contemptibile magnificentia gratiam Histrionibus prostituunt. » Nous avons vu quelquefois des Comédiens plus honnêtes que les autres, si l’on peut appeler honnête un état qui toujours couvert d’infamie, est indigne d’un homme libre : « Hominis liberis indignum indubitanter turpe. » On trouve de ces pièces comiques dans Ménandre, Plaute, Térence, etc.